Page:Zola - Vérité.djvu/489

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Puis, il raconta cette rencontre, le long entretien, dont il sortait plus saignant, plus convaincu de la rupture définitive. Salvan ne s’était jamais consolé d’avoir été l’ouvrier complaisant d’une union, d’abord si passionnée, si heureuse, et qui finissait si mal. Il s’accusait d’avoir agi sans prudence, en consentant à marier la libre pensée avec l’Église. Aussi écoutait-il d’une oreille attentive, ne souriant plus, l’air assez satisfait cependant :

— Mais, finit-il par dire, tout cela n’est pas trop mauvais. Vous n’espériez pas sans doute que notre pauvre Geneviève allait se jeter à votre tête, en vous suppliant de la reprendre. Une femme qui s’est donnée à Dieu, a trop d’orgueil pour avouer ainsi la détresse où Dieu la laisse, en se refusant à elle. Selon moi, elle n’en traverse pas moins une crise terrible, qui peut vous la ramener d’un moment à l’autre… Si la vérité l’éclaire, ce sera le coup de foudre. Elle a gardé trop de raison, pour ne pas être juste.

Et, s’animant, il s’égaya de nouveau.

— Je ne vous ai jamais conté, mon ami, mes démarches chez Mme Duparque, pendant ces dernières années. Comme elles n’ont servi à rien, je n’avais pas à m’en vanter près de vous… Oui, lorsque le coup de tête de votre femme s’est produit, j’ai cru devoir aller la sermonner en vieil ami de son père ; et, d’ailleurs, n’étais-je pas son ancien tuteur ? Ces titres, naturellement, m’ont ouvert la petite maison si fermée et si morne de la place des Capucins. Seulement, vous vous imaginez de quelle façon féroce la terrible grand-mère m’accueillait. Elle ne me laissait pas seul avec Geneviève, elle coupait chacune de mes phrases conciliantes d’un cri d’imprécation à votre adresse… Pourtant, je crois avoir dit tout ce que j’avais à dire… La pauvre enfant, il est vrai, n’était pas en état de pouvoir m’entendre. C’est effrayant, le ravage que l’exaltation religieuse fait dans une cervelle de femme, quand une