Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/124

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cette besogne, elle l’avait espionnée pour son compte, en se disant que les vices des maîtres sont la fortune des valets ; et elle s’était heurtée à une de ces honnêtetés d’autant plus solides, qu’elles s’appuient sur l’orgueil. Flavie gardait de sa faute une rancune à tous les hommes. Aussi mademoiselle Chuin se désespérait-elle, lorsqu’un jour elle rencontra M. des Fondettes. Il la questionna si vivement sur sa maîtresse, qu’elle comprit tout d’un coup qu’il la désirait follement, brûlé par le souvenir de la minute où il l’avait tenue dans ses bras. Et son plan fut arrêté : servir à la fois le mari et l’amant, là était la combinaison de génie.

Justement, tout venait à point. M. des Fondettes, repoussé, désormais sans espoir, aurait donné sa fortune pour posséder encore cette femme qui lui avait appartenu. Ce fut lui qui, le premier, tâta mademoiselle Chuin. Il la revit, joua le sentiment, en jurant qu’il se tuerait, si elle ne l’aidait pas. Au bout de huit jours, après une grande dépense de sensibilité et de scrupules, l’affaire était faite : il donnerait dix mille francs, et elle, un soir, le cacherait dans la chambre de Flavie.

Le matin, mademoiselle Chuin alla trouver Nantas.