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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/319

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vie, une vie de travail. Malheureusement, les obstacles croissaient devant le jeune homme, et il sentait une résistance sourde qui faisait échouer ses efforts les plus énergiques. D’ailleurs, il ne désespérait de rien, il était même certain d’arriver à son but un jour ou l’autre.

En attendant, il se contentait d’échanger quelques lettres avec Philippe, lui recommandant d’avoir du courage et surtout de ne pas céder à l’envie de rentrer en France. Une pareille imprudence pouvait tout perdre. Philippe répondait qu’il était à bout de force qu’il s’ennuyait à mourir. Ce désespoir, cette impatience effrayaient son frère, qui allait jusqu’à inventer des mensonges pour retenir le fugitif en exil. Il lui promettait d’avoir sa grâce dans un mois, puis, le mois écoulé, il lui assurait que ce serait à coup sûr pour le mois suivant. Pendant plus d’une année, il le fit patienter ainsi.

Un dimanche soir, comme Fine et Marius revenaient de Saint-Barnabé des voisins leur dirent qu’un homme était venu les demander à plusieurs reprises dans l’après-midi. Comme ils allaient se mettre au lit, après avoir cherché vainement quel pouvait être cet homme, on frappa doucement à leur porte. Marius, qui alla ouvrir, resta stupéfait.

« Comment, c’est toi ! » s’écria-t-il d’une voix désespérée.

Fine accourut et reconnut Philippe qui l’embrassa, après avoir embrassé son frère.

« Oui, c’est moi, répondit-il, je serais mort là-bas, j’ai voulu revenir à tout prix.

– Quelle folie ! reprit Marius avec accablement. J’étais certain d’avoir ta grâce... Maintenant, je ne réponds plus de rien.

– Bah ! je me cacherai jusqu’au jour où tu auras réussi... Je ne pouvais plus vivre loin de vous, loin de mon enfant... C’était une maladie.

– Mais que ne m’as-tu prévenu ? J’aurais pris certaines précautions.

– Eh ! si je t’avais prévenu, tu m’aurais empêché de