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Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/92

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saire de police avec la face effrayée et béante des petits enfants qui entendent Barbe-Bleue ou le Petit Poucet. Cela les terrifiait et les amusait.

Ce jour-là, Michaud, qui venait de raconter un horrible assassinat dont les détails avaient fait frissonner son auditoire, ajouta en hochant la tête :

— Et l’on ne sait pas tout… Que de crimes restent inconnus ! que d’assassins échappent à la justice des hommes !

— Comment ! dit Grivet étonné, vous croyez qu’il y a, comme ça, dans la rue, des canailles qui ont assassiné et qu’on n’arrête pas ?

Olivier se mit à sourire d’un air de dédain.

— Mon cher Monsieur, répondit-il de sa voix cassante, si on ne les arrête pas, c’est qu’on ignore qu’ils ont assassiné.

Ce raisonnement ne parut pas convaincre Grivet. Camille vint à son secours.

— Moi, je suis de l’avis de M. Grivet, dit-il avec une importance bête… J’ai besoin de croire que la police est bien faite et que je ne coudoyerai jamais un meurtrier sur un trottoir.

Olivier vit une attaque personnelle dans ces paroles.

— Certainement, la police est bien faite, s’écria-t-il d’un ton vexé… Mais nous ne pouvons pourtant pas faire l’impossible. Il y a des scélérats qui ont appris le crime à l’école du diable ; ils échapperaient à Dieu lui-même… N’est-ce pas, mon père ?

— Oui, oui, appuya le vieux Michaud… Ainsi, lors-