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Théorie du mouvement des corps célestes/L1S4

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Traduction par Edmond Dubois.
(p. 165-172).

QUATRIÈME SECTION.
RELATIONS ENTRE PLUSIEURS POSITIONS DANS L’ESPACE.
110

Les relations qui doivent être considérées dans cette section seront indépendantes de la nature de l’orbite, et soumises à la seule hypothèse que tous les points de l’orbite se trouvent dans un même plan avec le Soleil. Mais nous avons cru convenable de toucher seulement ici quelques-unes des plus simples, et de réserver pour un autre livre d’autres plus compliquées et plus spéciales.

La situation du plan de l’orbite est entièrement déterminée par deux positions du corps céleste dans l’espace, pourvu que ces deux lieux ne soient pas situés sur une même droite avec le Soleil. C’est pourquoi, puisque la position d’un point dans l’espace peut être assignée particulièrement de deux manières, il se présente deux problèmes à résoudre.

Nous supposerons d’abord que les deux lieux soient déterminés par leurs longitudes et latitudes héliocentriques, respectivement désignées par les distances au Soleil ne devront pas entrer dans ce calcul. Alors, si la longitude du nœud ascendant est désignée par l’inclinaison de l’orbite sur l’écliptique par on aura

La détermination des inconnues se rapporte ici au problème considéré dans l’art. 78, II. Nous avons donc, d’après la première solution,

de même, d’après la troisième solution, nous trouvons par l’équation

formule certainement un peu plus commode, si les angles sont donnés immédiatement, et non par les logarithmes de leurs tangentes ; mais, pour la détermination de on aura recours à l’une des formules

Au reste, l’ambiguïté dans la détermination de l’angle

 ou 

par sa tangente, sera décidée par la considération que doit être positif ou négatif selon que le mouvement projeté sur l’écliptique est direct ou rétrograde : c’est pourquoi, on ne peut alors lever cette incertitude que dans le cas où l’on peut constater dans quelle direction le corps céleste a passé de la première position à la seconde. Si ceci ne pouvait être déterminé, il serait certainement impossible de distinguer le nœud ascendant du nœud descendant.

Une fois les angles et déterminés, on obtiendra les arguments de la latitude par les formules

qui doivent être prises dans le premier demi-cercle ou dans le second, suivant que les latitudes correspondantes sont boréales ou australes. À ces formules nous ajoutons encore les suivantes, dont l’une ou l’autre pourra, si cela convient, être employée dans la pratique à s’assurer de l’exactitude du calcul :

111

Supposons, en second lieu, que les deux positions de l’astre soient données par leurs distances à trois plans passant par le Soleil et se coupant à angles droits ; désignons ces distances par pour le premier lieu, par pour le second, et supposons que le troisième plan soit le plan de l’écliptique lui-même, et aussi que les pôles positifs du premier et du second plan soient situés par les longitudes et On aura ainsi, d’après l’art. 53, les deux rayons vecteurs étant désignés par et

Il suit de là

En combinant la première formule avec la seconde on aura et et de là, au moyen de la troisième formule, on obtiendra et

Puisque le lieu auquel répondent les coordonnées est supposé postérieur en temps, doit être plus grand que si donc on sait en outre, si l’angle décrit autour du Soleil entre le premier et le second lieu est plus petit ou plus grand que deux angles droits, et devront être des quantités positives dans le premier cas, et négatives dans le second : sera donc alors déterminé sans ambiguïté, en même temps que du signe de la quantité on décidera si le mouvement est direct ou bien rétrograde. Réciproquement, si l’on est certain de la direction du mouvement, on pourra, d’après le signe de la quantité décider si doit être pris plus petit ou plus grand que 180°. Mais si non-seulement la direction du mouvement, mais encore la nature de l’angle décrit autour du Soleil sont entièrement inconnus, il est évident qu’on ne pourra distinguer le nœud ascendant du nœud descendant.

On s’apercevra facilement que de même que est le cosinus de l’inclinaison du plan de l’orbite sur le troisième plan, sont respectivement les cosinus des inclinaisons du plan de l’orbite sur le premier et le second plans ; et aussi que exprime le double de l’aire du triangle compris entre les deux rayons vecteurs, et le double de l’aire des projections du même triangle sur chacun des plans.

Il est enfin évident, qu’à la place de l’écliptique on peut choisir tout autre plan pour troisième plan, pourvu que toutes les quantités définies par leurs relations avec l’écliptique, soient également rapportées au troisième plan, quel qu’il soit.

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Soient les coordonnées de quelque troisième lieu, son argument de la latitude et son rayon vecteur. Nous désignerons les quantités qui sont les doubles des aires des triangles compris entre le second rayon vecteur et le troisième, le premier et le troisième, le premier et le second, respectivement par On obtiendra donc pour des relations semblables à celles que nous avons données pour et dans l’article précédent; d’où, par le secours du lemme I, art. 78, on déduit facilement les équations suivantes :

Soient maintenant les longitudes géocentriques correspondant à ces trois positions du corps céleste ; leurs latitudes géocentriques ; leurs distances à la Terre projetées sur l’écliptique ; ensuite, les longitudes héliocentriques correspondantes de la Terre ; ses latitudes que nous ne posons pas égales à zéro, pour qu’il soit permis non-seulement d’avoir égard à la parallaxe, mais aussi, si l’on veut, d’adopter tout autre plan à la place de l’écliptique ; soient enfin, les distances de la Terre au Soleil projetées sur l’écliptique.

Si, alors, sont exprimées en fonction de et qu’il en soit de même des coordonnées concernant le premier et le second lieu, les équations précédentes prendront la forme suivante :

[1]
[2]
[3]

Si nous considérons ici et les quantités analogues pour les deux autres lieux comme connues, et que les équations soient divisées par par ou par il reste cinq quantités inconnues, dont on pourra, par conséquent, éliminer deux ou déterminer trois, au moyen de deux quelconques d’entre elles. De cette manière ces trois équations ouvrent la route à plusieurs conclusions très-importantes, dont nous développerons ici quelques-unes particulièrement remarquables.

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Pour que nous ne soyons pas trop embarrassés par la longueur des formules, nous trouvons bon d’employer les abréviations suivantes. D’abord nous désignons la quantité

par si dans cette expression, à la place de la longitude et de la latitude correspondant à un lieu géocentrique quelconque, sont substituées la longitude et la latitude de n’importe lequel des trois lieux héliocentriques correspondants de la Terre, nous changeons, dans la notation , le chiffre qui correspond à cette position géocentrique, avec un chiffre romain qui devra répondre à cette position de la Terre. De telle sorte, par exemple, que la notation exprime la quantité

et aussi , la suivante,

Nous changeons la notation de la même manière, si dans la première expression, nous substituons deux longitudes et latitudes quelconques héliocentriques de la Terre à la place de deux longitudes et latitudes géocentriques. Si deux des longitudes et latitudes contenues dans cette expression sont permutées entre elles, il conviendra aussi de permuter dans la notation les chiffres correspondants ; mais par là, la valeur elle-même de la quantité ne change pas, mais seulement, de positive devient négative, ou de négative positive. De telle sorte qu’on a par exemple,

C’est pourquoi, toutes les quantités qui naissent de cette manière se réduisent aux dix-neuf suivantes :


auxquelles il faut ajouter la vingtième

Il est au reste facilement démontré que chacune de ces expressions multipliées par le produit des trois cosinus des latitudes qui y entrent, devient égale à six fois le volume de la pyramide dont le sommet est au Soleil, et qui a pour base le triangle formé par les trois points de la sphère céleste qui correspondent aux lieux entrant dans chaque expression, le rayon de la sphère étant supposé égal à 1.

C’est pourquoi, toutes les fois que ces trois lieux se trouvent sur un même grand cercle, la valeur de l’expression doit être égale à zéro ; et comme pour les trois positions héliocentriques de la Terre ceci a toujours lieu, toutes les fois que nous ne considérons pas les parallaxes et les latitudes de la Terre nées des perturbations, c’est-à-dire toutes les fois que nous plaçons la Terre dans le plan même de l’écliptique, on aura toujours, dans cette hypothèse, qui devient, par le fait, une équation identique si l’écliptique lui-même est pris pour troisième plan. Enfin, toutes les fois que et toutes ces expressions, la première exceptée, deviennent beaucoup plus simples ; c’est-à-dire qu’à partir de la seconde jusqu’à la dixième, chacune d’elles sera composée de deux parties, mais que de la onzième jusqu’à la dix-neuvième elles ne contiendront qu’un seul terme.

114

En multipliant l’équation [1] par l’équation [2] par et l’équation [3] par et en ajoutant les produits, on trouve

[4]

et de la même manière, ou plus commodément par la seule permutation des lieux entre eux,

[5]
[6]

Par conséquent, si le rapport des quantités est donné, on pourra au moyen de l’équation 4, déterminer en fonction de ou en fonction de et semblablement d’après les équations 5 et 6.

De la combinaison des équations 4, 5 et 6 naît la suivante,

[7]

au moyen de laquelle, d’après deux distances du corps céleste à la Terre, on peut déterminer la troisième. Mais il peut être démontré que cette équation 7 devient identique, et par suite impropre pour la détermination d’une distance en fonction des deux autres, toutes les fois que l’on aura et

La formule suivante qui découle des équations 1, 2, 3 est affranchie de cet inconvénient :

[8]

En multipliant l’équation 1 par l’équation 2 par l’équation 3 par et ajoutant les produits, on trouve

[9]

et de la même manière,

[10]
[11]

Au moyen de ces équations, les distances peuvent être déterminées en fonction du rapport entre les quantités quand il est connu ; mais cette conclusion n’est vraie que d’une manière générale, et souffre une exception toutes les fois que l’on a Il peut, en effet, être démontré que, dans ce cas, on n’obtient des équations 8, 9 et 10 rien autre chose que la relation qui existe nécessairement entre les quantités relation qu’on trouve réellement la même par chacune des trois. Des restrictions analogues relativement aux équations 4, 5, 6, s’offriront spontanément au lecteur expérimenté.

Au reste, toutes les conclusions développées ici ne sont d’aucun usage toutes les fois que le plan de l’orbite coïncide avec l’écliptique. Si, en effet, sont toutes l’équation 3 est identique, et par conséquent toutes les suivantes aussi.