Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/283

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Secrétairie et les nonces, un million pour le Vatican. J’entends, par ce dernier article, les dépenses de la cour pontificale, des gardes militaires, des Musées, de l’entretien du palais et de la basilique… Nous sommes à cinq millions, n’est-ce pas ? Mettez les deux autres pour les Œuvres soutenues, pour la Propagande et surtout pour les écoles, que Léon XIII, avec son grand sens pratique, subventionne toujours très largement, dans la juste pensée que la lutte, le triomphe de la religion est là, chez les enfants qui seront les hommes de demain et qui défendront leur mère, l’Église, si l’on a su leur inspirer l’horreur des abominables doctrines du siècle.

Il y eut un silence. Les trois hommes s’arrêtèrent sous la majestueuse colonnade, où ils se promenaient à petits pas. Peu à peu, la place s’était vidée de sa foule grouillante, il n’y avait plus que l’obélisque et les deux fontaines, dans le désert brûlant du pavé symétrique ; tandis qu’au plein soleil, sur l’entablement du portique d’en face, se détachaient les statues, en noble rangée immobile.

Et Pierre, un instant, les yeux levés encore vers les fenêtres du pape, crut de nouveau le voir dans ce ruissellement d’or dont on lui parlait, baignant de toute sa personne blanche et pure, de tout son pauvre corps de cire transparente, au milieu de ces millions, qu’il cachait, qu’il comptait, qu’il dépensait à la seule gloire de Dieu.

— Alors, murmura-t-il, il est sans inquiétude, il n’est pas embarrassé ?

— Embarrassé, embarrassé ! s’écria monsignor Nani, que ce mot jeta hors de lui, au point de le faire sortir de sa diplomatique discrétion. Ah ! mon cher fils… Chaque mois, lorsque le trésorier, le cardinal Mocenni, va chez Sa Sainteté, elle lui donne toujours la somme qu’il demande ; elle la donnerait, si forte qu’elle fût. Certainement, elle a eu la sagesse de faire de grandes économies,