Page:Zola - Vérité.djvu/206

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

homme si compromis dans les récents scandales. Il s’était même permis de ricaner avec les élèves, lorsqu’un d’eux, pour égayer les autres, s’était laissé tomber. Et l’appel commença.

— Auguste Doloir.

— Présent ! cria un garçon réjoui, d’une voix si grosse, que, de nouveau, toute la classe éclata de rire.

C’était le fils du maçon, le même enfant qui avait fait un faux pas, un bonhomme de neuf ans à l’air casseur, intelligent, mais mauvaise tête, dont les farces révolutionnaient l’école.

— Charles Doloir.

— Présent !

Et cette fois, le frère du précédent, son cadet de deux années, répondit d’une voix si aiguë, que la tempête de rires recommença. Charles, plus doux et plus fin, n’en marchait pas moins toujours derrière son dîné.

Marc, très patient, laissa passer encore, pour ne point sévir. Et l’appel continua pendant qu’il examinait la vaste salle où il allait travailler à la bonne œuvre, avec ce petit peuple turbulent. À Jonville, il n’avait pas un tel luxe de tableaux noirs, un derrière son bureau pour lui, deux autres à droite et à gauche pour les élèves, ni tant de belles images en couleurs, les poids et mesures, le règne minéral, le règne végétal, le règne animal, les insectes utiles et nuisibles, les champignons bons et mauvais, sans compter de grandes et nombreuses cartes géographiques. Il y avait même, dans une armoire, une collection complète des corps solides et quelques instruments de physique et de chimie. Mais il ne retrouvait pas là l’ambiance de bonne entente, la gaie, affection des élèves qu’il venait de laisser. Évidemment, le dernier instituteur, Méchain, malade et faible, avait aidé par sa nonchalance à la désorganisation de l’école, tombée de cinquante et quelques élèves à une quarantaine au plus. Et