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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/56

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Marius, en entendant insulter son frère, avait eu une forte envie de tomber à coups de poing, comme un vilain, sur le noble personnage. Il se retint et continua d’une voix que l’émotion commençait à faire trembler :

« Je vous l’ai dit, monsieur, je viens ici pour offrir à Mlle de Cazalis la seule réparation possible, le mariage. Ainsi sera lavée injure qui lui a été faite.

– Nous sommes au-dessus de l’injure, cria le député avec mépris. La honte pour une Cazalis n’est pas d’avoir été la maîtresse d’un Philippe Cayol, la honte pour elle serait de s’allier à des gens tels que vous.

– Les gens tels que nous ont d’autres croyances en matière d’honneur… D’ailleurs, je n’insiste pas : le devoir seul me dictait l’offre de réparation que vous refusez… Permettez-moi seulement d’ajouter que votre nièce accepterait sans doute cette offre, si j’avais l’honneur de m’adresser à elle.

– Vous croyez ? » dit M. de Cazalis d’un ton railleur.

Il sonna et donna l’ordre de faire descendre sa nièce sur-le-champ. Blanche entra, pâle, les yeux rougis, comme brisée par des émotions trop fortes. En apercevant Marius, elle frissonna.

« Mademoiselle, lui dit froidement son oncle, voici monsieur qui demande votre main au nom de l’infâme que je ne veux pas nommer devant vous… Dites à monsieur ce que vous me disiez hier. »

Blanche chancelait. Elle n’osa pas regarder Marius. Les yeux fixés sur son oncle, toute tremblante, d’une voix hésitante et faible :

« Je vous disais, murmura-t-elle, que j’avais été enlevée par la violence, et que je ferai tous mes efforts pour qu’on punisse l’attentat odieux dont j’ai été la victime. »

Ces paroles furent récitées comme une leçon apprise. À l’exemple de saint Pierre, Blanche reniait son Dieu.