Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/457

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et les autres ont gardé la prétention de pétrir le monde à l’image de leur foi. On entendait gronder les influences, c’était une guerre de toutes les heures, dont Rome, le pouvoir suprême au Vatican, demeurait l’éternel enjeu. Les premiers, cependant, avaient beau avoir saint Thomas qui combattait pour eux, ils sentaient crouler leur vieille science dogmatique, ils devaient céder chaque jour un peu de terrain aux seconds, victorieux avec le siècle. Puis, c’étaient encore les Chartreux, vêtus de leur robe de drap blanc, les silencieux très saints et très purs, les contemplateurs qui se sauvent du monde dans leurs cloîtres aux cellules calmes, les désespérés et les consolés dont le nombre peut être moindre, mais qui vivront éternellement comme la douleur et le besoin de solitude. C’étaient les Bénédictins les enfants de Saint-Benoît dont la règle admirable a sanctifié le travail, les ouvriers passionnés des lettres et des sciences, qui ont longtemps été, à leur époque, des instruments puissants de civilisation, aidant à l’instruction universelle par leurs immenses travaux d’histoire et de critique ; et ceux-ci, Pierre qui les aimait, qui se serait réfugié chez eux deux siècles plus tôt, s’étonnait pourtant de leur voir bâtir, sur l’Aventin, une vaste demeure, pour laquelle Léon XIII a déjà donné des millions, comme si la science d’aujourd’hui et de demain eût encore été un champ où ils pussent moissonner : à quoi bon ? lorsque les ouvriers ont changé, lorsque les dogmes sont là pour barrer la route à qui doit passer en les respectant, sans achever de les abattre. Enfin, c’était le pullulement des ordres moindres, dont on compte des centaines : c’étaient les Carmes, les Trappistes, les Minimes, les Barnabites, les Lazaristes, les Eudistes, les Missionnaires, les Récollets, les Frères de la Doctrine chrétienne ; c’étaient les Bernardins, les Augustins, les Théatins, les Observantins, les Célestins, les Capucins ; sans compter les ordres correspondants de femmes, ni les Clarisses, ni les religieuses sans nombre, telles que