Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/129

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son entrée en scène, madame Vestris le regarda des pieds à la tête, et tandis que Brutus lui adressait son couplet, elle échangeait à voix basse avec Talma-Proculus ce rapide dialogue : « —Mais vous avez les bras nus, Talma ! —Je les ai comme les avaient les Romains.—Mais, Talma, vous n’avez pas de culotte.—Les Romains n’en portaient pas.—Cochon !… » et, prenant la main que lui offrait Brutus, elle sortit de scène en étouffant de colère. »

Voilà le cri réactionnaire en art : Cochon ! Nous sommes tous des cochons, nous autres qui voulons la vérité. Je suis personnellement un cochon, parce que je me bats contre la convention au théâtre. Songez donc, Talma montrait ses jambes. Cochon ! Et moi, je demande qu’on montre l’homme tout entier. Cochon ! cochon !

Je m’arrête. L’ouvrage de M. Jullien prouve, avec un luxe d’évidence, la continuelle évolution naturaliste au théâtre. Cela s’impose comme une vérité mathématique. Inutile de discuter, de dire que ce mouvement qui nous emporte à la vérité en tout, est bon ou mauvais ; il est, cela suffit ; nous lui obéissons de gré ou de force. Seulement, le génie va en avant, et c’est lui qui fait la besogne, pendant que la médiocrité hurle et proteste. Je sais bien que les médiocres d’aujourd’hui voudraient nous arrêter, sous le prétexte qu’il n’y a plus de réformes à faire, que nous sommes arrivés en littérature à la plus grande somme de vérité possible. Eh ! de tous temps, les médiocres ont dit cela ! Est-ce qu’on arrête l’humanité, est-ce qu’on fixe jamais sa marche en avant ? Certes, non, toutes les réformes ne sont pas accomplies. Pour nous en tenir au costume, que d’erreurs aujourd’hui