Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/276

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meurt à la fin avec une résignation de mouton, pour finir la pièce. Cette mort est également amenée par une péripétie trop enfantine. Jean, ce lion superbe, trahit les siens sans paraître se douter un instant de ce qu’il fait, ce qui rapetisse tout le dénoûment.

Quant à la comtesse, elle est bâtie sur le patron des héroïnes, avec trop de mépris et trop de tendresse à la fois. Lorsque Jean l’a sauvée, elle se montre d’une cruauté monstrueuse, blessant inutilement son libérateur, se conduisant d’une si sotte façon qu’elle mériterait simplement une paire de gifles, malgré toute sa noblesse. Puis, au dernier acte, elle se pend au cou de Jean et lui déclare qu’elle l’adore. Le quatrième acte a suffi pour changer cette femme. C’est toujours le même système, celui des pantins que l’on déshabille et que l’on rhabille à sa fantaisie, pour les besoins de son œuvre. Marie a compris la grandeur de Jean, et cela suffit : elle est comme frappée par la baguette d’un enchanteur, la couleur de ses cheveux elle-même a dû changer.

Je ne parle point des autres personnages, de ce Raoul de Puylaurens, qui passe sa vie à tenir son salut de son rival, ni du conventionnel Berthaud, qui traverse l’action en récitant des tirades énormes. Oh ! les tirades ! elles pleuvent avec une monotonie désespérante dans Jean Dacier. On essuie une trentaine de vers à la file, on courbe le dos comme sous une averse grise, on croit en être quitte ; pas du tout, trente autres vers recommencent, puis trente autres, puis trente autres. Imaginez une grande plaine plate, sans un arbre, sans un abri, que l’on traverse par une pluie battante. C’est mortel. Je préfère, et de beaucoup, les vers rocailleux de M. Parodi. Que