Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/253

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tez-vous de vous donner une leçon, pendant que je vous tiens là, dans un petit coin ? »

Elle avait la sévérité souriante d’une mère qui réprimande un gamin.

— Dès le premier jour, j’ai bien compris. On vous a conté des horreurs sur mon compte, n’est-ce pas ?… Vous avez espéré des choses, et je vous excuse, car vous ne savez rien de notre monde, vous êtes tombé à Paris avec les idées de ce pays de loups… Puis, vous vous dites encore que c’est un peu de ma faute, si vous vous êtes trompé. J’aurais dû vous arrêter, vous vous seriez retiré sur un mot de moi. C’est vrai, je n’ai pas prononcé ce mot, je vous ai laissé aller, vous devez me regarder comme une abominable coquette… Savez-vous pourquoi je n’ai pas dit ce mot ?

J’ai balbutié. L’étonnement de cette scène me paralysait. Elle me serrait les poignets davantage, elle me secouait, me parlant de si près, que je sentais son souffle sur mon visage.

— Je ne l’ai pas dit, parce que vous m’intéressiez et que je voulais vous donner cette leçon… Vous ne comprenez pas encore, mais vous réfléchirez et vous devinerez. On nous calomnie beaucoup. Nous faisons peut-être tout ce qu’il faut pour cela. Seulement, vous le voyez,