Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/154

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Comme la petite continuait, elle lui montra le lit. Dédé s’arrêta, et je la sentis inquiète, reculant vers la porte.

— Est-ce que le monsieur dort ? demanda-t-elle très bas.

— Oui, va-t’en jouer, répondit madame Gabin.

Mais l’enfant ne s’en allait pas. Elle devait me regarder de ses yeux agrandis, effarée et comprenant vaguement. Brusquement, elle parut prise d’une peur folle, elle se sauva en culbutant une chaise.

— Il est mort, oh ! maman, il est mort.

Un profond silence régna. Marguerite, accablée dans le fauteuil, ne pleurait plus. Madame Gabin rôdait toujours par la chambre. Elle se remit à parler entre ses dents.

— Les enfants savent tout, au jour d’aujourd’hui. Voyez celle-là. Dieu sait si je l’élève bien ! Lorsqu’elle va faire une commission ou que je l’envoie reporter l’ouvrage, je calcule les minutes, pour être sûre qu’elle ne galopine pas… Ça ne fait rien, elle sait tout, elle a vu d’un coup d’œil ce qu’il en était. Pourtant, on ne lui a jamais montré qu’un mort, son oncle François, et, à cette époque, elle n’avait pas quatre ans… Enfin, il n’y a plus d’enfants, que voulez-vous !