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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/335

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éperdue, sans force pour mentir de nouveau, pleurant comme une enfant. L’observation est excellente ; une fois encore, nous sommes dans la vie. J’en dirai de même pour certaines parties de la grande scène entre Coralie et son fils, tout en faisant pourtant des réserves, car l’auteur ici verse singulièrement dans la déclamation et dans les gros effets inutiles. J’aurais voulu plus de discrétion dramatique, certain que le coup porté sur le public aurait encore grandi. Rien de meilleur que l’embarras de Coralie, lorsque Daniel lui demande le nom de son père ; très juste également la conclusion de la scène, le pardon du fils acceptant sa mère, quelle qu’elle soit. Seulement, c’est là que je voudrais moins de rhétorique. Daniel fait des phrases sur la rédemption, sur l’honneur, sur la famille. A quoi bon ces phrases, dont on rirait dans la réalité ? Pourquoi ne pas parler simplement et dire tout juste ce que Daniel dirait, s’il était seul à seule avec sa mère, dans une chambre ? Toujours l’idée qu’on est au théâtre et qu’il faut donner un coup de pouce à la vérité, si l’on veut obtenir l’émotion, lorsqu’il est démontré au contraire que la plus forte émotion naît de la vérité la plus franche et la plus simple.

Tel est donc, pour moi, le grand mérite de ce troisième acte. Daniel reste en bois, sauf deux ou trois cris, car Daniel est un être abstrait, fait sur un type ridicule de perfection. Mais Coralie se montre bien vivante, et cela suffit pour donner à l’acte un souffle de vie. Je le répéterai : l’acte a réussi parce que, d’un bout à l’autre, il échappe aux ficelles ordinaires, et qu’il obéit simplement à des ressorts logiques et humains, pris dans le caractère même des personnages.