Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/34

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— Quel âge a-t-elle donc ? demanda le major.

— À peine dix-sept ans. C’est bête, c’est sale. Mais je ne lui donne que dix francs par mois, et elle ne mange que de la soupe.

Lorsque Rose rentra avec une pile d’assiettes, Laguitte, que les filles intéressaient peu, la suivit du regard, étonné d’en rencontrer une si laide. Elle était petite, très noire, légèrement bossue, avec une face de guenon à nez épaté, à bouche fendue largement, et où luisaient de minces yeux verdâtres. Les reins larges et les bras longs, elle avait l’air très fort.

— Sacré nom ! quelle gueule ! dit Laguitte égayé, quand la bonne fut sortie de nouveau, en quête du sel et du poivre.

— Bah ! murmura Burle négligemment, elle est très complaisante, elle fait tout ce qu’on veut. C’est toujours assez bon pour laver la vaisselle.

Le dîner fut charmant. Il y avait le pot-au-feu et un ragoût de mouton. On fit raconter à Charles des histoires de son collège. Madame Burle, afin de montrer combien il était gentil, lui posa plusieurs fois sa question : « N’est-ce pas que tu veux être militaire ? » Et un sourire effleurait ses lèvres blanches, lorsque le petit répondait avec une obéissance craintive de chien savant : « Oui, grand’