Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/58

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des pierres, sur une bande de gazon brûlé, qui devait servir de table.

C’était toute une histoire que cette bouillabaisse en plein air. D’abord, Micoulin rentra dans la barque et alla seul retirer ses jambins, qu’il avait placés la veille. Quand il revint, Naïs avait arraché des thyms, des lavandes, un tas de buissons secs suffisant pour allumer un grand feu. Le vieux, ce jour-là, devait faire la bouillabaisse, la soupe au poisson classique, dont les pêcheurs du littoral se transmettent la recette de père en fils. C’était une bouillabaisse terrible, fortement poivrée, terriblement parfumée d’ail écrasé. Les Rostand s’amusaient beaucoup de la confection de cette soupe.

— Père Micoulin, dit madame Rostand qui daignait plaisanter en cette circonstance, allez-vous la réussir aussi bien que l’année dernière ?

Micoulin semblait très gai. Il nettoya d’abord le poisson dans de l’eau de mer, pendant que Naïs sortait de la barque une grande poêle. Ce fut vite bâclé : le poisson au fond de la poêle, simplement couvert d’eau, avec de l’oignon, de l’huile, de l’ail, une poignée de poivre, une tomate, un demi-verre d’huile ; puis, la poêle sur le feu, un feu formidable, à rôtir un mouton.