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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/183

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qui le regardait curieusement étonné de le voir si mal renseigné sur les affaires de l’homme qu’il allait représenter.

Lorsqu’il se trouva seul dans la rue, Marius fut obligé de se rendre à l’évidence : Douglas seul avait pu commettre le faux dont il était porteur. D’ailleurs, le jeune homme ne s’expliquait pas bien la cause du crime. L’immeuble avait été intégralement payé, et il fut obligé de s’arrêter à la pensée que le notaire s’était décidé à acquérir personnellement une propriété sous un nom supposé, pour dissimuler l’état de sa fortune. Mais, malgré cette explication, le délit n’en existait pas moins : Douglas, l’homme pieux et honnête, était un faussaire.

Marius craignit un instant que Mouttet, l’ancien négociant de Toulon, ne fût également une marionnette. Il courut chez un de ses amis qui avait longtemps habité Toulon, et le questionna. Il respira plus à l’aise, lorsqu’il eut appris que Mouttet existait réellement et qu’il était client de Douglas. Alors, toujours poussé par ses soupçons, il voulut voir la propriété sur laquelle Mouttet possédait des hypothèques. Il avait consacré sa matinée à chercher inutilement un homme, il employa son après-midi à chercher une maison.

Élevé au quartier de Saint-Just, dans l’ancienne maison de campagne de sa mère, Marius connaissait toutes les habitations de ce coin du littoral. La propriété sur laquelle Douglas prétendait avoir pris des hypothèques, au nom de Mouttet, appartenait à un sieur Giraud, chez qui le jeune homme avait joué étant enfant. Il se rendit immédiatement chez Giraud et se présenta en promeneur, en ami qui venait simplement serrer la main du maître du logis.

On était vers le milieu de septembre. À l’horizon, la mer dormait, lourde, immobile, pareille à un immense tapis de velours bleu. La campagne s’étendait, toute jaune de soleil, chaude et accablée. De petits souffles venaient par moments du rivage et couraient légèrement