Page:Zola - Vérité.djvu/586

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du mur à son appel, et qui l’aidait à faire sa classe. Mais, les portes closes, le curé et la servante s’entendaient très bien, d’une âpreté et d’une avarice extraordinaires, l’un ramassant le plus de messes possible, l’autre tenant les comptes, se fâchant lorsque l’argent ne rentrait pas. Et ce fut, dès lors, de la part de l’abbé Cognasse une lutte sourde, empoisonnée, tout ce qu’il put inventer de mortel, pour détruire l’instituteur et l’école, afin de continuer à régner en maître sur la commune, dont l’église paroissiale devait rester le centre, l’unique autorité religieuse et civile.

D’ailleurs, de son côté, Marc agissait simplement comme si l’église n’était pas. Pour reprendre Martineau, pour ramener à lui le conseil municipal et tous les habitants, il menait une campagne unique, la vérité enseignée, la raison triomphant peu à peu des dogmes absurdes. Lui, voulait que l’école fût le centre, la maison commune d’où sortaient la fraternité, la force et la joie de vivre, la juste et heureuse société de demain. Et il se renfermait donc strictement dans son rôle d’instructeur et d’éducateur, certain de la victoire du vrai et du bien, le jour où il aurait refait des hommes, des cœurs et des cerveaux capables de comprendre et de vouloir. Toute sa foi, tout son effort étaient là. À la mairie, où il avait dû reprendre sa fonction de secrétaire, il se contentait de conseiller discrètement le maire Martineau, très heureux au fond de son retour. Déjà Martineau avait eu, chez lui, une querelle avec sa femme, à propos des messes chantées, supprimées par l’abbé Cognasse, depuis que Chagnat n’était plus là, pour chanter au lutrin. Il y avait aussi la vieille querelle, à propos de l’horloge de l’église, qui ne marchait plus ; et le premier acte où l’on comprit que quelque chose était changé à Jonville, fut une décision du conseil municipal, le vote d’une somme de trois cents francs, destinée à l’achat et à la pose d’une horloge neuve,