Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/188

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surrection. À ce moment, je n’avais aucune idée nette ; je trouvais seulement inutile de publier l’aventure, éprouvant une honte à vivre, lorsque le monde entier me croyait mort. En une demi-heure de travail, je parvins à effacer toute trace. Et je sautai hors de la fosse.

Quelle belle nuit ! Un silence profond régnait dans le cimetière. Les arbres noirs faisaient des ombres immobiles, au milieu de la blancheur des tombes. Comme je cherchais à m’orienter, je remarquai que toute une moitié du ciel flambait d’un reflet d’incendie. Paris était là. Je me dirigeai de ce côté, filant le long d’une avenue, dans l’obscurité des branches. Mais, au bout de cinquante pas, je dus m’arrêter, essoufflé déjà. Et je m’assis sur un banc de pierre. Alors seulement je m’examinai : j’étais complètement habillé, chaussé même, et seul un chapeau me manquait. Combien je remerciai ma chère Marguerite du pieux sentiment qui l’avait fait me vêtir ! Le brusque souvenir de Marguerite me remit debout. Je voulais la voir. Au bout de l’avenue, une muraille m’arrêta. Je montai sur une tombe, et quand je fus pendu au chaperon, de l’autre côté du mur, je me laissai aller. La chute fut rude. Puis, je marchai