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Page:Zyromski - Sully Prudhomme, 1907.djvu/152

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138 SULLY PRUDHOMME

de l'éternel inconnu. Or cet inconnu n'est pas uniquement ce qu'il ignore, c'est encore ce qu'il redoute, c'est quelque chose de sacré, le mys- tère... »

Loyalement il renonce à demander à la science ce que la science ne peut donner, et, reconnaissant que l'homme ignorera toujours l'origine et la fin des choses, il aboutit à une sorte de positivisme que couronnera bientôt sa morale. Quand il parle de ces problèmes, la prose de Sully Prudhomme, d'ordinaire laborieuse et tendue, arrive à l'émo- tion et à l'éclat. Il mêle ici son âme à sa pensée, puisqu'il s'agit du destin des hommes. La lucidité de sa critique s'anime de l'ardeur de son désir, et son esprit est soulevé par ces lames de mélancolie qui montent du fond de lui-même et agitent son âme toute tendue par l'aspiration.

Ces diverses formes de la mélancolie ont été enfiévrées par un esprit d'analyse d'une intensité singulière.

L'esprit d'analyse est le goût et le besoin de se replier sur soi-même. Celui qui s'attarde à cet