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Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/232

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cher fils était trop juste, et qu’il fallait lui donner les moyens de devenir un homme de talent. La bonne dame gâtait Laurent comme elle avait gâté Camille ; elle était tout amollie par les caresses que lui prodiguait le jeune homme, elle lui appartenait et se rangeait toujours à son avis.

Il fut donc décidé que l’artiste louerait un atelier et qu’il toucherait cent francs par mois pour les divers frais qu’il aurait à faire. Le budget de la famille fut ainsi réglé : les bénéfices réalisés dans le commerce de mercerie payeraient le loyer de la boutique et de l’appartement, et suffiraient presque aux dépenses journalières du ménage ; Laurent prendrait le loyer de son atelier et ses cent francs par mois sur les deux mille et quelques cents francs de rente ; le reste de ces rentes serait appliqué aux besoins communs. De cette façon, on n’entamerait pas le capital. Thérèse se tranquillisa un peu. Elle fit jurer à son mari de ne jamais dépasser la somme qui lui était allouée. D’ailleurs, elle se disait que Laurent ne pouvait s’emparer des quarante mille francs sans avoir sa signature, et elle se promettait bien de ne signer aucun papier.

Dès le lendemain, Laurent loua, vers le bas de la rue Mazarine, un petit atelier qu’il convoitait depuis un mois. Il ne voulait pas quitter son emploi sans avoir un refuge pour passer tranquillement ses journées, loin de Thérèse. Au bout de la quinzaine, il fit ses adieux à ses collègues. Grivet fut stupéfait de son départ. Un