Une femme m’apparut/1905/13

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Alphonse Lemerre, éditeur (p. 69-70).


XIII


La volupté de Lorély était infiniment pure, son désir était infiniment chaste.

« Je ne sais point, » disait-elle, « tracer des limites à mon corps ni à mon âme, mon corps ayant une âme, et mon âme un corps. »

Lorély s’avérait d’une singulière franchise. Elle accusait son individualité, comme peu d’êtres ont eu l’audace de le faire, ne connaissant point les petits mensonges et s’affirmant, en sa pleine personnalité, au-dessus des règles et des lois.

Elle semblait égarée parmi notre époque. C’était une exilée de Mytilène, portant des yeux pleins de souvenirs sur ce monde inconnu. Son âme païenne cherchait, en la regrettant, l’harmonieuse patrie. Elle était de tous les temps, hors l’heure présente.

Un jour qui précédait Noël, elle me demanda :

« Qu’est-ce que cette fête de Noël ? Commémore-t-elle la naissance ou la mort du Christ ? Je ne me le rappelle plus. »

Peut-être ne l’avait-elle jamais appris…