Aller au contenu

Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/174

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

entre ses deux chers enfants. Thérèse l’écoutait, la tête basse, résignée et docile, prête à contenter ses moindres souhaits.

— J’aime Laurent comme un frère, dit-elle douloureusement, lorsque sa tante se tut. Puisque vous le désirez, je tâcherai de l’aimer comme un époux. Je veux vous rendre heureuse… J’espérais que vous me laisseriez pleurer en paix, mais j’essuierai mes larmes, puisqu’il s’agit de votre bonheur.

Elle embrassa la vieille dame, qui demeura surprise et effrayée d’avoir été la première à oublier son fils. En se mettant au lit, madame Raquin sanglota amèrement en s’accusant d’être moins forte que Thérèse, de vouloir par égoïsme un mariage que la jeune veuve acceptait par simple abnégation.

Le lendemain matin, Michaud et sa vieille amie eurent une courte conversation dans le passage, devant la porte de la boutique. Ils se communiquèrent le résultat de leurs démarches, et convinrent de mener les choses rondement, en forçant les jeunes gens à se fiancer, le soir même.

Le soir, à cinq heures, Michaud était déjà dans le magasin, lorsque Laurent entra. Dès que le jeune homme fut assis, l’ancien commissaire de police lui dit à l’oreille :

— Elle accepte.

Ce mot brutal fut entendu de Thérèse, qui resta pâle, les yeux impudemment fixés sur Laurent. Les deux amants se regardèrent pendant quelques secondes,