Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/268

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Les modestes mettent le mot « patrie » cinq ou six fois ; cela fait cinq ou six salves de bravos. Les vaniteux, ceux qui rêvent l’écroulement de la salle, prodiguent le mot « patrie », à la fin de toutes les tirades ; alors, c’est un feu roulant, on est obligé de payer la claque double. Vraiment, la méthode est trop commode ! Dans ces conditions, on se commande un succès, comme on se commande un habit. Cela rappelle les ténors qui n’ont pas de voix, et qui laissent aux cuivres de l’orchestre le soin d’enlever les hautes notes. La littérature n’est plus que pour bien peu de chose dans tout ceci.

J’arrive à l’Hetman. Voici, en quelques lignes, le sujet du drame. Un roi polonais du dix-septième siècle, Ladislas IV, a soumis les Cosaques. Deux des vaincus, le vieux chef Froll-Gherasz et le jeune Stencko, sont même à la cour de ce roi, où se trouve aussi un traître, un parjure, Rogoviane. Ce dernier, qui rêve de devenir gouverneur de l’Ukraine, pousse les Cosaques à une révolte, et travaille de façon à ce que Stencko s’échappe pour être le chef des révoltés. Mais Froll-Gherasz n’approuve pas cette prise d’armes. Il accepte une mission du roi, celle de pacifier l’Ukraine, et il laisse à la cour sa fille Mikla comme otage. Stencko et Rogoviane, naturellement, aiment Mikla. Dès lors, la seule situation dramatique est celle du père et de l’amant, pris entre l’amour de la patrie et l’amour qu’ils éprouvent pour la jeune fille. Au dénoûment, la patrie l’emporte, Stencko et Mikla meurent, mais les Cosaques sont victorieux.

La situation principale ne fait que se déplacer, pas davantage. D’abord, c’est Froll-Gherasz qui arrive dans un campement cosaque et qui adjure ses anciens