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Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/177

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reur respectueuse. Olivier complimenta la tante et la nièce, Grivet hasarda quelques plaisanteries épicées qui eurent un succès médiocre. En somme, la compagnie se montra enchantée, ravie, et déclara que tout était pour le mieux ; à vrai dire, la compagnie se voyait déjà à la noce.

L’attitude de Thérèse et de Laurent resta digne et savante. Ils se témoignaient une amitié tendre et prévenante, simplement. Ils avaient l’air d’accomplir un acte de dévouement suprême. Rien dans leur physionomie ne pouvait faire soupçonner les terreurs, les désirs qui les secouaient. Madame Raquin les regardait avec de pâles sourires, avec des bienveillances molles et reconnaissantes.

Il y avait quelques formalités à remplir. Laurent dut écrire à son père pour lui demander son consentement. Le vieux paysan de Jeufosse, qui avait presque oublié qu’il eût un fils à Paris, lui répondit, en quatre lignes, qu’il pouvait se marier et se faire pendre, s’il voulait ; il lui fit comprendre que, résolu à ne jamais lui donner un sou, il le laissait maître de son corps et l’autorisait à commettre toutes les folies du monde. Une autorisation ainsi accordée inquiéta singulièrement Laurent.

Madame Raquin, après avoir lu la lettre de ce père dénaturé, eut un élan de bonté qui la poussa à faire une sottise. Elle mit sur la tête de sa nièce les quarante et quelques mille francs qu’elle possédait, elle se dépouilla entièrement pour les nouveaux époux, se