Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/178

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gorge d’amazone de la jeune fille, respira longuement son odeur, pour s’étourdir.

Oh ! quelles délices ! Il voulait tout oublier. Non, ce n’était pas une veillée de mort, c’était une veillée d’amour. Il vint appuyer le front contre les vitres, en gardant aux lèvres le corset de satin ; et il recommença l’histoire de son cœur. En face, de l’autre côté de la rue, il apercevait sa chambre dont les fenêtres étaient restées ouvertes. C’était là qu’il avait séduit Thérèse dans ses longues soirées de musique dévote. Sa flûte chantait sa tendresse, disait ses aveux, avec un tremblement de voix si doux d’amant timide, que la jeune fille, vaincue, avait fini par sourire. Ce satin qu’il baisait, était un satin à elle, un coin du satin de sa peau, qu’elle lui avait laissé, pour qu’il ne s’impatientât pas. Son rêve devenait si net, qu’il quitta la fenêtre et courut à la porte, croyant l’entendre.

Le froid de la pièce tomba sur ses épaules ; et, dégrisé, il se souvint. Alors, une décision furieuse le prit. Ah ! il n’hésitait plus, il reviendrait la nuit même. Elle était trop belle, il l’aimait trop. Quand on s’aime dans le crime, on doit s’aimer d’une passion dont les os craquent. Certes, il reviendrait, et en courant, et sans perdre une