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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/280

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ruisseau, il faut bien que des jeunes gens tendent vers les hauteurs et produisent des œuvres pour enflammer le patriotisme de la nation. Nous autres naturalistes, nous sommes le déshonneur de la France ; les poètes, M. Lomon et d’autres, sont chargés devant l’Europe d’honorer le pays et de le remettre à son rang. Ils consolent les dames, ils satisfont les âmes fières, ils préparent à la République une littérature qui sera digne d’elle.

Ah ! les pauvres jeunes gens ! S’ils sont convaincus, je les plains. J’ai déjà dit que je regardais comme une vilaine action de voler un succès littéraire, en lançant des tirades sur la patrie et sur l’honneur. Cela vraiment finit par être trop commode. Le premier imbécile venu se fera applaudir, du moment où la recette est connue. Si les mots remplacent tout, à quoi bon avoir du talent ?

Et puis, causons un peu de cette littérature qui relève les âmes. Où sont d’abord les âmes qu’elle a relevées ? En 1870, nous étions pleins de patriotisme contre la Prusse ; un peu de science et un peu de vérité auraient mieux fait notre affaire. J’ai remarqué que les dames qui travaillaient dans l’idéal, étaient le plus souvent des dames très émancipées. Au fond de tout cela, il y a une immense hypocrisie, une immense ignorance. Je ne puis ici traiter la question à fond. Mais il faut le déclarer très nettement : la vérité seule est saine pour les nations. Vous mentez, lorsque vous nous accusez de corrompre, nous qui nous sommes enfermés dans l’étude du vrai ; c’est vous qui êtes les corrupteurs, avec toutes les folies et tous les mensonges que vous vendez, sous l’excuse de l’idéal. Vos fleurs de rhétorique cachent