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Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/434

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Mais l’effet fut inattendu. De nouveau, le maigre visage du père Dangelis s’éclaira d’un sourire, d’un plissement des lèvres où s’aiguisait le plus ironique dédain. Il était devenu plus pâle, et ses yeux de vive intelligence flambèrent.

— Ah ! c’est monsignor Nani qui vous envoie… Eh bien ! mais, si vous croyez avoir besoin de protection, il est inutile de vous adresser à un autre qu’à lui-même. Il est tout-puissant… Allez le voir, allez le voir.

Et ce fut tout l’encouragement que Pierre emporta de sa visite : le conseil de retourner chez celui qui l’envoyait. Il sentit qu’il perdait pied, il résolut de rentrer au palais Boccanera, pour réfléchir et comprendre, avant de continuer ses démarches. Tout de suite, la pensée de questionner don Vigilio lui était venue ; et la chance voulut, ce soir-là, après le souper, qu’il rencontrât le secrétaire dans le corridor, avec sa bougie, au moment où celui-ci allait se coucher.

— J’aurais tant de choses à vous dire ! Je vous en prie, cher monsieur, entrez donc un instant chez moi.

D’un geste, l’abbé le fit taire. Puis, à voix très basse :

— N’avez-vous pas aperçu l’abbé Paparelli au premier étage ? Il nous suivait.

Souvent, Pierre rencontrait dans la maison le caudataire, dont la face molle, l’air sournois et fureteur de vieille fille en jupe noire lui déplaisaient souverainement. Mais il ne s’en inquiétait point, et il fut surpris de la question. D’ailleurs, sans attendre la réponse, don Vigilio était retourné au bout du couloir, où il écouta longuement. Puis, il revint à pas de loup, il souffla sa bougie, pour entrer d’un saut chez son voisin.

— Là, nous y sommes, murmura-t-il, lorsque la porte fut refermée. Et, si vous le voulez bien, ne restons pas dans ce salon, passons dans votre chambre. Deux murs valent mieux qu’un.

Enfin, quand la lampe eut été posée sur la table, et