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XII

Depuis près de cinq ans, le pavillon de la rue de Boulogne se trouvait inhabité. Guillaume n’avait jamais voulu le louer, comptant toujours y venir passer quelques mois d’hiver. Vers les commencements de son mariage, il s’était contenté d’y envoyer un vieux domestique de la Noiraude, à titre de concierge. Le bonhomme logeait dans une sorte de grande guérite de briques rouges, bâtie à côté de la grille, sur la rue. Toute sa besogne consistait à ouvrir, chaque semaine, pendant une matinée, les fenêtres des appartements, afin de leur faire prendre l’air. Ce poste était pour cet ancien serviteur comme une retraite gagnée par ses longs services.

Averti la veille de la venue de ses maîtres, il avait employé une partie de la nuit à épousseter les meubles. Quand Guillaume et Madeleine arrivèrent, ils trouvèrent du feu dans toutes les cheminées. Ils furent heureux de ces foyers ardents qui donnaient à leur ancienne solitude les tiédeurs de jadis. Pendant le trajet de Véteuil à Paris, leur cœur s’était serré secrètement, à l’idée de rentrer dans cette petite maison où étaient enfermés quelques mois de leur passé ; ils se rappelaient les dernières semaines de leur séjour, les sourdes inquiétudes qu’ils y