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IV

hiver.


Janvier a de sinistres matinées, qui glacent le cœur. Au réveil, ce jour-là, je fus pris d’une inquiétude vague. Pendant la nuit, le dégel était venu, et, lorsque, du seuil de la porte, je regardai la campagne, elle m’apparut comme un immense haillon d’un gris sale, souillé de boue, troué de déchirures.

Un rideau de brouillard cachait les horizons. Dans ce brouillard, les chênes de l’allée dressaient lugubrement leurs bras noirs, pareils à une rangée de spectres gardant l’abîme de vapeur qui se creusait derrière eux. Les terres étaient défoncées, couvertes de flaques d’eau, le long desquelles traînaient des lambeaux de neige salie. Au loin, la grande voix de la Durance s’enflait.

L’hiver est d’une vigueur saine, lorsque le ciel est clair et que la terre est dure. L’air pince les