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XIII

La stratégie de Mathéus


Mathéus était décidément un républicain pur, un radical avec lequel il ne fallait pas plaisanter. Le front à demi couvert par sa perruque rousse, il agitait sa tête, dans les clubs, comme une torche aux lueurs rouges. Il était toujours pour les partis extrêmes, il appuyait toutes les propositions qui pouvaient amener des désordres dans la ville. On finit par avoir pour lui une sorte de respectueuse terreur, et l’on écoutait ses avis avec une admiration effrayée. Le lendemain des élections, il avait parlé carrément de brûler Marseille. Cela lui donna une grande popularité parmi les libéraux exaltés.

Il rencontrait souvent Philippe, mais il évitait de lier connaissance avec lui, se contentant de le surveiller de loin, de prendre note des paroles ardentes qu’il laissait parfois échapper. Il aurait voulu le voir se mêler à une bonne petite conspiration. Tant que le jeune homme se contenterait de déclamer dans les clubs et d’assister aux banquets et aux manifestations populaires, il comprenait qu’il ne pourrait rien contre lui. Et c’est pour cela qu’il poussait à la guerre, aux barricades. Il espérait qu’au premier coup de fusil, Philippe descendrait se battre dans les rues et qu’on le condamnerait comme insurgé.

D’ailleurs, la guerre civile entrait dans les calculs de Mathéus. Ayant promis à son maître de lui livrer le père et le fils, il comptait sur le tumulte d’une insurrection