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« Page:Tolstoï - Résurrection, trad. Wyzewa, 1900.djvu/316 » : différence entre les versions

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— Nekhludov ! C’est toi ?
— Nekhludov ! C’est toi ?


La première impression de Nekhludov fut toute de
La première impression de Nekhludov fut toute de plaisir.
plaisir.


— Tiens ! Chembok ! — s’écria-t-il joyeusement.
— Tiens ! Chembok ! — s’écria-t-il joyeusement. Mais, dès l’instant d’après, il comprit qu’il n’y avait là pour lui aucun motif de se tant réjouir.
Mais, dès l’instant d’après, il comprit qu’il n’y avait
là pour lui aucun motif de se tant réjouir.


C’était ce même Chembok qui était venu le rejoindre
C’était ce même Chembok qui était venu le rejoindre chez ses tantes, le lendemain du jour où il avait séduit Katucha. Nekhludov l’avait perdu de vue depuis longtemps ;
mais on lui avait dit que Chembok, lui aussi, avait quitté le régiment, et que, malgré son manque de fortune et ses dettes, il continuait, on ne savait comment, à vivre dans la société des gens riches. L’élégance de sa mise et l’expression satisfaite de ses traits prouvèrent à Nekhludov qu’on ne l’avait pas trompé.
chez ses tantes, le lendemain du jour où il avait séduit
Katucha. Nekhludov l’avait perdu de vue depuis longtemps ;
mais on lui avait dit que Chembok, lui aussi,
avait quitté le régiment, et que, malgré son manque de
fortune et ses dettes, il continuait, on ne savait comment,
à vivre dans la société des gens riches. L’élégance
de sa mise et l’expression satisfaite de ses traits
prouvèrent à Nekhludov qu’on ne l’avait pas trompé.


— En voila une chance, de t’avoir rencontré ! Ma
— En voila une chance, de t’avoir rencontré ! Ma parole, il n’y a plus personne en ville! Eh ! mon cher, tu as vieilli ! — dit l’ancien officier, descendant du fiacre et
parole, il n’y a plus personne en ville! Eh ! mon cher, tu
as vieilli ! — dit l’ancien officier, descendant du fiacre et
déployant ses épaules. Figure-toi que je ne t’ai reconnu
déployant ses épaules. Figure-toi que je ne t’ai reconnu
qu’à ta démarche ! Nous dînons ensemble, n’est-ce pas ?
qu’à ta démarche ! Nous dînons ensemble, n’est-ce pas ?
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— Je crains de ne pouvoir pas accepter ! — répondit
— Je crains de ne pouvoir pas accepter ! — répondit
Nekhludov qui pensait seulement à trouver quelque
Nekhludov qui pensait seulement à trouver quelque moyen de prendre congé de son compagnon sans le fâcher. — Et toi, que fais-tu ici ? — reprit-il.
moyen de prendre congé de son compagnon sans le
fâcher. — Et toi, que fais-tu ici ? — reprit-il.


— Moi, mon cher, j’y suis pour affaire ! Pour l’affaire
— Moi, mon cher, j’y suis pour affaire ! Pour l’affaire de ma tutelle. Car tu sais que je suis tuteur ? Je gère les
de ma tutelle. Car tu sais que je suis tuteur ? Je gère les
biens de Samanov, Tu le connais, Samanov, le richard ?
biens de Samanov, Tu le connais, Samanov, le richard ?
Figure-toi qu’il est ramolli ! Et cinquante-quatre mille
Figure-toi qu’il est ramolli ! Et cinquante-quatre mille
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toute particulière. — Tout cela était dans un désordre
toute particulière. — Tout cela était dans un désordre
lamentable ! Les paysans s’étaient approprié les terres.
lamentable ! Les paysans s’étaient approprié les terres.
Ils ne payaient pas, le déficit était énorme. Eh bien ! moi,
Ils ne payaient pas, le déficit était énorme. Eh bien ! moi, en un an de tutelle, j’ai tout remis en état et fait rapporter aux terres 70 % de plus. Hein ! qu’en dis-tu ? —
demanda-t-il avec une fierté encore plus marquée.[[Catégorie:]]
en un an de tutelle, j’ai tout remis en état et fait rapporter
aux terres 70 % de plus. Hein ! qu’en dis-tu ? —
demanda-t-il avec une fierté encore plus marquée.

Version du 26 octobre 2009 à 07:43

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312
RÉSURRECTION

pointe, qui, assis dans un fiacre de première classe, lui faisait amicalement signe de la main et lui souriait, découvrant des dents d’une blancheur anormale.

— Nekhludov ! C’est toi ?

La première impression de Nekhludov fut toute de plaisir.

— Tiens ! Chembok ! — s’écria-t-il joyeusement. Mais, dès l’instant d’après, il comprit qu’il n’y avait là pour lui aucun motif de se tant réjouir.

C’était ce même Chembok qui était venu le rejoindre chez ses tantes, le lendemain du jour où il avait séduit Katucha. Nekhludov l’avait perdu de vue depuis longtemps ; mais on lui avait dit que Chembok, lui aussi, avait quitté le régiment, et que, malgré son manque de fortune et ses dettes, il continuait, on ne savait comment, à vivre dans la société des gens riches. L’élégance de sa mise et l’expression satisfaite de ses traits prouvèrent à Nekhludov qu’on ne l’avait pas trompé.

— En voila une chance, de t’avoir rencontré ! Ma parole, il n’y a plus personne en ville! Eh ! mon cher, tu as vieilli ! — dit l’ancien officier, descendant du fiacre et déployant ses épaules. Figure-toi que je ne t’ai reconnu qu’à ta démarche ! Nous dînons ensemble, n’est-ce pas ? Où peut-on manger convenablement, dans ce pays ?

— Je crains de ne pouvoir pas accepter ! — répondit Nekhludov qui pensait seulement à trouver quelque moyen de prendre congé de son compagnon sans le fâcher. — Et toi, que fais-tu ici ? — reprit-il.

— Moi, mon cher, j’y suis pour affaire ! Pour l’affaire de ma tutelle. Car tu sais que je suis tuteur ? Je gère les biens de Samanov, Tu le connais, Samanov, le richard ? Figure-toi qu’il est ramolli ! Et cinquante-quatre mille déciatines de terre ! — ajouta Chembok avec une fierté toute particulière. — Tout cela était dans un désordre lamentable ! Les paysans s’étaient approprié les terres. Ils ne payaient pas, le déficit était énorme. Eh bien ! moi, en un an de tutelle, j’ai tout remis en état et fait rapporter aux terres 70 % de plus. Hein ! qu’en dis-tu ? — demanda-t-il avec une fierté encore plus marquée.[[Catégorie:]]