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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/189

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– Avant-hier, continua Marius, j’avais reçu la visite de M. de Girousse, un riche propriétaire de Lambesc, et il m’avait affirmé qu’aucun de ses voisins ne portait le nom d’Authier et que cette personne n’existait certainement pas... Aujourd’hui, je sais qu’il ne se trompait point... Que dois-je croire ? »

Le notaire ne répondit pas. Il regardait vaguement devant lui, pâlissant et frémissant, se sentant perdu, cherchant sans doute avec désespoir un moyen de se tirer d’affaire.

« Je me suis ensuite rendu au quartier de Saint-Just reprit impitoyablement Marius. La maison que vous m’avez dit avoir grevée d’une hypothèque, au nom de votre client Mouttet, appartient justement à un ancien ami de ma mère, à M. Giraud, qui m’a affirmé que ses biens étaient libres... Je vous le demande encore que dois-je croire ? »

Et, comme Douglas gardait toujours le silence :

« Eh bien ! dit le jeune homme avec éclat, puisque vous refusez de répondre, je vais vous dire, moi, ce que je crois et ce qui est... Votre M. Authier n’a jamais existé ; c’est là un pantin que vous avez créé pour faire plus à l’aise quelque trafic honteux. D’autre part, vous n’avez pas pris d’hypothèque et vous avez mis dans votre poche l’argent de Mouttet. Pour arriver à ce beau résultat, vous avez commis plusieurs faux, et aujourd’hui vous êtes tout prêt à en commettre d’autres, pour vous procurer de nouveaux fonds. »

Marius parlait à un marbre immobile et insensible. Le calme de Douglas accrut sa colère.

« Je n’ai point à juger vos crimes, reprit-il d’une voix plus haute ; mais j’ai à vous demander compte de votre indigne conduite envers moi. Comment ! vous vouliez me mêler de gaieté de cœur à vos sales affaires ; vous m’auriez compromis, et vous me traitiez avec amitié, vous connaissiez ma position de travailleur modeste... J’ai le droit, n’est-ce pas, de vous dire que vous êtes un misérable ! »