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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/254

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M. Martelly le regardait avec un sourire pénétrant qui l’embarrassait un peu.

« J’ai vu Mlle Fine, dit l’armateur en l’accompagnant jusqu’à son bureau, c’est une charmante personne, un brave cœur... Aimez-la bien, mon ami. »

Il sourit encore et se retira. Marius, quand il fut seul, goûta une joie à se retrouver dans le cabinet où il avait vécu de si nombreuses journées de travail. Il reprit possession de son petit domaine, eut du plaisir à s’asseoir devant sa table, à toucher aux papiers, aux plumes qui traînaient. Il avait failli mourir, et voilà qu’il revoyait face à face sa tranquille existence de chaque jour.

La pièce où il travaillait était située en face des appartements de l’armateur. Parfois, les visiteurs se trompaient, frappaient à sa porte. Ce matin-là comme il allait se mettre à la besogne, deux coups furent frappés discrètement. Il cria d’entrer.

Un homme, vêtu d’une longue redingote noire, se présenta. Cet homme avait le visage rasé, les mouvements doux, l’attitude humble et sournoise d’un homme d’église.

« Mlle Claire Martelly ? » dit-il.

Marius, occupé à l’examiner, ne répondit pas : il se demandait où il avait pu voir déjà ce dévot personnage. L’homme, qui hésitait, finit par tirer d’une des immenses poches de sa redingote un livre de messe enfermé dans un étui.

« Je lui rapporte, continua-t-il d’une voix flûtée, son paroissien qu’elle a oublié hier soir, dans un confessionnal. »

Marius se demandait toujours : « Où diable ai-je vu cette face de cafard ? » L’homme comprit sans doute l’interrogation muette de son regard. Il inclina légèrement la tête, en ajoutant :

« Je suis bedeau à l’église Saint-Victor. » Ces quelques mots furent un trait de lumière pour le