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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/177

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attendre. Alors, il marcha en étouffant le bruit de ses pas.

Une clarté faible, la clarté de la nuit étoilée, lui permettait de distinguer les taches sombres des meubles. Certains coins se noyaient. Seule, la glace gardait un reflet éteint de vieil argent. Il n’était pas peureux d’habitude ; mais, dans cette chambre, des sueurs, par moments, lui inondaient la face. Autour de lui, les masses noires des meubles remuaient, prenaient des formes menaçantes. Trois fois, il crut entendre des soupirs sortir de l’alcôve. Et il s’arrêtait, terrifié. Puis, quand il prêtait mieux l’oreille, c’étaient des bruits de fête qui montaient, un air de danse, le murmure rieur d’une foule. Il fermait les yeux ; et, brusquement, au lieu du trou noir de la chambre, une grande lumière éclatait, un salon flambant, où il apercevait Thérèse, avec sa robe pure, passer sur un rythme amoureux, entre les bras d’un valseur. Tout l’hôtel vibrait d’une musique heureuse. Il était seul, dans ce coin abominable, à grelotter d’épouvante. Un moment, il recula, les cheveux hérissés : il lui semblait voir une lueur s’allumer sur un siége. Lorsqu’il osa s’approcher et toucher, il reconnut un corset de satin blanc. Il le prit, enfonça son visage dans l’étoffe assouplie par la