Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/273

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sous un bonnet de caoutchouc, d’où s’échappaient des mèches folles, elle avait la souplesse d’un poisson bleuâtre, à tête de femme, inquiétante et rose.

M. Chabre était là depuis un quart d’heure, sous le soleil ardent. Trois fois déjà, il avait consulté sa montre. Il finit par se hasarder à dire timidement :

— Tu restes bien longtemps, ma bonne… Tu devrais sortir, les bains si longs te fatiguent.

— Mais j’entre à peine ! cria la jeune femme. On est comme dans du lait.

Puis, se remettant sur le dos :

— Si tu t’ennuies, tu peux t’en aller… Je n’ai pas besoin de toi.

Il protesta de la tête, il déclara qu’un malheur était si vite arrivé ! Et Estelle souriait, en songeant de quel beau secours lui serait son mari, si elle était prise d’une crampe. Mais brusquement, elle regarda de l’autre côté de la jetée, dans la baie qui se creuse à gauche du village.

— Tiens ! dit-elle, qu’est-ce qu’il y a donc là-bas ? Je vais voir.

Et elle fila rapidement, par brassées longues et régulières.

— Estelle ! Estelle ! criait M. Chabre. Veux-tu