Page:Zola - Travail.djvu/441

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Ce n’était point un méchant homme, ce n’était qu’un sot et un faible, un de ces lâches cœurs dont le plaisir égoïste fait des bourreaux. Et il s’était plaint de la solitude où elle le laissait, dans le malheur, d’un air si accablé, qu’elle en fut très émue.

«  Tu veux dire que tu as voulu être seul. Pourquoi, depuis ces affreuses choses, n’es-tu pas venu à moi  ?

— Mon Dieu  ! bégaya-t-il, est-ce un pardon  ?   »

Et il lui saisit les mains qu’elle lui abandonna  ; et, dans l’anéantissement ou il était, il confessa sa faute, éperdu de repentir. Il n’avouait rien qu’elle ne sût déjà, sa longue trahison, cette maîtresse introduite au foyer domestique, cette femme qui l’avait rendu fou, jusqu’à la ruine, mais il mettait à s’accuser un tel emportement de franchise, qu’elle en était touchée, comme d’un aveu nouveau, entier, dont il aurait pu s’éviter l’humiliation.

Et il finit en disant  :

«  C’est vrai, je t’ai outragée si longtemps, j’ai été abominable… Pourquoi m’avais-tu abandonné, pourquoi n’as-tu rien tenté pour me reprendre  ?   »

Il touchait là le douloureux cas de conscience où elle était, le sourd remords qu’elle éprouvait, de n’avoir peut-être pas fait tout son devoir, en ne l’arrêtant pas dans sa chute. Et la réconciliation que la pitié avait commencée, s’acheva dans ce sentiment de fraternelle indulgence. Les plus purs, les plus héroïques, n’ont-ils pas souvent leur part de la faute, lorsque les mauvais et les faibles succombent autour d’eux  ?

«  Oui, dit-elle, j’aurais dû lutter davantage, j’ai trop voulu sauver ma fierté, assurer ma paix. Nous avons besoin d’oubli l’un autre, il faut que tout ce passé soit mort.  »

Puis, comme leur fils Paul passait dans le jardin, sous les fenêtres, elle l’appela. C’était maintenant un grand garçon de dix-huit ans, intelligent et fin, qu’elle avait