Page:Zola - Vérité.djvu/398

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Mazeline. Mais Marc était attendri, il sentait chez sa fille renaître un peu de sa passion de la vérité, de son intelligence claire et solide. Sans doute, dans cette obscure formation du cerveau d’une enfant, il n’est point aisé de prévoir ni d’analyser ce que sera la pensée mûrie et agissante de la femme. Il croyait pourtant la pressentir déjà raisonnable, saine, libérée de bien des erreurs. Et cela lui était d’une grande douceur, comme s’il attendait de cette fille, si puérile encore, l’aide future, la tendre médiatrice qui, en ramenant l’absente au foyer, renouerait tous les liens si tragiquement rompus.

Mais les nouvelles que Louise apportait, après chacune de ses visites à la petite maison de la place des Capucins devinrent tout à fait mauvaises. À mesure que le moment de ses couches approchait, Geneviève tombait à une tristesse plus sombre, d’humeur si capricieuse, si âpre, que parfois même elle repoussait les caresses de sa fille. Elle avait eu de nouveaux évanouissements, elle semblait se jeter dans une exaltation religieuse croissante, comme ces malades qui, déçus par l’inefficacité de certains stupéfiants, en doublent la dose, en arrivent au poison final. Et, par une délicieuse soirée, dans l’étroit jardin en fleurs, les nouvelles données par Louise inquiétèrent tellement Mlle Mazeline, qu’elle fit une proposition à Marc.

— Mon ami, voulez-vous que j’aille voir votre femme ? Elle me témoignait de l’affection autrefois, peut-être m’écoutera-t-elle si je lui parle raison.

— Et que lui direz-vous, mon amie ?

— Mais que sa place est d’être auprès de vous, qu’elle vous adore toujours sans le savoir, sans comprendre de quel affreux malentendu est faite sa souffrance, et qu’elle sera guérie seulement le jour où elle vous rapportera le cher enfant, dont elle étouffe comme d’un remords.

Des larmes étaient montées aux yeux de Marc, bouleversé