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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/348

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tourner devant lui le quadrille de leurs marionnettes. Leur art consiste à machiner leur joujou, de façon que les personnages obéissent à chaque tour de la manivelle et viennent occuper sur les planches l’endroit précis qui leur est assigné. C’est du théâtre mécanique, des bonshommes, joliment campés, dont les pas sont réglés comme par un maître de ballets. Ils vont à gauche, ils vont à droite, ils s’entrecroisent, se mêlent et se dégagent, pour le plus grand plaisir des yeux du public. Et, je le répète, cela demande des mains exercées. On parle souvent du métier au théâtre. Eh bien ! les Dominos Roses sont un produit immédiat du métier, sans aucune faute. De la mémoire, de l’adresse, et rien de plus. Mais on voit que le métier n’est décidément pas à dédaigner, puisqu’il peut suffire au succès.

On parlait du Procès Veauradieux, des mêmes auteurs, pendant la représentation. Les deux pièces, en effet, ont beaucoup de ressemblance, sortent tout au moins du même moule. Rien de plus naturel, d’ailleurs. MM. Delacour et Hennequin ont pensé, avec raison, que les spectateurs applaudiraient plus volontiers ce qu’ils avaient déjà applaudi. Les nouveautés troublent le public dans sa quiétude, lui causent une secousse cérébrale désagréable. L’éternel quiproquo des maris qui embrassent les bonnes, en croyant embrasser leurs femmes, ne suffit-il pas à la gaieté d’une soirée ? Rien de plus digestif que ce jeu du quiproquo. Il est à la portée de tout le monde, il soulève toujours le même éclat de rire, comme ces calembours de province qui sont, pendant un quart de siècle, la joie d’un salon. Et l’on s’en va, la tête libre, sans fatigue intellectuelle, en se souvenant des petits