Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/447

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« Écoutez, dit M. Martelly, nous allons le mettre dans le fiacre et je le conduirai à l’hospice, car c’est encore là qu’il recevra les soins les plus prompts... Vous, pendant ce temps, courez prévenir son frère... Faites en sorte que la jeune femme et l’enfant ne se doutent de rien. »

Tous deux étaient désolés, il leur semblait qu’ils perdaient un des leurs. Sauvaire partit en courant du côté de Saint-Just, tandis que M. Martelly, aidé par les sergents, portait Philippe dans le fiacre. M. de Cazalis s’était retiré, jouant l’indifférence, le cœur bondissant d’une joie farouche.

L’armateur recommanda au cocher de marcher lentement. Pendant l’heure mortelle que dura le triste voyage, il soutint là tête pâle et vacillante du blessé évanoui. Il avait posé un mouchoir sur sa blessure pour arrêter le sang ; mais il le voyait si faible, qu’il craignait de ne pouvoir le mener jusqu’à l’hospice.

On arriva enfin. Lorsque M. Martelly eut déclaré qu’il amenait un blessé, on lui répondit assez brusquement que les salles étaient pleines. On finit enfin par recevoir Philippe ; seulement, la place manquant, il fut porté dans une salle de cholériques. Le médecin qui l’avait visité à son entrée, avait secoué la tête, en disant qu’on pouvait le mettre n’importe où, qu’il était à l’abri de tout danger.

M. Martelly l’accompagna. Il ne voulait pas le quitter avant l’arrivée de Marius. La salle où il entra était sinistre à voir. Elle s’enfonçait, blafarde ; les deux rangées de lits blancs s’allongeaient le long des murs comme des tombes, et dans ces lits, on voyait des rigidités de cadavre, aux mouvements furieux d’agonie. Le fléau hurlait et se tordait dans cette longue pièce froide.

Des religieuses, des femmes fluettes et délicates, tournaient paisiblement autour des lits, aidant les médecins dans leur besogne.

M. Martelly s’était assis près du matelas sur lequel on avait couché Philippe. Il regardait la mort en face,