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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/380

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es couronnes. On ne pouvait ouvrir un journal sans tomber sur des indiscrétions relatives aux œuvres qu’il préparait, à ce qu’il avait mangé à son déjeuner et à ce qu’il mangerait le soir à son dîner. Et j’avoue que cet engouement me semblait explicable, car M. Offenbach avait créé un genre ; il menait avec ses flonflons toute la danse d’une époque qui aimait à danser. Il a été et il restera une date dans l’histoire de notre société.

Il y a dix ans ! et, bon Dieu ! comme les temps sont changés ! Il faut se souvenir que ce fut lui qui conduisit le cancan de l’Exposition universelle de 1867. Dans tous les théâtres, on jouait de sa musique. Les princes et les rois venaient en partie fine à son bastringue. Plus d’une Altesse, que ses turlututus grisaient, fit cascader la vertu de ses chanteuses. Son archet donnait le branle à ce monde galant, qui l’appelait « maître ». Maître n’était pas assez, il passait au rang de dieu. Comme le Savoyard qui fait sauter du pied ses pantins enfilés dans un bout de corde, il a dû avoir de belles jouissances d’amour-propre, lui qui faisait sauter, nez contre nez, ventre contre ventre, des princes et des filles.

Et voilà qu’aujourd’hui le dieu est par terre. Nous avons encore une Exposition universelle ; mais d’autres amuseurs ont pris le pavé. Toute une poussée nouvelle de maîtres aimables se sont emparés des théâtres, si bien que l’ancêtre, le dieu de la sauterie, a dû rester dans sa niche, solitaire, rêvant amèrement à l’ingratitude humaine. A la Renaissance, le Petit Duc ; aux Folies-Dramatiques, les Cloches de Corneville ; aux Variétés, Niniche ; aux Bouffes, clôture ; et c’est certainement cette clôture qui a été le coup le plus