Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/113

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« Ainsi, tout est convenu et arrangé, reprit Philippe. Je puis me sauver sans crainte et sans remords... Vous avez donné l’argent promis ?... Tu ne me réponds rien, Marius. »

Fine se hâta d’intervenir.

« Eh ! je vous ai dit de vous dépêcher, cria-t-elle. De quoi vous inquiétez-vous ? »

Elle avait pris les vêtements du jeune homme, elle les lui jetait ajoutant qu’elle allait attendre dans le corridor.

Marius l’arrêta du geste.

« Pardon, dit-il, je ne puis laisser mon frère dans l’ignorance de nos malheurs. »

Et, malgré les impatiences de Fine, il raconta de nouveau son voyage à Marseille. D’ailleurs, il ne donna aucun conseil, il voulait laisser toute liberté à son frère.

« Mais alors, s’écria Philippe accablé, tu n’as pas donné l’argent au geôlier !... Nous sommes sans un sou.

– Ne vous inquiétez pas de cela, répondit le geôlier en s’approchant. Vous viendrez plus tard à mon aide. »

Le prisonnier resta muet. Il ne songeait plus à la fuite, il songeait à la misère, à la triste mine qu’il ferait désormais sur les promenades de Marseille. Plus de vêtements élégants, plus de flâneries, plus d’amours. D’ailleurs, il y avait en lui des sentiments chevaleresques, des idées de poète qui l’empêchaient d’accepter le dévouement de Revertégat.

Il rentra dans son misérable lit, remonta la couverture jusqu’à son menton, et, d’une voix tranquille :

« C’est bien, dit-il, je reste. »

Le visage de Marius rayonna. Fine resta comme écrasée.

Elle voulut prouver la nécessité de la fuite, elle parla de l’exposition publique, de l’infamie du pilori. Elle s’animait, elle était superbe de colère, et Philippe la regardait avec admiration.

« Ma belle enfant, répondit-il, vous me feriez peut-être céder si je n’étais devenu aveugle et entêté dans