Dictionnaire de la Bible/Tome 5.2.d THOMAS-ZUZIM

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Dictionnaire de la Bible
(Volume Vp. 2197-2198-2549-2550).

1. THOMAS (Nouveau Testament, Su>(iàt), un des douze Apôtres (fig. 487), saint Jean, xi, 16 ; xxi, 2, explique son nom araméen comme signifiant « jumeau », i Xe-fo^evoî AiSu^oç. Les auteurs des anciens livres apocryphes chrétiens, à cause de cette circonstance, ont imaginé diverses fables pour savoir quel était son jumeau. On lui donna pour sœur jumelle Lysia ou Lydia. Voir Chronic. pasch., IX, t. xcil, col. 1076. Les Homélies clémentines, hom. ii, 1, Pair, gr., t. ii, col. 77, disent que Thomas avait un frère jumeau qui est appelé Éliézer. Dans les Actes apocryphes qui portent son nom, ainsi que dans la Doctrina Apostolorum,

il est appelé lui-même (t Judas Thomas ». Eusèbe, II. E., i, 6, t. xx, col. 126, dans l’histoire d’Abgar d’Édesse, cite un fragment où il est désigné ainsi : ’Io — j5aç ô xoci 0w|j.âç.

Les synoptiques se contentent de mentionner saint Thomas dans le catalogue apostolique. Matth., x, 3 ; Marc, iii, 18 ; Luc, vi, 15 ; Ac’t., i, 3. Saint Jean nous a conservé trois épisodes qui mettent en plein relief

487. — Saint Thomas. D’après Raphaël.

Dans les représentations de cet apôtre qui ne sont pas antérieures au XIIIe siècle, il a l’équerre pour attribut, parce qu’il est le patron des architectes et des maçons. Mrs Jameson, Sacred and legendary art, in-8°, Londres, 1850, p. 147.

son caractère : 1° Quand les autres Apôtres s’efforcent en vain de dissuader Jésus d’aller à Béthanie : « Allons aussi et mourons avec lui, » Joa., xi, 16, leur dit-il, montrant ainsi son dévouement au divin Maître. — 2° Il voulait se rendre compte de l’enseignement du Sauveur et le bien comprendre. Aussi, quand, à la dernière Cène, Jésus dit aux siens qu’il va leur préparer une place auprès de son Père et qu’ils en connaissent le chemin, Thomas l’interrompt : « Seigneur, nous ne savons pas où vous allez, comment pouvons-nous connaître le chemin ? » Joa., xv, 14. — 3° La passion fut pour lui un coup terrible. Il ne se sépara point des autres Apôtres, Joa., xx, 25, mais quand ils lui racontèrent qu’ils avaient vii, en son absence, Jésus ressuscité, ꝟ. 24, il ne se rendit pas à leur témoignage et déclara que, pour être convaincu, il lui faudrait toucher lui-même les plaies du Crucifié. Il devait fournir ainsi aux générations à venir une preuve incontestable de la

réalité de la résurrection. Huit jours après, le Sauveur apparut de nouveau aux disciples assemblés et, cette fois, Thomas était présent. Jésus entra au milieu d’eux, les portes fermées, et, s’adressant à Thomas, il lui dit, en lui montrant ses mains percées, et en répondant mot pour mot aux paroles de l’apôtre incrédule : « Introduis ton doigt ici et vois mes mains ; approche aussi ta main et mets-la dans mon côté ; et ne sois pas incrédule, mais fidèle. » Thomas toucha-t-il les cicatrices du Sauveur ? Le texte sacré ne le dit pas, mais l’apôtre, rempli d’admiration et de foi, s’écrie : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Le divin Maître tira la conclusion de cette scène : « Parce que tu m’as vii, Thomas, tu as cru : heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru ! » Joa., xx, 26-29. Plus nobis Thomse infidelitas ad (idem, quam fides credentium discipulorum profuit, dit saint Grégoire le Grand, Rom. xxvi in Evang., 1, t. lxxvi, col. 1201.

Après cette scène, le nom de saint Thomas n’apparaît plus que deux fois dans le Nouveau Testament : 1° dans le récit de la pêche miraculeuse, à laquelle il prit part avec Pierre, Nathanaël, les fils de Zébédée, et deux autres disciples, Joa., xxl, 2, et 2° dans l’énumération des Apôtres réunis au Cénacle, après l’Ascension de Notre-Seigneur. Act., i, 13.

Après la dispersion des Apôtres, saint Thomas porta l’Évangile chez les Parthes, d’après Eusèbe, H. E.,

III, 1, t. xx, col. 216 ; Socrate, H. E., i, 19, t. lxvii, col. 125 ; Recognit., ix, 29, Pair, gr., t. i, col. 1415, et aussi en Perse, d’après saint Jérôme, De vit. Apostol. , 5, t. xxiii, col. 721. Il fut enterré à Édesse. Rufin, H. E., iii, 5, t. xxi, col. 513 ; Socrate, H. E.,

IV, 18, t. lxvii, col. 504. Saint Jean Chrysostome, tiom. xxvi in Heb., 2, t. lxiii, col. 179, mentionne son tombeau comme l’une des quatre tombes apostoliques connues, les trois autres étant celles de saint Pierre, de saint Paul et de saint Jean. Une autre tradition lui fait prêcher ]a foi et souffrir le martyre dans l’Inde. S. Grégoire de Nazianze, Orat. xxxm ad Arian., 11, t. xxxvi, col. 228 ; Pseudo-Dorothée de Tyr, Patr. gr., t. xcii, 7, col. 1072 ; Nicéphore, H.E., ii, 40, t. cxlv, col. 851. L’apostolat de saint Thomas dans l’Inde est mentionné dans une inscription d’Oodeypure, près de Sagur, dans l’Inde orientale. Voir Beilage zur Allgemeinen Zeitung, 8 janvier 1900, p. 7. Les chrétiens de l’Inde, connus sous le nom de chrétiens de saint Thomas, qui habitent le Malabar et appartiennent à l’Église syrienne, considèrent cet apôtre comme leur fondateur, mais ils paraissent tirer leur origine d’un missionnaire nestorien appeléThomas. — L’Église latine célèbre la fête desaintThomasle21 décembre et l’Église grecque, le 6 octobre. Le Bréviaire romain, au 21 décembre, le fait mourir martyr dans l’Inde, à Calamine. — Plusieurs écrits apocryphes portent son nom ou racontent ses actes. Voir Acta Thomæ (llpaÇet ; , De miraculis B. Thomas, Passio S. Thomse), recensuit Max Bonnet, in-8°, Leipzig, 1883 ; W. Wrgiht, Apoci-yphal Acts of the Apostles, from Syriac manuscripts, 2 in-8°, Londres, 1871 ; S. C. Malan, The con/licts of the holy Apostles, an apocryphal book of the early Eastern Church, in-18, Londres, 1871 ; R. A. Lipsius, Die Apokryphen Aposielgeschichlen, in-8°, Brunswick, 18831890, t. i, p. 225-347. F. Vigouroux.

2. THOMAS (ACTES DE SAINT). Voir Actes apocryphes des Apôtres, 1. 1, col. 160-161.

3. THOMAS (APOCALYPSE DE SAINT). Voir APO-CALYPSES APOCRYPHES, 6, t. i, col. 766.

4. THOMAS (ÉVANGILE DE SAINT). Sur cet évangile apocryphe, voir Évangiles apocryphes, 4, t. ii, col. 2116.

    1. THOPHEL##

THOPHEL (hébreu : Tôfél ; Septante. : Toçé).), localité située à l’est de la Palestine. Voir carte du pays de Moab, t. iv, col. 1146. Elle est nommée, Deut., i, 1, pour déterminer l’endroit où Moïse résuma dans un discours l’histoire d’Israël au désert. C’est le Tafiléh actuel, situé sur l’ouadi du même nom, qui coule dans la direction nord-ouest, vers le Ghôr, au sud-est de la mer Morte. Ed. Robinson, Biblical researches in Palestine, 2e édit., 1856, t. ii, p. 167. Thophel est dans une région très fertile et bien arrosée, où abondent les arbres fruitiers. L’identification de Thophel avec Tafiléh n’est cependant pas universellement acceptée.

    1. THOPO##

THOPO (grec : Ts : pwv), ville fortifiée par Bacchide, pendant les guerres contre les Machabées. I Mach., IX, 50. Elle était située en Judée, avec les autres villes qui sont nommées en même temps. C’est peut-être Beththaphua, aujourd’hui Taffouh, à cinq kilomètres à l’ouest d’Hébron. Voir Beththaphua, t. i, col. 1750.

    1. THORA##

THORA, nom hébreu du livre de la loi de Moïse. Voir Pentateuque, col. 51.

TH OS AiTE (hébreu : fial-Tisî ; Septante : ô ®w<rai’). I Par., XI, 45. Joha, fils de Samri, et frère de Jédihel, un des vaillants soldats de David, est appelé le Thosaïte. On ne saurait déterminer si ce qualificatif désigne sa famille ou sa patrie, l’une et l’autre étant également inconnues.

THOÙ (hébreu : Tô’û ; Septante : ©ovoJ, Il Sam. (Reg.), viii, 9-10 ; dans I Par., xviii, 9-10, Jô’û ; &u>i), roi d’Émath, sur l’Oronte. Il avait été en guerre avec Adarézer, roi de Soba, et quand David eut battu ce dernier, Thoû envoya ses félicitations au roi d’Israël par son fils Joram ou Adoram, avec des vases d’or, d’argent et d’airain qu’il lui offrit en présents.

    1. THRACE##

THRACE (grec : ®p3£), originaire de la Thrace. Un cavalier thrace est mentionné dans II Mach., xii, 35, comme ayant sauvé la’vie du gouverneur de l’Idumée, Gorgias, dans une bataille contre Judas Machabée, vers 163 avant notre ère, sous le régne du roi de Syrie Antiochus IV Épiphane. La Thrace, à cette époque, comprenait la Bulgarie et la Roumélie de nos jours.

    1. THUBAL##

THUBAL (hébreu : Tûbal, Tubal ; Septante : ©6ês)i), fils de Japhet. Gen., x, 2 ; I Par., i, 5. De lui descendirent les Tibaréniens, peuple dont nous trouvons le nom dans Hérodote, iii, 94 ; vii, 78, et qui habitait à l’est de Thermodon, dans les montagnes du sud-est de la mer Noire. Il est plusieurs fois mentionné dans les inscriptions assyriennes. Eb. Schrader, Keilinschriften und Geschichtsforschung, p. 155. Isaïe, lxvi, 19, 1e nomme, avecMèsech et Javan, parmi les peuples éloignés. Ézéchiel, xxvii, 13, le montre comme faisant avec Tyr le commerce des esclaves et des vases de cuivre ; xxxii, 26, il signale les adversités qui l’ont frappé ; xxxviii, 2, 3, et xxxix, 1, il l’énumère parmi les alliés de Gog.

THiIMMI M (hébreu : Tummîm ; Septante : SïJJ.oktlç ; Vulgate : doctrina). Exod., xxviii, 30. Voir Urim et Thummim.

    1. THUYA##

THUYA (Apoc. : |ii).ov Sdt’vov ; Vulgate : lignum thyinum), bois précieux.

I. Description. — C’est le bois de Citre des anciens Romains, qui l’employaient à fabriquer des objets d’ébénisterie de luxe ; il est formé par une conifère de l’Afrique septentrionale, le Thuya articulata, devenu Callitris quadrivalvis de Ventenat (fig. 488). Ce nouveau genre diffère surtout par les écailles de son fruit,

qui sont verticillées parqualre, au lieu d’être opposées. Les feuilles sont aplanies etsubulées sur les jeunes rameaux ; plus tard, sur les branches adultes, elles deviennent fortement apprimées-soudées et squamiformes, paraissant verticillées, mais réellement opposées-décussées et inégales deux à deux. Le fruit est un strobile pointu, de la grosseur d’une noisette, formé par quatre écailles cordiformes, un peu inégales, concaves en dehors, brièvement mucronulées au-dessous du sommet, recouvrant six graines irrégulièrement coniques, bordées de chaque côté d’une aile membraneuse.

L’arbre atteint rarement plus de six mètres de hauteur, ramifié dès la base, puis formant une cime pyramidale ou même dilatée en parasol. Les ramules terminaux sont articulés, comprimés et presque dichotomes. Il forme un élément très important des massifs boisés de l’Algérie, sur les coteaux d’altitude moyenne. De végétation lente, il a un bois dense, blanc dans l’aubier,

488. — Thuya articulata.

rouge-brun vers le cœur, doué d’une odeur caractéristique, et imprégné de résine sandaraque. Son grain fin et homogène, lourd et presque indestructible, le rend propre à une foule d’usages : il fournit en outre un charbon de bonne qualité. Mais ce sont surtout les broussins souterrains, provoqués sur les souches par les incendies dus aux pasteurs arabes, qui fournissent à l’ébénisterie un bois de placage de nuances riches et finement moucheté (fig. 489). F. Hv.

II. Exégèse. — Le £û).ov 615ïvov, lignum thyinum, n’est mentionné que dans l’Apocalypse, xviii, 12. Il figure parmi les produits précieux que la Babylone symbolique ou Rome recevait de l’étranger : à côté des marchandises d’or, d’argent, de pourpre, on voit le bois de thuya. Les auteurs grecs et latins parlent souvent de ce bois, qu’ils appellent titre. Pline, dans son H. N., xui, 29, 30, donne une longue description de ce bois, de ses qualités, de ses emplois. Il cite les tables les plus célèbres, fabriquées avec ses racines. « On conserve encore aujourd’hui la table de Cicéron, payée malgré sa fortune médiocre un million de sesterces (210000 fr.). On cite aussi celle d’Asinius Gallus, qui coûta 1100000 sesterces (231000 fr.). Un incendie a consumé récemment une table qui venait de Céthégus et qui fut vendue 1400000 sesterces (294000 fr.). La plus grande table qu’on eût encore vue est celle de Ptolémée, roi de Mauritanie : elle était faite de deux

demi-circonférences réunies ensemble ; elle avait quatre pieds et demi de diamètre et trois pouces d’épaisseur ; et l’art, en cachant la jointure, avait rendu cette table plus belle que si elle avait été naturellement d’une seule pièce. La plus grande d’une seule pièce est la table de Nomius, affranchi de l’empereur Tibère : elle a quatre

439. — Coupe de bois.

pieds moins trois quarts de pouce, et elle est épaisse de six pouces environ. Ce qui sert à faire les tables est un nœud de la racine ; on estime surtout les nœuds qui ont été tout entiers sous la terre… Le principal mérite de ces tables, c’est d’avoir des veines disposées en cheveux crêpés ou en petits tourbillons. Dans la première disposition, les veines courent en long : tables tigrées ; dans la seconde, elles reviennent surelles-mèmes : tables panthérines. Il y en a encore à ondulations crêpées, recherchées surtout si elles imitent les yeux de la queue du paon… Pour toutes, la qualité prééminente est la nuance ; la nuance de vin miellé avec des veines brillantes est au premier rang. Après la couleur, c’est Ja grandeur qu’on prise : on veut des troncs entiers et plus d’un dans une seule table. » Pline, H. N., xiii, 29, 30. Le bois est très odorant. On faisait venir ce bois de la région de l’Atlas, ou encore de la province de Grenade, Strabon, XVI, iii, 4 ; 0. Celsius, Hierobotanicon, in-8°, Amsterdam, 1748, t. ii, p. 22-29. — La Vulgate, dans III Keg., x, 11, 12, et dans le passage parallèle, II Par., IX, 10, 11, traduit par thuya le mot hébreu algûmîm. Il s’agit du bois de Santal. Voir t. v, col. 1468.

E. Levesque.

    1. THYATIRE##

THYATIRE (Nouveau Testament : ©udtTeipa), ville de Lydie (fig. 490), aujourd’hui.A fc Hissar dans la vallée

490. — Monnaie de Ttayatïre.

Néron lauré à droite. NEPQN KAAVd KAIcAP CEBA. r). Hache

bipenne. erATEIPHNQN.

du Lycus. —. 1° Séleucus Nicator, roi de Syrie, y établit une colonie de Macédoniens entre 301 et 281 avant notre ère. La ville existait sans doute auparavant, mais c’est alors qu’elle commença à prendre de l’importance et à devenir le centre d’un commerce florissant. Elle rendait un culte au soleil, npoxxrcop 8eoç "HXioç IIûOioç T-jptp.vaîo ; ’AnoXXwv (Clerc, De rébus Thyat., 1893, p. 71), comme on le voit par ses inscriptions et par ses monnaies. Les colons macédoniens, sous les rois

Séleucides, puis les rois de Pergame et les Romains s’appliquèrent à en faire une cité commerçante et riche. Elle est en plaine, ce qui est une exception assez rare dans ces contrées, et cette plaine se distingue par sa fertilité. Elle produit de riches moissons et on y cultive la vigne. Deux bosquets de cyprès encadrent Thyatire à l’est et à l’ouest (fig. 491). On n’y voit point de ruines d’anciens monuments, mais on y trouve encore les industries anciennes qui l’avaient enrichie, en particulier la tannerie et la teinturerie. La teinturerie des étoffes en rouge se faisait au moyen de la garance. La découverte de l’aniline fait disparaître cette industrie d’Ak Hissar. CXerc, De reb. Thyatir., p. 93. Une despre christianisme mêlé d’éléments disparates et idolâtriques. Les nombreuses inscriptions qu’on a trouvées à Thyatire montrent que la population de cette ville était très mélangée, Latins, Grecs, Orientaux, et la nouvelle Jézabel, qui se donnait pour prophétesse, aurait altéré la foi en la dénaturant par des éléments idolâtriques.

— Voir de Peysonnel, consul de France à Smyme, Observations historiques et géographiques sur les peuples barbares qui ont habité sur les bords du Danube et du Pont-Euxin, suivies d’un voyage à Magnésie, à Thyatire, etc., Paris, 1675 ; Ferd. Stosch, Antiquitatum Thyatirenarum libri duo, Zwollse, 1763 ; M. Clerc, De rébus Thyatirenorum commentatio

491. — Thyatire, d’après une photographie.

mières chrétiennes de Thyatire, Lydie, que saint Paul convertit à Philippes, Act., xvi, 14, 40, était wopçvipôictoXi ; , « marchande de pourpre ». Voir Lydie 1, t. iv, col. 447. Ce fut elle peut-être qui, de retour dans sa patrie, y travailla à la propagation du christianisme.

2° Lorsque saint Jean écrivit son Apocalypse, quelques années plus tard, le nombre des chrétiens s’était multiplié à Thyatire. L’apôtre loue leurs œuvres et leur foi, mais il leur reproche d’écouter Jézabel, qui se donne pour prophétesse et qui les entraîne à la fornication et à l’usage des viandes consacrées aux idoles, et il les menace de châtiments. Apoc, ii, 18-25. On admet généralement que le nom de Jézabel esl ici symbolique, par allusion à l’impie Jézabel, femme d’Achab, roi d’Israël. D’après les uns, c’est la sibylle Sambatha, qui avait en dehors de la ville un sanctuaire dont l’enceinte s’appelait « le péribole du Chaldéen », et qui était d’origine chaldëenne, perse ou juive. Suidas, voce Sambatha ; alien, Hist. var., xii, 36. Dans ce cas, elle serait la personnification d’une secte analogue à celle des nicolaïtes. D’après d’autres, c’était un personnage individuel, qui enseignait un

epigraphica, in-8°, Paris, 1893 ; E. Schùrer, Die Prophetin Isabel in Thyatira, dans les Theologische Abhandlungen, "in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1892, p. 39-57.

    1. THYRSE##

THYRSE (grec : Mpo-oç ; Vulgate : thyrsus), bâton surmonté d’une pomme de pin, ou d’un bouquet de lierre ou de feuilles de vigne, que l’on portait dans les fêtes de Bacchus (fig. 492). Cf. Horace, Od., ii, 19, 8 ; Stace, Theb., ix, 614. C’était primitivement une lance dont la pointe était entourée d’une pomme de pin’ou de feuillages. — À une fête célébrée pour remplacer celle des Tabernacles, les Juifs compagnons de Judas Machabée portaient des thyrses, des rameaux verts et des palmes. II Mach., x, 7. Les thyrses désignent ici le lûlâbou le’étrôg (cédrat), t. ii, fig. 117, col. 373, qu’on tenait en main pendant les fêtes des Tabernacles. Voir Tabernacles (Fête des), col. 1961. Dans sa description de la fête juive, Plutarque, Sympos. , IV, VI, 2, parle aussi de Oupuoçôpta, « port de thyrses », parce qu’il ne connaissait pas les termes hébreux

correspondants..
H. Lesêtre.
    1. TIARE##

TIARE (hébreu : iebûlîm, misnéféf, pe'êr, sânîf ; Septante : xiêapit, pfrpa ; Vulgate : liara, mitra, cidaris, diadema, corona, vitta), espèce de coiffure. — 1° La tiare est la coiffure d’Aaron. Elle est faite de lin. Exod., xxviii, 4, 39 ; xxix, 6 ; xxxix, 28. Elle avait la forme d’une espèce de turban. Voir t. III, fig. 64, col. 296. Elle est appelée misnéféf ou pe'êr. Zacharie, m, 5, lui donne le nom de sânîf. — 2° Le prince d’Israël porte aussi le misnéfép. Ezsch., xxi, 31. Le pe'êr est encore le (urban des Israélites, Ezech., xxiv,

492, — Thyrses romains. Celui de gauche porte un bouquet de feuilles de vigne ; celui du milieu, une pomme de pin ; celui de droite, des feuille » de lierre.

17, 23, celui du fiancé, Is., lxi, 10, et la coiffure des femmes élégantes. Is., iii, 20. Ces dernières mettent aussi le sdnîf, Is., iii, 23, et les nomades le portaient au désert. Job, xxix, 14. Les turbans que coiffaient les Chaldéens s’appelaient des tebûlîm. Ezech., xxiii, 15. Les versions donnent le nom de « tiare » au pelas, qui se portait à Babjlone et était une pièce de vêtement plutôt qu’une coiffure. Dan., iii, 21. Les mêmes noms servent ainsi à désigner des coiffures analogues de forme, mais sans doute différentes par la richesse et les ornements. Voir Mitre, t. iv, col. 1135.

H. Lesêtre.

Tl BÈRE (grec : Tt61pioc), le second empereur romain. Il régna seul de l’an 14 à l’an 37 de notre ère, mais il avait été associé par Auguste au gouvernement

dans l'Évangile, Luc, iii, 1, mais il est désigné plusieurs fois indirectement. C’est sous son gouvernement que Notre-Seigneur accomplit son ministère public et que les Apôtres commencèrent à prêcher le christianisme en Palestine. Jean-Baptiste inaugura son ministère « sous Tibère César, la quinzième année de son gouvernement. » Luc, iii, 1. De savants chronologistes pensent que, dans cette date de la quinzième année de son règne, lévangéliste compte les années pendant lesquelles Tibère fut associé à Auguste dans l’administration de l’empire. Tibère n’exerça seul le pouvoir que l’an 14, mais il avait été appelé à partager l’autorité avec le mari de sa mère quelque temps auparavant, à

493. — Monnaie de Tibère.

Tibère lauré, à droite, ti. cæsar divi aug. ꝟ. avgvstvs.

r^. Livie assise tenant une palme, maxim. pontif.

de l’empire, quelque temps auparavant, à une époque dont la date précise est incertaine. Sa mère était Livie, qui l’avait eu de son premier mari, Tibère Claudius Néron. Elle épousa plus tard l’empereur Auguste et c’est grâce à ce' mariage que son fils devint empereur. Il était né à Rome, lel6 novembre de l’an 45 avant l'ère chrétienne et il avait 55 ans quand il devint empereur (fig. 493). Il s'était déjà distingué dans plusieurs guerres, Horace avait célébré ses exploits et ceux de son frère Drusus, Carrn., IV, 4, 14, et il s'était acquis la réputation d’un orateur de mérite et d’un administrateur de talent. Toutes ses qualités s'éclipsèrent dès qu’il eut atteint le pouvoir suprême ; il se montra dissolu, cruel, despotique, dissimulé, et abandonna le gouvernement aux mains des plus indignes favoris. Il mourut à 78 ans, après un règne de vingt-trois. Tibère (fig. 494) n’est nommé qu’une fois par son nom

494. — Buste de l’empereur Tibère. Musée du Louvre.

une époque qui n’est pas certaine, en l’an 11, disent les uns, en l’an 13, disent les autres. Sur ses monnaies, son règne date de Tan 765 de Rome, an 12 de notre ère. Il est le César auquel font allusion les passages de saint Matthieu, XX, 17, 21 ; de saint Marc, xii, 14, 16, 17 ; de saint Luc, xx, 22, 24, 25 ; xxiii, 2 ; de saint Jean, xix, 12, 15. II était encore à la tête de l’empire, lorsque eut lieu la conversion de saint Paul et le commencement de sa prédication.' C’est lui qui avait nommé Ponce-Pilate procurateur de la Judée. Son ami Hérode Antipas bâtit en son honneur Sa ville à laquelle il donna Je nom de Tibériade.

1. TIBÉRIADE (Nouveau Testament : Ti’geptiç), ville de Palestine (fig. 495), sur les bords du lac auquel elle a donné son nom.

1° Elle fut fondée par Hérode Antipas, qui lui donna ce nom en l’honneur de l’empereur Tibère, entre Tan 20 et l’an 30 de notre ère, à peu de distance, un mille environ, au nord des bains chauds d’Emmaiïs, le Hammath de Josué, xix, 35. Il fallut déplacer une nécropole, probablement celle de Hammath, pour avoir largement la place nécessaire à la construction de la 405. — Vue de TiberUde.

2209

TIBÉRIADE — TIBÉRIADE (LAC DE)

2210

nouvelle ville, et pour ne pas exposer les habitants aux impuretés légales que pouvait leur faire contracter la présence de ces tombeaux. Cette circonstance éloigna d’abord les Juifs de la cité naissante. « Elle fut peuplée d’abord, dit Josèphe, Ant, jud., XVIII, ii, 3, au moyen de toutes sortes d’étrangers et aussi d’un grand nombre de Galiléens. Beaucoup d’habitants de la contrée appartenant à Hérode y furent également transplantés de force. Parmi ceux-ci, quelques-uns étaient revêtus de dignités. Mais il admit pareillement avec eux un ramassis de pauvres et même de gens dont la condition libre n’était pas suffisamment établie. Il leur accorda des immunités et les combla de bienfaits. Il leur fit construire des maisons à ses frais et leur donna des terres, à la condition de ne jamais quitter Tibériade, car il savait qu’il répugnait aux Juifs d’habiter cette ville, parce qu’on avait dû enlever beaucoup de tombeaux sur l’emplacement où on la bâtit, ce qui, d’après nos lois, rendait ceux qui devaient l’occuper impurs pendant sept jours. » Cette répugnance ne persévéra pas et, dans la suite, elle devint pour les Juifs une ville privilégiée. Hérode Antipas l’embellit avec soin et y résida lui-même dans un palais, qu’il orna de représentations animées, contrairement à la loi mosaïque, et qui fut livré plus tard aux flammes. Josèphe, Vita, 12. —Au moment de la révolte contre la domination romaine, Tibériade ouvrit ses portes à Vespasien. Les Juifs, après la ruine de Jérusalem, obtinrent l’autorisation d’y résider et reçurent même certains privilèges, ayant seuls le droit d’habiter la ville, à l’exclusion des païens, des Samaritains et des chrétiens. Le grand sanhédrin, après avoir séjourné quelque temps à Jamnia, puis à Sepphoris, s’établit à Tibériade, et il s’y fonda une école talmudique célèbre, qui fut illustrée par plusieurs rabbins de grande réputation. C’est là que fut rédigée la Mischna du Talmud de Jérusalem et élaborée la Massore. Le rabbin qui aida saint Jérôme à traduire les Paralipomènes était de Tibériade. Pair, lat., Vita, ix, 3, t. xxii, col. 30.

2° Notre-Seigueur n’entra jamais à Tibériade ; du moins les Évangiles ne le disent pas. Une grande partie de sa vie publique se passa à l’extrémité septentrionale du lac et il le traversa souvent, mais c’est à peine si la ville est nommée trois fois dans saint Jean, vi, 1, 23 ; xxi, 1, deux fois, non à cause d’elle-même, mais comme donnant son nom au lac, et une fois, xvi, 23, ponr marquer l’endroit d’où sont parties les barques qui arrivent près du lieu où s’est opéré le miracle de la multiplication des pains. Les autres Évangélistes désignent le lac sous le nom de mer de Génésareth ou mer de Galilée. Voir Tibériade (Lac de) 2. On s’est demandé pourquoi le Sauveur avait ainsi évité la ville de Tibériade. C’est sans doute parce qu’elle était considérée comme impure par les Juifs fidèles et aussi parce qu’elle était le séjour ordinaire d’Hérode, le meurtrier de saint Jean-Baptiste. Saint Luc, xxiii, 8, nous apprend que ce roi, malgré son désir, n’avait jamais vu Jésus, avant que Pilate le lui eût envoyé.

2. TIBÉRIADE (LAC OK) (grec : r, MAtmn ttjc T16tptâîoç), lac de Palestine. Saint Jean, xxi, 1 ; cf. vi, 1, est le seul écrivain sacré qui ait désigné ce lac, ou, comme il l’appelle, cette « mer », sous le nom de Tibériade, sans doute parce que, écrivant loin de la . Palestine, ce nom était plus familier que le nom indigène à ceux qui n’habitaient pas la Terre Sainte, à l’époqne où il écrivait. Saint Luc l’appelle « lac », luv rewïjaapift, v, 1, 2 ; cf. vni, 23, tandis que tous les autres auteurs sacrés le désignent par l’appellation sémitique de « mer ». Voir Lac, t. iv, col. 7. Il est aussi le seul qui le nomme « de Génésareth ». L’auteur de I Mach., xi, 67, emploie la dénomination analogue xo û$up rtvvrpâç, aqua Genesar. Saint Matthieu, iv, 18 ; saint Marc, vii, 31 ; cf. Joa., vi, i, l’appellent « mer

DtCT. OR LA BIBI E

de Galilée ». Dans les Nombres, xxxiv, 11, et Josu é, xiii, 27, c’est « la mer de Cènéreth » ou « de Cénéroth « . Jos., xii, 3. Voir Cènéreth 2, t. ii, col. 420.

1° Description. — Le lac de Tibdriade (voir carte, t. iii, col. 88) forme un ovale long de 21 kilomètres du nord au sud et large de 9 kilomètres et demi. L’extrémité nord est un peu plus arrondie que celle du sud. Son niveau est de 212 mètres au-dessous de la Méditerranée. En hiver et au printemps, les pluies peuvent le faire élever de plus de deux mètres. Le bassin du lac paraît avoir été formé par la rupture nord-sud qui s’est produite dans les couches crétacées formant les montagnes environnantes, au moment où se sont soulevés les filons de basalte de la rive occidentale et les masses volcaniques du Ojolan, vers la fin de l’époque tertiaire. Vu des hauteurs qui le dominent en venant de Nazareth, le lac apparaît scintillant au soleil comme une immense coupe d’argent liquide ; vue de près, l’eau du lac est ordinairement d’un beau bleu. Pendant les orages, qui n’y sont pas très rares et sont fort dangereux, l’eau prend une couleur violet foncé. Le soir elle reflète le bleu du ciel et a l’éclat du saphir. La profondeur du lac est en moyenne de 50 à 70 mètres ; à l’entrée du lac, on voit les indigènes passer à pied d’une rive à l’autre, à la barre qui s’est produite à la rencontre des eaux du fleuve avec celles du lac. Vers le milieu du grand bassin nord, la profondeur est de plus de 250 mètres. On ne trouve dans le fond ni algues ni conferves, mais un grand nombre de diatomées. Les poissons y abondent et servent à l’alimentation des gens de Tibériade, et même de Nazareth, où on les transporte, surtout au moment des pèlerinages. On les prend surtout à l’épervier, à l’embouchure du Jourdain, au nord du lac, et à Ain Tabagha, à l’endroit où le Ain se jette dans le lac, d’après le témoignage des indigènes qui jettent là leurs filets pour faire jouir les pèlerins du spectacle. Le lac est si peuplé qu’on y prend fréquemment des poissons par milliers. Quelques-uns sont très remarquables, comme le Clarias macracanthus qui se traîne comme un serpent, le Chromi » Simonis, ou poisson de saint Pierre. Voir Poisson, fig. 113, 114, col. 486, 497. « c L’eau du lac de Tibériade est désagréable À boire a cause de son odeur marécageuse ; elle est fade, quoiqu’elle laisse cependant dans la gorge un arrière-goût légèrement saumâtre. » L. Lortet, La Syrie, p. 512.

2 « Le lac de Tibériade dan » l’Écriture, — Il occupe peu de place dans l’Ancien Testament, où il n’est guère nommé qu’en passant, pour marquer une limite, Num., xxxiv, 11 ; Jos., xii, 3 ; xiii, 27, et l’endroit où campa une fois Jonathas Machabée. I Mach., xi, 67. Mais l’Évangile lui a donné un reiletde gloire incomparable : c’est le lac de Noire-Seigneur, le lac qu’il a sillonné bien des fois avec ses Apôtres, où il semble qu’on le voit encore, comme un reste de lui-même, qu’il nous a laissé, relique précieuse, après son ascension. C’est là qu’il a travaillé à la formation et a l’instruction de ses disciples, c’est là qu’il a opéré des miracles et calmé d’un mot ses dangereux orages qui soufflent avec violence des gorges occidentales d’Arbèle et soulèvent les flots avec fureur. Matlh., viii, 24 ; xiv, 24 ; Marc, iv, 37 ; vi, 48 ; Luc, viii, 23 ; Jm., vi, 18. Wilson, Recovery of Jérusalem, in-8 4, Londres, 1871, p. 340, décrit ainsi une de ces tempêtes : « Des tempêtes soudaines, comme celles mentionnées dans le Nouveau Testament, ne sont pas rares. J’eus une excellente occasion d’observer l’une d’entre elles, des ruines de Gamala, sur les collines orientales. La matinée était délicieuse ; une brise agréable soufflait de l’est ; pas le moindre nuage dans le ciel ne faisait prévoir ce qui allait arriver. Soudain, vers midi, éclata un coup de tonnerre lointain, et un petit nuage, « pas plus grand « qu’une main d’homme, » se leva sur les hauteurs de Lubiéh à l’occident. En très peu de temps, le nuage

V. - 70

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    1. TIBÉRIADE##

TIBÉRIADE (LAC DE) — TIGRE

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grandit et roula en grandes masses noires, descendant des collines vers le lac, et plongeant dans une obscurité complète le Thabor et Hattin. À ce moment, la brise cessa ; il y eut quelques minutes de calme complet, pendant lequelle soleil brilla, éclatant, et la surface du lac fut égale et unie comme un miroir ; Tibériade, Medjdel et d’autres constructions se dessinaient en plein relief en avant du fond ténébreux qui s’étendait derrière, mais elles disparurent bientôt au regard quand les grondements du tonnerre les dépassèrent et que la tempête, s’avançant rapidement sur le lac, transforma ses eaux tranquilles en une nappe blanche d’écume. Elle atteignit promptement les ruines, me chassant avec mon compagnon et nous obligeant de nous réfugier dans une citerne, où nous fûmes emprisonnés pendant près d’une heure, entendant les grondements roulants du tonnerre et des torrents de pluie. La moitié du lac était tranquille et en repos, pendant que l’autre était toute bouleversée de façon sauvage et offrait un spectacle saisissant. Malheur à la barque légère qui aurait été surprise au milieu du lac par cette tourmente. Nous ne pouvions nous empêcher dépenser à cet événement mémorable où la tempête est décrite d’une façon si vivante, comme « tombant » sur le lac. » Matth. viii, 24-26.

Le lac de Tibériade, par sa situation et la dépression de terrain où il se trouve, était isolé des grandes voies de communication de l’antiquité. Les Égyptiens quand ils allaient en Syrie ou dans l’Asie antérieure, les Assyro-Chaldéens quand ils descendaient sur les bords du Nil, longeaient la Méditerranée. On ne voit que le Mohar égyptien qui, au xive siècle avant notre ère, ait visité le Jourdain. F. Ghabas, Voyage d’un Égyptien en Syrie, en Palestine, in-f », Chalon-sur-Saône, 1860, p. 206. Ce n’est que vers les commencements de l’ère chrétienne qu’il a vu des Romains et des étrangers visiter ses bords, où florissaient alors des villes dont le nom revient souvent dans l’Évangile, Capharnaùm, Bethsaïde, Corozaïn, Magdala. Voir ces noms.

F. Vigouroux.

    1. TICHON##

TICHON (MAISON DE) (hébreu : ftâsêr Hat-Tîkôn ; Septante : au M ; toû Sauviv), localité inconnue qui se trouvait sur les frontières duHauran(Auran).Ézech., xlvii, 16. Domum autem sive atrium Thicon, Symmachus interpretatur atrium médium, quod pergit ad terminas Auran, dit saint Jérôme, In Ezech., xlvii, t. xxv, col. 477.

    1. TICHONIUS ou TYCHONIUS##

TICHONIUS ou TYCHONIUS, écrivain africain, de la secte des donatistes, entre 380 et 420. Il parait n’avoir été que simple laïque, mais il avait le goût et la connaissance des choses théologiques. Saint Augustin parle souvent de lui dans ses écrits et, dans sa Doctrina christiania, iii, 30-37, t. xxxiv, col. 81-90, il expose et commente les sept règles célèbres de cet auteur pour l’intelligence des Saintes Écritures. Le Livre des Règles se trouve dans la Bibliotheca Patrum, Cologne, 1522, t. xv ; Lyon, 1677, t. vi ; Pitra, Spicilegiurn Solesmense, t. iii, p. 397. Tichonius avait aussi commenté l’Apocalypse, dans un sens spirituel. Le commentaire qui avait été publié comme étant celui de Tichonius n’est pas le sien, mais emprunté à divers auteurs, dont Tichonius. Il est reproduit dans Migne, t. xxxv, à la fin du t. m des œuvres de saint Augustin, col. 2415-2452.

1. TIGRE (hébreu : ïiiddéqéï ; Septante : Tiypi ; ), fleuve d’Assyrie et de Babylonie. Strabon, XI, xiv, 8, et Pline, H. N., vi, 27 (qui l’appelle Diglit), disent que son nom lui vient de la rapidité de son cours, qui égale celui d’une flèche, Tigra signifiant flèche en médo-perse.

I. « Le Tigre, le moins long des deux fleuves qui vont s’unir au golfe Persique par les bouches du Chat-el-Arab, naît dans le voisinage de l’Euphrate (voir la carte,

t. ii, fig. 623, col. 2047). Près des mines de Sivan, les sources principales, dites Outchgôl (les Trois Lacs), jaillissent à un millier de mètres à peine de la cluse profonde où coule le Mourad, et le torrent qu’elles forment se dirige au sud-ouest comme s’il allait se jeter dans l’Euphrate, à sa sortie des montagnes. Mais un autre cours d’eau, qui prend aussi son origine dans une haute vallée proche de l’Euphrate, vient à sa rencontre et l’entraîne dans la direction du sud-ouest et du sud : c’est le Didjlé, que l’on considère comme la branche maîtresse du Tigre, d’où son nom de Chat ou « Fleuve » par excellence. Il coule d’abord dans la région péninsulaire qui limite l’Euphrate en décrivant une longue série de méandres, au nord, puis à l’ouest et au sud des hautes plaines de Eharpout ; né à quelques kilomètres seulement d’un angle brusque de l’Euphrate, le Didjlé commence par chercher sa voie pour sortir du cercle immense que le fleuve rival trace autour de lui. Un petit lac d’eau saumâtre, le Gôldjuk, Gôldjik ou Gôlendjik, occupe, à une petite distance au nord et à 200 mètres plus haut, une cavité du plateau dont le rebord circulaire envoie des ruisseaux au Tigre aussi bien qu’à l’Euphrate. Récemment, à la suite d’années pluvieuses, le lac, élevant peu à peu son niveau comme la mer de Van, a fini par atteindre une brèche de rochers à son extrémité sud-orientale et par épancher son trop-plein dans le Tigre : on a même entrepris le creusement d’une tranchée pour régulariser l’écoulement du lac et en faire une source constante du fleuve. Ainsi se rapprochent les deux bassins fluviaux, au point de s’entremêler en apparence, comme pour donner raison aux descriptions des anciens auteurs. D’après une légende locale, la source du Tigre aurait été visitée par Alexandre ; on la désigne comme le « Fleuve aux deux cornes »… Arrivé dans la plaine de Diarbékir, le « Fleuve » grossit rapidement par les affluents que lui envoient les montagnes du nord. Le Batman-sou, l’un des plus abondants, est un autre Tigre par la violence de ses eaux, et son bassin, comme celui du Didjlé, commence dans le voisinage même du haut Euphrate, sur le revers méridional des montagnes de Mouch. Puis viennent l’Arzen-sou et un autre Chat, le Botan-sou, dans lequel se jette la rivière de Bitlis, née dans le massif de faible élévation qui limite au sud-ouest le réservoir du lac de Van ; ce beau torrent de Bitlis est probablement le cours d’eau qui a donné lieu aux fables, répétées par Strabon et Pline, sur le passage du Tigre à travers un lac qui ne renfermerait qu’une seule espèce de poisson ; on voyait dans les eaux du Bitlis l’écoulement souterrain du lac de Van, mais le courant du Bitlis prend son origine à un niveau plus élevé que le lac et son eau n’est pas saline et chargée de soude comme celle du réservoir fermé : c’est par la composition de l’eau que l’on pourra reconnaître s’il existe vraiment, parmi les affluents du haut Tigre, un ruisseau issu du lac d’Arménie par des galeries souterraines. « En aval de la jonction des deux Chat, Didjlé ou Tigre occidental, Botan Ou Tigre oriental, le fleuve, qui déjà roule la moitié de la masse liquide que son courant inférieur porte à la mer, tourne au sud-est pour s’engager dans une série de cluses ouvertes à travers d’âpres montagnes. Sur un espace d’environ 75 kilomètres, les sentiers abandonnent les rives et gravissent, soit à l’ouest, soit à l’est, les escarpements qui resserrent le courant ; çà et là, du haut des promontoires, on aperçoit les eaux glissant à la base de parois calcaires ou de colonnades basaltiques. En aval de cette percée, où n’osèrent pénétrer les Dix mille de Xénophon, s’ouvre une large plaine, et le fleuve serpente à son gré dans les terres alluviales ; mais bientôt après, le courant traverse d’autres remparts, et là encore ses bords sont impraticables. Les falaises et les éboulis de calcaires,

d’argiles, de conglomérats sont baignés par le flot ; les sentiers, évitant le fleuve par de grands détours, s’éloignent même de la partie inférieure des affluents, qui coulent tous à 15 mètres de profondeur entre deux murs d’argile.

Dans la série de défilés qui commence au confluent du Botan-sou et qui se termine en amont de Mossoul, le fleuve garde la direction normale qu’il suit jusqu’à l’Euphrate, parallèlement aux chaînes bordières du plateau d’Iran. Dans cette partie de son cours, comme dans la région des sources, le Tigre ne reçoit de grands affluents que sur la rive gauche ; le versant de la rive droite n’est qu’une mince lisière de terrain et c’est du côté de l’Euphrate que coulent presque toutes les eaux du faîte de partage ; les nuages pluvieux qui viennent de la Méditerranée et de la mer des Indes se déchirent aux versants méridionaux des hauteurs du Kourdistan, et tandis que les pluies tombées sur les avant-monts, immédiatement au nord du désert, s’écoulent vers l’Euphrate, l’humidité que les vents du ciel apportent sur les hautes montagnes de Van et de la Perse occidentale revient en torrents vers le Tigre. Parmi ces torrents, il en est qui ont un bassin considérable : tel est le Grand Zab ou Zarb (Zarb et Kebir), dont les rivières supérieures égouttent la région comprise entre les deux lacs de Van et d’Ourmiah. Le Petit Zab (Zarb Saghir) roule aussi beaucoup d’eau, dont une partie lui vient du territoire persan. De même, la Diyalah, qui rejoint le Tigre en aval de Bagdad, reçoit de la Perse un grand nombre de ruisseaux, nés dans les dépressions parallèles des chaînes bordières. Les affluents, comme le Tigre lui-même, ont à traverser des remparts de montagnes parallèles avant d’échapper à leurs anciennes cavités lacustres pour entrer dans la plaine de la Mésopotamie. Le Grand Zab, issu des hautes vallées du pays kourde, vient se heurter, à l’est de Mossoul, contre des massifs de conglomérat, qu’il perce d’un large lit, ayant en certains endroits un kilomètre de rive à rive. Le petit Zab gagne aussi le Tigre en passant successivement par des cluses de montagnes. Au sud-est d’une « Porte duTigre », une entaille, dont les parois verticales ont 50 à 70 mètres de hauteur, ouvre un passage aux eaux de la Diyalah à travers les assises de grès rouge du Hamrin ; pendant la saison des pluies, les eaux s’accumulent en lac temporaire dans la plaine de Kizilrobat, située en amont de la cluse. Un autre affluent du Tigre, l’Adhim, né sur les pentes d’un mont sacré, le PirOmar Goudroun (2500 mètres), forme un marais permanent au-dessus de la « Porte de Fer » ou Demir-Kapou, qui le sépare des plaines alluviales de la Mésopotamie. En aval de toutes les rivières affluentes, le Tigre déborde en plusieurs parties de son cours et projette à l’orient un rameau marécageux, le Hadd, qui va s’unir à la Kerkha, la rivière du Louristan. En hiver, toute la plaine qui s’étend du Tigre inférieur aux avant-monts persans est une mer intérieure, appelée souvent par ironie Oumm el-Bak ou la « mère des Moustiques » ; en été, il reste un réseau de sinueuses coulées, que des bateaux parcourent facilement, du Tigre à la Kerkha, sur plus de 150 kilomètres de distance. Layard, Ninereh and Babylon, dans le Journal of the Geographical Society, 1846. « Au confluent avec l’Euphrate, à Korna, le Tigre est, contrairement à ce que disait Strabon, le fleuve le plus abondant (débit moyen du Tigre à Bagdad, d’après Rennie : 4656 mètres cubes par seconde ; de l’Euphrate, à Hit : 2065). La rivière occidentale se perd dans son flot sans paraître l’augmenter : de là, peut-être le nom de « Tigre sans eau », Didjlat-el-Aoura, que l’on donnait jadis aux fleuves unis, comme pour indiquer la disparition apparente de l’Euphrate. Le développement total du Tigre, entre la source du « Fleuve aux deux cornes » « t son entrée dans le Chat-el-Arab, est d’environ

2 000 kilomètres, deux fois moins que l’Euphrate, et l’étendue de son bassin est aussi très inférieure ; mais, au lieu de serpenter dans le désert comme l’Euphrate à la sortie du Taurus, il ne cesse de longer la base des montagnes qui lui envoient leurs eaux de neige et de pluie. Naissant à plusieurs centaines de mètres au-dessus de la vallée de l’Euphrate et suivant dans la direction du golfe Persique une vallée moins sinueuse, le Tigre a sa pente beaucoup plus inclinée ; il fuit rapidement entre ses rives, d’où son vieux nom persan de Tigre ou de « Flèche » remplaçant l’appellation assyrienne de Hiddekel (Idiklat) ou « Fleuve aux bords élevés » (Frd. Delitzsch, Wo lag dasParadiesf), qui se retrouve dans l’arménien Dikla et dans l’arabe Didjlé. Gourant plus vite, le Tigre perd moins d’eau par l’évaporation et se répand dans les campagnes riveraines en moins d’étangs et de marécages. Des bateaux à vapeur d’un faible tirant le remontent jusqu’à Bagdad, et pourraient même atteindre Tekrit, à près de 1 000 kilomètres de la mer ; en amont, jusqu’à Mossoul et Diarbekir, le seul véhicule flottant est le kellek (voir t. IV, fig. 396, col. 1459), ou plancher soutenu par des outres. » Elisée Reclus, Nouvelle Géographie universelle, t. ix, Asie antérieure, 1884, p. 387-391.

II. Le Tigre dans l’Écriture. — 1° Le Tigre est nommé pour la première fois au commencement même de la Genèse, ii, 14, comme le troisième fleuve du Paradis terrestre, « qui coule à l’est de l’Assyrie. » C’est dans son voisinage que l’Euphrate prend aussi sa source, ainsi que plusieurs des affluents des deux grands fleuves. Voir fig. 272, 1. 1, col. 1003. Le Phison et le Géhon, les deux autres fleuves de l’Éden, nommés avant le Tigre et l’Euphrate, sont-ils deux des affluents qu’on voit là de nos jours ? On ne saurait le dire avec certitude.il a pu se produire sur la terre, depuis la’création de l’homme, des révolutions qui ont modifié et changé l’aspect des lieux où fut créé le premier homme, mais on comprend sans peine que l’opinion qui place en Arménie le paradis terrestre, à la source des grands fleuves, ait eu et compte toujours des partisans, parce que c’est celle qui s’accorde le plus naturellement avec le texte sacré (voir Paradis terrestre, iii, t. iv, col. 2133), en admettant qu’il n’y a pas eu un bouleversement complet du premier berceau de l’humanité.

2° Le Tigre n’est plus nommé dans l’Écriture jusqu’à l’époque de la captivité. Mais le prophète Nahum, en annonçant la chute de la grande ville, fait allusion à l’inondation du fleuve qui, après avoir contribué à sa grandeur, devait en ouvrir les portes à ses ennemis. « Les portes des fleuves (le Tigre et le Khasr, son affluent) sont ouvertes ; son palais s’écroule. » Nahum, iii, 6. Ces « portes » sont des digues, d’après les uns, mais plus vraisemblablement, d’après les autres, les portes de la ville, qui étaient fortifiées et qui furent renversées par l’inondation aux endroits par où entraient et sortaient le Tigre et le Khasr. Diodore de Sicile, ii, 27, qui ne connaissait pas la prophétie de Nahum, nous en a raconté à son insu l’accomplissement. Depuis deux ans, écrit-il, l’armée des Médo-Babyloniens réunis assiégeait Ninive, sans pouvoir réussir à faire brèche dans les remparts extrêmement solides et épais. De violents orages suppléèrent à leur impuissance : ils produisirent un débordement du Tigre qui inonda une partie de la ville et en renversa les murailles sur une longueur de 20 stades (5700 mètres). Les ennemis y pénétrèrent par là sans difficulté. Le roi de Ninive, désespéré, s’enferma dans son palais, y mit le feu et périt dans l’incendie. Le fleuve qui avait fait la gloire et la force delà capitale de l’Assyrie venait de consommer sa ruine.

3° Quelques années avant cette catastrophe, Tobie avait été emmené captif à Ninive. Quand il envoya son fils auprès de Gabélus pour recouvrer l’argent qu’il lui avait prêté, c’est sur les bords du Tigre que le jeune voyageur prit le poisson qui devait lui servir plus tard à rendre la vue à son père aveugle. Tob., vi, 1-9. On ne peut déterminer avec certitude de quelle espèce était ce poisson. Le fleuve abonde en poissons de diverses espèces et quelques-uns sont de dimensions considérables. Strabon, XI, xiv, 8. Voir Tobie.

4° Le Tigre est mentionné dans Judith, I, 6, mais simplement comme une des limites géographiques de la plaine de Ragaû.

5° L’Ecclésiastique, rappelant les fleuves du paradis terrestre, dit, xxiv, 35, que Dieu répand sa sagesse comme le Tigre répand ses eaux aux jours des nouveaux fruits, c’est-à-dire au moment de son inondation annuelle. Au mois de mars, à l’époque de la fonte des neiges, il croit rapidement, roulant ses eaux rapides et troubles, et grossit jusqu’à la première ou seconde semaine de mai, où il atteint sa plus grande hauteur. Vers le milieu de mai, il commence à décroître. Au milieu.de l’été, il reprend son niveau ordinaire. Une nouvelle crue a lieu en octobre et en novembre, à la suite des pluies d’automne, mais elle est insignifiante relativement à la crue du printemps.

6° Le Tigre apparaît pour la dernière fois dans l’Ecriture dans les visions de Daniel. C’est sur ses bords qu’il eut quelques-unes des plus importantes. Dan., x-xii. Il l’appelle han-nâhâr hag-gâdôl, « le grand fleuve », x, 4. Voir Daniel, t. ii, col. 1276.

2. TIGRE (Vulgate : tigris), carnassier de la famille des félidés, à peu près de la même taille que le lion, mais plus fort et plus féroce. Il vit surtout dans l’Asie méridionale et les îles de la Sonde. Il n’en est pas question dans la Bible. C’est à tort que la Vulgate a traduit par « tigre » le mot layîs, qui est un des noms du lion. Job, IV, 11. Voir Lion, t. iv, col. 267. Les Septante s’éloignent encore plus du vrai sens en traduisant parjj.upu.-r, xo).éo)v, « fourmilion ».

H. Lesêtre.

TIMÉE (grec : Tijjaioç), père de l’aveugle Bartimée, à qui Notre-Seigneur rendit la vue à Jéricho. Marc, x, 46. Voir Bartimée, t. i, col. 1474.


TIMIDITÉ (Septante : oXt-rouy.ia ; Vulgate : pusillanimitas), manque de courage en face du danger ou du devoir. Le timide est appelé hârêd, yârê’, nimhar, rak lêbab, « chancelant de cœur », SetXô ; , oXiyôil’u^oç, ipoêoûfisvo ; , àTîsiOûv, timidus, pavidus, trepidus, formidolosus, pusillanimis.

En face du danger.

La Loi prescrivait de signifier aux timides et aux peureux de se retirer de l’armée avant la bataille, de peur que leur exemple n’entraînât les autres. Deut., XX, 3, 8. — Israël infidèle, dispersé parmi les nations, y gardera un cœur tremblant. Deut., xxviii, 65. — Avant de livrer bataille, Gédéon dut écarter de son armée 22000 hommes qui avaient peur et tremblaient. Jud., vii, 3. — Judas Mæhabée renvoya de même chez eux, « selon la Loi », tous ceux qui avaient peur de combattre. I Mach., iii, 56. — Ézéchiel, xxi, 12, décrit la peur qu’excite en tous l’approche de l’épée de Nabuchodonosor : les cœurs se fondent, les mains faiblissent, les esprits se troublent, les genoux fléchissent. — Les écrivains sacrés donnent plusieurs fois le nom de « femmes » à ceux qui manquent d’énergie dans le danger. Is., iii, 12 ; XIX, 16 ; Jer., li, 30 ; Nah., iii, 13. Ils exhortent à n’avoir pas peur devant l’ennemi. Is., vii, 4 ; Jer., li, 46. Il ne faut pas s’adresser à un timide pour le consulter sur la guerre. Eccli., xxxvii, 12. — Quand les méchants comparaîtront au tribunal du souverain Juge, la timidité succédera à leur arrogance. Sap., iv, 20. — Notre-Seigneur reproche aux apôtres leur timidité et leur manque de foi, pendant la tempête sur le lac. Matth., xiii, 26 ; Marc, iv, 40. — Le vent impétueux, ritah so’âh, devient dans les versions àXiyotyvyJz, pusillanimitas spiritus. Ps. lv (liv), 19.

En face du devoir.

Roboam se montra timide, quand il eût fallu faire acle d’énergie pour rallier à lui tout son peuple. II Par., xiii, 7. Le cœur de Josias fut intimidé par les menaces que contenait le Deutéronome. IV Reg., xxii, 19. Il y a une timidité recommandable et qui se résout en crainte de mal faire. Prov., xviii, 14. Mais il ne faut pas être timide dans le service de Dieu, Is., xxxv, 4, ni dans la prière. Eccli., vii, 9. On doit encourager et consoler les timides. Is., xxxv, 4 ;

I Thés., v, 14. Quant à ceux qui sont timides et lâches dans l’accomplissement du devoir, ils auront un jour le même sort que les pires pécheurs. Apoc, xxi, 8.

H. Lesêtre.


TIMON (grec : Tl’h&iv), le cinquième des sept diacres choisis par les Apôtres pour s’occuper du soin des veuves. Act., vi, 5. Son nom est grec et il était probablement un Juif helléniste, comme les autres diacres qui devaient veiller à ce que les veuves des convertis non palestiniens fussent traitées convenablement. Le texte sacré ne nous apprend rien que son nom. D’après la Synopsis de vita et morte Prophetarum, Apostolorum et DiscipulorumDoniini, du pseudo-Dorothée, Patr. gr., t. xcii, col. 1001, c’était un des soixante-douze disciples, et il devint évêque de Bostra, où il subit le martyre du feu. Voir Acta sanctorum, 19 avril, aprilis t. ii, p. 619.


TIMOTHÉE (grec : Ttfj.68eo ; ), nom de deux étrangers qui combattirent contre les Machabées et d’un disciple de saint Paul.

1. TIMOTHÉE, chef ammonite, qui fut battu à plusieurs reprises par Judas Mæhabée. Quelques commentateurs supposent, à cause de son nom, qu’il était grec d’origine. Judas Mæhabée, ayant pénétré en Ammonitide, y livra plusieurs combats dans lesquels il battit Timothée, le chef des Ammonites. 1 Mach., v, 6. Mais ce dernier porta, quelque temps après, les armes en Galaad, où il fit beaucoup de mal. À la demande des gens du pays, Judas et son frère Simon marchèrent à leur secours. Timothée s’enfuit à leur approche ; les Juifs parvinrent à atteindre son armée et à lui infliger une sanglante défaite. I Mach., v, 11, 20, 24-34, 37-44. Timothée lui-même tomba entre les mains de Dosithée et de Sosipater, qui consentirent à lui laisser la vie sauve. II Mach., xii, 2-25.

2. TIMOTHÉE, général syrien, qui est le même que le précédent d’après les uns, différent d’après les autres. Il faisait partie de l’armée de Nicanor contre Judas Mæhabée. II Mach., viii, 30. On ne peut conclure de la similitude des noms à l’identité des personnes, car les Timothée étaient nombreux parmi les Grecs. Si les passages II Mach., viii, 30 ; IX, 3, ne donnent aucun détail particulier, et ne suffisent pas pour trancher la question de non-identité, quoiqu’il n’apparaisse pas comme général ammonite, il n’en est plus de même du récit, x, 24-37. Après avoir été battu une première fois avec Bacchide par Judas Mæhabée, viii, 30, défaite " qu’Ântiochus Épiphane avait apprise en Perse, x, 3, Timothée, postérieurement à la mort de ce roi, pour venger son échec, rentra en Judée à la tête d’une armée formidable. Judas, avec le secours d’en-haut, remporta contre son ennemi une éclatante victoire. Timothée s’enfuit à Gazara (Gazer). Les Juifs allèrent l’y assiéger, emportèrent la place et le mirent à mort quand ils l’eurent découvert dans une cachette.

II Mach., x, 24-37. Ce fut plus tard, après la mort de Timothée, le général syrien, que Judas Mæhabée battit définitivement Timothée 1, qui commandait aux Ammonites à l’est du Jourdain, et dont la vie futépar-

gnée. I Mach., v, 37-44 ; II Mach., xii, 2-25. Voir Patrizzi, De consensu utriusque libri Machabseorum, in-4°, Rome, 1856, p. 259.

3. TIMOTHÉE (Ttjj.69soç), le plus fidèle et le plus aimé des disciples de saint Paul, celui qu’il appelle son vrai fils, 1 Tim., i, 2, son très cher fils, II Tim., i, 2, son filsbien-aimé et fidèle dans le Seigneur, I Cor., iv, 17, le copartageant de son esprit, Phil., v, 20, de ses travaux dans le Seigneur, I Cor., XVI, 10, son collaborateur, Rom., xvi, 21, son frère et ministre de Dieu, I Thess., iii, 2, l’esclave de Jésus-Christ, Phil., i, 1, dévoué à la cause du Christ, ii, 21, l’imitateur parfait des vertus de son maître, initié à ses méthodes d’apostolat. II Tim., iii, 10 ; I Cor., xvi, 10. L’Apôtre l’avait converti à la foi, I Cor., IV, 14-17, avec sa mère et son aïeule, II Tim., i, 5, lors de la première mission en Lycaonie. Etait-il de Lystres ou de Derbé ? Les textes, Act., xvi, 1, 2 ; xx, 4, sans dirimer absolument la controverse, semblent indiquer plutôt Lystres. Peut-être Timothée a-t-il habité successivement ces deux villes. En tout cas, il était avantageusement connu à Lystres et à Icône, Act., xvi, 2, c’est-à-dire dans toute la région de la Lycaonie. Il était né d’un mariage mixte, son père était païen et sa mère juive ou du moins prosélyte des synagogues. Act., xvi, 3 ; II Tim., 1, 5. Aussi reçut-il, à sa naissance, un nom très usité chez les Grecs, I Mach., v, 6 ; IIMach., viii, 3, et, en même temps, facile à se faire accepter des Juifs. L’enfant grandit entre deux pieuses femmes, sa mère Eunice et son aïeule nommée Loïde ; elles relevèrent dans la crainte de Dieu et l’étude des Écritures. II Tim., iv, 15. Le père de Timothée devait être mort quand Paul et Rarnabé arrivèrent dans ces parages. Act., xvi, 3. Le jeune adolescent fut témoin des souffrances et des travaux des deux vaillants missionnaires. II Tim., iii, 10, 11 ; Act, xiv, 22. À son second voyage, l’Apôtre se l’attache comme disciple et compagnon d’apostolat à la place de Jean-Marc, ayant déjà substitué Silas à Barnabe. Act., xv, 40. D’après divers passages des Épitres pastorales, I Tim., i, 18 ; iv, 24 ; II Tim., i, 6, ce fut l’Esprit qui le désigna, dans quelque assemblée liturgique, à la fonction d’apôtre, ou peut-être d’évangéliste, Il Tim., iv, 5, par la voix des prophètes de ces Églises. Paul, Silas et les presbytres de l’endroit lui imposèrent les mains. Act., xiii, 3 ; II Tim-, i, 6.

Dès ce moment, il est presque toujours, sauf de rares intervalles, aux côtés de l’Apôtre, lui servant de secrétaire dans la rédaction de la plupart de ses Épitres. Afin de faciliter son ministère auprès des Juifs, Paul le circoncit de sa propre main. Act., xvi, 3. Sa carrière apostolique se confond, en général, avec celle de son maître. À peine s’il s’en sépare, de temps en temps, pour des mission spéciales, absences courtes et rapides auxquelles l’un et l’autre ne consentaient qu’avec peine. Timothée a de la sorte travaillé avec l’Apôtre à la fondation des principales Églises, Philippes, Thessalonique, Bérée, Corinthe, Ephèse. Lors de la seconde mission, il collabora, d’une façon particulière, à l’établissement et au développement des communautés de Macédoine. Il resta quelque temps à Thessalonique après l’expulsion violente de Paul et de Silas, Act., xvil, 10, les rejoignit à Bérée, xvii, 14, et retourna à Thessalonique pour y porter aux fidèles persécutés les encouragements et les instructions de son maître. I Thess., iii, 1, 2. De là il revint sans doute à Bérée, où était resté Silas, et, en sa compagnie, se dirigea vers Corinthe. Leur arrivée marque, depuis l’activité apostolique de Paul, un redoublement de zèle. Act., xvill, 5. Les trois ouvriers évangélistes séjournèrent au moins dix-huit mois dans la capitale de l’Achaïe.

Silas dut quitter saint Paul vers la fin du second voyage pour rester à Jérusalem, son r, glise d’origine.

Act., xv, 22. Timothée, au contraire, prit part au troisième voyage. Durant les trois ans du séjour de Paul à Éphèse, il ne s’éloigne de la métropole d’Asie que pour une mission en Macédoine avec Éraste et plusieurs frères, Act., xix, 22, puis, de là, à Corinthe, I Cor., xvi, 11 ; iv, 17, où il était chargé de rétablir l’ordre. Il semble qu’il ait échoué dans cette entreprise. D’un naturel doux et timide, I Cor., xvi, 10, il était peu fait pour la lutte. Il ne parvint pas, sans doute, à apaiser les désordres entre les divers parti » en présence, I Cor., i, 12, et il dut retournera Éphèse ou peut-être en Macédoine ; c’est là qu’il se trouve au moment où saint Paul écrit sa seconde Épître aux Corinthiens. II Cor., 1, 1. Il le suit dans sa troisième visite à Corinthe et figure dans l’Épitre aux Romains parmi ceux qui envoient leurs saluts fraternels à cette Église. Rom., xvi, 21. Quand l’Apôtre quitte Corinthe pour Jérusalem, il fait partie de la caravane qui s’achemine vers la Palestine. Act., xx, 4, 5.

A partir de ce moment, les Actes se taisent sur le reste de la carrière de l’illustre disciple. Mais les Épitres de la captivité suppléent, en partie, à ce brusque silence. On peut affirmer, sans doute possible, que Timothée suivit saint Paul à Jérusalem, puis à Césarée, s’embarqua avec lui vers l’Italie, l’assista dans sa prison. Son nom se lit dans l’adresse des Épitres aux Colossiens, i, 1, à Philémon, i, 1, aux Philippiens i, 1. Saint Paul dit même formellement, dans cette dernière Épître, qu’il espère envoyer « Timothée » vers eux, ii, 19-24. Durant la période qui suivit la première captivité, il accompagna l’Apôtre à Éphèse et y resla encore quelque temps après que celui-ci se fut acheminé de nouveau vers Rome en passant par la Macédoine, l’Achaïe et l’Épire. I Tim., i, 3. L’Apôtre le chargea de gouverner l’Église d’Éphèse et lui adressa, à cette occasion, une lettre (la première) pleine de sages conseils. Timothée resta en Asie jusqu’au moment où Paul, à la veille d’une condamnation certaine, l’appela en toute hâte pour qu’il assistât sans doute à ses derniers moments et recueillit, en dépôt, le précieux héritage de son zèle et de ses suprêmes enseignements. II Tim., IV, 21. Par l’Épître aux Hébreux on apprend que le disciple fut lui-même emprisonné, puis relâché, xiii, 23. Le reste de son existence et de son activité semble s’être passé à Éphèse, où il sera retourné après sa sortie de prison. Suivantla tradition, Const. Apost., vii, 46, 1. 1, col. 1063 ; Eusèbe, H. E., n i, 44, t. xx, col. 220, il aurait été martyrisé dans cette ville, sous Donatien ou Nerva, en voulant s’opposer à certaines réjouissances populaires qui tournaient à l’orgie et à la cruauté. Ses ossements ont été transportés plus tard, sous Constance, à Constantinople, Acta sanctorum, januar, t. iii, p. 562-569 ; Lipsius, Die apocryphen Aposlelgesch., t. ii, 372-400. Les Églises grecques et arméniennes célèbrent sa fête le 22 janvier, l’Église copte, le 23, l’Église latine et l’Église maronite, le 24 du même mois, bien que les premiers calendriers latins l’aient placée le27 septembre, peut-être pour faire suite au jour de la commémoration de saint Jean, qui avait exercé son apostolat à Éphèse. Lipsius, op. cit., p. 392 ; Nilles, Kalendarium manuale utriusque Ecclçsise, Inspruck, 1896. D’après plusieurs savants, c’est à lui que s’adresse, comme évêque d’Ephèse, le message de l’Apocalypse, II, 1-7. On ne sait rien de certain sur ce point. — "Voir H. Usener, Acta sancti Timothei, par Polycrate, in-4° Bonn, 1877. C. Toussaint.

4. TIMOTHÉE (PREMIÈRE EPITRE A). — 1° Importance. — Cet écrit appartient au groupe des trois lettres que la critique appelle, depuis plus d’un siècle Épitres pastorales. L’appellation se rencontre, pour la première fois, dans un commentaire de P. Anton, Exeget. Abh. Der Pastoralbriefe S. Pauli, 2 Theile. Halle, 1753, 1755,

puis chez Wegscheider (1810), Eichhorn(1812), nom qui caractérise avec assez d’à-propos (surtout pour la I re à Timothée et l’Épitre à Tite) leur objet commun : tracer à Timothée et à Tite les devoirs de leur charge. À elles seules, ces trois Épitres forment un code parfait à l’usage des pasteurs et des dignitaires de l’Eglise, un véritable traité sur l’art de gouverner les communautés chrétiennes. Le Canon de Muratori, voir Canon, t. ii, col. 170, en avait déjà perçu l’utilité pratique quand il les mentionnait avec cette remarque : in honore tamen Ecclesiie catholicse in ordinatione ecclesiasticse disciplinscsanctificatse sunt (lignes 61-62). Lesprincipes du droit public de l’Église se trouvent en germe dans ces écrits et spécialement dans cette première Épitre à Timothée. On y voit le pouvoir souverain émaner, non de l’assemblée des fidèles, mais de l’autorité apostolique transmise par le rite de l’ordination. Épiscopes, prêtres, diacres tiennent leurs fonctions non de la communauté, mais d’une transmission remontant plus ou moins directement aux Apôtres ou à leurs délégués. L’épiscopat apparaît déjà comme le futur héritier des pouvoirs apostoliques, le sommet et le pivot de la hiérarchie. I Tim., m ; Tit., i. À côté de cette esquisse de la constitution de l’Église trouvent place des règles de discipline, on dirait presque de législation canonique. On y trace les devoirs de l’évêque. Il doit être le modèle de ses subordonnés, irrépréhensible aux yeux des fidèles et de ceux du dehors. I Tim., iv, 12 ; Tit., ii, 6-8. Une liste d’irrégularités règle les choix des délégués de l’Apôtre. Tit., I. 7. L’apparition des hérésies et des doctrines d’erreur invite l’auteur à tracer la ligne moyenne de l’orthodoxie et le soin que l’on doit apporter à se préserver des nouveautés dangereuses. ITim., i, 33-10 ; vi, 320. Les fonctions des membres de la hiérarchie sont délimitées et réglementée s : cellesde l’évêque, du diacre, des veuves attachées au service de l’Église. On entre, avec ces détails, dans la vie intime des communautés chrétiennes, telles qu’elles étaient vers la fin de l’âge apostolique. Le livre qui se rapproche le plus, dans son contenu, de ces trois précieuses lettres et qui s’en est le plus largement inspiré, sont les Constitutions apostoliques. On peut aussi en saisir l’influence dans le Ilepi ispw<rûv/)c de saint Jean Chrysostome, le De officiis ministrorum de saint Ambroise et le De pastorali cura de saint Grégoire.

2° Authenticité. — Depuis que la critique rationaliste rejette en bloc les Épitres dites pastorales, on s’est habitué, dans l’autre camp, à les défendre toutes ensemble. Leur sort est, en effet, si étroitement lié qu’on ne saurait les disjoindre. On suivra donc ce plan, réservant néanmoins, à chacune d’elles, les raisons spéciales qu’il y a lieu de faire valoir. Un premier fait à noter c’est qu’au point de vue des témoignages anciens ce groupe de lettres se trouve aussi favorisé que les autres Épitres pauliniennes. À peine deux ou trois voix discordantes dans l’antiquité : encore ces quelques exceptions s’expliquent-elles sans difficulté. L’absence de ces lettres dans l’Apostolicon de Marcion peut venir de ce qu’il a ignoré leur existence, ces écrits n’étant pas adressés à des Églises, peut-être aussi, comme le pense saint Jérôme, en raison de la façon élogieuse dont ces Ëpttres parlent de l’Ancien Testament, de la Loi, des œuvres. Pour le même motif, Basilide et Tatien ne voulaient pas y reconnaître la main de saint Paul. « Je veux parler, écrit saint Jérôme dans sa Préface du Commentaire de l’Épitre de Tite, t. xxvi, col. 555, de Marcion et de Basilide, qui ont retranché des autres Épitres ce qui était contraire à leur dogme, et qui ont même cru pouvoir rejeter quelques Épitres tout entières, à savoir les deux à Timothée, celle aux Hébreux et celle à Tite. Toutefois, Tatien, le patriarche des Éncratites, qui, lui aussi, a rejeté quelques Épitres de Paul, a cru devoir affirmer tout particulièrement la composition de celle

à Tite par l’Apôtre, n’attachait aucun poids à l’opinion de Marcion et de ceux qui sont d’accord avec lui sur ce point. » Sauf ces contradictions intéressées, les Épitres pastorales ont été unanimement admises et fort souvent citées. Leur affinité d’idées, de tournures, d’expressions avec la lettre de Clément de Rome est indéniable. Comparer, à cet effet, Clem., lv, 3 = II Tim., ii, 1 ; Clem., xliii, 1 ; ii, 3 = II Tim., iii, 8 ; Clem., xxxv, 2 ; lv, 6 ; lxi, 2 = 1 Tim., i, 17 ; Clem., xxxvii, 1 = I Tim., i, 18 ; II Tim., ii, 3 ; Clém., i, 1 ; xlvii, 7 = I Tim., vi, 1. Mêmes termes caractéristiques : npooSextov, àitôSextov ; iriaTt ; àyaôr, , XaTpeûe’.v èv xaOapôc <Tvve18r)ffei I tiaiêna, àvaÇtomipecv, àytoY^itKjTwBsîç, etc. ; même ordre d’idées, Clem., ii, 1 = I Tim., vi, 8 ; Clem., i, 3, xliv, 4— ITim., v, 17 ; Clem., xlii, 4 = I Tim., iii, 10 ; Clem., liv, 3 = 1 Tim., iii, 13 ; Clem., i, 3 — I Tim., ii, 9 ; Tite, ii, 4 ; Clem., xxix, 1 = ITim., ii, 8 ; Clem., ii, 2 ; xxxii, 3 = II Tim., i, 9 ; Tite, iii, 5-7 ; Clem., ii, 7 = Tite, iii, 1 ; Clem., lxi, 1 = Tite, iii, 1 ; I Tim., Il, 2. L’Épître à Barnabe offre, à son tour, plusieurs points de contact : v, 6, xaTapyeïv ibvBàvaTov, détruire lamort, semble venir de II Tim., i, 10 ; IV, 6, âm<7(ûps’jeivte< ; taï ; àfjuxpuat ; , accumulant les péchés, de II Tim., iii, 6 ; çavepto6r|vai èv aâpxi, être manifesté en chair, de ITim., iii, 16 ; surtout, xiv, 6, XuTpaxjâjxevov tj^lcIç èx toO <jx6touç lioinàjou êauTûJ Xaôv âyiov, nous ayant rachetés des ténèbres pour se préparer un peuple saint, de Tite, ii, 14. Point d’allusions dans la Didaché ni dans le Pasteur d’Hermas, mais, en revanche, de frappantes analogies avec les lettres de saint Ignace et de saint Polycarpe (pour le détail, voir Texte und Untersuchungen, XII, iii, p. 107-118, 186194) telles que avaÇo)Trjp£Îv, àva’Vj’/^î £T£po318a<r/.aXsrv, xaTâdTV]fia, le Christ appelé-q èXm’î ï][j.à)v. Lettre de saint Ignace ad Tull., ad Magn., 8 ; ad Polyc, 3 t. v, col. 543 sq.). Dans l’Épitre de Polycarpe, IV, v, viii, IX, xii, les recommandations aux veuves, aux diacres, aux presbytres sont à peu près toutes tirées des Pastorales. Von Soden reconnaît qu’à partir d’Ignace et de Polycarpe, la priorité littéraire, douteuse pour Clément et l’Épitre à Barnabe, appartient certainement aux Pastorales. Saint Justin a textuellement emprunté une phrase de l’Épitre à Tite, iii, 4, quand il dit, Dial., c. xlvii, t. vi, col. 575 : « Car la bonté et la philanthropie de Dieu envers les hommes… » Une influence de I Tim., iii, 16, se remarque aussi dans ce passage de YEpître à Diognète, c. v, t. ii, col. 1173 : Prêché par les Apôtres, il a été cru par les païens. On rencontre de semblables emprunts dans Hégésippe, Eusèbe, H.E., III, xxxii, t. xx, col. 284, dans la II a Clementis, chez Athénagore, Théophile, la Lettre des Eglises de Vienne et de Lyon, t. v, col. 1401 ; Eusèbe, H. E., v, 1, t. xx, col. 407 ; le Testament des douze Patriarches, t. ix, col. 1025. Enfin l’insertion de ces lettres dans les versions syriaque et latine ainsi que leur mention dans le Canon de Muratori prouvent qu’elles faisaient partie, dès le spcond siècle, du canon des Églises de Syrie et d’Occident. D’autre part, saint Irénée, Adv. hser., II, xiv, 7 ; IV, xvi, 3 ; III, xiv, 1, t. vii, col. 755, 914, 1017 ; Tertullien, De presser., c. vi, xxv, t. ii, col. 18, 37 ; Clément d’Alexandrie, Strom., II, xi, t. viii, col. 990, les attribuent formellement à saint Paul. En résumé, ces trois Kpitres offrent, du côté des preuves de tradition, autant de garanties que celles dont on ne songe pas à contester l’authenticité. Pourtant, la majorité des critiques la leur refuse encore à cause d’arguments internes dont on discutera plus loin la valeur. Les premiers doutes remontent à Schleiermacher, qui, à propos d& quelques objections de J. E. B. Schmidt sur l’authenticité de la 1° à Timothée, se mit à faire ressortir le manque de liaison des idées, les tournures de style étrangères à Paul, la

j difficulté de situer cet écrit dans la vie de l’Apôtre.’Ueber den sog. erslen Brief des Paulen an den Tim.,

1807. Il en concluait que la première Épitre à Timothée avait été composée par un plagiaire à l’aide des deux autres Épitres pastorales. À son opinion se rallièrent plus tard Usteri, Lûcke, Bleek, Neander, tandis que Planck (1808), Beckhaus (1810) et Wegscheider (1810) entreprirent la défense de l'Épitre incriminée. Ces apologistes faisaient observer que les raisons alléguées contre la première Épitre à Timothée pouvaient, au même titre, être apportées contre les deux autres. Eichhorn (1812) souscrivit à ce raisonnement, mais pour le retourner contre les trois lettres ensemble ; toutefois il Jes rattachait encore à l’Apôtre par un lien, en l’attribuant à un de ses disciples qui aurait consigné là les directions de son maître. Pendant une vingtaine d’années, les mêmes conclusions sont défendues par de Wette, Schrader, Mayerhoff, combattues par Hug, Bertholdt et Feilmoser. Mais Baur, en 1835, ne se contenta pas de nier l’authenticité des Pastorales, il chercha, dans son Die sog. Pastoralbriefe des Apostels Paulus, les motifs de cette composition apocryphe et crut les découvrir dans l’intention qu’aurait eue l’auteur de combattre, sous le nom et l’autorité de Paul, les erreurs gnostiques, surtout celles de Marcion et de Valentin. Ces lettres ne seraient alors que de la moitié du second siècle. À peu de choses près, telle est l’opinion de Schwegler, Bruno Bauer, Hilgenfeld, Mangold, Meyer, Schenkel, Hausrath, Weizsàcker, Davidson, Harnack, Scholten, Beyschlag, Sabatier, Von Soden. Quelques critiques (Lôftler, Usteri, Lûcke, Bleek, Neander, Ritsehl et Krauss) acceptent la IIe à Timothée et l'Épitre à Tite mais repoussent obstinément la première à Timothée. Du côté des défenseurs des Pastorales se rencontrent, outre les commentateurs catholiques, bon nombre d’exégètes protestants, surtout parmi ceux qui ont écrit des commentaires ex professe). On peut leur adjoindre Otto, Kôlling, B. Weiss, dans son Introduction et dans Meyer, 5e édit., 1886 ; Bertrand, Essai critique sur V authenticité des Épitres pastorales, 1888 ; Bourquin, Étude critique sur l’authenticité des Ep. past., 1890. D’autres n’osent se prononcer : Rolle, De authentia epist. pastoralium, 1841 ; Scharling, Dieneuesten Untersuchungen ùberdie sog. Pastoralbriefe, 1846. De nos jours, on est revenu, dans le camp critique, à l’hypothèse admise dès 1836 par Credner et l’on reconnaît, dans les Pastorales, au moins dans le IIe à Timothée et l'épître à Tite, un noyau paulinien amplifié, vers la fin du I er siècle, par quelque disciple de Paul à l’aide des autres écrits de l’Apôtre. Chacun varie dans la part à faire aux éléments authentiques. Ainsi Hausrath (1865) trouve les restes d’une lettre de Paul dans II Tim., i, 1, 2, 15-18 ; IV, 918 ; Krenkel (Paulus, 1869), Tit., iii, 12, 13 + II Tim., iv, 19-21, 9-18 ; i, 16, 18 ; Grau pense que Tite et Timothée ont eux-mêmes développé, à l’aide de leurs souvenirs personnels, des billets qu’ils avaient reçus de l’Apôtre. Ménégoz (1872) reconnaît le caractère paulinien des trois lettres, mais, en même temps, il découvre les traces d’interpolations certaines, postérieures à la mort de l’Apôtre. Renan (1869), Beyschlag (1874) et Sabatier (1881) admettaient l’existence de billets authentiques adressés à Tite et à Timothée, puis amplifiés plus tard pour appuyer le mouvement des Églises vers la hiérarchie et la discipline ecclésiastique.

D’après Hesse (1889), la I re à Timothée comprend ellemême des passages de source paulinienne, par exemple, le premier et le sixième chapitre ; la seconde est composée de deux lettres, l’une apocryphe, l’autre à parties authentiques, i, 16-18 ; IV, 9-22. La lettre à Tite serait également de Paul, au moins quant au passage relatif aux hérétiques, emprunté d’ailleurs à la I re à Timothée. On aurait opéré ces fusions et ces amplifications d'épîtres pour donner aux évéques une sorte de manuel de discipline ecclésiastique. Ces écrits précéderaient

de peu d’années les lettres de saint Ignace. Telles sont, en général, les positions de la critique, à l'égard de ce dernier groupe d'épîtres pauliniennes. Voici maintenant les principaux arguments qu’elle a fait valoir, et les réponses qu’on leur a opposées.

I. La situation historique. — On objecte l’impossibilité absolue de faire entrer nos trois lettres dans la contexture historique de la vie de saint Paul, telle qu’elle résulte des données prises dans les Actes et complétées par les Épitres certaines. Ni la première ni la seconde Épitre à Timothée ni l'Épître à Tite ne peuvent trouver place dans les Actes. Ainsi, en ce qui regarde la I™ à Timothée, aucune des deux hypothèses imaginées à cet effet ne paraît donner satisfaction. Celle qui, par exemple, essaie de dater cette lettre du voyage que Paul fit en Macédoine après son séjour de trois ans à Éphèse, Act., XX, 1, ne s’adapte pas aux circonstances de cette partie de la vie de saint Paul. Mais bien des raisons rendent cette supposition inadmissible. En effet, d’après les Actes eux-mêmes, xix, 22, Timothée avait devancé son maître en Macédoine, où Paul le rejoignit peu après et d’où il écrivit la seconde lettre aux Corinthiens. II Cor., i, 1. De plus, quand Paul quitta Éphèse, après son long séjour de trois ans, il avait l’intention de gagner Jérusalem sans repasser parl’Asie. Act., xiv, 21 ; xx, 1, 3, 16 ; ICor., xvi, 4 ; II Cor., 1, 16. Or, dans cette Épitre, il annonce l’intention de revenir à Éphèse. Imagine-t-on, d’autre part, l’opportunité des recommandations de l’Apôtre s’il ne s’agit, pour Timothée, que de prolonger son séjour de quelques semaines ou même de quelques mois ? Dira-t-on, pour écarter ces objections, qu’il est ici question, I Tim., i, 3, d’un voyage non raconté dans les Actes, voyage que Paul aurait fait durant ses trois ans de séjour à Éphèse ? En soi, il est vrai, cette supposition ne serait pas inadmissible, car les Actes passent sous silence nombre de faits importants dans la biographie de l’Apôtre. Elle aurait même l’avantage, si l’on prolonge l’itinéraire de Paul jusqu’en Crète, de rattacher à cette période de la vie de Paul l'Épitre à Tite. Seulement, le fatal verset I Tim., 1, 3, estlà pour s’opposer à toute idée d’un séjour prolongé à Éphèse, permettant, tout au plus, une courte visite. Au surplus, il ne faut pas multiplier, au delà de toute mesure, les allées et venues de l’Apôtre pendant son séjour dans la métropole d’Asie. Quand on a intercalé, durant cette période, un voyage à Corinthe, pour se mettre d’accord avec la teneur des deux Épitres adressées aux fidèles de cette Église, c’est assez. L’activité de Paul se déploya plutôt du côté de l’Orient et l’on conçoit mal une interruption de ses travaux apostoliques en Asie, pour un autre motif que celui de parer à la situation critique survenue tout à coup à Corinthe. Qu’on ajoute. à ces raisons les différences de style et d’idées qui séparent cette I re Épitre à Timothée, comme les autres pastorales, du cycle des grandes Épitres, le genre d’hérésies dont elle parle, l’organisation de la hiérarchie à Éphèse, toutes choses qui ne conviennent guère au temps de la troisième mission. Avec la deuxième Épitre à Timothée les difficultés sont encore plus grandes. La lettre serait écrite durant la première captivité de Paul à Rome. Or, les traits épars, dans cette Épitre, ne s’accordent pas avec les données fournies par les Actes et les autres épîtres de la captivité. D’après la seconde Épitre à Timothée, en effet, l’Apôtre est en prison, à Rome sans doute (i, 8, 12, 16, 17 ; ii, 9-10), Timothée, à Éphèse. On donne, comme récent, un voyage de saint Paul à travers l’Archipel : à Milet, il a laissé Trophime malade, iv, 20 ; à Troade, il a laissé son manteau et des notes chez Carpus, iv, 13 ; Éraste est resté à Corinthe, iv, 20 : l’Apôtre y a donc fait escale. Puis on donne des indications sur la marche du procès. Tous ces détails ne sauraient concorder avec ce que les Actes disent du voya ge

de Paul captif. Paul ne traversa pas l’Archipel ; il ne put aller ni à Milet, ni à Troade, ni à Corinthe, la tempête ayant poussé le navire vers la Crète, puis sur Malte. Quant au* Épitres certaines de la captivité de Rome, celles aux Colossiens et aux Éphésiens, à Philémon, aux Philippiens, rien ne cadre entre la situation qu’elles reflètent et celle que suppose la seconde Épitre à Tiraothée. Essaiera-t-on avec plus de succès une conciliation enlre les Actes et l’Épitre à Tite ? Mêmes impossibilités. Selon les Actes, saint Paul ne fait que toucher la Crète, en naufragé et en prisonnier, non en fondateur d’Églises. La lettre, d’ailleurs, n’aurait pu être écrite qu’à Rome, en captivité. Comment Paul pourrait-il écrire qu’il a l’intention d’aller passer l’hiver à Nicopolis, voir iii, 12 ? Pourquoi ne fait-il aucune allusion à son état de prisonnier ? Ces incohérences obligent donc les défenseurs de l’authenticité à rejeter ces Épîtres en dehors du cadre des Actes. On a renoncé aux essais tentés par quelques exégètes, Bartlet, Apostolic âge, p. 179-182 ; Bowen, The dates of the Pastoral Epistles, Londres, 1900, pour intercaler les Pastorales dans la trame du livre des Actes. La seule voie possible paraît être de reporter la rédaction de ces trois écrits dans un période de la vie de Paul placée en dehors des Actes. L’Apôtre, après deux ans de captivité, aurait comparu devant Néron, aurait été acquitté et aurait repris, du côté de l’Orient, peut-être même de l’Occident, ses courses évangéliques. C’est durant cette ère de liberté qu’il aurait visité l’Archipel, revu Éphèse, la Macédoine, l’Achaïe, l’Épire. La première lettre à Timothée et celle à Tite dateraient de ce voyage. Revenu à Rome, Paul aurait été de nouveau incarcéré ; là, il aurait écrit sa seconde missive à Timothée et aurait, peu de temps après, subi le dernier supplice. L’historicité des Pastorales se trouve ainsi liée à la question de la seconde captivité de saint Paul, point d’histoire difficile à établir, il est vrai, mais ayant pour lui un ensemble de conjectures assez vraisemblables sans qu’il soit nécessaire, comme le pense B. Weiss, de tourner dans un cercle vicieux et de prouver l’authenticité de nos trois lettres par le second emprisonnement de saint Paul, et la réalité de celui-ci par l’existence de celle-là. Il faut, avant tout, convenir que la mention d’une seconde période active de saint Paul, au delà des Actes, n’est attestée formellement par aucun auteur antérieur au iv « siècle. Eusèbe de Césarée, H. E., II, xxii, 2, xx, col. 194, est le premier à parler en termes explicites d’une seconde captivité à Rome, en alléguant deux passages de la seconde Épitre à Timothée, iv, 6, 16-18. Puis viennent les témoignages divers de saint Jérôme. Le premier, où le voyage en Espagne est vaguement enveloppé dans l’expression : in Occidentis partibus^ De vir. ill., 5, t. xxiii, col. 615 ; le second, où l’auteur rapporte l’opinion des Nazaréens sur la prédication de saint Paul, In ls., viii, 23 ; ix, 1, t. xxiv, col. 123, 125 ; in terminos gentium et viam universi maris Christi evangeliumsplendu.it ; le troisième, où, parlant d’après ses propres idées, il dit, In ls., xi, t. xxiv, col..151 : Hic ltaliam quoqueel, ut ipse scribit, ad H ispanias alienigenarmn portalus est navibus ; le quatrième, Tract, de Ps. LXXXIU, Anecd. Maredsol., iii, 2, 805 : dsinde dicit quod de urbe Ronia ierit ad Hispaniam. Voici, par ordre, les indices d’après lesquels on peut conjecturer, faute de textes catégoriques, une seconde captivité de saint Paul à Rome : 1° Les espoirs de délivrance prochaine qui se font jour dans plusieurs Epîtres de la première captivité, notamment dans l’Épitre à Philémon, ꝟ. 22, surtout dans l’Épître aux Philippiens, i, 19, 25 ; ii, 21, espoirs qui ne paraissent pas être de simples désirs mais des conclusions sur la marche du procès. Les Actes, xxv, 25 ; xxvi, 32, laissent déjà entrevoir cette issue, en montrant combien Festus était favorable à l’Apôtre. Nul doute que son rapport à

l’empereur, pièce capitale de l’affaire en cours, n’ait conclu à l’innocence du prisonnier, xxvi, 32, aucun fait nouveau n’étant survenu, ni aucune nouvelle intrigue du côté de Jérusalem. Act., xxviii, 20. Le sanhédrin avait d’ailleurs suffisamment de difficultés, à ce moment-là, avec l’autorité romaine, pour perdre de vue son adversaire. On était proche des troubles qui amenèrent la guerre de Judée.

2° La tradition romaine d’un voyage de saint Paul en Espagne. Cette tradition semble attestée par le passage célèbre mais tant discuté (c. v) dans lequel Clément de Rome écrit : « Paul aussi a reçu le prix de la patience, ayant porté sept fois les chaînes, ayant été fugitif, lapidé, après avoir prêché la justice en Orient et en Occident, il a obtenu la noble renommée de sa foi. Après avoir instruit le monde entier dans la justice et être arrivé au terme de l’Occident (rlpy.* xïjç S-Jtr£t « >c) et avoir rendu témoignage devant les chefs, il a été retiré de ce monde et s’en est allé dans le saint lieu, étant devenu le plus grand modèle de constance. » Or, l’expression-tipua Trjç 8-j<te « ; , chez les auteurs grecs (Strabon, II, i ; Philostrate, Vilavpoll., , iv ; Appien, Proœm., 3 ; Hispan., 1 ; Eusèbe, Vila Const., i, viii, 2-4), servit à désigner l’Espagne. On objecte sans doute qu’en prenant Jérusalem pour point de départ de l’apostolat de Paul, Clément peut, se permettre une hyperbole oratoire, placer Rome aux confins de l’Occident, afin d’achever sa comparaison et assimiler la marche de l’Apôtre à celle du soleil. L’Occident, pour les Latins, commençait à la mer Adriatique et à la mer Ionienne. Appien, liell.civ., V, 64 ; Mommsen, iîes n’esta ? Augusti, p. 118. De la sorte on pouvait dire, à la rigueur, que Paul avait prêché dans les deux mondes, même s’il n’avait pas dépassé l’Italie. Mais, en regardant de plus près, dans son contexte, la valeur dumotxépua, il est difficile de ne pas lui laisser son acception première. L’intention de l’auteur, en l’adoptant, paraît être d’avoir voulu préciser la locution précédente « le monde entier » et marquer ainsi que la tâche de Paul avait atteint, avanlson martyre, une limite qu’elle ne pouvait dépasser. Le programme apostolique comportait d’ailleurs, comme l’indique l’Épître aux Romains, x, 18, complétée parxv, 24, 28, et II Cor., x, 16, l’évangélisation de l’Espagne, point terminus du monde connu. On conçoit mal que Clément de Rome, qui avait su les projets de l’Apôtre, eût osé dire que Paul avait instruit le monde entier et touché le terme de l’Occident, si en réalité les événements s’étaient opposés à l’exécution de ce dessein. Il faut songer que les lignes émanent d’un témoin oculaire et sont écrites trente ans après la mort de saint Paul, et à des gens qui avaient connu l’Apôtre et étaient au courant de sa vie et de ses travaux. Quelques auteurs, voir Zahn, Einleit., 3e édit., 1906, p. 449, insistent, en outre, pour établir une seconde captivité romaine, sur les sept emprisonnements mentionnés dans le même passage de la lettre de Clément, le 1 er à Philippes, le 2 « à Jérusalem, le 3e à Césarée, sous Félix, le 4e sous Feslus, le 5e en mer, le 6e à Rome (l re captivité), le 7e de nouveau à Rome (seconde captivité). Mais il y a suffisamment de parties solides dans la thèse exposée sans recourir à ces énumérations subtiles et un peu arbitraires. Beaucoup meilleur est l’appoint fourni par la phrase incorrecte et mutilée du Fragment de Muratori, ligne 37, que l’on peut traduire : « Comme Luc le montre lui-même avec évidence en omettant la passion de Pierre et aussi le départ de Paul pour l’Espagne. » L’auteur a voulu dire pour expliquer, sans doute, la fin si brusque des Actes, que saint Luc n’avait voulu raconter que des faits qui s’étaient passés en sa présence, raison inexacte, il est vrai, mais précieuse par la tradition dont elle se fait l’écho. On tenait donc pour certain à Rome, vers la fin du IIe siècle, le voyage de Paul en Espagne, ce qui

précise et corrobore le document de Clément Romain. Trente ans plus tard, les Actes de Pierre, écrits d’origine gnostique, attestent que Paul est allé prêcher en Espagne, à la suite d’une vision. Pendant son absence de la Ville sainte, qui n’a duré qu’une année, Pierre vint de Jérusalem à Rome pour combattre Simon le Magicien et mourut avant le retour de l’Apôtre. Les Actes de Xantippe et de Polyxène, Apocr. aned., édit. James, 4893, i, 58-85, si étroitement apparentés aux Actes de Pierre, font également émigrer Paul de Rome vers l’Espagne pendant quelques mois, comme pour donnera Pierre le temps de venir d’Orientluttercontre son adversaire traditionnel, Simon de Samarie. Il n’est pas sûr qu’Origène, xiii, In Gen., t. xii, col. 233, ait parlé du voyage de Paul en Espagne, mais on en trouve une mention formelle dans saint Cyrille de Jérusalem, Cal., xvii, 26 ; xxviii, 9, t. xxxiii, col. 597 ; saint Épiphane, Hser., xxvii, 6, t. xli, col. 373, saint Éphrem, Expos, ev. concord., 286 : Paulus ab urbe Jérusalem usque ad Hispaniam [prxdicavit] ; saint Chrysostome qui avait lu de confiance les Actes de Paul, In Epist. Il adTim., Boni., x, 3, t. lxii, col. 659 ; etc. ; Théodoret, In Phil., i, 25, t. lxiii, col. 568.

Toutes ces dépositions venues de points si divers ne sauraient, du moins avec facilité, trouver leur raison suffisante dans l’exégèse du passage si connu, xv, 21, 28, de l’Épitre aux Romains, où l’Apôtre forme le projet d’aller en Espagne. Cela apparaîtra encore mieux si l’on observe qu’Eusèbe de Césarée, le premier auteur qui, dans l’antiquité, ait explicitement parlé des deux captivités de saint Paul, ne dit rien et ne paraît rien savoir de ce voyage oulre-monts. Même silence chez Euthalius (vers 350), qui compte dix ans entre les deux captivités. Il semble donc résulter des variantes mêmes de Ja tradition une donnée constante et apparemment solide, celle d’un intervalle plus ou moins long entre les deux captivités de l’Apôtre.

Peut-on, avec nombre d’auteurs, apporter à l’appui de cette conclusion la fin si brusque du livre des Actes ? Il est à craindre que ce nouvel argument n’ajoute pas grande lumière, soit que l’on suppose avec assez d’invraisemblance, il faut en convenir, que saint Luc ait eu l’idée de composer un troisième livre pour raconter lu suite de la vie de son héros (Ramsay, Saint Paul, p. 309 ; Spilta, Vie Apostelgeschickle, p. 318), soit qu’on place la rédaction des.Actes avant la mort de saint Paul. On peut croire, en effet, que ce silence — il y en a bien d’autres dans ce livre et non moins étonnants

— vient, comme les précédents, du plan même de l’ouvrage qui, tout en narrant les exploits apostoliques des Apôtres, n’avait cependant pas l’intention de faire des biographies, mais d’exposer la diffusion rapide de l’Évangile à travers le monde sous l’action divine de l’Esprit. S’il n’est pas fait mention de la mort de Paul, ce pouvait être parce que cet événement ne servait en rien à la thèse posée et que chacun avait dans la mémoire la façon dont s’était terminée cette vie incomparable-En résumé, tout compte fait, entre les deux opinions adverses sur les dernières années de l’Apôtre, on ne peut traiter de manifestement improbable celle qui, recueillant les divers échos du passé, croit y démêler l’attestation d’une activité postérieure au premier emprisonnement et pouvants’adapter à la situation historique des Pastorales. L’hypothèse du voyage de saint Paul en Espagne n’y contredit pas : elle aide plutôt à établir qu’on avait gardé à Rome le souvenir d’une période d’évangélisation entre les deux captivités. Quand même l’Apôtre aurait abandonné à Rome son dessein primitif de prêcher aux confins de la terre, réservant la fin de ses travaux aux Eglises d’Orient, il resterait, de cette persistance à imaginer son action en Espagne, le fait qu’on ne pouvait terminer par une seule captivité la fin d’une existence si active et limiter

à Rome ses derniers travaux apostoliques. Qu’on suppose maintenant, dans le même milieu, la certitude absolue de la façon dont Paul avait terminé sa vie, en l’expliquant par une exécution capitale, suite naturelle de son procès devant César, on aura à chercher l’origine commune de ces traditions.

II. Hérésies. — Les erreurs signalées par l’auteur des Pastorales ont exercé, dès le début, l’art divinatoire de la critique. Le terrain sur lequel se rejoignent toutes les conjectures imaginées dans ces derniers temps, c’est le fond de gnosticisme plus ou moins caractérisé que l’on s’accorde à identifier avec ces rêveries fantastiques. Les divergences — et ceia influe naturellement sur la date et l’origine des Épîtres controversées — portent sur les diverses formes de gnosticisme auxquelles répondent les indications que nous fournissent ces mêmes Épitres. Baur, Paulus, p. 110, essaya de prouver qu’on y trouvait les doctrines gnostiques du second siècle, particulièrement celles de Marcion. Il voyait dans l’expression J/EuSwvûftoy yvcôusmc, I Tim., VI, 20, l’appellation quasi officielle des théories marcionites et croyait découvrir jusque dans le terme àvT18£<j£iç, I Tim., vi, 20, le titre de l’ouvrage de Marcion sur les contradictions entre l’Ancien et le Nouveau Testament. D’autre part, les [niOoi xa YsvEaXoyfai, I Tim., IV, 7, rappelaient les doctrines émana tistes de la gnose. Déjà saint Irénée, Adv. hser., Prsef., i, t. vii, col. 23 ; Tertullien, Presser., 7, 16, 33, t. ii, col. 19, 29, 46 ; Adv. Valent., 3, col. 545 ; De anima, 18, t. iii, col. 678, et saintÉpiphane, Hxres., xxxiii, 8, t. xli, col. 587, avaient pensé, en lisant ces passages, soit à Marcion soit à Valentin ; ils y trouvaient longtemps écrite à l’avance, par l’Apôtre, la condamnation de ces dangereux hérétiques. L’objection capitale qui se présente comme d’elle-même en face de cette opinion, c’est le caractère judaïque de ces erreurs. Comment transformer Marcion et Valentin en scribes et en partisans de la Loi (vou.oS181<xxa).oi), des ennemis aussi déclarés.du mosaïsme ? Plleiderer et Holtzmann, pour parer l’argument, disent que le faussaire, afin de mieux couvrir sa pieuse fraude, aurait prêté à ses doctrines une couleur de judaïsme, Paul ayant forcément gardé quelque chose de sa lutte avec les judaïsanls, solution bien subtile et fort au-dessus de la moyenne des auteurs d’ouvrages apocryphes. Le sentiment de Baur est néanmoins adopté, avec des variantes, par de Wette, Zeller, Volkmar, Scholten, Pfleiderer, Krenkel. Ainsi Hilgenfeld et Davidson quittent Marcion et Valentin pour Saturnin et pour les marcosiens ; Lipsius et Schenkel ont songé aux Ophites ; Mayerhoff. à Cérinthe ; Michaëlis et Mangold, à des Esséniens christianisés ; Wieseler, à des néopythagoriciens ; Reuss et Néander, à des judaïsants influencés par le gnosticisme latent qui germait en Orient dès l’apparition du christianisme ; Otto et Doehne, au judaïsme alexandrin, nourri des idées de Philon et échafaudant, sur tes généalogies de la Genèse, des allégories spirituelles de toutes sortes. Suivant Godet, qui reprend à son compte l’hypothèse d’anciens critiques comme Grotius, Herder, Baumgarten, on aurait, dans les Pastorales, un spécimen anticipé de cette philosophie juive Bi étrange et si fantastique qui s’est développée si longtemps à côté de la Loi et qui n’a été fixée par écrit que beaucoup plus tard, sous le nom de Cabbale. Un choix ferme, parmi tant de divergences, est chose bien difficile. Et cela, pour deux raisons capitales : la première, c’es que les origines du gnosticisme sont très obscures ; la seconde, c’est que les erreurs désignées-là ne sont pas suffisamment caractérisées pour qu’on puisse les identifier avec tel ou tel système d’hérésie nettement connu. i Ne pourrait-on pas dire, avec Renan, qu’<c au lieu de rejeter l’authenticité des passages du Nouveau Testament où f’on a trouvé des traces de gnosticisme, il faut quelquefois raisonner à l’inverse et chercher dans ces

passages l’origine des idées gnostiques qui prévalurent au second siècle ? » On sait, en effet, que le gnosticisme, qui a pris une si grande extension durant l’âge postapostolique, ne peut être localisé dans un seul pays d’origine ni dans une époque déterminée. Ses racines se prolongent jusqu’à l’ère apostolique. On observe, d’autre part, que le danger qu’offraient les faux docteurs ici en cause était plutôt d’ordre moral (itovïjpoi avBptoTtoi, cf. II Tim., iv, 3 ; II, 25 ; iii, 2-7 ; I Tim., vi, 4) que d’ordre dogmatique. Aussi l’auteur des susdites Épîtres ne se perd-il pas contre eux en discussions théoriques. Il flagelle leurs vices et leurs dérèglements. Aux membres de l’Église, il trace, pour les mettre en garde contre de tels exemples, une règle de conduite à l’opposé de ces lamentables excès. De là, ces conseils de tempérance, de modération, de justice, de chasteté, de modestie, de désintéressement, d’honnêteté, qui constituent la partie marquante de ce groupe de lettres.

Au point de vue de l’enseignement doctrinal, voici les traits fondamentaux qu’on a pu recueillir. Les fausses théories contre lesquelles l’auteur met en garde ses disciples et leur ordonne de combattre présentent diverses faces. D’abord elles sont essentiellement juives d’origine et de tendance. Ceux qui les exposent se paient du titre de vouoSiSâaxaXoi, I Tim., i, 7 ; ils appartiennent au parti de la circoncision, Tit., i, 10 ; ils aiment les disputes de la casuistique d’école, [i.â-/ai vou.ixaî, Tit., iii, 9, discutent sur les mythes juifs, ’IouSaïxol nûôoi, les traditions rabbiniques, èvroXai àvOptûiTwv, Tit., i, 14 ; ce sont des ennemis déclarés de saint Paul ; ils nient ou mettent en doute son apostolat. I Tim., i, 1, 20 ; ii, 7. Ce judéo-christianisme n’est pas celui que l’Apôtre a combattu dans ses grandes Épltres, c’est-à-dire le pharisaïsme légal ; ce n’est pas non plus l’essénisme asiatique et mystique des Épîtres aux Colossiens et aux Éphésiens ; c’est une forme de judaïsme qui affecte une tournure puérile et fait penser aux fables et aux extravagantes histoires du Talmud. Ce sont des contes de vieilles femmes, |j.û801 ^patiSs^, I Tim., iv, 7, des fables profanes péérjXot des généalogies interminables, YsveaXoyiat àirépavtoi, des disputes vides de sens, tiwpai ÇïjTï|<j-etç- ITim., ii, 23 ; Tit., iii, 9, des batailles de mots, XoYO|/.ax ! ’a'- I Tim., vi, 4. On peut avoir un exemple de ce fatras de mythes et de légendes dans le livre d’Enoch, le livre des Jubilés et le traité d’Antiquités bibliques attribué à Philon. Hort, Judaïstic christianity, p. 130-146. L’histoire des patriarches y est la base habituelle des contes les plus fantastiques. À ces vaines et creuses spéculations se mêlait un ascétisme exagéré, imposant des abstinences, I Tim., iv, 1-4, établissant de rigoureuses distinctions entre les choses pures et impures, condamnant le mariage, I Tim., i, 4, 6, 7 ; iv, 3, 4, 7 ; II Tim., iii, 1-9, et favorisant, par contre, une licence de mœurs révoltante. C’est de ce côté surtout que l’affinité serait plus apparente avec le gnosticisme. Cf. Clément d’Alex., Stron)., Hl, 3 ; t. viii, col. 1114 ; Tertullien, Adv.Marc, 1, 14, t. ii, col. 262 ; S.Irénée, fîœr., i, 28, t. vii, col. 690. Le but pratique de ces théories malsaines, c’est un gain sordide, Tit., i, 11, ala-/po-j xipSouc "/ « P’v, ’I Tim., VI, 5, voeuÇovtmv Tropurp-bv gtvai ttjv eùtréëeiav ; c’est même la débauche, pénétrant domos et captivas ducunt mulierculas oneratas peccatis. II Tim., iii, 6. Bien que l’apparition de ces faux docteurs semble être réservée à un avenir plus ou moins éloigné, en ce qu’elle est mise en rapport avec des prédictions relatives aux derniers temps, ï(s%cnai riu-spai, II Tim., iii, 1 ; êv ierrâpotç xaipoîç, I Tim., iv, 11, il n’est pas nécessaire de croire ici à une pure prédiction, mais à une conjecture fondée sur l’état de choses actuel, que l’imminence de la Parousie ne peut qu’aggraver, puisque alors doivent paraître tant de faux prophètes.

Matth., xxii, 24. Il n’y a donc en résumé, dans l’analyse des erreurs qui viennent d’être examinées, aucun motif absolu de chercher les personnes ou les tendances combattues dans ces Épîtres à une grande distance de l’époque apostolique proprement dite, et, en particulier, parmi les divers systèmes gnostiques du n « siècle. L’opinion qu’on se forme là-dessus résulte, d’ordinaire, de celle qu’on a déjà sur l’authenticité de ces Épîtres. Dans ce large syncrétisme d’idées juives, grecques, orientales, esséniennes, gnostiques qui faisaient le fond de ces doctrines étranges, il y a place pour tous les rapprochements, pour toutes les analogies, pour toutes les suppositions.

III. Organisation ecclésiastique. — Les progrès qui, d’après les Epîtres pastorales, se sont accomplis par l’Église dans la discipline et la hiérarchie, fournissent aux adversaires de l’authenticité un de leurs plus spécieux arguments. Ils commencent par faire observer que les idées de l’âge apostolique sur la proximité de la Parousie paraissent mal s’harmoniser avec des règles destinées à assurer l’avenir des Églises après la mort de Paul. Ces préoccupations, disent-ils, se comprennent mieux sur le seuil du second siècle, alors que les espérances sur la fin du monde et la grande apparition messianique s’éloignaient. L’Église dut alors songer à s’organiser pour durer. On sentit le besoin d’institulions stables et de lois proprement dites, condition essentielle de vie pour toute société humaine. Pour leur donner plus de crédit on s’imagina qu’elles avaient été établies par les Apôtres. Toute une littérature s’employa à fortifier cette idée dans les esprits. On en retrouve les principaux fragments, remaniés et délayés dans les Constitutions apostoliques, les canons des Apôtres, les lettres d’Ignace. Or, les Épitres pastorales ont avec ces divers écrits une affinité tangible de fond et de forme. Il suffit, pour les saisir, de mettre sur une même page, les prescriptions des Pastorales et de la Didascalie des Apôtres, relatives à la hiérarchie ecclésiastique. Les Épltres à Tite et la première à Timothée auront été composées pour couvrir de l’autorité de Paul le mouvement vers la hiérarchie et l’épiscopat unitaire qui, sous la poussée des hérésies, devenait, pour l’Église, la seule garantie de vivre. Pour le prouver, on compare les mots et les idées de l’Apôtre touchant l’Église et ses institutions hiérarchiques d’après les lipitres certaines, I Cor., xii-xiv ; xvi, 16 ; Rom., xii, 8 ; IThess., v, 12, 13, et d’après les Pastorales, d’où il ressort une diversité de conceptions nettement tranchée. Cf. sur ce point Holtzmann, Einleit., p. 290 sq. On fait, en outre, observer que ces écrits se rapprochent plutôt des lettres de saint Ignace, dont le thème invariable porte, comme les Épîtres à Tite et à Timothée, sur le choix des prêtres et des évêques.

La croyance à l’approche de la Parousie n’a pas empêché les Apôtres de donner, dès le commencement, aux communautés nouvelles une organisation locale. Ainsi, dans leur première mission, Paul et Barnabe, au témoignage des Actes, xiv, 23 (grec), établirent, partout où ils avaient réussi à fonder un noyau de croyants, des collèges d’anciens ou d’épiscopes. Aucune société, même purement démocratique, ne saurait d’ailleurs subsister sans une organisation et sans hiérarchie. Qu’il y ait eu, sur la lin de l’âge apostolique, une légère modification dans les formes et les conditions d’exercice de ces autorités locales, nul ne songe à le mettre en doute. Dans les sociétés comma dans les individus, la tête suit les progrès des autres parties du corps. Avec l’expérience et le temps — celle de saint Paul atteint avec les Pastorales une durée de presque trente ans — certaines mesures s’imposaient pour le gouvernement des Églises. L’autorité personnelle de Paul sur les communautés de son ressort ne pouvait plus s’exercer de la même manière, à la fin de sa vie

qu’au commencement de ses missions. À mesure que le nombre des Églises augmentait, il devait laisser aux autorités locales une plus grande part d’initiative et de responsabilité. L’éloignement, par le fait de sa captivité à Rome, dut encore élargir les pouvoirs de ces collèges de prêtres ou épiscopes. Enfin quand l’Apôtre, à la veille de son martyre, eut à régler le sort de ses chères Églises, il dut se préoccuper de la consolidation de son œuvre et, particulièrement, de la transmission de son autorité apostolique à ses deux principaux disciples, I Tim., vi, 20 ; II Tim., i, 12, 14, et aux chefs préposés aux centres de croyants. Tout cela explique, dans une grande mesure, les nuances qu’on signale au point de vue hiérarchie et discipline ecclésiastique, entre les premières et les dernières Epitres de saint Paul. Que le progrès de la hiérarchie soit en raison inverse de celui des charismes, cela n’a rien d’étonnant pour qui sait comprendre que ces dons spirituels ont dû, pour ne pas devenir un danger, se discipliner peu à peu et céder le pas à l’autorité des pasteurs. À Gorinthe, Paul esquisse déjà ce mouvement. Les charismes sont pour lui un phénomène transitoire qu’il faut toujours subordonner à l’utilité générale de l’Église. Il est à observer qu’à la période de diffusion de l’Évangile dans les principaux centres de l’Empire romain, a dû succéder une période d’organisation. Le personnel itinérant et missionnaire, apôtres, prophètes, évangélistes, didascales, s’est fixé dans certaines Églises et y a occupé des fonctions hiérarchiques. On pourrait se faire une idée de cette transformation progressive dans ce qui se passe encore aujourd’hui, lorsqu’un vicariat apostolique, en pays de mission, se change en diocèse régulier et en acquiert les cadres et les organes essentiels. Dans les Pastorales, la hiérarchie n’a pas encore le développement qui se remarque dans les Constitutions apostoliques ni même dans la Didascalie des Apôtres, où l’on parle déjà du lecteur et du sous-diacre. Les termes désignant les principales fonctions ecclésiastiques, ’ETct’eraowoc, izpeoëûrspoc, ôiàxovo ; , sont dans les Épitres antérieures de saint Paul avec le même sens et la même portée. Ces lettres précèdent donc l’époque où s’est formée la terminologie hiérarchique. Cf. Prat, La théologie de saint Paul, t. i, p. 488.

IV. Circonstances invraisemblables. — On relève, dans le contenu des Pastorales, une foule de détails qui semblent incompatibles soit par rapport à l’auteur supposé, soit par rapport aux personnages auxquels il est censé avoir écrit ces diverses Épîtres. On signale, notamment, les inscriptions solennelles de ces Épitres, qui contrastent si fort avec celle de la lettre àPhilémon, quoique pourtant Paul ait été moins intime avec Philémon qu’avec Tite et Timothée, on s’étonne des développements dans lesquels entre saint Paul touchant son apostolat, I Tim., i, n ; ii, 7, comme si Timothée avait besoin, pour croire à la mission de son maître, d’une attestation de ce genre. On se demande pourquoi cette énumération de vertus, II Tim., iii, 10, 11, sous la plume de l’Apôtre, avec un ton de panégyrique auquel on n’était pas habitué. Phil., iii, 12. On n’est pas moins surpris de le voir si assuré du salut final, II Tim., IV, 8, alors qu’auparavant, I Cor., IV, 3, 4 ; ix, 27, il redoutait les jugements de Dieu ; on ne s’explique pas sa bienveillance pour les autorités romaines, I Tim., ii, 2, qui n’a vraiment pas de sens si on l’applique aux dernières années de Néron. À remarquer aussi la citation empruntée au troisième Évangile et prise sur le même pied d’autorité et de canonicité que les paroles mêmes du Deutéronome, -I Tim., v, 18 ; Luc, x, 7 ; la doctrine sur le mariage, I Tim., 11, 15 ; iv, 3 ; v, 41, contraire aux principes habituels de Paul en cette matière, I Cor., vii, 8 ; le manque de salutations personnelles pour les Éphésiens parmi lesquels il comptait tant d’amis !

Le titre d’  « Apôtre » mis en tête des trois Épitres et revendiqué quelques versets plus loin, ITim., ii, 7 ; II Tim., i, 11, sous la foi du serment, étonne sans doute quand on songe que Timothée était bien le dernier des hommes qui pût en douter, lui qui, depuis près de quinze ans, partageait les travaux de saint Paul. Seulement, on a peut-être tort de voir toujours une intention apologétique dans l’emploi d’un mot qui, à force d’être répété dans les lettres, était devenu comme inséparable de ses correspondances. II n’y a pas lieu non plus d’être choqué des soi-disant louanges que l’Apôtre est censé se donner à lui-même. Ne lui était-il pas permis ici, comme dans ses précédentes lettres, II Cor., vi, 416 ; Phil., iii, 17 ; iv, 8, 9, de rappeler ses lettres et ses travaux ? Ne s’était-il pas déjà proposé ailleurs comme un modèle à suivre ? I Cor., xi, 1. On connaît, au reste, le correctif d’humilité qu’il ajoute, d’ordinaire, à ce genre de déclarations. I Cor., xv, 10. La certitude où il se trouve sur la fin de sa carrière, par rapport au salut, n’a rien qui doive surprendre. Cette confiance pouvait lui venir, à la veille de sa mort, d’un coup d’œil gêné rai embrassant toute sa vie apostolique. L’historien n’a qu’à enregistrer l’aveu de Paul sans le révoquer en doute.

L’avis de prier pour ceux qui détiennent l’autorité souveraine ne fait que confirmer l’attitude de l’Apôtre envers le pouvoir civil, quel qu’il soit. Ses principes, à cet égard, ne dépendaient en aucune manière de la conduite des gouvernants. Il voyait en eux des dépositaires de l’autorité divine, Rom., xiii, 6 ; cela lui suffisait pour établir des règles de respect, de gratitude envers eux. La vue des désordres et des cruautés qui marquèrent la fin du règne de Néron ne pouvait rien changera cette manière de voir, pas plus que le souvenir des folies sacrilèges de Caligula n’avait pas empêché d’écrire le chap. xm de l’Épître aux Romains. La maxime que l’auteur de la I re Épltre à Timothée (v, 18) place à la suite d’une citation du Deutéronome n’est pas nécessairement tirée du troisième Évangile : elle pouvait faire partie de ces paroles de Jésus que la tradition gardait avec un soin jaloux et qui allaient être bientôt fixées par écrit, si elles ne l’étaient déjà en bonne partie. Le même fait s’observe dans I Cor., IX, 14. Dans les deux cas, le mot ypatpr) ne s’applique qu’à l’Ancien Testament, nullement aux sentences parallèles empruntées au Sauveur Jésus. On ne saurait sérieusement opposer les enseignements de saint Paul sur le mariage, tels qu’ils se rencontrent dans les Pastorales, I Tim., ii, 15, avec la doctrine de I Cor., vu. Les circonstances sont, en effet, tout à fait différentes. Ici, on compare le mariage et le célibat, là on oppose au désir frivole d’enseigner qui tourmente certaines femmes les graves devoirs de la vie domestique qu’impose à chacune d’elles la nature de son sexe.

L’absence des salutations pour les principaux membres de l’Église d’Éphèse vient probablement du caractère intime et privé de la lettre tout entière, qui ne devait pas être lue en public. Si l’Epître à Tite, au contraire, se termine par une salutation aux Églises de Crète, c’est parce que les directions apostoliques qu’elle renfermait visaient plutôt la conduite des membres de la communauté que celle de Tite lui-même.

V. Divergences doctrinales. — Les idées théologiques des Pastorales représentent, d’après la majorité des critiques, un système doctrinal très différent de celui des autres Épitres pauliniennes. Cela est particulièrement sensible dans les points de dogme qui sont communs à ces deux sortes d’écrits, ce qui témoigne qu’ils ne peuvent être sortis d’une seule et même plume. Ainsi la « foi » qui, dans les précédentes lettres de Paul, désignait presque toujours un sentiment subj jectif, prend désormais le sens objectif, c’est-à-dire ce qu’il faut croire. Ce n’est plus la foi qui croit, mais celle

qui est crue : c’est la foi de l’Église, condensée sous forme d’enseignement réglé, imposé par l’autorité hiérarchique. Aussi s’appelle-t-elle indiféremment iifo-riç, àXï|8eia, ê18aaxaXt<x, XôfOi tîjç ihVtewç, nnaafir i Y.r„ ûytaîvouffa 618a<TxocXta, i xoiv7j t « <ttiç ; de là, encore les composés suivants : èv-kIgtei Çrjv, etvo », ctt^xeev, expressions qui impliquent toutes, d’une façon plus ou moins directe, une règle de foi, un centre catholique, une orthodoxie en exercice. On remarque, en outre, qu’une part plus considérable est faite, dans la vie chrétienne, aux bonnes œuvres. Au mot « justice » se substitue, presque partout, celui de « piété » qui englobe l’exercice de toutes les vertus. L’idéal du chrétien est la 8so<7£ëeia Si’ïpytav àya8wv, synonymisantavecl’eûiréëeia. Ce genre de préoccupation, succédant aux thèses de la justification par la foi, ne peut appartenir qu’à une époque où l’Église était déjà une société complète, tout absorbée par son gouvernement intérieur, sa discipline, sa vie morale, ce qui n’est pas le fait de la première génération chrétienne, mais plutôt celle de la seconde et de la troisième. D’autre part, les espérances relatives à la Parousie, si vives dans l’âme de Paul, font place à une résignation tranquille qui confine presque à l’indifférence. Comparer, par exemple, I Tim., vi, 14, avec Act., i, 7 ; II Petr., ii, 12. L’auteur semble ajourner indéfiniment ce qui a été le mobile central de toute sa vie apostolique. On dirait qu’il ne partage plus l’espoir immense qui a été si vif durant la première génération chrétienne. Ses préoccupations vont maintenant vers l’organisation d’une société qui doit vivre. Il n’est pas seul à renoncer à l’avènement prochain du royaume de Dieu. Autour de lui, il y a des esprits qui relèguent dans le domaine de la métaphore l’annonce de la Parousie et des phénomènes connexes qu’on y attachait. II Tim.. ii, 18. Autre symptôme. La théodicée chrétienne commence, dans ces écrits, à faire des emprunts à la philosophie grecque. Elle exalte, en Dieu, son unité, I Tim., i, 17 ; ii, 5 ; vi, 15, son invisibilité, i, 17 ; vi, 16, sa vie, iii, 15 ; iv, 10, sa puissance, i, 17 ; vi, 15, sa véracité, Tite, i, 2 ; II Tim., ii, 13, son immortalité, ITim., i, 17 ; vi, 16, sa félicité, vi, 15. Ce progrès philosophique ne peut évidemment dater des dernières années de Paul. Il est également difficile de concevoir qu’une plume chrétienne ait pu, avant l’an 70, traiter le judaïsme, avec ses prescriptions légales, de fable et d’invention humaine. Tit., i. 10. En tout cas, Paul n’a jamais rien dit de pareil, même au plus fort de la lutte avec les judaïsants.

A ces diverses difficultés on peut répondre, en les reprenant par ordre, que l’emploi prépondérant et presque exclusif du mot foi, au sens objectif, n’est pas absolument inconnu aux autres écrits de saint Paul ; il se trouvé ici, il est vrai, dans la proportion de 9 à 3, mais on comprend cette inégalité quand on songe qu’un des buts principaux des ÉpHres à Timothée et à Tite est de tracer à ces pasteurs modèles les devoirs de leur charge, au premier rang desquels se place, tout naturellement, le soin de veiller à la pureté de l’Évangile. Il n’est donc pas nécessaire, pour justifier le point de vue où se place l’auteur et les expressions dont il se sert, de songer à une autre forme de doctrine qu’à ce type d’enseignement (tôwoç ffn Siôax’lCt Rom., vi, 17), que l’Apôtre, en l’an 58, félicitait les Romains d’avoir pour règle de leur nouvelle croyance. L’insistance avec laquelle ces dernières Épîtres reviennent si souvent sur la « saine doctrine », provient des erreurs nombreuses qui, à ce moment, faisaient invasion dans l’Église, même du vivant des Apôtres. S’il est souvent question des bonnes œuvres, I Tim., ii, 10 ; v, 10 ; vi, 18 ; Tite, i, 16 ; ii, 7, 14 ; iii, 1, 5, 8, 14, c’est qu’on ne saurait jamais assez exiger de ceux qu’on veut mettre à la tête des Églises, qu’ils prouvent, par leur conduite, qu’ils sont dignes de cet honneur, afin que leur exemple exerce une salu taire influence sur les fidèles dont ils ont la charge. Le mot « piété » résume heureusement la somme des devoirs de celui qui est, par état, « l’homme de Dieu ». I Tim., vi, 11 ; II Tim., iii, 17. Tout en partageant avec ses contemporains l’espoir d’un prochain retour du Christ, saint Paul a parfois entrevu la possibilité de mourir avant la grande apparition finale. Dans sa seconde captivité cette possibilité devenait certitude, presque un fait réalisé. Il était alors très naturel, pour l’Apôtre, de pourvoir à l’avenir des Églises en donnant à ses disciples des règles de conduite pour conserver le fruit de ses travaux. — Les erreurs d’Hyménée et de Philète ne reflètent pas l’opinion commune du milieu où vit l’auteur des Pastorales : d’ailleurs, le dogme de la résurrection avait trouvé de bonne heure, parmi les Grecs, d’ardents contradicteurs. I Cor., xv, 12. — Aucun des attributs donnés à Dieu, par ces trois lettres, ne dépasse le monothéisme de l’Ancien Testament. Il se peut, toutefois, que la forme quasi technique sous laquelle ils se présentent se ressente quelque peu du contact avec les esprits grecs, mais on sait que l’Apôtre a commencé lui-même ce travail d’adaptation qui, en d’autres mains, ira en se perfectionnant. — Le judaïsme contre lequel s’élèvent les Pastorales n’est pas le judaïsme palestinien des premières Épitres, mais ce mélange de vieilles théogonies de cabbale, de pratiques théurgiques dont sortirent plus tard les diverses formes du gnosticisme. Aucune épithète ne pouvait assez énergiquement flétrir cesélucubrations malsaines, si dangereuses, dont le foyer paraît avoir été en Asie Mineure. VI. Style. — La langue des Pastorales est sensiblement différente de celle des Épttres précédentes. D’abord, au point de vue du vocabulaire. D’après les calculs de Holtzmann, on compte, sur les 897 mots de ces trois lettres, une moyenne de 171 âitaÇ ^eyôp-eva, dont 74 dans la I ie à Timothée, 46 dans la seconde, 28 dans l’Épître à Tite. Certains verbes fournissent de multiples dérivés inconnus à la plume de Paul, tels que (TMçppoviU qui donne au>ippovtai.6f, <jo>çpc5va>5, aâxppwv ; StSiuxsiv avec tous ses composés, StSâcrxaXoç, SiSseirxaXi’a, StSayrj, SiSaxTey.o ; , vo|j.o8 : 8dc<rxaXo ; , xâXo81 SâoxocXoç, ârspoSiSaaxor.Xeîv ; oîxeïv et les mots qui en viennent, olxoç, oixia, otxaioç, oïxovop.ta, oixoSeffuoTetv, o’t ovôp.o « et olxoupY<5 ; . On pourrait y joindre les mots formés avec fiâpmp, <pfXoç avec des procédés de dérivation inusités chez Paul. Demême, deslocutionsentièresoudes associations d’images en dehors de ses habitudes littéraires : s-ja-sêtài ; Ç7JV, II Tim., iii, 12 ; Tit., ii, 22 ; Siwxsiv êixaioerjvïiv, I Tim., VI, 12 ; II Tim., Il, 22 ; çuXiaæiv xtjv TCapa6v ; xrjv, I Tim., VI, 20 ; II Tim., i, 12, 14 ; itapaxo-Xouôeîv tîj SiSa<jxaXfat, ITim., IV, 6 ; II Tim., iii, 10 ; tôv xaXôv àyâia àfwvi^eofiat, I Tim., VI, 12 ; II Tim., IV, 7 ; puis la phraséologie spéciale contre les faux docteurs et leurs doctrines, gé8/)Xoi pûSot, I Tim., iv, 7 ; (Sêgï]Xoi xevoçwvi’cu, I Tim., VI, 20 ; II Tim., Il, 16 ; ( « opai Kwr<rei ; , II Tim., 11, 23 ; Tit., iii, 9 ; Çr^iec ; xoc XoTona/cai, ITim., VI, 4 ; Àoyo^a/siv, II Tim., Il, 14 ; (jaTaioXoyia, I Tim., i, 6 ; u.aTaioXoYoç, I Tit., i, 10 ; en opposition avec Xoyoç Oyir, ?, Tit., ii, 8 ; ùfiahoycEi Xôyot, I Tim., vi, 3 ; II Tim., i, 13 ; ûytalveiv t^ iziarsi, Tit., i, 13 ; -fl vifiaîvouOTt 818a<xxaXîa, I Tim., i, 10 ; II Tim., iv, 3 ; Tit., 1, 9 ; ii, 1 ; des expressions comme av8pMi : oi xiteç-Ôotppiévot, II Tim., iii, 8 ; 8tecp6ap|Aévot, I Tim., vi, 5 ; xXav(ip.£voi, II Tim., iii, 13 ; Tit., iii, 3 ; ôtv6p<oiîo ; ©soû, ITim., VI, 11 ; II Tim., iii, 17 ; icoyic toû ôiaêdXou, I Tim., Hl, 7 ; II Tim., II, 26 ; xittôç 6 Xôyo ; , I Tim., i, 15, iii, l, iv, 9 ; II Tim., ii, 11 ; Tit., iii, 8 ; des mots plus ou moins grecs tels que à<ff)a.pafa, èitejiven, alûvE(, eyaiSeia, awypofrjvT) ; ou au contraire, du plus pur héllénisme, ypxûôric, <TU|jiarixr| yj(i.va<r : a, yutivâîTEiv, àvx^uTtupeiv, e’.XavSpojfti’a, mais peu ou point d’hébraïsmes ; à peine une citation de l’Ancien Testament, I Tim., v, 18, 19 On note pareillement l’absence de

presque tous les mots favoris de l’Apôtre : aStxo ; , àxï9aa<rta, ày.poêuTTÏa, i%oiTçtaiai< : , yvtupiZeiv, SiaôrjxYj, Sixacoojvv], ô'.naiwij.a, Soxsïv, Iv.oktto ; , eSUffriv, spY a vô|iou, xàyti, xaTepYâÇEaôai, xpsîouMV, (asiÇcuv, picxpô ; , [itopîa, o[j.oioOv, 6510tto(ia, ôuocioç, opxv, o’jpavoç, TrapàSoticç, îcapa).a[iêâvetv, îtEtôeiv, rceiTOtôévac, 7re7toi'9r É (riç, 7CEp17raTeiv, ol noXXot, o7cXâYxva, TOMretvô ; , 'jio6c<y ! a, uîô ; toô 0eo3, <pù<nç, xapfÇeaOoet, xP’I’tocLa syntaxe des Pastorales s'éloigne fort de celle des écrits pauliniens. Le style y est lâche, terne, prolixe, sans vigueur et sans vie. Plus de pensées brillantes ni de vigoureuses antithèses. Aucun développement dialectique. On dirait que l’on a évité systématiquement tout ce qui caractérise la manière littéraire de l’Apôtre.

Cette diversité de style est indéniable et beaucoup plus tranchée qu’ailleurs. Mais doit-on en conclure rigoureusement à une diversité d’auteur ? Le problème est délicat, sans pour cela rester insoluble. N’y a-til pas à faire valoir les circonstances toutes particulières dans lesquelles ces trois lettres ont été composées ? D’abord la similitude de langue qu’on remarque entre elles s’explique par cela qu’elles ont été écrites pour un but à peu près identique et dans un laps de temps très court. Si, au contraire, elles diffèrent notablement, sur ce point, de celle des autres Épltres, c’est que, par leur objet, elles s'écartent d’un façon notable du thème ordinaire qu’on y traite. Saint Paul n’avait pas à entamer ici des controverses dogmatiques sur la justification avec ses deux disciples préférés ou à revenir sur sa lutte avec les judaïsants des premières missions. De plus, ses lettres étaient adressées généralement à des communautés et s’adaptaient à des situations d’ensemble, à des nécessités d’ordre général ; dans le cas présent, il s’agit de lettres privées et de conseils paternels. La lettre à Philémon n’est-elle pas d’une facture tout autre que celle des Épltres aux Colossiens et aux Éphésiens, encore qu’elle ait été écrite à la même époque et portée par le même courrier ? Les hapax legomena ne sontpas un critérium infaillible pour solutionner la question d’auteur. « Quand on songe, dit Reuss, combien peu de pages nous avons de l’apôtre Paul, sur combien d’années elles se répartissent, combien de sujets différents il y traite et combien il fait preuve de liberté, d’adresse, de génie même, dans le maniement d’une langue très riche par elle-même, et qu’il s’agissait maintenant de façonner pour le service d’un cercle d’idées toutes nouvelles, on serait en droit de s'étonner s’il y avait là une monotone uniformité et si son vocabulaire était moins riche. Si ce premier argument (celui des hapax) devait être considéré comme démontrant la diversité des auteurs, il n’y aurait pas deux de toutes ces Épîtres qui ne dussent finir par être attribuées à des plumes différentes. » Les locutions nouvelles peuvent être une conséquence du changement qui s'était opéré dans la vie de l’Apôtre et dans l'Église elle-même. Certains latinismes : x*P tv ïz ctv > gratiam habere ; 81' îjv aîti’av, quam ob rem ; xaxoûp-foç, maleficus ; itpôxptjia, preejudicium, étaient d’usage courant et pouvaient résulter d’un long séjour à Rome. Le manque de discussion dialectique vient de ce que l’Apôtre ne veut que signaler à ses disciples les erreurs à éviter sans entrer avec elles en discussion. Tite et Timothée n’avaient pas besoin, pour être persuadés, de ce genre de démonstration. La dépression générale qui se manifeste dans le style et les idées de l'écrivain est peut-être un effet de l'âge. Paul était alors plus que sexagénaire. Quoi qu’il en soit, ces pages refroidies, dernier reste « d’une voix qui tombe et d’une ardeur qui s'éteint, » laissent encore loin derrière elles les longues amplifications de Clément de Rome et les pages plus ou moins colorées des écrivains postapostoliques.

VII. Classement. — Certains critiques, tels que von Soden, Handc, p. 159 ; Moffatt, Histor. N. T., p. 560 ;

MacGiffert, Apost. âge, p. 413, d’ailleurs hostiles à l’authenticité des Pastorales, ont interverti l’ordre traditionnel suivant lequel on les trouve rangées dans la Bible. D’après eux, notre seconde Épître à Timothée serait, en réalité, la première en date, puis viendrait l'Épître à Tite et enfin la première Épitre à Timothée. Les preuves sur lesquelles ils s’appuient sont les suivantes : l’auteur, dans la II" à Timothée, insiste moins sur les faux docteurs que dans les deux autres lettres : leurs doctrines paraissent aussi moins bien caractérisées et ne préoccupent pas si vivement l’Apôtre que dans la I re à Timothée. D’autre part, l’organisation ecclésiastique, qui se laisse à peine deviner dans la IIe à Timothée, fait en grande partie le thème des deux autres Épltres pastorales, signe évident que celles-ci sont d’une date postérieure. Aureste, le rapprochement de II Tim., IV, 9-22, avec les finales des Épltres aux Colossiens et à Philémon prouve qu'à peu d’exceptions près, c’est le même entourage qui se trouve autour de l’Apôtre, ce qui fait penser à la première captivité, celle dont parlent les Actes. Enfin, la preuve décisive semble donnée par le fait de deux personnages, l’un nommé Hyménée, l’autre Philète qui, d’après II Tim., ii, 17, continuent à troubler l'Église, alors que dans I Tim., i, 20, on les donne déjà comme excommuniés. — On répond à ces difficultés que les avis sur la conduite à tenir à l'égard des hérétiques devaient, au contraire, être plus longuement développés et plus minutieusement circonstanciés dans une lettre écrite à Timothée, à Éphèse, où il demeure pour gérer, pendant quelque temps, la place de son maître. Là surtout, au centre même de l’erreur, il importait d’avoir des règles fermes et très explicites pour préserver la communauté chrétienne des fausses doctrines qui menaçaient de l’envahir. Act., xx, 29. Les mêmes explications n'étaient plus nécessaires dans une lettre — c’est le cas de notre IIe à Timothée — où saint Paul ordonnait à son disciple de quitter Éphèse pour se rendre à Rome auprès de lui, II Tim., iv, 21. Quant aux longs développements de la I re à Timothée et de l'Épître à Tite, relativement à la hiérarchie et à la discipline ecclésiastique, la raison en est dans le but, les circonstances de ces deux Épîtres. Toutes deux, en effet, visent des situations analogues. La I re à Timothée avait en vue le gouvernement de l'Église d'Éphèse ; l’Epître à Tite, l’organisation des communautés de Crète. Cela ne pouvait se faire, on le comprend, sans qu’il soit question des divers degrés de la hiérarchie ecclésiastique. Tout autre est l’idée principale de la IIe à Timothée, qui est un message de rappel et un testament. Rien d'étonnant non plus à ce que ce soit à peu près le même personnel d’amis qu'à la fin de la première captivité romaine qui entoure l’Apôtre lors de son second emprisonnement. Les deux événements ne sont d’ailleurs séparés que par un intervalle de deux à trois années à peine. Il n’y a donc rien de péremptoire dans l’argument qu’on prétend tirer des deux Éphésiens, Hyménée et Philète. Même après leur bannissement de l'Église, ils pouvaient continuer à exciter des troubles et devenir un danger par leurs doctrines perverses et leur prosélytisme. La seconde à Timothée signale l’habileté avec laquelle les erreurs de ces deux hérétiques se glissaient parmi les fidèles, ce qui n’implique pas qu’ils lissent encore partie de l'Église. Au total, la seconde Épître à Timothée renferme quantité de détails qui ne permettent pas de la reporter à l'époque de la première captivité. Comment expliquer, par exemple, le manteau et les livres laissés à Troade, la maladie de Trophime laissé à Milet, le voyage dans l’Archipel ? Toutes ces circonstances ne cadrent pas avec le récit des Actes rapportant, escale par escale, et presque jour par jour, la traversée de Paul prisonnier. Ainsi, pour se borner à un seul fait comment l’Apôtre peut-il dire qu’il vient de laisser

Trophime à Milet, s’il s’agit du voyage de la troisième mission, quand on voit plus loin, dans les Actes, xxi, 29, que Trophime accompagne Paul à Jérusalem ? On ne voit pas non plus, si Paul n’est pas repassé à Troade depuis l’an 58, pourquoi il redemande des livres et un manteau laissés depuis près de huit ans chez Carpus. Est-il explicable que, parmi tant de messagers venus d’Asie Mineure ou de Macédoine, aucun n’ait eu l’occasion de les lui rapporter ?

VIII. Situation historique. — D’après le contenu de la lettre, Paul, allant en Macédoine, vient de passer quelque temps à Éphèse, en compagnie de Timothée, qu’il laisse à la tête de la communauté, avec mission de s’opposer aux diverses erreurs qui commencent à s’y glisser, i, 3. À peu d’intervalle de là, lui arrivent, de la métropole d’Asie, des nouvelles très fâcheuses. Timothée, avec son naturel timide, iv, 12, et un état de santé des plus précaires, rencontrait, dans l’exercice de sa charge, toutes sortes de difficultés. Paul lui écrit alors, pour le guider et le soutenir au milieu de l’épreuve, cette première lettre où il lui rappelle les directions qu’il lui a précédemment données. L’idée centrale de ces quelques pages est tout entière dans le ꝟ. 15 du chap. m : l’va EtSvjç ir<5 ; Stï èv oîxo> ©eoO àvxsTpé<pss6ai.

IX. Temps et lieu de la rédaction. — L’opinion sur ces deux points dépend, en grande partie, de celle que l’on adopte par rapport à l’authenticité de l’Épître elle-même. Or, d’après ce qui a été établi plus haut, il faut placer cette première lettre vers l’année 64 ou 65, c’est-à-dire dans la période d’activité apostolique qui sépare les deux captivités de l’Apôtre. On peut donc conjecturer qu’elle a été écrite en Macédoine, pendant la tournée pastorale qu’y fit Paul au sortir de son premier emprisonnement, 1, 3.

X. Intégrité. — Aucun soupçon ne s’est jamais élevé autrefois à cet égard. Les doutes ne commencent qu’avec la mise en cause de l’authenticité. Ceux qui cherchent à trouver dans ces lettres des billets authentiques adressés par saint Paul à Timothée distinguent, d’une façon plus ou moins arbitraire, les parties dues à la plume de l’Apôtre et celles qui ont été ajoutées, beaucoup plus tard, par une main étrangère. Le travail le plus original et le plus complet, à ce point de vue, est celui de Knoke, Comm. in den Past., 1889, qui croit avoir retrouvé des éléments primitifs de cette première lettre dans trois lettres antérieures, dont deux de Paul à Timothée et la troisième due à un auteur inconnu du IIe siècle, qui aurait fondu ensemble ces trois écrits, dans le but de mettre sous le patronage vénéré d’un Apôtre bien connu les institutions ecclésiastiques qui commençaient à fleurir dans les communautés chrétiennes de l’Asie. Harnack, Chron., p. 482, 484, pense que iii, 1-13 ; v, 17-20, sont des fragments qui ne peuvent être antérieurs à l’an 138. Ce ne sont que des affirmations sans preuves.

XI. Analyse du contenu. — r. prologue, i, 1-2. — L’en-tête de cette lettre’est simple, bref et sans phrase, comme on pouvait l’attendre d’un maître écrivant à un disciple et à un collaborateur de tous les instants. Le titre d’Apôtre se trouve associé au nom de Paul non dans un but apologétique, mais uniquement pour rappeler à Timothée à quel titre il doit recevoir cet ensemble de règles et de mesures administratives, surtout de quelle source dérive l’autorité qu’il lui a déléguée. Le Christ est appelé « notre espérance » pour écarter sans doute les fausses perspectives de ceux qui, amusant les fidèles avec des rêveries extravagantes, leur faisaient perdre de vue les grandes vérités du christianisme.

il. corps se l’épure, i, 3- vi, 19. — Sans prétendre enfermer les idées de la lettre dans un cadre trop rigide, il semble qu’on peut cependant y distinguer deux

parties principales qui s’appellent et se répondent. Dans l’une, il est surtout question de ce que Timothée doit faire sur-le-champ, à Éphèse, au nom de l’Apôtre et comme son délégué ; dans l’autre sont indiqués les devoirs habituels du même Timothée comme pasteur d’âmes.

A) 1° partie. — Le mandat confié à Timothée, i, 3m, 16. — 1° S’opposer aux fausses doctrines, i, 3-20.

— Les ordres à exécuter, de la part de saint Paul, ont été dictés par la situation grave où se trouvait l’Église d’Éphèse au moment où l’Apôtre se rendait en Macédoine. Les sombres pressentiments dont il avait fait part aux anciens, dans son discours de Milet, Act., xv, 29-30, ne s’étaient que trop réalisés. Des doctrines étranges circulaient dans la communauté. Il était de toute nécessité de s’opposer à leur diffusion. Timothée reçut donc comme première tâche de dénoncer le péril de ces nouveautés malsaines, dont le danger est ici, avant tout, d’ordre moral. Le reproche à leur faire est de volatiliser en chimères puériles la vertu sanctifiante de l’Évangile. En effet, elles s’éloignent de l’enseignement reçu dans l’Église (éTe ?o818aoxa), E ! v), se perdent en mythes et en généalogies interminables, peut-être au sujet de certains personnages ou de certains faits de l’histoire sacrée ; ce sont des légendes rabbiniques, dans le genre de celles du Talmud ; elles provoquent des discussions stériles (ÇriTTi<reiç), détournent la doctrine évangélique de son vrai but, qui est de promouvoir l’œuvre de Dieu, exaltent à tort et à travers la Loi ancienne, obscurcissent l’éclat de l’Évangile. Aussi l’Apôtre enjoint-il à son disciple, au nom même de la consécration solennelle qui l’a voué au saint ministère, de combattre ces erreurs pernicieuses et de poursuivre l’œuvre de préservation qu’il a lui-même inaugurée en rejetant de l’Église les deux principaux fauteurs de ces doctrines, Hyménée et Alexandre.

2° Veiller à la célébration du culte, ii, 1-15. — De la doctrine l’Apôtre passe à la réglementation du service religieux. Là encore il y avait à reprendre et à corriger. Une première recommandation semble s’inspirer des circonstances politiques du moment. Si l’on prescrit de prier pour les autorités romaines, c’est qu’on a pour cela, quelque part, des répugnances spéciales. On est à la veille de la guerre de Judée et au lendemain des massacres de Néron. Paul base son conseil sur les principes de son universalisme : l’unité de Dieu et l’unité du Sauveur. Si Dieu veut le salut de tous les hommes, des bons comme des méchants, des justes comme des pécheurs, nous n’avons pas à nous montrer plus sévères que lui. Il est prescrit aux hommes de n’élever vers le ciel que des mains pures, exemptes de souillure morale, ef de ne s’approcher de Dieu qu’avec des sentiments pacifiques, allusion discrète à des querelles intestines dans l’Église d’Éphèse. Aux femmes sont données des prescriptions qui rappellent, sur quelques points, celles qui avaient été adressées aux Corinthiens, I Cor., xi, 3-15, relativement à la tenue extérieure dans les assemblées liturgiques.

3° S’appliquer à bien choisir le personnel ecclésiastique, m, 1-13. — À cet effet, l’Apôtre trace la liste d’irrégularités qui doit servir d’indication à Timothée pour écarter les indignes des fonctions saintes. Les règles qu’il donne visent d’abord l’évêque (m, 1-7) qui, en raison de la grandeur de sa charge, doit être, pour tous, un modèle de perfection. Il doit avoir non seulement les qualités d’un pasteur d’âmes, mais aussi celles d’un intendant temporel. Celui qui brigue une si belle fonction doit être irrépréhensible tant aux yeux des fidèles qu’à ceux du dehors, n’avoir été marié qu’une seule fois, être sobre, chaste, aimable, hospitalier, capable d’enseigner. Il ne doit pas être violent mais, au contraire, se montrer doux, pacifique, désintéressé, exempt d’avarice. Sa famille doit être grave comme lui ;

ses fils, soumis, respectueux, à l’abri de tout soupçon. Pas d’évêques néophytes, mais des hommes éprouvés depuis longtemps. L’Apôtre ne se montre pas moins sévère pour l’élection des diacres. On n’est admis à cette fonction délicate qu’après une sérieuse épreuve. Le passé du candidat doit être irréprochable. Avec cela, une grande dignité de vie ; pas de duplicité dans ses rapports avec les membres de l’Église, une tempérance exemplaire, une conscience scrupuleuse en affaires, la haine de l’erreur et du mal. Des veuves diaconesses on exigera une vie honnête, de la réserve dans les conversations, de la sobriété’et de la fidélité à s’acquitter de leur ministère.

B) Seconde partie. — Les devoirs professionnels de Timolhée comme serviteur de l’Église, iii, 14-vi, 19.

— La pensée qui domine cette nouvelle série de conseils est toujours le danger des faux docteurs. On peut les classer ainsi :

1° Devoirs envers la vérité, iii, 15-iv, 16. — Le morceau débute par une sorte de vision phrophétique sur l’avenir de l’Église d’Éphèse. L’Apôtre voit, dans ce qui arrive en Asie, l’image de ce qui se reproduira plus tard, un peu partout, quand il aura disparu : d’un côté, l’Église de Dieu, dépositaire officielle de la vérité, faisant briller aux yeux de tous le trésor dont elle a la garde ; de l’autre, les efforts des prophètes de mensonge, qui essaient de renverser la colonne brillante d’où rayonnent les bienfaisantes clartés de l’Évangile. En face d’une pareille situation, le devoir du pasteur d’âmes est tout tracé. Il doit garantir le troupeau de la contagion, lutter par tous les moyens contre l’erreur, faire resplendir, par l’enseignement de la parole et de l’exemple, la vérité qui lui a été confiée. Les obligations pastorales sont, pour ainsi dire, contenues dans la notion de l’Église. L’Apôtre les résume en deux points : la parole et l’exemple. Par le premier moyen, Timothée inculquera aux fidèles les vrais enseignements de la foi. Il ne prêtera pas l’oreille aux inepties doctrinales et aux pratiques ridicules des faux docteurs. Il utilisera son temps d’une façon beaucoup plus profitable, en se livrant à la piété. Puis, pour fortifier dans les cœurs l’effet de sa parole, Timothée s’efforcera d’inspirer à tous, même aux plus anciens, le respect dû à sa dignité, suppléant au défaut de l’âge par la gravité d’une vie où tout deviendra exemple : paroles, conduite, charité, foi, intégrité morale. En même temps, il vaquera, jusqu’au retour de Paul, aux fonctions normales du ministère : lectures publiques, exhortations, didascalie. Pour remplir avec succès ces divers offices, le disciple n’a qu’à mettre en exercice le charisme qui est en lui et qui lui a été communiqué, à la voix des prophètes, lorsque les anciens de Lystres lui imposèrent les mains.

2° Devoirs envers les différents membres de l’Église. v-vi, 3. — Dans l’art de gouverner, il faut savoir s’adapter aux diverses catégories de personnes qu’on a sous ses ordres. De là, les avis données à Timothée quant à ses relations : — a) Avec les hommes, v, 1. Ménager les vieillards, surtout s’il faut les réprimander : exhorter plutôt que reprendre. S’il s’agit des jeunes gens, les traiter comme des frères. — b) Avec les femmes, v, 2. Se comporter envers elles, si elles sont avancées en âge, comme avec une mère, et, si elles sont jeunes, comme avec des sœurs, en toute pureté. — c) Avec les veuves. 3-15. L’auteur distingue, dans cette classe, deux catégories : la vraie veuve, celle qui n’a ni enfants, ni parents pour la recueillir, qui met en Dieu son espoir et passe sa vie en veilles saintes, en prières continuelles. À celle-là est due naturellement une part des aumônes recueillies par l’Église. Timothée veillera à ce que la communauté acquitte avec fidélité cette dette d’honneur. Il ne permettra pas, au contraire, qu’on laisseà la charge de l’Église les veuves qui ont encore des parents. Quant à la veuve consolée

qui vit dans les plaisirs, c’est la seconde sorte de veuves. L’Église n’a aucun devoir envers elle, d’ailleurs elle est morte au point de vue spirituel.

A partir du ꝟ. 9, l’Apôtre passe à un autre ordre d’idées. Des veuves assistées il en vient aux veuves chargées dans l’Église d’un ministère de charité. Il exige que la veuve élue à cette fonction n’ait pas moins de soixante ans, qu’elle n’ait été qu’une fois mariée et qu’elle soit recommandable par ses bonnes œuvres, par la manière dont elle a élevé ses enfants, par le zèle qu’elle a mis à exercer l’hospitalité, à laver les pieds des saints, à soulager les affligés, à faire le bien sous toutes ses formes. Les jeunes veuves doivent être écartées de ces fonctions ; car, au bout de quelque temps donné au Christ, leur nouvel époux, elles sont exposées à lui être infidèles et à ne plus penser qu’à se remarier.

d) Avec les presbytres. v, 17-22. — Faire en sorte que l’Église sache reconnaître par de larges offrandes les bons services de ses chefs, surtout lorsqu’ils joignent à leurs fonctions administratives le travail de la parole et de l’enseignement. Si quelqu’un de ces presbytres vient à être soupçonné ou convaincu de quelque grave délit, la première règle sera de ne pas prêter trop facilement l’oreille aux dénonciations. C’est pour eux surtout qu’il faut impliquer les principes de procédure indiqués par le Deutéronome, xiv, 15. Timothée ne devra donc recevoir l’accusation que si elle s’appuie sur deux ou trois témoignages. Mais si la preuve est faite, le coupable doit être repris devant tous ses collègues. Il va sans dire que le jugement doit être impartial. Pour éviter autant que possible d’admettre, dans le collège des anciens, des hommes indignes ou incapables, ne pas faire de choix précipité.

e) Avec les esclaves, vi, 1-2. — L’auteur signale le danger qu’il y aurait si l’adhésion à la foi chrétienne rendait les esclaves enclins à la rébellion ou même à la négligence dans leur service habituel. En conséquence, Timothée les persuadera, si leur maître est païen, de redoubler de respect, pour éviter qu’on ne blasphème le nom de Dieu et la foi qu’ils professent ; quant à ceux qui ont un maître chrétien, il leur conseillera de n’être pas moins vigilants à s’acquitter de leur service.

3° Désintéressement, vi, 3-19. — Ce paragraphe donne à saint Paul l’occasion de revenir sur les faux docteurs pour peindre leur cupidité. L’amour de l’argent est, au fond, le mobile de ce pseudo-ascétisme. Aussi la conduite de Timothée doit-elle contraster avec cet amour effréné des biens de la terre. Simple en sa vie, se contentant de peu, l’homme de Dieu ne se mettra pas en peine d’amasser des richesses, mais il recherchera la justice et la piété, la foi, la charité, la constance et la douceur. Les jl. 17 et 19 s’adressent aux riches de la communauté d’Ephèse pour leur recommander l’humilité, la confiance en Dieu seul et une large libéralité.

ni. épilogue, 20, 21. — Ces deux derniers versets résument toute l’Épltre. C’est le mot d’ordre du chef à un subordonné qui est sous les armes, aux prises avec l’ennemi, et qui défend avec courage un trésor qui lui a été confié.

XII. Bibliographie. — « Au sujet de l’authenticité des Pastorales. — En dehors des catholiques, elle est défendue intégralement par les protestants conservateurs et par presque tous les commentateurs jusqu’à B. Weiss dans Meyer, 5e édit., 1886 ; plus tard, le même auteur a changé d’opinion et se tient plutôt vers le non liquet ; par la plupart des anglicans. Godet, Introd., 1. 1, p. 628 sq. ; Zahn, Einl. in das N. T., 4e édit., 1906, p. 402 sq. ; Bertrand, Essai critique sur l’authenticité des Epîtres pastorales, Paris, 1888 ; Salmon, Introd. to the N. T., p. xx ; Findlay, dans son appen

dice à la traduction anglaise de l’ouvrage de Sabatier, The Apostle Paul, 1891 ; Lightfoot, Biblical essaya, en. xi, xm. Ont admis une authenticité demipaulinienne : Eichhorn, Credner (1836), Ewald, Hitzig, Hausrath, Pfleiderer, Hesse, Die Austehung derneutest. Hirtenbriefe, Halle, 1889 ; Knoke, Comment., Gœttingue, 1889 ; Harnack, Die Chronologie, 1897, p. 480-485 ; Renan, Saint Paul, p. xlix ; Beyschlag, Die christliche Gemeindeverfassung im Zeitalter des N. T., 1874 ; Sabatier, Encyclopédie des sciences religieuses, t. x, 1881, p. 250 ; Clemen, Paulus, sein Leben und Werken, Giessen, 1904, p. 146 ; Von Soden, Handcom., 1893 ; Bovon, La théolog. du N. T., 1905, p. 327-339. Depuis Baur, toute l’école de Tubingue a rejeté’authenticité des Pastorales. Consulter sur ce point le travail approfondi de H. Holtzmann, Die Pastoralbriefe krilisch und exegetisch behandelt, 1880 ; Reuss, Les epîtres Pauliniennes (en exceptant la IIe à Timothée dont il reconnaît l’authenticité) ; Mac Giffert, Hist. of christ, in tlie Apostolic âge, p. 398 ; Jûlicher, Einl., 1901, p. 136-146 ; Moflatt, dans Encycl. biblica, Timothy and Titus, col. 5079-5096.

2° Commentaires. — Dans l’antiquité, spécialement ceux de saint Jean Chrysostome, de l’uéodore de Mopsueste, de Théodoret, de l’Ambrosiaster ; plus près de nous, Wegscheider (1 Tim.), 1810 ; Heydemeich, 1826-28 ; Mack, 1836-1841 ; Léo, 1837-1850 ; Mathias, 1848 ; Wiesinger (Gomm. d’Olshausen), 1850 ; Ellicott, 1865 ; Fairbairn, 1874 ; Kôlling, 1882 ; Meyer, XI, 6° éd., 1893 ; von Soden, Handc, 1893 ; Walter Lock, The Pastoral Epistles, dans The lntern. crit. Comm. ; A. E. Humphrey, dans Canib. Bible for schools, 1897.

3° Travaux particuliers. — Schleïermacher, Ueber den sogen. ersten Brief des Paulus an den Timotheus, 1807 ; Planck, Bemerkungen ûber den ersten Brief an Timoth., Gœttingue, 1808 ; Bœhl, Ueber die Zeit der Abfassung und den paulin. Charakter der Briefe an Timoth. und Titus, 1829 ; Ad. Curtius, De tempore quo prior ad Timoth. exarata sit, 1828 ; Baur, Die sogen., Pastoralbriefe, 1835 ; Baumgarten, Die Aechtheit der Pastoralbriefe, 1837 ; Rolle, De authentid ep. pastor., 1841 ; Scharling, Die neusten Untersuchungen ûber die sogen. Pastoralbriefe, 1846 ; Good, Authenticité des Epîtres pastorales, Montauban, 1848 ; Saintes, Etudes critiques sur les lettres pastorales attribuées à saint Paul, Paris, 1852 ; Rudow, De argumentis historicisquibus épis t. pastoralium origopaulina impugnata est, Gœttingue, 1852 ; Dubois, Étude critique sur l’authenticité de la première Épître à Timothée, Strasbourg, 1856 ; Mangold, Die Irrlehrer der Pastoralbriefe, 1856 ; Otto, Die geschichtlichen Verhâltnisse der Pastoralbriefe, 1860 ; Ruffet, Saint Paul, sadcuble captivité à Rome, 1860 ; Ginella, De authencia ep. Pauli pastoralium, 1865 ; Plitt, Die Pastoralbriefe, 1872 ; Herzog, Ueber die Abfassungzeit der Pastoralbriefe, 1872 ; Pierre Bordier, Les Épîtres pastorales, 1872 ; Lemme, Dos echte Ermahnungsschr. d. Ap. P. an Tim., 1882 ; Eylau, Zwr Chronol. der Pastoralbriefe, 1884 ; Spitta, Zur Gesch. und Litt. d. Urchrist., 1893, p. 35, 49 ; l’article de B. Weiss dans American journal of theology, avril 1897. Voir F. Prat, sur l’état actuel de la critique indépendante, dans Théologje de saint Paul, 1908, p. 467.

5. TIMOTHEE (DEUXIÈME ÉPITRE A). — 1° Situation historique. — L’Apôtre est à Rome, en prison, I, 8, 12, 16, 17 ; ii, 9, 10, pour la cause du Christ, tandis que Timothée est à Éphèse, i, 16, 18 ; ii, 17 ; iv, 14, 15, 19, où les mauvaises doctrines continuent à pulluler, du fait d’Hyménée et de Philète, iii, 17. Il n’y a pas longtemps que Paul est à Rome et en prison, puisqu’il donne à Timothée, comme des nouvelles, certains détails sur une tournée qu’il vient de faire dans l’Archipel ; à

Milet, il a laissé Trophime malade, iv, 20 ; à Troade, il a laissé un manteau et des livres chez Carpus, ii, 13 ; Éraste est resté à Corinthe, iv, 20. Paul a donc traversé récemment l’Asie Mineure et la Grèce, en compagnie d’un groupe de disciples, Tit., iii, 15, assez nombreux (oî fier’Èjioy TtâvTEç), parmi lesquels on comptait sans doute, outre ceux qui viennent d’être cités, Tite, Démas, Crescent, Tychique et un certain nombre d’Éphésiens. À Rome, les Asiates, entre autres Phigelle et Hermogène, l’ont abandonné, i, 15. Un autre Éphésien, au contraire, Onésiphore, un de ses anciens amis, étant venu à Rome, l’a cherché, l’a trouvé et l’a soigné dans sa captivité, i, 16, 18. L’Apôtre est plein du pressentiment de sa fin prochaine, iv, 6-8, il craint, pour son second procès, une issue fatale. À mesure qu’approche le dénouement, il sent le vide autour de lui. Ses disciples sont loin de lui. Démas, peu fait à l’épreuve, vient de le quitter pour suivre des intérêts périssables ; il est retourné à Thessalonique, iv, 10 (texte grec) ; Crescent est allé en Galilée, Titus enDalmatie, IV, 10. Tychique n’est pas encore revenu d’Ephèse, où Paul lui-même l’a envoyé, lv, 12, en sorte que l’Apôtre n’a que Luc auprès de lui. Dans l’intervalle, ses adversaires exploitent son isolement. Un certain Alexandre, ouvrier en cuivre, originaire d’Ephèse, lui a fait beaucoup de peine et une vive opposition ; cet Alexandre est maintenant de retour en Asie, IV, 14, 15. Par rapport au procès en cours, voici où en sont les choses : Paul a déjà comparu devant l’autorité romaine ; dans cette comparution, personne ne l’a assisté, lv, 16, mais Dieu l’a aidé et l’a arraché de la gueule du lion, iv, 17. Dans le cas, malheureusement trop probable, où la seconde audience se terminerait par une condamnation, il désire avoir, près de lui, ses plus chers disciples. En conséquence, il prie Timothée de venir avant l’hiver, iv, 9, 21, et d’amener Marc avec lui, iv, 11. Le voyage devra, vraisemblablement, s’effectuer en repassant par la Macédoine et la Grèce, puisque l’ordre est de passer par Troade. Là, Timothée prendra la pénule, les livres et les feuillets de parchemin que son maître a laissés chez Carpus, iv, 13. Mais, avant de quitter Ephèse, le disciple fidèle ne manquera pas de saluer Aquila et Priseille, ainsi que la maison d’Onésiphore, iv, 19. En lui faisant cette dernière recommandation, Paul lui envoie les saluts des plus notables chrétiens de Rome, tels qu’Eubule, Pudens, Linus, Claudia, et les vœux de tous les autres frères. Tel est l’ensemble des choses qui ressort de la lettre elle-même. 2° Emprunts littéraires. — Le ton général del’Épître étant celui de l’intimité, non celui de l’argumentation, il s’ensuit que les citations sont peu nombreuses. On n’en trouve même aucune qui soit explicite. À peine de vagues réminiscences, par exemple, ii, 13 = xvi, 5 ; Is., xxvi, 13 ; ii, 20 = Sap., xv, 7 ; ii, 24, 26 = Is., xlii, 1-3 ; lv, 14 = Ps. lxii (hébr.) ; iv, 14, 17, 18 = Ps. xxii (hébr.). Quelques-unes ne nous arrivent qu’à travers les paroles de Matth., vii, 23, 24 ; Luc, xiii, 25-27. Saint Paul a-t-il, en revanche, usé ici de la tradition juive ? Un seul mot pourrait y faire penser, m, 8-9, là où il est question de Jannès et de Mambrés. On croit aussi reconnaître, dans un autre passage de cette lettre, ii, 11-13, des fragments d’un hymne chrétien avec des pensées reproduites dans divers écrits du Nouveau Testament. Rom., vi, 8 ; viii, 17 ; Matth., x, 33 ; Luc, XII, 9. Il y a peut-être des traces d’un Credo primitif au ii, 8. Burn, Introd. to the Creeds, p. 27-30. Certaines paroles, ii, 8 ; II, 19, ont aussi l’air d’être empruntées à quelque proverbe alors en vogue dans les Églises du temps. On soupçonne, en outre, la belle sentence, iv, 8, d’être tirée d’un âf po ?ov du Seigneur. Enfin, la doxologie finale, iv, 18, semble imiter la dernière prière de Jésus. Les points de contact avec les autres Epîtres sont assez nombreux, spécialement avec

l’Épltre aux Romains. On pourra s’en rendre compte par le tableau suivant : i, 3 = Rom., i, 8 ; i, 7 = Rom., vin, 15 ; i, 8 = Rom., i, 16 ; Eph., iv, 1 ; i, 9 = Rom, , xvi, 25 ; Eph., i, 4 ; ii, 8 ; i, 11 = I Tim., ii, 7 ; i, 14 = Rom., viii, 11 ; ii, 4-6 = I Cor., ix, 7 ; ii, 11. 13 = Rom., vi, 8 ; viii, 7 ; ii, 16 = Tit., iii, 9 ; ii, 22 = ITim., vi, 11 ; iii, 5 = TH., i, 16 ; iii, 7 = Tit., i, 16 ; iii, 1 ; iv, 6 = Phil., i, 23 ; ii, 17.

3° Authenticité. — Du côté de la critique interne, la seconde Épître à Timothée se trouve bien plus favorisée que les deux autres Pastorales. On y sent davantage le ton, les manières, les sentiments de saint Paul ; sa profonde affection pour ses compagnons d’apostolat, sa tendresse paternelle pour Timothée, sa délicate sensibilité. Avec cela, sa haute idée de l’apostolat, son insistance à rappeler, à tout propos, son enseignement et ses souffrances, le même beau mépris de la mort, le même dévouement pour la cause de l’Église, la même promptitude à donner son sang comme libation pour assurer le sacrifice de foi des fidèles, la même assurance par rapport à la protection divine. On retrouve, aussi, dans ces pages, l’amour de l’Apôtre pour ses anciens coreligionnaires, i, 3 ; Phil., iii, 5, sa haute estime, son culte pour les écrits de l’Ancien Testament, ni, 16, 17, son respect des traditions juives, IV, 8. Mêmes affinités avec les doctrines des grandes Épîtres : la prédestination, la grâce, la victoire sur la mort, la résurrection du Christ, base de notre espérance, la nécessité de souffrir, le courage chrétien, les épreuves de la foi. Aussi, dans toutes les parties, il n’y a rien qui ne rappelle, d’une façon ou d’une autre, la plume du grand Apôtre. Ajoutons que, dans le détail, les faits répondent, sans trop d’effort, à l’état de choses général qui ressort de l’ensemble de la lettre ou qui résulte des autres données de l’histoire. « On peut même dire, dit Reuss, qu’aucune autre, parmi les Épîtres pauliniennes, ne lui est comparable à cet égard. Le fait que le ton y change plusieurs fois, selon que l’auteur est dominé momentanément par l’idée de sa fin prochaine ou qu’il se dégage de cette préoccupation pour ne songer qu’à la cause qu’il défend, ce fait n’est qu’une preuve de plus que nous avons là des épanchements naturels qui doivent provoquer la sympathie et désarmer la critique. C’est à dessein, continue le même auteur, que nous avons écrit cette dernière phrase. Car, de nos jours, la majorité des savants qui se sont occupés de l’histoire de la littérature apostolique ont exprimé la conviction que les deux Épîtres à Timothée et celle à Tite sont une production postiche du second siècle et ne sauraient être attribuées à l’apôtre Paul. Nous ne nous trompons pas en disant que, si celle que nous avons devant nous, en ce moment, existait seule, et que nous ne possédions plus les deux autres, il est peu probable que de pareils doutes eussent jamais surgi. Car, à y regarder de près, les arguments produits par la critique à l’appui de sa manière de voir sont empruntés, à bien peu d’exceptions prés, au texte de ces dernières. La raison pour laquelle la deuxième à Timothée a été comprise dans le même arrêt de réprobation, c’est qu’on leur a trouvé à toutes les trois une certaine physionomie commune, laquelle cependant, si l’on veut rester dans les limites du positif, se réduit à bien peu de chose. » Les Épîtres Pauliniennes, t. ii, p. 219. Renan a été si frappé de l’accent sincère de certains versets de cette Epître que, tout en tenant l’écrit entier, sous sa forme actuelle, pour une sorte de roman historique, il ne peut s’empêcher d’admirer avec quelle habileté l’auteur a su conserver le sentiment très juste de la situation de Paul à ses derniers moments. Aussi ne trouve-t-il pas impossible qu’on se soit servi, pour la rédaction des Épîtres pastorales, de billets authentiques adressés à Tite et à Timothée, qu’on aurait délayés dans un sens conforme aux idées du temps et


avec l’intention de prêter l’autorité de l’Apôtre aux développements que prenait la hiérarchie ecclésiastique. Saint Paul, Introd., p. xlviii. La plus sérieuse diffl-. culte contre l’authenticité de cette jipttre vient donc de ses attaches littéraires avec les deux autres Pastorales, surtout de cette forte proportion d’Hapax legomena (il y en a 41) et d’expressions stéréotypées qu’elle a en commun avec ces deux écrits, et qui font soupçonner une main étrangère. Son sort est ainsi hé à celui des deux autres Épîtres et en partage les vicissitudes.

4° Intégrité. — Les hypothèses imaginées, dans ces derniers temps, pour faire de cette Épître le résultat d’un amalgame de lettres ou de billets pauliniens n’ont d’autre appui théorique que des hypothèses de critique interne. Les manuscrits ne portent trace d’altération ni de juxtaposition d’aucune sorte. On allègue donc contre l’unité du présent morceau diverses considérations tirées du contenu de la lettre. Il semble, observent certains critiques, que l’Épître poursuit simultanément deux buts contradictoires, les premiers chapitres donnant des instructions à Timothée, comme s’il devait continuer son ministère, à Ephèse, les derniers, au contraire, le pressant de venir à Rome. Il y a, d’autre part, des détails, dans certaines parties de la lettre, qui contredisent d’autres passages du même écrit, par exemple, iii, 6=n, 17 ; iv, 11 ; iv, 21. Enfin, plusieurs passages portent l’empreinte de Paul alors que d’autres, par exemple, ii, 14-nr, 9, ne sont que de vagues généralités ou peuvent facilement se détacher du contexte, I, 15-18. De là, les deux essais tentés, il y a quelque temps, pour reconstituer, sous leur forme primitive, les lettres ou billets qui ont servi à composer cette unique Epître. Le premier essai retrouve les fragments des deux lettres : l’une, I, l-iv, 8 + IV, 19-21 et 22, écrite par Paul lors de sa seconde captivité ; l’autre, iv, 9, 18 + iv, 22, datant de la prison de Césarée ou bien de la première captivité à Rome. Dans la seconde tentative de reconstitution, on suppose que, vers le règne de Domitien, un disciple de Paul recueillit des fragments de lettres authentiques et en fit une seule lettre. Son but était de soutenir le courage des fidèles en face de la persécution et de les mettre en garde contre certaines nouveautés doctrinales. Plusieurs critiques vont jusqu’à préciser les divers morceaux qui ont été mis à contribution. L’auteur, d’après eux, aurait d’abord utilisé une lettre très courte écrite par Paul dans le cours de la troisième mission, et ayant pour objet de rappeler Timothée auprès de lui, lettre comprenant iv, 9-15 + 19 ; 21 + 22 a, puis il aurait inséré une autre missive dans laquelle, sur la fin de la captivité de Rome, l’Apôtre encourageait le même disciple à bien s’acquitter de sa tâche, i, 1 + ii, 13 + iii, 10 + IV, 8 + iv, 16, 18 ; enfin, il aurait ajouté de son propre chef, tout un passage, ii, 14 + iii, 9. Voir, pour plus de détails, Clemen, DieEinheitlickkeitder Paul. Briefe, p. 142-156 ; Mac Giffert, The apostolic âge, p. 404-414 ; Moffatt, The hist. N. T., p. 700-704. Une exégèse attentive à faire ressortir, dans cette lettre, la liaison des idées, leur harmonie parfaite avec la situation donnée, leur couleur nettement paulinienne, sera le moyen de démonstration le plus efficace pour montrer ce que valent ces diverses suppositions. *

5° Importance. — Cette lettre n’ajoute que peu de chose à la théologie de saint Paul. En fait de doctrine, elle se borne à affirmer l’inspiration de l’Ancien Testament, son utilité pour la prédication chrétienne ; elle insinue peut-être une formule de prière pour les morts, 1, 18, déjà en usage chez les fidèles ; elle montre la force qu’on peut puiser dans le dogme de la Résurrection du Christ, pour affronter la mort et les supplices. Comme ecclésiologie, rien d’original. Avec la première à Timothée, cette seconde lettre atteste la signification

V. — 71

qu’on attachait déjà à l’imposition des mains : on y voyait le signe de la transmission de l’autorité apostolique ; elle fait constater, en même temps, comment cette sorte d’hérédité spirituelle, remontant aux Apôtres en ligne continue, a été créée pour être la sauvegarde du dépôt de la foi. Au point de vue historique, la seconde à Timothée complète les Actes, fait connaître les derniers instants de la vie de saint Paul, son second emprisonnement à Rome, sa réconciliation avec Jean Marc, le nom de quelques compagnons d’apostolat dont ne parlaient pas les autres Épîtres.

6° Analyse du contenu. — I. Prologue, i, 1-5. — Dans l’adresse, ꝟ. 1-2, Paul se déclare apôtre par la volonté de Dieu pour prêcher aux hommes la vie que Dieu promet à ceux qui croient en Jésus. L’action de grâces, ꝟ. 3-5, rappelle, en termes émus, les bienfaits de Dieu envers Timothée, manière délicate de faire son éloge.

II. Corps de l’ÉpItre. i, 6-iv, 8.— Cette lettre est en réalité le testament de saint Paul à Timothée, son fils chéri. L’Apôtre y trace ses derniers conseils, en prévision d’une mort prochaine. On peut les résumer en deux grands devoirs, imposés à l’ouvrier évangélique dans ces temps de trouble.

A) i™ partie. — Le courage. 1-6, iii, 14. Le principal danger, pour les disciples de Paul, après la mort de leur maître, était de se laisser envahir par les impressions de tristesse, d’abattement, d’inquiétude qui se dégageaient de la marche générale des événements depuis que l’Église était entrée dans l’ère des persécutions. Déjà, le vide avait commencé à se faire autour de l’Apôtre dans sa seconde captivité. Rien ne s’adaptait donc mieux aux circonstances présentes qu’une vive exhortation à la vaillance. Point de faiblesse à cette heure critique. Et d’abord ne pas rougir de la doctrine du Christ ni des chaînes de Paul. L’ouvrier évangélique, Timothée en particulier, n’a, pour faire face aux événements, qu’à mettre en exercice la force divine contenue dans le charisme d’évangéliste, ꝟ. 7. Trois idées inspireront son courage : 1° L’énergie surnaturelle renfermée dans le charisme d’ordination, ꝟ. 6-10 ; 2° la certitude du succès final, j. 12-13 ; 3° l’action de l’Esprit-Saint. Pour appuyer sa doctrine par des exemples, l’Apôtre met en parallèle les Asiates qui ont rougi de sa chaîne et l’excellent Onésiphore, d’Éphèse, dont la visite lui a fait tant de bien ! En forme de conclusion, l’Apôtre réitère à Timothée des pressantes exhortations pour lutter vaillamment. À cet effet, il présente tour à tour l’ouvrier de l’Évangile comme un soldat enrôlé dans la milice du Christ, un athlète qui, pour gagner le |3pa6Etov, se soumet au régime sévère de l’athlétique, un laboureur prodiguant sans compter, à ses humbles travaux, ses peines et ses sueurs. Timothée comprendra la leçon contenue dans ces allégories. Le Seigneur, au reste, l’aidera à en faire son profit. La grande pensée qui sera, pour le disciple, comme elle l’a été pour le maître, le soutien de son courage, sera l’espoir de vivre et de régner avec le Christ, espoir basé sur la Résurrection du Christ et sur le lien de mystique solidarité qui associe le croyant aux destinées du Sauveur, à sa mort, à sa résurrection, à sa gloire dans le ciel.

B) 2 S partie. — La lutte contre l’erreur, ii, 14-iv, 8. — L’auteur distingue deux catégories d’erreurs : celles d’aujourd’hui et celles de demain. Quant aux premières, ii, 14-26, Timothée devra conjurer devant le Seigneur, c’est-à-dire par les plus graves attestations, ceux qui sont chargés d’enseigner de ne point entrer en discussion avec les faux docteurs. Ces controverses seraient plus dangereuses qu’utiles, ꝟ. 14. Il faudra employer, pour enrayer le mal, la parole et l’exemple. A l’égard de ceux qui se sont laissés surprendre de bonne foi par les doctrines erronées, supporter tout en

patience et reprendre avec douceur. Dans les cas extrêmes, c’est-à-dire lorsqu’on n’a rien à attendre de la clémence, mais qu’on se trouve en face d’hommes pervers, décidés à ruiner l’Église, il n’y a qu’une mesure à prendre, se séparer d’eux, les éviter, au besoin les livrer à Satan comme Paul l’avait fait lui-même pour Hyménée et Alexandre. Par rapport aux erreurs futures, iii, 1-iv, 8, Paul trace un tableau très sombre des pseudo-prophètes de l’avenir. Il en fait des hommes profondément égoïstes, avides d’argent, vaniteux, hautains, insolents, ingrats, impies, sans affection, insociables, enclins à la calomnie, à l’intempérance, à la cruauté, à la débauche. Ils ont tous les vices. Cependant, il n’y a pas à s’en effrayer _ outre mesure. Timothée est dans les meilleures conditions possibles pour leur tenir tête. Il a d’abord l’avantage exceptionnel d’avoir été formé par Paul lui-même et il sait, par l’exemple de son maître, comment Dieu arrache ses apôtres aux plus fortes épreuves. Timothée n’aura qu’à rester fidèle aux enseignements de son maître.

III. Épilogue, iv, 8-22. — L’Apôtre presse son disciple de venir avant l’hiver, saison peu propice aux voyages par mer. Il a d’autant plus besoin de lui qu’il se trouve presque seul, soit par l’abandon de certains disciples, soit par l’éloignement des autres. Il lui donne des nouvelles de son procès. Sa première comparution n’a pas donné lieu à une condamnation, mais il n’en sera pas de même de la seconde. Aussi se prépare-t-il à la mort. Suivent des saluts pour Aquila et Priscille et pour la famille d’Onésiphore, qui sans doute était mort. Paul, en terminant, présente à Timothée les salutations des frères de la Ville éternelle : Eubule, Pudens, Claudia, Linus.

Pour la Bibliographie, voir la I re à Timothée, col. 2238.

C. Toussaint.

    1. TIRIN Jacques##

TIRIN Jacques, commentateur belge, né à Anvers, le 16 septembre 1580, mort dans cette ville le 14 juillet 1636. Il entra dans la Compagnie de Jésus et y remplit diverses fonctions, entre autres, celle de professeur d’Écriture Sainte. On a de lui : Commentarius in Vêtus et Novum Testamentum, tomis tribus comprehensus (avec le texte de la Vulgate), 3 in-f°, Anvers, 1632. Ce commentaire a été très répandu et a eu de nombreuses éditions. Voir E. Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, t. viii, 1898, col. 49-52.

    1. TISCHENDORF Lobegott Friedrich Constantin##

TISCHENDORF Lobegott Friedrich Constantin, théologien allemand, né le 18 janvier 1815, à Lengenfeld, en Saxe, mort à Leipzig, le 7 décembre 1874. Il commença en 1839 à préparer une édition critique du Nouveau Testament. En 1840, #1 partit pour Paris et passa plus de quatre ans en France, en Angleterre, en Italie et en Orient. Il revint à Paris, à Londres et à Oxford en 1849. En 1853, il visita pour la seconde fois le mont Sinaï, et en 1859, il s’y rendit une troisième fois ; après quoi, il alla en Russie et de nouveau en Italie, toujours en quête de découvertes littéraires. Sa première publication importante fut le Codex Ephrsemi rescriptus, manuscrit palimpseste de la Bibliothèque nationale de Paris, dont le Nouveau Testament parut en 1843 et l’Ancien en 1845. Voir t. ii, col. 1872.

Il avait préparé en même temps l’édition du Codex Claromontanus, mais il ne put la faire paraître qu’en 1852. En 1846, il avait mis au jour les Monumenta sacra inedita et le Codex Friderico-Augustanus contenant 43 feuillets du Codex Sinailicus, qu’il avait découverts au monastère grec de Sainte-Catherine au mont Sinaï. Un nouveau voyage au mont Sinaï en 1859 lui fit découvrir le reste presque complet du Codex, qu’il y avait cherché en vain en 1853. Voir Tischendorf, Novum Testamentum grsece, édit. vm* critica major, t. iii, p. 345-354. Le Codex Sinaiticus parut en 1862,

4 in-f°. Le Nouveau Testament fut publié séparément en 1863. Voir Sinaiticus (Codex), col. 1783. Le Codex Palalinus des Évangiles latins parut en 1847, le Codex Amiatinus en 1850, le Codex Claromontanus des Épîtres de saint Paul, grec-latin, en 1852. Il donna en 1855 un volume d’Anecdota sacra et, de 1855 à 1870, sept volumes de Monumenta sacra ; De evangeliorum apocryphorum origine et usu, in-8°, La Haye, 1851 ; De Isrælitarum per mareRubrum transitu, in-8°, Leipzig, 1847 ; Synopsis Evangelica, in-8°, Leipzig, 1851 ; Acta Apostolorum apocrypha ex XXX anliquis codicibus grsecis, in-8°, Leipzig, 1851 ; Apocalypses apocryphse, 1866 ; Wann wurden unsere Evangelien verfasst 9 in-8°, Leipzig, 1865, publication populaire qui fut vendue àdes milliers d’exemplaires et traduite dans la plupart des langues européennes (traduction française par L. Durand, A quelle époque nosÉvangiles furent-ils com posés ? in-8°, Paris, 1866 : et De la date de nos Évangilesin- 12, Toulouse, 1867) ; huit éditions du Nouveau Testamentgrec, Leipzig, 1841, une protestante et une catholique, Paris, 1842 ; 4e, Leipzig, 1849 ; 5°, 1850 ; 6e, 1854 ; 7e (major et minor), 8e (major et minor), 1869 ; cette dernière est la meilleure. On aune traduction française de sa Terre Sainte, avec les souvenirs de S. A. I. le grand-ducConstantin, in-8°, Paris, 1868. Voir G. R. Gre, gory, Allgemeine deutsche Biographie, t. xxxviii, 1894, p. 371.

    1. TISCHRI##

TISCHRI, septième mois de l’année juive. Il est appelé Ethanim, III Reg., vi, 38. Voir Éthanim, t. ii, col. 2005. D’après les Talmudistes, c’est dans le mois de tischri, qu’on dit venir de arvii, « commencer », que

le monde fut créé et que naquirent et moururent les patriarches. Cependant, R. Josua place ces événements au mois de nisan. Voir J. Levy, Chaldâisches Wôrlerbuch ûber die Targumin, 2 in-4°, Leipzig, 1866-1868, t. ii, p. 565.

    1. TISON##

TISON (hébreu : ’ûd ; Septante : SaXô ;  ; Vulgate : titio, torris), morceau de bois dont une extrémité est encore en feu. — Isaïe, vii, 4, appelle « deux bouts de tisons fumants » Rasin de Syrie et Phacée d’Israël, conjurés contre Juda. Us ont beau se rapprocher, ils ne rallumeront pas l’incendie, car ils ne produisent plus que de la fumée. — Samarie a été bouleversée comme Sodome et Gomorrhe et, bien que devenue semblable à un tison tiré du feu, elle ne s’est pas convertie. Am., îv, 11. — Les Israélites revenus de captivité sont aussi comme ci un tison arraché du feu. » Zach., iii, 2.

II. Lesètre.

    1. TISSERAND##

TISSERAND (hébreu : ’orêg ; Septante : û ?ivT-r, ç, èpYaî° ! AÉvo ;  ; Vulgate : teœens), celui qui tisse des étoffes. « Tisser » se dit’ârag, cf. à ?iyyr, le nom de l’araignée, et sôkêh, ifxlim, texere, ordiri. Le « tissu », produit de ce travail, s’appelle’érég, niisbesôt, û : pao-[iévo’/, ’[otoç, textura, opus textile ou textrinum. — Pour tisser, l’ouvrier se sert d’un métier composé d’un cadre de bois, sur lequel sont disposés en haut et en bas deux rouleaux ou ensouples. Sur ces rouleaux, on tend des fils parallèles appelés chaîne, de manière que les fils pairs puissent être écartés des fils impairs au moyen d’un dispositif placé au bas de la chaîne. Quand ils sont séparés angulairement, on fait passer entre eux horizontalement un autre fil appelé trame, qu’on lance à l’aide d’une navette sur laquelle il est enroulé, voir Navette, t. iv, fig.402, col. 1493, et qu’on serre contre la trame précédente au moyen d’un sorte de peigne. A mesure que le tissu avance, on l’enroule sur l’ensouple supérieure et on déroule la chaîne inférieure, jusqu’à ce que la pièce entière soit achevée. Les anciens Égyptiens savaient se servir du métier à tisser. Deux femmes s’accroupissaient aux côtés d’un métier horizontal, se lançaient mutuellement la trame et la ser raient ensuite au moyen d’une barre pressée par un effort commun. Voir t. iv, fig.80, col.261. Quelquefois, au lieu d’employer une ensouple inférieure, on se contentait de tendrelesfils de la chalneeny attachant des poids (fig.496). Dans une caverne troglodyte de Chanaan, on a retrouvé une collection de poidsde tisserandsoud’autreséléments de métier à tisser. Ces poids sont formés par de petits disques ou des cônes d’argile ou de pierre perforés. A une époque assez reculée, au moins dès les premières invasions sémitiques, les Chanacéens savaient donc utiliser plus ou moins habilement le poil de leurs chèvres et la laine de leurs brebis pour se fabriquer des étoffes grossières. Cf. H. Vincent, Canaan, Paris, 1907, p. 214, 405, 406. — L’usage du métier était familiei aux Hébreux ; ils s’en servaient pour fabriquer différentes espèces de tissus. Voir Étoffes, t. ii, col. 2035. Les patriarches nomades se procuraient vraisemblablement des étoffes toutes faites. Mais, dès le désert, on

5 ?e

496. Métier grec. Torsion des fils de ta chaîne au moyen de poids.

D’après Rich, Diction, des antiquités grecq. et rom., p. 634.

voit les Hébreux en fabriquer eux-mêmes, spécialement pour l’usage du Tabernacle et pour les vêtements des prêtres. Exod., xxviii, 32 ; xx’xv, 35 ; Eccli., xlv, 12 ; etc. Il leur futdéfendu de se faire pour eux-mêmes des étoffes dans lesquelles se mélangeraient des fils de différentes espèces. Lev., xix, 19. Cette prohibition tendait sans doute à signifier aux Hébreux qu’ils ne devaient pas se mêler eux-mêmes à des races étrangères. Job, vii, 6, fait allusion au métier, quand il dit que ses jours passent plus vite que la navette. Il compare son corps à un tissu d’os et de nerfs composé par Dieu. Job, x, 11. Un Psalmiste reprend la même idée, quand il dit (dans le texte hébreu) que Dieu l’a tissé dès le sein de sa mère. Ps. cxxxix (cxxxviii), 13. — Samson suggéra à Dalila l’idée de lui tisser les cheveux en même temps que sa toile. Elle les fixa en effet avec la cheville de son métier ; mais, en se réveillant, Samson arracha la cheville et le tissu. Jud., xvi, 13-14. Il est plusieurs fois question de 1’  « ensouple de tisserands », menôr’orgîm, nio-a/.Xov ûsaivôvriav, liciatorium texenlium, à laquelle on compare la hampe de la lance d’un géant. IReg., xvii, 7 ; II Reg., xxi, 19 ; I Par., XI, 23 ; xx, 5. — Les tisserands savaient mêler des fils d’or à leur ouvrage. Ps. xlv (xliv), 14. — Des maisons de prostituées avaient été ménagées dans le Temple par Manassé, et les femmes y tissaient des tentes pour

Astarthé, IV Reg., xxiii, 7, sans doute en étoffes précieuses. — Isaïe, xix, 9, parle de ceux qui, en Egypte, travaillent le lin peigné avec une carde (fig. 497), et tissent le coton. — Ézéchias, déplorant sa mort prochaine, dit que Dieu l’ôte de la trame pendant que, comme un tisserand, il enroulait le tissu de sa vie. Is., xxxviii, 12. Le prophète compare encore l’œuvre des méchants à celle que tissent les araignées. Is., lix, 5. — Anne, femme de Tobie, travaillait à gages, yipcôsûero, pour gagner sa vie ; la Vulgate ajoute qu’elle allait tous les jours tisser de la toile. Tob., ii, 19. — Ontissaitle byssus à Beth-Aschbéa. I Par., iv, 21. Voir Aschbéa, 1. 1, col. 1073.

497. — Carde égyptienne pour peigner le lin.

D’après Wilkinson, Manners and customs of the ancient

Egyptians, 2- édit., t. ii, p. 174.

A l’époque évangélique, il y avait dans le quartier neuf de Jérusalem des marchands de laine et un marché aux habits. Cf. Josèphe, Bell.jud., V, viii, 1. L’industrie des lainages y florissait, Erubin, x, 9 ; Baba kamma, x, 9, de même que celle des tissus de lin à Scythopolis, en Galilée. Cꝟ. 1er. Kidduschin, ii, 5 ; Mùller, Geographi gr. min., 31, t. ii, p. 513 ; Edict. Dioci., 26-28. Voir Tarse, col. 2012.

H. Lesêtre.
    1. TITAN##

TITAN (FILS DE) (Septante : Uol Ti-révwv), géants dans la mythologie grecque. La version des Septante, à laquelle la Vulgate a emprunté cette expression, Judith, xvi, 8, a traduit vraisemblablement ainsi dans un sens figuré l’hébreu gibbôrîm, « . forts », de même qu’elle a rendu refa’îm par ysyavrec, « géants ». D’après la mythologie hellénique, les Titans étaient fils d’Uranus, « le Ciel », et de Gaia, « la Terre ». Ils furent vaincus par les dieux de l’Olympe et Zeus (Jupiter) les condamna à demeurer dans le Tartare. Les poètes latins, Horace, Od, , iii, 4, 42, etc., les confondirent avec les géants. Dans l’usage, ces expressions étaient devenues synonymes de « forts, valeureux ». Les Septante rendirent l’hébreu Refa’îm par ily » Yteç, Gen., xiv, 5 ; Jos., xii, 4, etc. Saint Jérôme conserva le mot hébreu et le transcrivit par Raphaïm, dans plusieurs passages ; dans d’autres, il le rendit par giganles. Voir Raphaïm 1, col. 976. Le mot Titan ne se lit dans la Vulgate que Judith, xvi, 8.

1. TITE (grec Tréoç), l’un des plus chers et des plus dévoués collaborateurs de saint Paul, qui l’a plusieurs fois mentionné dans ses Epitres, Gal., ii, 1, 2 ; II Cor., n, 13 ; vii, 6, 13 ; viii, 6, 16, 23 ; xii, 18 ; II Tim., iv, 16 ; Tit., i, 4. Le silence des Actes à son égard a fait conjecturer, par plusieurs critiques fWieseler, Chron., p. 204), queTite était le n.om d’emprunt d’un des compagnons de saint Paul et on a cherché tour à tour à l’identifier soit avec Timothée, soit avec Silas, soit avec Titus Justus. Act., xviii, 7. Aucune de ces suppositions ne mérite créance. La forme latine de ce nom ne donne aucune indication sur l’origine ou le pays du disciple

en question. On ignore son lieu de naissance. Cependant diverses légendes le placent en Crète, saint Chrysostome à Corinthe, les Actes de Thècle, c. ii, à Icône. Quelques-uns le mettent à Antioche parce que c’est là qu’il semble avoir fait connaissance avec l’Apôtre et s’être attaché à lui. Ce qu’on peut affirmer, c’est qu’il était d’origine païenne, Gal., ii, 3, et qu’il fut probablement converti par saint Paul (l’vijdccp tsxvco, Tit., i, 4). L’Apôtre se rendit avec lui à la conférence de Jérusalem, le présenta aux Apôtres et aux anciens et s’opposa avec énergie aux injonctions des judaïsants, qui voulaient qu’il fût circoncis. Gal., n, 3. À la troisième mission, Tite paraît avoir pris la place de Silas et, dès ce moment, avoir suivi partout l’Apôtre dans ses courses évangéliques et ses fondations. Il devait être du nombre de ceux dont parle l’Épitre aux Galates, ot aùv ly.oi, i, 2. On suppose qu’il séjourna longtemps à Éphèse avec son maître. C’est sans doute de là qu’il se rendit à Corinthe pour remplacer Timothée, calmer les esprits, organiser la collecte. Dans ces diverses tâches il déploya tant de zèle, de courage et d’intelligence qu’il rétablit la paix dans l’Église de Corinthe, se conciliant les sympathies de tous. II Cor., vu, 13. Inquiet sur l’issue de sa mission, l’Apôtre n’eut de repos que lorsqu’il vit son disciple le rejoindre en Macédoine et lui apporter de consolantes nouvelles. II Cor., ii, 14 ; vii, 11, 15. Il l’envoya de nouveau à Corinthe, en avant-garde, avec deux frères de Macédoine choisis par les Églises, II Cor., viii, 23, afin d’achever la collecte pour les Saints de Jérusalem. Il n’est plus question de Tite qu’après la première captivité romaine. Cette omission, par saint Luc, d’un collaborateur de Paul aussi important est, dans les Actes, un des points les plus obscurs. Sans les Pastorales, on aurait complètement perdu la trace d’un des ouvriers évangéliques les plus en vue du Nouveau Testament. L’Épitre à Tite nous apprend, en particulier, qu’après sa libération l’Apôtre se rendit en Crète, évangélisa plusieurs villes de cette contrée (xatà ttiSaiv, i, 5), et laissa Tite continuer l’œuvre commencée, avec mission d’organiser les, nouvelles communautés. Le zélé disciple rencontra dans l’île de vraies résistances, surtout de la part des Juifs, qui y étaient nombreux. Tite, 1, 10. Ce n’est pas sans raison qu’on associe d’ordinaire les noms de Tile et de Timothée. Tous deux semblent avoir été les deux disciples préférés par l’Apôtre. Chacun d’eux avait pourtant son individualité à part. En comparant 1 Tim., iii, 12, avec Tit., ii, 15, on peut conclure que Tite était plus âgé que Timothée, avec plus d’expérience et de fermeté. I Cor., xv, 10 ; II Cor., vu, 15. Il était surtout apprécié par les Églises où dominait l’élément d’origine païenne. II Cor., vii, 15. Comme Timothée, il marche dans les voies de l’Apôtre, II Cor., xii, 18, il est son fils chéri, Tit., i, 4, son frère bien aimé, II Cor., ii, 13, son précieux collaborateur. Il Cor., viii, 23. On ignore l’histoire de ses dernières années. La seconde Épitre à Timothée, IV, 10, indique qu’il est en Dalmatie, peu de temps avant la mort de saint Paul. Les écrivains ecclésiastiques le font vivre et mourir en Crète. Eusèbe, H. E., III, iv, 6 ; t. xx, col. 220 ; Const. Apost., vii, 46, t. i, col. 1053. Cf. Lipsius, Die Apokryph. Àpostelgeschichte, t. ii, p. 401406. André de Crète en a fait un panégyrique, Orat. xvi ; Pair, gr., t. xcvii, col. 1141-1169. Le corps de Tite a été conservé à Gortyne pendant plusieurs siècles, puis transféré à l’église de Saint-Marc, à Venise. L’Église latine célèbre sa fête le 6 février ; les Églises grecques, syriaque et maronite, le 25 août.

C. Toussaint.

2. TITE (épître A). — I. Introduction. — 1° Situation historique. — Comme dans les lettres à Timothée, on n’a pour se renseigner que ce que suggère l’Épitre elle-même. Voici les faits. qu’elle suppose. Quand saint 2249

TITE [ÉPÎTRE A)

2250

Paul écrit à Tite, celui-ci est dans l'île de Crète, i, 5. L’Apôtre, qui vient de visiter ce pays, y a laissé son disciple pour achever l’organisation des Églises et pour aller de ville en ville établir des presbytres et des épiscopes, i, 5. Certains détails laissent entendre que le christianisme était relativement assez ancien dans l’ile, i, 10. Les erreurs dont on signale la présence dans les Églises de cette contrée ne peuvent se concevoir, en effet, qu’après un temps plus ou moins long, depuis la première prédication évangélique. On a donc essayé de rattacher l’implantation de la foi chrétienne dans cette contrée soit à la présence de quelques Juifs ou prosélytes crétois convertis par les prodiges de la Pentecôte, Act., ii, 11, soit à une période de la vie de Paul relatée par les Actes. Mais ces deux hypothèses rencontrent les mêmes difficultés, disonsimpossibilités. Selon les Actes, en effet, Paul ne touche la Crète qu’une fois, et cela lors de son naufrage ; il n’y fait qu’un très court séjour, et durant ce séjour, il est captif. Ce n’est sûrement pas à ce moment-là que Paul a pu fonder des Églises dans l'île. De même, si le christianisme existe là depuis près de trente ans, comment se fait-il que les frères ne viennent pas, comme ceux d’Italie, Act., xxviii, 15, au-devant de l’Apôtre, qu’ils ne lui prêtent pas secours ? L’auteur des Actes, si cela fût arrivé, n’aurait pas manqué de le dire. S’il se tait, c’est que la foi nouvelle était, à cette époque, ignorée ou peu connue des Crétois. L'évangélisation de l'île est donc probablement postérieure au premier passage de Paul. Ce qu’il est permis de conjecturer, c’est que, peu de temps après, c’est-à-dire pendant sa captivité à Rome, l’Apôtre eu peut-être l’idée d’envoyer là quelqu’un de ses disciples, Tite, par exemple, avec l’intention de le rejoindre aussitôt après sa libération. Effectivement Paul y aurait fait un court séjour avant de gagner Éphèse, confiant à Tite le soin de poursuivre l'œuvre commencée. Il semble que ce dernier ait été, lui aussi, aux prises avec des difficultés assez analogues à celles où se trouvait alors Timothée. Les mêmes fausses doctrines se glissaient de toutes parts dans les Églises d’Orient, les mêmes abus s’y produisaient, les mêmes dangers s’y faisaient jour. Paul venait à peine d’envoyer sa première lettre à Timothée qu’il apprit, on ne sait comment, la situation précaire des Églises de Crète. Il se mit aussitôt à rédiger quelques avis pour Tite. Il n’eut guère pour cela qu'à répéter ce qu’il venait d'écrire à Éphèse. Apollos, qui était auprès de lui, reçut, avec un ancien scribe nommé Zénas, la mission de porter ce message à son destinataire. On comptait beaucoup sur l'éloquence du docteur alexandrin pour réduire au silence l’opposition juive ou judaïsante. Act., xviii, 27, 28. En outre, Paul promettait à Tite de lui envoyer bientôt Artémas et Tychique qui, sans doute, devaient l’aider dans ses travaux et le remplacer momentanément. Il prie, en effet, son disciple de venir, dès qu’il aura reçu ces deux frères, le rejoindre à Nicopolis, où il compte passer l’hiver, iii, 12. Enfin, il recommande, en terminant, de faire la conduite à Zénas et à Apollos qui ne devaient guère que passer, et d’avoir grand soin d’eux, iii, 13.

2° Emprunts littéraires. — On a relevé, dans cette Épitre, un certain nombre d’expressions, parfois même des phrases entières, prises de divers côtés. Il y a d’abord un vers d'Épiménide, i, 13, peu flatteur pour les Crétois ; puis une sorte de proverbe reçu dans les milieux chrétiens du temps, iii, 8. Bien que l’auteur ne cite jamais expressément l'Écriture, il est pourtant visible qu’il s’en inspire en maints endroits, i, 14 = Isaïe, xxix, 13 ; ii, 5 = Is., lii, 5 ; ii, 14 = Ps. cxxx, 8 ; Deut., xiv, 2 ; Ézéch-., xxxvii, 23 ; iii, 6= Joël, iii, 1. On s’aperçoit, en outre, par nombre de réminiscences et d’allusions, qu’il connaît les discours du Seigneur, mais il n’y a pas trace, dans ce qu’il en rapporte, de

sources écrites ou d’emprunts directs aux Évangiles canoniques, i, 15= Marc, vii, 9 ; Luc, xi, 41 ; iii, 5 = Joa., iii, 5 ; iii, 10= Matth., xviii, 15-17. Aurait-il subi l’influence delà Ia Pétri ? Plusieurs critiques l’ont cru, tant les points de contact entre les deux Épîtres sont frappants, i, 5-9=1 Pet., v, 1-4 ; iii, 1 = 1 Pet., ii, 13 ; iii, 4-7=1 Pet., i, 3-5. Plus nombreuses, on peut même dire plus littérales sont les ressemblances avec les autres écrits pauliniens : I, 1-4= Rom., i, 1 ; XVI, 25-27 ; 1, 15= Rom., xiv, 20 ; ii, 14= Gal., i, 4 ; iii, 1 = Rom., xiii, 1 ; iii, 3= Eph., ii, 3 ; I Cor., vi, 9-11 ; iii, 5= Eph., ii, 8, v, 26, surtout avec la première à Timothée. Ici, la similitude touche presque à l’identité. Dans plusieurs passages, les deux lettres ont l’air de se copier. L’entrée en matière est tout à fait pareille, Tit., i, 5= I Tim., i, 3, le but général, le plan dans son ensemble, la teneur des avis, la forme du langage ellemême ne diffèrent point : Tit., i, 4= I Tim., i, 1, 2 ; i, 5-9= iii, 1, 7 ; i, 11 = iii, 9 ; ii, 1, 6= v, 1-2 ; ii, 7= iv, 12 ; ii, 9-10= vi, 1 ; ii, 14= ii, 6 ; ii, 15= iv, 12 ; m, 5=1, 9 ; iii, 9= iv, 7. Cette analogie rappelle celle qui existe entre l'Épître aux Colossiens et l'Épître aux Éphésiens.

3° Temps et lieu de la composition. — De ce qui précède^ il découle que l'Épître à Tite et la première à Timothée ont été écrites à peu près vers le même temps, à peu de distance l’une de l’autre. Toute hypothèse qui mettrait entre elles un intervalle de plus d’un ou deux mois devrait être repoussée. On serait même tenté de les dater du même jour. S’il faut, pourtant, en reporter la rédaction à des périodes différentes, la priorité de temps semble être en faveur delà lettre à Timothée. Le projet d’aller hiverner à Nicopolis paraît, en effet, modifier les premières intentions de Paul, qui se proposait d’abord de retourner sous peu à Éphèse, I Tim., ni, 14 ; iv, 13. Maintenant, s’il parle d’aller en Épire, c’est qu’il a changé d’itinéraire. On objectera peut-être qu’il s’agit de Nicopolis, en Thrace, sur le Nestus, près des frontières de Macédoine ; mais la présence de Tite en Dalmatie, à peu de temps de là, II Tim., iv. 10, rend fort improbable cette supposition. C’est bien dans la Nicopolis d'Épire, l’ancienne Actium, bâtie par Auguste en souvenir de sa victoire, que Paul a dessein de passer l’hiver, en compagnie de Tite. On sait que par une singulière coïncidence, Josèphe, Act., XVI, v, 3, Hérode le Grand avait largement contribué à la construction de cette ville. La seule raison qu’on pourrait alléguer contre l’antériorité de l'Épître à Timothée, c’est que l’organisation ecclésiastique y paraît plus complète et plus avancée que dans l'Épître à Tite. Mais l’obstacle disparaît si l’on veut songer, un instant, à la différence d'âge des Églises dans lesquelles travaillait chacun des deux disciples. La communauté d’Jtphèse existait depuis près de dix ans quand la Crète recevait à peine les premiers germes de l'Évangile. S’il fallait en croire la suscription des manuscrits grecs, Paul aurait écrit de Nicopolis en Macédoine. Mais il n’y a là qu’une glose de copiste fondée, sans doute, sur l’interprétation de iii, 12. On croit généralement que la lettre a été composée dans quelque Église de Macédoine, Philippes, Bérée ou Thessalonique, peu de temps avant le voyage de Paul en Épire. L’Apôtre presse le départ de son disciple, ffTto-jSxcrov êÀŒïv, parce que l’hiver approche et que la navigation va devenir difficile. On peut supposer qu’il lui fit indiquer, de vive voix, par Apollos, le port où il l’attendait avant de prendre ensemble le chemin de l’Occident. En tenant compte de toutes ces circonstances, l'Épître devrait être datée du mois de septembre ou, au plus tard, de fin octobre, l’an 65.

4° Authenticité. — Sans vouloir revenir sur un problème déjà traité (voir Épître [Première] a Timothée), il n’est pas cependant sans intérêt de grouper quelquesuns des traits particuliers de cette Épître qui en con

Brmen l’origine paulinienne. Car non seulement il n’y a. rien, ni comme doctrine, ni comme circonstances personnelles, ni comme ton épistolaire, qui sorte, dans cet écrit, du tour d’esprit propre à l’Apôtre ou qui répugne soit aux données de l’histoire, soit aux conjectures qu’elle peut autoriser, mais encore on saisit, ici et là, des particularités difficiles à expliquer, si l’on admet que ces lignes sont d’une plume étrangère. En tout cas, il faudrait conclure à une imitation extrêmement habile. Sans doute, on pouvait, avec les autres Épltres, mettre en circulation des idées semblables à celles de Paul, mais ce qui n'était guère possible, c'était de les adapter, sans aucun heurt, à une situation créée de toutes pièces, en dehors de la vie historique qu’on met en scène, tout en gardant dans l’ensemble le ton et la couleur individuelle des écrits du grand Apôtre : sa manière de citer les auteurs grecs, I Cor., xv, 33, d’appliquer à sa thèse les textes de l’Ancien Testament, de tirer d’un dogme des conclusions morales. Avec cela, les grands principes de l’universalisme, la vie éternelle promise à tous, la grâce du salut apportée au genre humain, II, 11, la mort rédemptrice du Christ, l’effusion de l’Esprit parle baptême, la vie nouvelle dans l’amour, le non-sens des distinctions entre mets purs et impurs. Mais si le fond des idées est bien de Paul, on ne peut, du moins avec la même assurance, en dire autant du style. Le vocabulaire de l'Épître à Tite n’a presque rien de commun avec celui des grandes Épîtres. Les hapax legomena s’y rencontrent dans une proportion par trop forte. On en compte jusqu'à 26 dans l’espace de 46 versets. Ce qui inquiète encore d’avantage, c’est, à chaque instant, de trouver quelqu’une de ces formules stéréotypées, exclusivement propres aux Pastorales, par exemple, Èiriyvouiç à-reix< ; , |uz( f uvaixo ; àvrip, xaXà epya, ô vûv aïâjv, 6 nÉyaç Bsbç, XouTpàv TtaXivyevEai’aç, itia-ub ; o XiSyoç, etc. Car tout cela semble nous mettre en face d’un auteur qui a son style à lui, ses expressions toutes faites, imposées peut-être par une sorte de langage technique plus ou moins officiel, résultat d’une lutte déjà longue contre l’erreur. Ce qui aggrave la difficulté, c’est que ces phrases conventionnelles ne sont pas la propriété exclusive de l'Épître à Tite, mais sont communes à toutes les Pastorales. On a ainsi un groupe de trois écrits qui ont une langue particulière, différente de celle des autres Epîtres pauliniennes, assez originalepour faire penser à un écrivain distinct de Paul, mais écrites à une époque différente.

5° Intégrité du texte. — Les manuscrits ne laissent . soupçonner aucune altération. On pourrait toutefois supposer l’insertion de deux versets, i, 7, 9, et une transposition maladroite, iii, 18, à la place du f 14. Mais, à la rigueur, il n’y a aucune raison pressante de retoucher ces passages. La question ne se pose que pour les critiques qui nient l’authenticité de presque toute l'Épître, sauf quelques lambeaux de phrases empruntés à des lettres que Paul aurait écrites à Tite, lorsque celui-ci préparait la troisième visite de l’Apôtre à Corinthe. II Cor., xii, 16. On s’est livré, de ce côté, à des morcellements par trop arbitraires. En dehors des versets III, 12-13 et 12-15, qu’on accepte d’abord comme étant de Paul lui-même, chaque auteur démêle à son gré ce qui est authentique d’avec ce qui ne l’est pas. Cf. Me Giffert, Apostolic âge, p. 406 ; Harnack, Chronologie, p. 480 ; Clemen, Die Einheitlich keit der Paul.Briefe, p. 157-163 ; Mqffatt, Histor. N. T., p. 700.

6° Importance. — Cette Épitre est un document très précieux sur l’organisation de la hiérarchie ecclésiastique, sur la persistance du danger juif dans les communautés fondées par saint Paul, sur les obstacles opposés, par les influences païennes, à la foi du Christ, à sa pleine expansion au sein des l'Églises, sur la discipline merveilleuse qui façonne tous les membres de la nouvelle société pour en faire un corps social modèle,

capable d’attirer à Jésus, par sa belle tenue, sa dignité morale, ses vertus de loyauté, de douceur, d’abnégation, la vieille société grecque et romaine, qui s’abîmait de plus’en plus dans le désordre, l’anarchie, l'égoïsme, la corruption.

II. Analyse du contenu. — A) prologue, i, 1-4. — L’adresse présente quelque ressemblance avec celle de l'Épître aux Romains et la première Épitre de saint Jean. L’Apôlre y résume, en quelques mots, l’origine, le but, l’objet de l’apostolat ainsi que la force qui, au milieu des difficultés de toutes sortes, en est l’appui et le soutien. Paul n'écrit pas à Tite une lettre d’ami mais une lettre de service. De là, le ton et l’objet de ce préambule.

B) corps de l'Épître. i, 5-ih, 11. — Déduction faite de quelques légères différences imposées par des raisons locales, le fond de la lettre à Tite reproduit, dans ses deux parties essentielles, la première Épitre à Timothée. De part et d’autre, ce sont les mêmes avis, les mêmes règles de gouvernement, les mêmes écûeils à éviter, en sorte que l’un des deux écrits ne semble être, en réalité, que la copie réduite de l’autre. Cela s’explique par l’analogie de situation où se trouvaient, tous deux, les destinataires de ces diverses flett » es. Il n’est pas difficile de voir qu'à peu de ebose près, Tite avait mission de fonder en Crète ce que Timothée devait restaurer à Éphèse. Les règles de gouvernement qui font l’objet de cette Épitre donnent lieu à une division en deux parties :

a) i" partie. — Les devoirs des pasteurs. I, 5-16. — Dans l'Église, comme dans toute société bien réglée, les chefs suprêmes ont, pour gérer dignement leur charge, un double devoir : 1° bien choisir leurs subordonnés ; 2° leur donner une sage direction. Tels sont les deux points sur lequels portent les premières recommandations de Paul à son disciple. Il lui détermine les conditions d'éligibilité des presbyteri ou episcopi, i, 6-10. Ce sont les mêmes que dans l'Épître à Timothée. Le côté moral des candidats est ce qu’on doit le mieux examiner. Quant aux devoirs des élus, 9-16, ils sont résumés dans ces prescriptions : 1° prêcher aux fidèles la doctrine sacrée ; 2° réfuter ceux qui la combattent et la contredisent. Ce dernier devoir est motivé, en Crète, par l’apparition de faux docteurs très dangereux, greffant sur la nature vicieuse des Cretois les défauts de la race juive.

b) S' partie. — Les devoirs du troupeau, ii, i-m, 11. — C’est une esquisse de morale sociale à l’adresse de la société chrétienne. On voit poindre, à travers cet ensemble de préceptes, l’idée d’une sorte de code ecclésiastique. Chacun des membres de l'Église, fût-ce le plus humble, a un devoir civique à remplir. Les préoccupations de l’Apôtre ne vont pas seulement, dans cette Épitre, au salut individuel des néophytes, elles embrassent maintenant l'Église tout entière, pour lui assurer, au dedans, la prospérité, le bon ordre, l’harmonieuse coopération de tous à l'œuvre commune et, au dehors, la paix avec les pouvoirs publics, la bonne entente avec les païens, le bon renom de la doctrine nouvelle.

1. À l’intérieur, ii, 1-15. — Les vieillards doivent être sobres, graves, modérés, gardant, dans toute leur intégrité, la foi, la charité, l’attente ferme et patiente de la Parousie. Aux femmes âgées on enjoint de se donner en exemple aux personnes de leur sexe qui sont jeunes ; éviter, en outre, la médisance, l’ivrognerie. Une seule chose est recommandée aux jeunes gens. La vertu de leur âge doit être la tempérance. Éviter avec soin toutes sortes d’excès. Tite qui, comparé à Paul, est encore, un jeune homme, devra par ses actes leur servir de modèle pratique. On compte particulièrement sur les esclaves pour faire briller, par leur conduite, la divinité de la doctrine chrétienne. Par leur condition, ils sont plus à même que personne de

prouver les miracles de force régénératrice contenus dans la foi nouvelle.

2. Au dehors, iii, 1-11. — Paul veut que le chrétien soit un homme d’ordre, en règle avec l’autorité romaine, vivant en bons termes avec les païens et, en général, avec tous ceux qui ne pensent pas comme lui. Tous les frères semontreront donc sujets soumis, obéissants à l'égard des magistrats et des pouvoirs publics, prêls à faire tout ce qu’on demandera d’eux, hormis ce qui serait contraire aux intérêts de la conscience. Point de mauvaises paroles ni de querelles avec les gens du dehors, païens ou juifs non convertis ; se montrer, au contraire, très polis à leur égard et faire preuve, en toutes occasions, de la plus grande douceur. L’idée qui doit inspirer ces sentiments, c’est le souvenir de ce que les néophytes étaient eux-mêmes avant leur con Calig., xxxviii, 8 ; Dion Cassius, liv, 3. Eusèbe, H. E., v, 1, t. xx, col. 425, rapporte la lettre des chrétiens de Lyon sur le martyre d’Attale, où il est dit qu’on portait devant lui une planchette, n(vx£, où il était écrit : Outoç lerriv "AtioO.o ; à -/pianavoç, « celuici est Attale le chrétien ». Pilate se conforma à cet usage après la condamnation de Jésus. La tablette sur laquelle on écrivait était d’abord enduite de couleur blanche et l’on y traçait les lettres en rouge. Pilate rédigea lui-même le texte de l’inscription. Il voulut qu’il fût écrit en hébreu, langue des habitants du pays, en grec, langue des Juifs de la dispersion et des étrangers, et en latin, langue officielle du gouvernement. Le titre fut fixé en haut de la croix et lu par un grand nombre de Juifs, à raison de la proximité du Calvaire. Joa., xix, 19, 20. Les quatre évangélisles mentionnent

. — Ce qui reste du titre de la croix de Notre-Seigneur, conservé dans l'église de Sainte-Croix de Jérusalem à Rome.

Demi-grandeur de l’original.

version. N'étaient-ils pas hier ce que les autres sont aujourd’hui ? Si tout cela est changé, il ne faut en reporter la gloire que sur l’amour miséricordieux du Dieu Sauveur. La transformation qui fait d’un homme un élu du ciel est le fruit, non de ses mérites, mais de la miséricorde de Jésus-Christ et de l’efficacité de ses sacrements. Il n’y a donc pas lieu de traiter les païens avec hauteur et dureté.

C) épilogue, iii, 12-15. — Saint Paul termine sa lettre par diverses recommandations. Il prie Tite de venir le rejoindre, avant l’hiver, à Nicopolis, en lipire, dès que sera arrivé, pour le remplacer, soit Artémas, soit Tychique, de prendre un soin tout particulier du légiste Zénas et d’Apollos, porteurs de la présente missive. Suivent les salutations de la part de ceux qui lui sont liés par l’affection chrétienne, puis le salut final. — Pour la Bibliographie, voir Timothée 4, col. 2238.

C. Toussaint.

    1. TITRE DE LA CROIX##

TITRE DE LA CROIX (grec : èm-rpa<pvi, tîiXos ; Vulgate : superscriptio, titulus), inscription fixée au sommet de la croix pour indiquer le motif de la condamnation. — Chez les Romains, quand un condamné élait conduit au supplice, on portait devant lui, ou il portait lui-même suspendu au cou, un écriteau indiquant la cause de la condamnation. Cf. Suétone,

le litre et le citent plus ou moins complètement. Saint Marc, xv, 26 : '0 BaoïXsù? r15v 'Io’jBatmv, « le roi des Juifs y>, rex Judseorum ; saint Luc, xxiii, 38 : Outoç èotiv ô BaffiXe’jç zib’i 'IouSaioiv, « celui-ci est le roi des Juifs ï>, hic est rex Judmorum ; saint Matthieu, xxvii, 37 : OOtoç ècjTiv 'iYjffoîj ; ô BatrcXsuç toïv 'IouSaîcov, <( celui-ci est Jésus, le roi des Juifs », hic est Jésus, rex Judmorum ; saint Jean, XIX, 19 : 'I^aovz 6 NaÇrapatoç, ô Bao-iXeùç tûv 'IouSai’wv, « Jésus le Nazaréen, le roi des Juifs », Jésus Nazarenus, rex Judseorum. Cette dernière rédaction est la plus complète. Elle indique le nom du condamné, son origine et la cause de sa condamnation. Il avait dû être difficile à Pilate de trouver le libellé de cette cause, après avoir reconnu lui-même qu’elle n’existait pas. Joa., xviii, 38 ; xrx, 4, 6. Parmi tous les motifs d’accusation portés à son tribunal, il choisit celui qui avait vaincu ses hésitations, le titre de roi prêté à Jésus et déclaré par les Juifs en opposition avec les droits de César. Joa., xix, 12, 14. C’est pourquoi les quatre évangélistes reproduisent en commun le titre de « roi des Juifs ». Ce libellé excita le mécontentement des ennemis du Sauveur. Jésus, en effet, à s’en tenir au titre, semblait avoir été crucifié parce qu’il était roi des Juifs. Les pontifes allèrent donc trouver Pilate, soit au moment où le titre apparut à leurs yeux au départ du cor

tège, soit quand ils le virent en haut de la croix, et ils lui demandèrent de le modifier. Ils auraient voulu qu’il écrivit : « Je suis le roi des Juifs, » pour faire ressortir ainsi la prétention qu’ils attribuaient à leur victime. Pilate refusa sèchement d’acquiescer à leur requête, « c Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit, » se contentat-il de dire. Joa., xix, 20-22. — Le titre de la croix, retrouvé en même temps que la croix elle-même, fut apporté à Rome, où il est maintenant conservé dans la basilique de Sainte-Croix de Jérusalem. La planchette qui le constitue était de chêne, de peuplier ou de sycomore ; mais elle est tellement piquée qu’on n’en peut plus déterminer exactement la nature. Elle a dû avoir primitivement 65 centimètres sur 20 ; elle n’en a plus que 23 sur 13. En 1492, les deux lettres uni du dernier mot latin manquaient déjà. En 1564, les mots Jésus et Judseorum n’existaient plus. Aujourd’hui, la relique est encore bien plus réduite (fig. 498). Les lettres sont rouges sur fond blanc ; elles sont légèrement en creux, soit qu’elles aient été tracées avec une sorte de gouge, soit que la couleur rouge ait eu plus d’action sur le bois que le blanc. Elles ont de 28 à 30 millimètres de hauteur, ce qui permettait assez aisément de les lire du bas de la croix et à petite distance. Uue particularité de l’inscription prouve son authenticité : les mots grecs et latins sont écrits à la manière de l’hébreu, de droite à gauche. Dans le principe, les Grecs écrivaient en eflet de cette manière ; ils adoptèrent ensuite le système (30uorpo<p7180v, celui des bœufs qui labourent, commençant une ligne par la gauche, la suivante par la droite et ainsi de suite. Le système actuel avait prévalu depuis plusieurs siècles en Grèce et en Italie, à l’époque évangélique. Mais l’inscription de la croix fut rédigée sous cette forme archaïque, soit pour répondre à une coutume juive de l’époque, soit pour ménager un certain parallélisme entre les trois textes. On voit, par ce qui en reste, que l’inscription avait été exactement reproduite par saint Jean. Des mots hébreux, il n’y a plus que la partie inférieure de six jambages assez difficiles à identifier. Il est certain pourtant que l’inscription hébraïque a été composée, non en hébreu ancien, mais dans le dialecte araméen alors parlé en Palestine, et que les lettres ont été tracées en écriture cursive. Des jambages subsistants, les deux premiers à droite représenteraient la partie inférieure du ii, article précédent le nom de Nazaréen ; le troisième est l’extrémité du 2, le quatrième celle du "i, le cinquième celle du i très allongé dans l’ancienne écriture, et le sixième celle du 3 tel qu’il s’écrivait alors. Dans l’inscription grecque, assez inhabilement exécutée, au lieu de NocÇwpafoc, on a transcrit le mot latin, NAZAPEN8C = NAZARENVS, alors qu’il eût fallu plutôt NAZAPHNOC pour rendre exactement Nazarenus. S. Ambroise, De obit.Theodos., 45, t. xvi, col. 1401, dit que sainte Hélène trouva écrit sur le titre de la croix : Jésus Nazarenus rex Judseorum, et Sozomène, H. E., ii, 1, t. lxvii, col. 929, raconte que le titre fut trouvé écrit dans les trois langues ; et il en cite le texte grec avec le mot NaÇwpaîoç, qu’il reproduit d’après saint Jean et non d’après le titre lui-même. Il faut observer en outre que la dernière lettre de gauche de l’inscription grecque paraît bien être le B de BaaOîJî, qui, par conséquent, n’aurait pas été précédé de l’article O, comme dans le texte de saintjean,

— Cf. J. Bosius, Crux triumphans, Anvers, 1617, i, 11 ; H. Niquet, Titulus sanctse crucis, Anvers, 1670 ; Gosselin, Notice historique sur la sainte couronne, Paris, 1828, p. 40-55 ; Rohault de Flcury, Mémoire sur . les instruments de la Passion, Paris, 1870, p. 183198 ; Vigouroux, Le N. T. et les découv. archéol. mod., Paris, 1896, p. 183-187 ; D. Donadiu y Puignau, Le vrai titre de la croiæ, dans le Compte rendu du IV’Congr. scient, internat, des catholiques, Fribourg,

1898, " sect., p. 65-77.
H. Lesêtre.
    1. TITUS##

TITUS (grec Tîtoc), nom de trois personnes dans l’Écriture.

. TITUS, prénom du légat romain Manilius. II Mach., xi, 34. Voir Manii.ius, t. iv, col. 656.

2. TITUS JUSTUS, prosélyte de Corinthe, chez qui logea l’apôtre saint Paul dans cette ville. Sa maison était attenante à la synagogue. Act., xviii, 7. Le nom de Titus ne se lit pas dans la plupart des manuscrits

grecs.

3. TITUS, disciple de saint Paul. Voir Tite.

TOB (TERRE DE) (hébreu : ’ères Tôb ; Septante : Y ?) Twê), endroit où se réfugia Jephté quand il fut chassé par ses demi-frères., fud., xi, 3. Il y réunit autour de lui une troupe de gens hardis et prêts à tout, comme plus tard David persécuté par Saiil, et il vécut avec eux de pillage, jusqu’à ce qu’il fut appelé par les anciens de Galaad, opprimés par les Ammonites, pour se mettre à leur tête. Voir Jephté, t. iii, col. 1250. — Tob devait se trouver non loin de Galaad, probablement dans le désert, à l’est, mais sa situation précise est jusqu’à présent inconnue. On croit généralement que le petit royaume araméen d’Istob, qui fournit des hommes aux Ammonites pour résister à David, n’est pas différent de Tob. II Reg. (Sam.), x, 6, 8. Voir Istob, t. iii, col. 1010. — Les Tubianéens ou habitants de Tubin, dont il est question I Mach., v, 13 ; II Mach., xii, 17, sontpeut-être aussi des habitants de Tob. Voir Tubin. La position de Tubin est définie, II Mach., xii, 3, 17, comme étant à 750 stades de Charax ou Characa, voisine de Tob, en partant de Casphis, mais ni Casphis ni Characa ne sont identifiés.

    1. TOBIAH BEN ÉLIÉZER##

TOBIAH BEN ÉLIÉZER, juifdeMayence, mortvers 1107. Il consacra près de vingt ans de sa vie, 1088-1107, à un commentaire du Pentateuque et des cinq Megilloth, c’est-à-dire du Cantique des cantiques, de Ruth, des Lamentations, de l’Ecclésiaste et d’Esther. Ce commentaire porte le nom de Leqah Tob, « leçon bonne », par allusion à son nom. Les commentaires duLévitique, des Nombres et du Deutéronome ont.été publiés à Venise en 1546 ; en traduction latine par Ugolino, Thésaurus antiquil. sacr., t. xv et xvi, Venise, 1766. A. Jellinek a publié des extraits des commentaires des cinq Megilloth, Leipzig, 1855-1858. —Voir M. Sel. TobiaBenMoses ha-Abel, dans Jewish Encyclopedia, t. xii, 1906, p. 166 ; Fùrst, Bibliotheca judaica, t iii, p. 427.

    1. TOBIE##

TOBIE, nom de six personnages de nationalité diverse, dans la Vulgale. Dans le texte original, ils ne sont pas tous écrits de la même manière. Voir ThOBIAs, II Par., xvii, 8, col. 2195.

1. TOBIE (hébreu : Tôbïydh), chef d’une famille dont les descendants retournèrent en Palestine avec Zorobabel, mais sans pouvoir établir leur généalogie.

I Esd., ii, 60 ; II Esd., vii, 62-65.

2. TOBIE (hébreu : Tôbïydh), esclave ammonite.

II Esd., ii, 10, 19. C’était un homme intelligent, qui fit la plus vive opposition à Néhémie. Il était le gendre de Séchénias, fils d’Arèa, II Esd., VI, 18, et s’immisçait ainsi dans les affaires des Juifs. Le moabite Sanaballat partageait sa haine contre les enfants d’Abraham et tous les deux, réunissant l’aversion de la race de Moab et de celle d’Ammon contre Israël, s’entendaient ensemble pour l’empêcher de relever Jérusalem de ses ruines. Néhémie écarta avec soin ces loups qui voulaient se mêler à son troupeau pour le dévorer. « Vous n’avez ni part, ni droit, ni souvenir dans Jérusalem, »

dit Néhémie, II Esd., ii, 20, à Tobie, à Sanaballat et à Gosem l’Arabe. L’irritation de l’Ammonite n’en devint que plus vive. « Qu’ils essaient de rebâtir (les murs de Jérusalem) ! s’écriait-il, iv, 3. Si un renard s’élance, il renversera leurs murailles de pierres. » Cf. ꝟ. 7. Par des intrigues de toute sorte, il travaillait à prendre pied dans Jérusalem. Des affidés le tenaient par lettres au courant de tout ce qui se passait et il les excitait en leur écrivant lui-même. Plusieurs Juifs étaient liés avec lui par serment, parce qu’il était gendre de Séchénias, fllsd’Arèa, et parce que son fils Johanan avait épousé la fille de Mosollam, fils de Barachie, vi, 1-14, 17-19. Profitant sans doute de l’absence de Néhémie, il poussa l’audace jusqu’à s’établir dans le Temple, dans un appartement que lui avait préparé le grand-prêtre Ëliasib, xiii, 45. Voir Éliasib 5, t. ri, col. 1668. À son retour de Perse, Néhémie, indigné, se rappelant que la Loi interdisait l’accès du Temple aux Ammonites et aux Moabites, xiii, 1, chassa l’intrus et fit jeter ses meubles dehors, jf." 7-8. Depuis lors, il n’est plus question de lui. Voir Néhémie 2, t. iv, col. 1567.

3. TOBIE (Septante : Twêei’9, Twëei’ï, Ttoên), fils de Tobiel et père de Tobie le jeune. Il était de la tribu et de la ville de Nephthali en Galilée et fut emmené captif à Ninive sous le règne de Salmanasar, roi d’Assyrie. Son histoire est racontée dans le livre qui porte son nom. Voir Tobie 7.

4. TOBIE, fils du précédent. Pour son histoire, voir Tobie 7.

5. TOBIE (hébreu : Tôbîydhû ; Septante : irapà tù>v -/pïiit’iiwv), un des personnages revenus de la captivité qui doivent donner les couronnes destinées à être mises sur la tête du grand-prêtre Jésus. Zach., vi, 10, 14. Voir Hélem 2 ; Idaïa 4, t. iii, col. 566, 806.

6. tobie (grec : Twët’aî), père d’Hircan, riche habitant de Jérusalem. II Mach., iii, 11. Voir Hircan, t. iii, col. 719.

7. TOBIE (LIVRE DE), livre deutérocanonique qui raconte l’histoire de Tobie, père et fils. Dans les anciens manuscrits grecs, il porte simplement comme titre T(o6c’t, Twêeir ; dans des manuscrits moins anciens, B16Xo{ ï.6yu>w TuSix ; en latin, Tobis, Liber Thobis, Tobit et Tobias, Liber utriusque Tobise ; dans la Vulgate : liber Tobise. Le nom de Tobie devait être en hébreu Tôbîyâh, « Jéhovah est bon « ou « Jéhovah est mon bien ». Cf. I Esd., ii, 60 ; Il Esd., ir, 10 ; iv, 3 ; Zach., vi, 10, 14. La forme Twëi’r des versions grecques et Tobis de l’ancienne Italique provient sans doute de simples terminaisons t et s ajoutées à la forme hébraïque abrégée Tôbi, dans laquelle Yâh doit être sousentendu comme’èl, « c Dieu », est sous-entendu dans le nom Palti, I Sam., xxv, 44, qui est écrit Paltiel, II Sam., iii, 15 (Vulgate : Phalti, Phaltiet).

I. Do texte du livre. — 1° Tobie a été composé en chaldéen, au témoignage de saint Jérôme, Prsef. in Tob., t. xxix, col. 23 ; en hébreu, d’après d’autres, ou même en grec, selon quelques-uns. Cette dernière opinion est fausse. On ne peut apporter aucun argument décisif en faveur de l’une ou l’autre des deux premières. On a découvert en 1877 et publié en 1878 un texte chaldéen de Tobie, mais ce n*est certainement pas le texte originalThe book of Tobit ; a Chaldee text from a unique m », in the Bodleian Library, edited by Ad. Neubauer, Oxford. Les versions anciennes sont notablement différentes les unes des autres, et la critique est impuissante à rétablir le texte primitif.

2° Manuscrits. — On possède quatre manuscrits grecs, plus ou moins complets, en lettres onciales, du

livre de Tobie : le Vaticanus, le Sinaiticus (Libellus Tobite codice Sinaitico editus et recensitus a Fr. H. Reusch, Fribourg, 1870), Y Alexandrinus et le Venetus-Marcianus. Le texte du Sinaiticus est reproduit avec les principales variantes du Codex Alexandrinus, du Codex Parisiensis Coislin viii, et du Codex Parisiensis, supplément grec 609, qui représente la revision de l’évêque égyptien Hésychius (ive siècle), dans F. Vigouroux, Bible polyglotte, t. iii, p. 466-522. Les manuscrits grecs en lettres minuscules, de Tobie, sont assez nombreux.

3° Classification et valeur des divers textes. — On peut partager en quatre groupes principaux les différents textes du livre de Tobie. — 1. Le premier comprend le Vaticanus, Y Alexandrinus, le Venetus, la Peschito ou version syriaque, i-vn, 5, la version arménienne et la version hébraïque de Fagius. — 2. Le second, le Sinaiticus, l’ancienne Italique et la version hébraïque de Sébastien Munster. — 3. Le troisième, les manuscrits minuscules grecs 44, 106, 107, et la dernière partie de la Peschito, vii, 10-xiv. — 4. Le quatrième, la Vulgate. — Les critiques sont loin d’être d’accord sur la valeur de ces divers textes. Les savants catholiques ont donné communément la préférence à la Vulgate. Un commentateur de Tobie, Gutberlet, est porté cependant à croire que saint Jérôme, qui traduisit le livre en un seul jour, d’après ce qu’il nous apprend lui-même, Prsef. in Tob., t. xxix, col. 26, a abrégé le texte original. Il se fonde principalement sur ce que Tobie le père parle à la première personne dans les textes grecs, tandis que le récit est à la troisième personne dans la Vulgate. On comprend, dit-il, qu’un abréviateur change la personne ; on ne comprendrait pas que celui qui traduit simplement ou amplifie l’original eût imaginé un pareil changement. « Sous le rapport littéral, continue t-il, le texte du Codex Sinaiticus et la version Italique méritent la préférence ; sous le rapport dogmatique, la Vulgate doit être placée au premier rang ; … sous le rapport esthétique, le codex du Vatican (ou le grec ordinaire) doit être regardé comme le meilleur travail sur l’original, s Das Buch Tobias, 1877, p. 19.

II. Auteur, date, canonicité. — 1° La tradition a toujours attribué à Tobie père et fils la rédaction de leur histoire : — a) parce que, dans les anciennes versions, à l’exception de celle de saint Jérôme et du nouveau texte chaldéen en partie, Tobie le père parle à la première personne depuis le ch. i jusqu’au commencement de l’histoire de Sara, fille de Raguël, iii, 7. — b) Le texte grec, xii, 20, porte que l’ange Raphaël donna l’ordre à Tobie d’écrire son histoire et l’on ne doit pas douter que celui-ci ne lui ait obéi, comme l’insinue le verset suivant, xiii, 1, dans les versions grecques.

2° Date. — Le livre a dû être écrit quelque temps après les événements qu’il raconte. Les deux derniers versets, xiv, 16-17, qui marquent la mort de Tobie le fils, doivent avoir- été ajoutés par une main étrangère, comme le récit de la mort de Moïse à la fin du Deutéronome. — Les protestants et les rationalistes, qui nient maintenant le caractère historique du livre de Tobie, en placent la composition aux époques les plus diverses et rien ne montre mieux le caractère arbitraire de leur critique que les résultats inconciliables auxquels elle arrive. Suivant Eichhorn, qui ne détermine rien de plus précis, le livre a été écrit après le règne de Darius, fils d’Hystaspe ; suivant Bertholdt, après Séleucus Nicator, entre 250 et 200, par un Galiléen ou un Juif babylonien ; suivant Ewald, vers la fin de l’empire perse, vers 350 ; suivant plusieurs critiques modernes, sous l’empereur Adrien, qui régna de 117 à 138 de notre ère, etc.

3° Canonicité. — La primitive Église a considéré le livre de Tobie comme canonique. Les principales scènes

en sont reproduites dans les catacombes. « Les diverses représentations de ce sujet qui sont arrivées jusqu’à nous, dit Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 2 B édit., in-4°, 1877, p. 760-761, suivent à peu près la succession des événements de la touchante histoire deTobie… Ces représentations, si souvent répétées dans la primitive Église, alors que rien ne se faisait en ce genre, soit dans les cimetières, soitdansles basiliques, sans l’autorité des pasteurs, prouvent jusqu’à l’évidence que le livre de Tobiefut dès les premiers temps placé dans le canon des Livres Saints. » Cependant, comme il ne se trouvait pas dans la Bible hébraïque en usage chez les Juifs de Palestine, d’anciens écrivains ecclésiastiques, en particulier saint Jérôme, se sont exprimés sur les livres deutérocanoniques et sur Tobie comme s’il existait une différence entre eux et les livres hébreux de l’Ancien Testament ; ils les ont reconnus néanmoins comme sacrés. Voir Canon, t. ii, col. 154-155. Les canons des papes et des conciles ont défini la canonicité du livre de Tobie. Voir canon de saint Gélase, t. ii, col. 153 ; cf. col. 162 ; canon du concile de Trente, ibid., col. 178.

III. Division et résumé du livre de Tobie. — Il forme un tout parfaitement ordonné et disposé avec un art admirable en six sections.

1° Vertus et épreuves de Tobie le père. — 1. Un Israélite fidèle de la tribu de Nephthali est déporté à Ninive avec Anne, sa femme, et Tobie, son fils. Il exerce les œuvres de miséricorde envers ses frères et ensevelit les morts, ce qui attire sur lui la persécution de Sennachérib, roi d’Assyrie, ; il échappe en se cachant à la colère du roi, et celui-ci ayant été tué par ses fils peu de temps après, il recommence ses actes de miséricorde et de piété, i II. 9. — 2. L’épreuve allait commencer pour lui. Quelque temps après, s’étant endormi au pied d’un mur, la fiente d’un nid d’oiseaux lui tomba sur les yeux et l’aveugla. Le nom des oiseaux est différent dans les divers textes, ainsi que les circonstances dans lesquelles se produisit la cécité. Elle amena pour Tobie la privation et les misères, et les reproches de ses amis et de sa femme. Accablé d’amertume, il prie Dieu de le délivrer de la vie, ii, 10-m, 6.

2° Vertus et épreuves de Sara, fille de Raguël. —A ce point du récit, nous sommes transportés à Rages, en Médie, d’après le texte actuel de la Vulgate, mais plus vraisemblablement à Ecbatane, comme le portent les versions grecques. Pendant que Tobie souffrait et priait Dieu à Ninive, la fille d’un de ses parents, Sara, fille de Raguël, souffrait et priait à Ecbatane, en Perse. Sept fois, elle avait été mariée, et ses sept époux avaient été tués au moment même de ses noces par le démon Asmodée, dont le nom vient, d’après les uns, du perse azmûden, « tenter », d’après les autres, de l’hébreu Sâmad, « perdre ». Asmodée paraît être le démon de la concupiscence. Une des esclaves de la jeune Sara lui reproche la mort de ceux qui ont recherché sa main, et la jeune fille, affligée, demande à Dieu de la secourir ou de la délivrer de la vie, iii, 7-23.

3e Voyage du jeune Tobie en Médie. — Dieu exauce la prière que lui adresse le père du jeune voyageur et aussi celle de Sara, la fille de Raguël ; il mettra fin aux épreuves de ces deux justes par le ministère de Raphaël, un de ses anges. Le vieux Tobie, croyant sa mort prochaine, après avoir donné à son fils les plus sages conseils, l’envoie en Médie pour recouvrer dix talents d’argent (85 COO francs) qu’il avait prêtés à Gabélus, un de ses coreligionnaires. L’ange Raphaël, qui a pris une forme humaine, sert de guide au jeune Tobie sous le nom d’Azarias. Le soir de la première journée du voyage, ils s’arrêtèrent sur les bords du Tigre. Tobie ayant voulu laver ses pieds dans le fleuve, un poisson s’élançant, dit le Codex Sinailicus, « voulut dévorer le pied du jeune homme. » On ignore à quelle espèce

appartenait ce poisson. Calmet a supposé que c’était un brochet. On le trouve dans le Tigre et sa chair est excellente. L’ange dit à Tcbie de saisir le poisson par les ouïes, et, quand ils en eurent mangé, il lui recomma nda de garder une partie du cœur et du foie pour chasser le démon, et le fiel pour guérir la taie des yeux, vi, 1-9.

4° Mariage du jeune Tobie avec Sara. — Les deux voyageurs arrivèrent sans autre incident à Ecbatane et ils allèrent loger chez Raguël, le père de Sara. Sur le conseil de l’ange, Tobie demande la main de la jeune fille, après avoir appris de son guide le moyen de chasser le démon qui avait fait périr les précédents maris de sa cousine ; il l’obtient, chasse Asmodée en brûlant une partie du cœur et du foie du poisson et en passant en prières les trois premières nuits de leur mariage. L’ange Raphaël relégua Asmodée dans le désert de la HauteEgypte, de sorte qu’il ne pût agir en dehors de ce lieu. Alligavit, hoc est ejus potestatem… cohibuit atque frsenavit, dit saint Augustin, De civ. Dei, XX, vii, 2, t. xii, col. 668, expliquant un passage analogue de l’Apocalypse, xx, 2. Le nouvel époux demeura quatorze jours auprès de Raguël, son beau-père. Pendant ce temps, Raphaël alla à Rages chercher l’argent prêté à Gabélus et amena ce dernier à Ecbatane pour prendre part aux fêtes du mariage, VI, 10-IX.

5° Retour de Tobie à Ninive. — L’ange enseigna au jeune Tobie, pendant le retour, le moyen de guérir son père de sa cécité, à l’aide du fiel du poisson. Sara était partie avec lui, après avoir reçu de Raguël de sages conseils sur les devoirs d’une mère de famille. En chemin, son jeune époux prit les devants, pour calmer les inquiétudes des siens, et, à son arrivée, il guérit le vieillard aveugle par les moyens que l’ange lui avait indiqués, x-xi.

6° Conclusion : manifestation de Raphaël ; dernières années de Tobie. — Raphaël fit alors connaître aux deux Tobie sa nature angélique et leur révéla les desseins de Dieu dans les épreuves qu’ils avaient eues à subir, xii. Le vieux Tobie rend alors gloire à Dieu de ses bienfaits et prédit la gloire future de Jérusalem, xiii. Aux approches de la mort, il donne ses derniers avis à sa famille et lui recommande de quitter Ninive, qui sera détruite. Tobie le fils retourne auprès de Raguël et meurt à l’âge de 99 ans, xiv. — L’intervention de Raphaël, envoyé de Dieu, est un des traits principaux du livre de Tobie, qui nous révèle ainsi quel est l’office des anges gardiens et nous met sous les yeux l’action de la Providence dans les incidents de la vie ordinaire.

IV. Caractère historique du livre de Tobie. — L’historicité du livre de Tobie a été longtemps admise sans contestation. Tous les protestants le regardent aujourd’hui comme un roman pieux, ainsi que quelques catholiques, mais la réalité de l’histoire de Tobie est attestée par les détails minutieux du récit, la généalogie du principal personnage, les renseignements précis sur la géographie, l’histoire, la*chronologie, etc., qui nous montrent que l’auteur a voulu parler en historien. Les principales difficultés qu’on fait contre le caractère historique du livre de Tobie sont les suivantes :

1° Les faits merveilleux qui y sont racontés. — Les miracles contenus dans un récit ne sont pas une preuve qu’il est historique, mais ils ne sont pas non plus une preuve qu’il soit fictif, parce que Dieu peut, quand il lui plaît, intervenir surnaturellement dans les affaires de ce monde, comme le montrent tant d’autres miracles rapportés dan3 la Sainte Écriture.

2° Inexactitudes qu’on prétend exister dans le récit.

— 1. Rages, la ville de Médie où l’auteur fait résider Gabélus, au VIIIe siècle avant notre ère, ne fut bâtie, dit-on, que plusieurs siècles plus tard, par Séleucus Nicator, d’après le témoignage de Strabon, XI, xiii, 6.

C’est là une fausse interprétation de Slrabon. Il dit que Séleucus changea le nom de Rages, comme il le fit pour d’autres villes, et l’appela Eurôpos. Le Zend-Avesta la mentionne comme une ville déjà ancienne. — 2. On prétend que c’est Théglathphalasar (745-727) et non Salmanasar (727-722), Tob., i, 2, qui déporta la tribu de Nephthali en Assyrie. C’est peul-être Sargon qu’il faut lire au ꝟ. 2, comme au ꝟ. 18, au lieu d’Enemessaros, nom altéré que porte le texte grec, et qu’il faut corriger en Sargon, d’après les documents assyriens. Mais, quoi qu’il en soit, Théglathphalasar n’avait pas déporté en Assyrie la tribu de Nephthali tout entière, et Salmanasar ou Sargon put encore trouver des hommes de cette tribu dans le royaume d’Israël. — Quelques autres difficultés géographiques s’expliquent aussi par la perte de l’original et par les altérations des noms propres étrangers, que ne connaissaient pas les copistes, et qu’ils ont défigurés dans leurs transcriptions.

3° L’histoire de Tobie et le conte d’Ahikar. — La découverte d’un conte ou d’un roman connu sous le nom d’Histoire du sage Ahikar fournit matière à une objection nouvelle, contre le caractère historique du livre de Tobie. Tout ce qu’on en connaît jusqu’ici a été publié par MM. Rendel Harris, F. C. Conybeare et Agnès Smith Lewis, The story of Ahikar, from the Syriac, Arabie, Armenian, Ethiopie, Greek and Slavonic versions, in-8°, Londres, 1898. Une partie des aventures altribuées à Ahikar se retrouve, mais démarquée, dans la vie d’Ésope le Phrygien, attribuée au moine grec Planude et que La Fontaine a placée en en tête de ses Fables. Son nom se lit aussi dans le livre de Tobie. La Vulgate l’appelle Achior, Tob., x, 20, et ne le mentionne que dans ce passage, mais les versions grecques et l’ancienne Italique lui conservent son nom’A-/Ei’-/.apoç (Sinaiticus), ’A-/iàxapoç (Valicanus), Achicarus (Vêtus llala), et parlent de lui, I, 24-25, où Tobie l’appelle le fils de son frère ; ii, 11, où Achiachar nourrit son oncle devenu aveugle jusqu’à son départ pour l’Élymaide ; XI, 18 (Vulgate, 20), où Achiachar (Achior) et Nasbas (Nabath) félicitent Tobie de tous les biens dont Dieu l’a comblé ; enfin xiv, 10, Tobie dit avant de mourir à son fils, d’après le Sinaiticus : « Mon fils, considère ce qu’a fait Nadab à Achichar, qui l’avait élevé ; ne l’a-t-il pas mis vivant dans la terre ? Et Dieu l’a couvert de confusion, et Achichar est revenu à la lumière et Nadab est tombé dans les ténèbres éternelles parce qu’il avait cherché à tuer Achichar. Parce qu’il avait pratiqué la miséricorde envers moi, il a échappé au piège de mort que Nadab lui avait tendu, et Nadab est tombé dans le piège de la mort qui l’a fait périr. »

Des détails analogues se retrouvent dans le conte d’Ahicar. Voir la reproduction des parties principales de ce conte dans F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 5e édit., t. iv, 1902, p. 557-569. On veut en conclure que le livre de Tobie est aussi fabuleux. Son auteur nous a suffisamment prévenus du caractère purement imaginaire de son œuvre, dit-on, en y mêlant des traits empruntés à un récit qui a mérité d’être inséré dans le supplément des Mille et une nuits. — À cela on peut répondre que la question est de savoir si le texte primitif et original de Tobie contenait les passages qui ont trait à Ahicar. Le texte de notre Vulgate ne contient pas les passages relatifs à Ahicar qu’on lit dans les textes grecs ; il nomme bien Achior et Nabath, xi, 20, mais ce verset ne renferme pas d’allusion précise aux détails fabuleux du conte. On prétend que saint Jérôme, ayant abrégé l’original, y a supprimé ces passages, mais c’est une affirmation qu’on ne peut prouver ; nous ne possédons plus aujourd’hui le texte original ; personne ne peut assurer qu’il les contenait et se faire garant que le traducteur les a omis volontairement. Leur présence dans les tra ductions grecques n’est pas suffisante pour établir qu’ils viennent de l’original, il s’en faut d’autant plus que les textes grecs ne concordent point entre eux ; ils ont par conséquent souffert, et les allusions à Ahicar en particulier se présentent avec toutes les apparences d’additions postérieures. De plus, on est hors d’état d’établir que Tobie est postérieur à Ahicar.

Voir*0. Fr. Fritzsche, Die Bûcher Tobi und Judith, in-8°, Leipzig, 1853 ; H. Reusch, Das Buch Tobias ûbersetzt und erklârt, in-8°, Fribourg, 1857 ; C. Gutberlet, Das Buch Tobias ûbersetzt und erklàrt, in-8°, Munster, 1877 ; A. Schdlz, Commentaizum Bûche Tobias, in-8°, Wurzbourg, 1889.

    1. TOILE##

TOILE (Septante : îcttôç ; Vulgate : tela), tissu fait sur le mélier avec du fil de chanvre, de liii, ou de l’un et l’autre mêlés ensemble. L’hébreu n’a pas de nom spécial pour désigner la toile. —La toile d’araignée est appelée en hébreu bêf, « maison », Job, viii, 14, ou qûrîm, « fils fins ». 1s., lix, 5, 6. Sur Osée, viii, 6, où les versions parlent encore de toiles d’araignée, voir Araignée, 1. 1, col. 875. — Les mots i<rrô ; et tela veulent l’un et l’autre dire à la fois « métier, chaîne, trame, tissu, toile ». Ils sont mis pour désigner le fil dans Job, vii, 6, et Isaïe, xxx, 1. Dans un autre passage, Is., xxv, 7, la Vulgate nomme la toile à la place d’une couverture. Voir Linceul, t. iv, col. 265 ; Suaire, t. v,

col. 1874.
H. Lesêtre.
    1. TOILETTE##

TOILETTE, ensemble de soins que l’on prend pour la bonne tenue du corps, son vêtement et sa parure. — Les Hébreux prenaient de leur corps le soin commandé par l’hygiène. Voir Bain, t. i, col. 1386 ; Lavement des pieds, Laver (se) les mains, t. iv, col. 132, 136. Les prescriptions sur les impuretés légales tendaient à les éloigner de toute souillure corporelle ou à les en purifier. Voir Impureté légale, t. iii, col. 857 ; Purification, t. v, col. 879. Comme tous les Orientaux, ils aimaient les parfums et en faisaient grand usage. Voir Onction, t. iv, col. 1810 ; Parfum, col. 2163. — Les vêtements étaient simples, amples, et ordinairement de lin ou de laine. Voir Vêtement. Les hommes comptaient les pièces suivantes à leur costume : le manteau, la tunique, deux ceintures, l’une sur la tunique et l’autre sur le corps même, un vêtement plus court qui se mettait entre la chemise et la tunique, la chemise, la coiffure, la chaussure, le caleçon, les manchettes, pour couvrir les mains et les bras jusqu’aux coudes, deux mouchoirs, dont l’un pour essuyer les mains après qu’on les avait lavées, un voile pour couvrir la tête et les épaules, et un tour de cou dontles extrémités pendaient en avant. Les femmes portaient la chemise, une large tunique, une écharpe couvrant les épaules, le caleçon, les chaussures, le voile, le manteau. Voir ces mots. Cf. Iken, Antiquitates hebraiese, Brème, 1741, p. 543-548. Toutes ces pièces n’étaient pas indispensables et on n’en a sans doute point toujours fait usage dans les anciens temps. — Aux étoffes s’ajoutaient des ornementsde métal, anneaux, t. i, col. 632, bijoux, t.i, col. 1794, bracelets, t. i, col. 1906, chaînes, t. ii, col. 479, colliers, t. ii, col. 834, pendants d’oreilles, t. v, col. 36, etc. Ézéchiel, xvi, 10-13, décrit ainsi la toilette d’une Israélite de condition : « Je te vêtis de broderie et je te chaussai de peau de tahas (voir t. ii, col. 1512) ; je te ceignis d’un voile de lin et je te couvris des plus fins tissus. Je t’ornai d’une parure : je mis des bracelets à tes mains et un collier à ton cou ; je mis à ton nez un anneau, des boucles à tes oreilles et sur ta tête un magnifique diadème. Tu t’ornas d’or et d’argent, et tu fus vêtue de liii, du tissu le plus fin et de broderie. » Isaïe, iii, 16-24, fait le portrait des élégantes de son temps, qui marchaient la tête haute, en faisant sonner les anneaux de leurs pieds. Il énumère jusqu’à vingt

cinq objets entrant dans la composition de leur toilette. On peut voir aussi la description de la toilette que fait Judith, avant de se présenter devant Holoferne. Judith, x, 3. Une fille de roi portait des tissus d’or et une robe de couleurs variées. Ps. xlv (xliv), 15. Les jeunes tilles avaient un goût particulier pour la parure. Jer., ii, 32 ; Bar., vi ; 8. Il était recommandé de ne pas tirer vanité de sa toilette : « Ne te glorifie pas des habits qui te couvrent. » Eccli., xi, 4. — Saint Jacques ne veut pas qu’on ait plus d’égards pour le chrétien portant un anneau d’or et un vêtement magnifique, que pour un pauvre à l’habit sordide. Jacob., ii, 2-4. Saint Pierre recommande aux femmes la simplicité : « Que votre parure ne soit pas celle du dehors : les cheveux tressés avec art, les ornements d’or ou l’élégance des habits. » Elles doivent se préoccuper avant tout de la parure de leur âme. « C’est ainsi qu’autrefois se paraient les saintes femmes qui espéraient en Dieu. » I Pet., iii, 3-5. Saint Paul dit de même : « Que les femmes soient en vêtements décents, se parant avec pudeur et simplicité, sans tresses, or, perles ou habits somptueux, mais par de bonnes œuvres, comme il convient à des femmes qui font profession de servir Dieu. » I Tim.. ii, 9, 10. Il veut également « que les femmes figées fassent paraître une sainte modestie dans leur tenue. » Tit., ii, 3. H. Lesèire.

    1. TOISON##

TOISON (hébreu : gêz, gizzâh ; Septante : mixoç, xovpâ, « tonte » ; Vulgate : vellus), laine de la brebis qui a été tondue. — L’Israélite devait offrir les prémices de ses toisons. Deut., xviii, 4. — Pour connaître la volonté divine, Gédéon se servit d’une toison, et demanda successivement que la rosée s’arrêtât dans la toison sans aller jusqu’au sol, et qu’ensuite elle humectât le sol sans mouiller la toison. Jud., VI, 36-39. — On employait des toisons pour se couvrir pendant la nuit ; Job, xxxt, 21, eu prétait aux indigents pour cet usage.

— Mésa, roi de Moab, payait au roi d’Israël un tribut de 100 000 agneaux et 100000 béliers avec leurs toisons, c’est-à-dire avant la tonte. IV Reg., iii, 4. — Il est dit du Messie qu’il « descendra comme la pluie sur le gêz, et comme des eaux qui gouttent sur la terre. » Ps. lxxii (lxxi), 6. Il est possible que le psalmiste fasse allusion au miracle de Gédéon, comme le fait elle-même l’Église en se servant de ce texte. In Circumcis. Dom., ad laud., ant. 3. D’autres pensent que gêz est pris ici dans le sens d’herbe ou de gazon, qui est comme

la toison du sol.
H. Lesêtre.

TOIT (hébreu : gdg, mikséh ; Septante : Sôjia, axiyo ; , Û7ta18pov, « en plein air » ; Vulgate : tectutn, solarium, doma), couverture d’une maison ou d’un édifice.’1° Le toit oriental diffère des toits construits dans les pays où il faut pourvoir à l’écoulement de pluies fréquentes et de neiges. Ce toit est plat et en forme de terrasse entièrement exposée au soleil, solarium, et au grand air, <irou6pov. « Les maisons de Palestine et de Syrie ont pour couverture une terrasse faite d’une épaisse couche d’argile, reposant sur un plancher grossier. L’herbe y pousse pendant l’hiver et se dessèche au soleil du printemps. Parfois, quelque mouton, quelque chèvre y va brouter l’herbe ; puis on arrache le chaume pour serrer de nouveau la terre avec un rouleau de pierre, aux premières pluies d’automne. » M. Jullien, L’Égijpte, Lille, 1891, p. 263. Autrefois, on avait des toitures plus solides, mais moins étanches, composées de dalles de pierre ou de tuiles qu’on pouvait facilement lever. Luc, v, 19. Ces sortes de toitures avaient un inconvénient. À la saison des pluies, elles laissaient parfois goutter l’eau à l’intérieur, de laplus désagréable façon. C’était alors une gouttière continue, délêf torêd. Prov., xix, 13 ; xxvii, 15. Pour éviter les accidents de chute, la loi ordonnait de mettre une ba lustrade tout autour du toit. Deut., xxii, 8. On accédait au toit par un escalier extérieur, qui permettait d’y arriver de la cour, même quand la maison était pleine. Luc, v, 19. Voir t. iv, fig. 181, 183, col. 590, 592. L’herbe poussait sur ces toitures, autrefois comme aujoud’hui ; mais elle se desséchait dès que le soleil succédait à la pluie. Cette herbe était l’image de tout ce qui est éphémère. IV Reg., xix, 26 ; Ps.cxxix(cxxviii), 6 ; Is., xxxvii, 27. Le toit n’avait pas seulement pour raison d’être d’abriter la maison ; il servait encore à toutes sortes d’usages. Quand les espions israélites vinrent à Jéricho, Rahab les cacha sur son toit, sous des tiges de lin. Jos., Il, 6, 8. On montait sur le toit pour converser à son aise, I Reg., IX, 25, 26 ; pour éviter une compagnie importune, Prov., xxi, 9 ; pour se baigner, mais seulement d’après la Vulgate, II Reg., xi, 2 ; pour certains actes qu’on voulait accomplir devant de nombreux témoins, II Reg., xvi, 22 ; pour voir ce qui se passait aux alentours, II Reg., xi, 2 ; pour se faire entendre de loin à ceux qui étaient dans les rues ou sur les autres terrasses, Malth., x, 27 ; Luc, xii, 3 ; pour se réjouir, Is., xxii, 1 ; pour se lamenter, Is., XV, 3 ; Jer., xlviii, 38 ; quelquefois, pour se livrer à certains cultes idolâtriques. IV Reg., xxiii, 12 ; Jer., xix, 13 ; xxxii, 29 ; Soph., 1, 5. On élevait sur les toits des cabanes de feuillage pour la fête des Tabernacles. IIEsd., viii, 16. Notre-Seigneur dit à ceux qui devront fuir avantle siège de Jérusalem de ne pas descendre de leur toit afin de prendre quelque chose dans leur maison, mais de se sauver sans arrêt, tant le péril sera pressant. Matth., xxiv, 17 ; Marc, xiii, 15 ; Luc, xvii, 31. Quelquefois un oiseau était solitaire sur le toit d’une maison. Ps. en (ci), 8. — 2° La Sainte Écriture mentionne encore le toit de l’arche de Noé, Gen., viii, 13, le toit du Tabernacle, Exod., xxvi, 7, voir Tabernacle, col. 1955 ; le toit de la tour de Thébès, du haut duquel une femme lança sur la tête d’Abimélech un morceau de meule, Jud., ix, 51, le toit du temple de Dagon, sur lequel 3000 personnes avaient pris place pour voir danser Samson, Jud., xvi, 27, et le toit du Temple de Jérusalem. Ezech., XL, 13. — 3° Être sous un toit, c’est êtredansune maison. Jud., xix, 18 ; , Ter., xxx, 18 ; Sap.,

xvii, 2 ; Matth., viii, 8 ; Luc, vii, 6.
H. Lesêtre.
    1. TOLET François##

TOLET François, théologien et exégète espagnol, né à Cordoue, le 4 octobre 1532, mort le 14 septembre 1596. Il entra dans la Compagnie de Jésus le 3 juin 1558. Il fut appelé à Rome pour y professer la philosophie et la théologie. Clément VIII le fit cardinal le 17 septembre 1593. On a de lui, sur l’Écriture Sainte : In sacrosanctum Joannis Evangelium Commentarii, in-f°, Rome, 1598, plusieurs éditions ; In duodecim capita… Evangelii secundum Lucam, in-f°, Rome, 1600 ; Commentarii in Evangelium secundum Lucam, in-f°, Cologne, 1611 ; Commentarii et Annolationes in Epistolam B. Pauli ad Romanos, in-4°, Rome, m.cd.ii ; Emendationes in Sacra Biblia vulgatse edilionis, in-f°, 1590. — Voir C. Sommervogel, Bibliothèque delaCompagnie de Jésus, t. viii, 1898, col. 64-82.

    1. TOLETANUS##

TOLETANUS (CODEX). Ce manuscrit, un des manuscrits importants de la Rible latine, appartient à la Bibliothèque nationale de Madrid, où il est coté « 2, 1°, sa cote de la bibliothèque du chapitre de Tolède, au fonds duquel il appartient. L’écriture, wisigothique, est du VIIIe siècle. Il compte 375feuillets à trois colonnes, chaque colonne de 63 à 65 lignes. Il mesure 438 mill. sur 330. Notes arabes sur les marges. Le texte commence avec Gen., l, 22, et, avec quelques lacunes accidentelles, donne tonte la Bible. Ce manuscrit, en 158$^ fut collationné par le bibliothécaire du chapitre de Tolède, Cristobal Palomarès, pour le cardinal Antoine Carafa et la commission romaine qui préparait l’édi

tion romaine de la Vulgate. Le Codex Toletanus, écrit Samuel Berger, a presque en toutes ses parties des caractères distincts et qui souvent sont uniques, tels beaucoup des" sommaires qu’il met en tête des divers livres de la Bible. C’est une Bible espagnole, antérieure de texte à l’invasion arabe, avec de nombreuses leçons singulières, et en particulier de très curieuses variantes inscrites sur les marges. Beaucoup de leçons de fort bonne nature attestent en même temps l’antiquité de ce texte, dit encore S. Berger. En tête des Épîtres de saint Paul sont reproduits les canons de Priscillien, accompagnés du proœmium sancti Peregrini episcopi. En voir l’édition critique dans G. Schepss, Priscilliani quse supersunt, Vienne, 1889, p. 109 147. On sait que ce Peregrinus episcopus est identifié avec le moine Bachiarius, vers 410. À la fin du manuscrit, une note de seconde main, ancienne, mentionne que le codex a été donné à l’église Sainte-Marie de Séville (Hispalis) par Servandus, évêque de Cordone, en 988. Le codex n’en est pas moins du viij » siècle, et Servandus n’en a été que propriétaire et donateur au xe siècle. Voir Samuel Berger, Histoire de la Vulgate, Paris, 1893, p. 12-14, 391. Un tac-similé est dans Ewald et Lœwe, Exempta scripturæ wisigothicx, 1883, planche xi. La collation de Palomarès, publiée par Bianchini, est reproduite dans Migne, Patr. Lat., t. xxix. P. Batiffol.

    1. TOMBEAU##

TOMBEAU (hébreu : qébûrâh, qêbér, de qabâr, « ensevelir » ; bôr, « fosse », bêt, « maison », èal.iap, « pourriture », ces trois derniers mots désignant le tombeau par sa forme, sa destination ou ses effets ; Septante : u.vï)|j, eiov, pv^iia, tivoi ; Vulgate : sepulcrum, monumentum), lieu où l’on dépose le corps d’un mort.

I. Les anciens tombeaux. — 1° En Chaldée. — Les terres d’alluvions sur lesquelles étaient bâties les villes ne permettaient pas la construction de grands monuments funéraires. L’humidité du sol pénétrait partout et décomposait rapidement les cadavres. On construisait les tombeaux en briques sèches ou cuites, disposées de manière à former une sorte de voûte (fig. 499), ou un réduit assez étroit surmonté d’un petit dôme ou d’un toi*, plat. Voir 1. 1, fig. 324, 325, col. 1162. Une natte imprégnée de bitume recevait le corps, autour duquel on disposait des jarres et des plats d’argile, contenant les aliments et les boissons nécessaires au mort, les armes

étaient simplement enfouis dans le sable, d’autres, plus aisés, se faisaient ensevelir dans un modeste édicule de briques jaunes ou creusaient leur sépulture dans les parois de la montagne. Les plus riches se préparaient un mastaba, tombeau isolé qui se composait d’une chapelle intérieure, d’un puits et de caveaux souter 499. — Tombe voûtée d’Ur.

D’après Taylor, Journal of the R. Asiat. Society, t. xv, p. 273.

rains. La chapelle avait la forme d’une pyramide tronquée, de trois à douze mètres de haut, de cinq à cinquante mètres de côté, et les quatre faces aux quatre points cardinaux (fig. 500). À l’intérieur, était ménagée une chambre oblongue, au fond de laquelle se dressait une stèle représentant quelquefois le mort. C’était comme la porte conduisant à sa demeure et c’est devant cette stèle qu’on lui apportait les offrandes. Elle constituait la partie essentielle du tombeau, celle qui entretenait l’identité du mort, et autour de laquelle on

500. — Mastaba de Gizéh. D’après Lepsius, Denkmaler, ii, 26.

pour les défendre et les objets servant à la parure des femmes. Parfois, on procédait au préalable à la crémation du corps, dont ensuite on enterrait les restes, en ménageant jusqu’au sol des conduits de poterie qui amenaient l’eau de pluie ou d’infiltration au défunt pour qu’il se désaltérât. Les tombes, souvent superposées, s’effondraient sous l’envahissement du sable ou des décombres et ne laissaient guère de traces. Les rois seuls se faisaient inhumer dans des palais abandonnés et y recevaient un culte. Cf. ilaspero, Histoire ancienne, t.i, p. 684-689.

2° En Egypte. — Pendant que les gens du peuple

se plaisait à figurer tous les objets dont il pouvait avoir besoin. La figuration de ces objets équivalait à leur réalité. Un puits de douze à trente mètres descendait jusqu’au caveau, comprenant un couloir très bas et la chambre funéraire. La momie était déposée dans cette chambre avec des provisions ; puis l’entrée du couloir était murée et le puits comblé de matériaux et de terre arrosés d’eau, qui ne tardaient pas à former un ciment compact. Les plus anciens rois se construisaient également des pyramides, dans lesquelles l’accès de la chambre mortuaire était dissimulé par les moyens les plus ingénieux. Ces tombeaux étaient les hârâbût,

soliludines, les demeures solitaires dont parle Job, iii, 14, et le bêf’olàm, oTxoî aî&voç, domus sslernitatis, la « maison éternelle » à laquelle fait allusion l’Ecelésiaste, xii, 5. Dès les premières dynasties, les tombeaux égyptiens portent le nom de « maisons éternelles ». Cf. Masperô, Les contes populaires de l’Egypte ancienne,

(fig. 501). On y pénétrait par un puits situé à l’une des extrémités et fermé par une pierre. À l’extrémité opposée était pratiquée une cheminée conique, large seulement de m 20 à l’orifice extérieur. La caverne a servi primitivement à des incinérations, plusieurs siècles avant notre ère. Dans la couche de cendres

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2° Plan montrant les constructions environnantes 501. — Caverne funéraire de Gazer. D’après Q. St., Palest. Expl. Fund, oct. 1902, pi. 8.

Paris, 3e édit., p. ltiii. Malgré les précautions prises pour rendre ces maisons inviolables, les grands et les rois n’ont pas toujours eu le pouvoir d’habiter celles qu’ils avaient préparées, ou, plus souvent encore, y ont été visités ou en ont été expulsés par les chercheurs de trésors, de sorte que, comme dit Bossuet, Disc, sur Vhist. univers., iii, 3, Bar-le-Duc, 1870, t. ix, p. 522,

humaines, on a reconnu les restes d’une centaine de personnes, dont la moitié d’adultes. La présence de la cheminée est ainsi justifiée par l’usage auquel était consacrée la caverne. À une époque moins ancienne, de 2500 à 1200, l’inhumation fut substituée à la crémation. La caverne fut alors agrandie et le puits fut creusé pour tenir lieu de l’escalier primitif, parce qu’il deve 502. — Tombe chananéenne. D’après Vincent, Canaan, p. 215. « ils n’ont pas joui de leur sépulcre. » Cf. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 248-258 ; L’archéologie égyptienne, Paris, 1887, p. 108-161.

3° En Chanaan. — Les fouilles exécutées àGézerpar M. Macalister ont mis au jour des tombes antiques qui nous révèlent la manière dont les Chananéens primitifs ensevelissaient leurs morts. Cf. Q. S., Palest. Explorât. Fund, 1904, p. 320-354. Le plus ancien hypogée qu’on ait retrouvé est une caverne taillée dans une roche tendre du coteau de Gazer, mesurant 6*45 sur 7 m 50, et haute seulement de m 61 à l m 50

nait important de rendre inaccessible aux intrus l’hypogée qui recevait des corps entiers. Des poteries diverses renfermaient les aliments et la boisson dont on approvisionnait les morts. Dans d’autres tombes, on pénètre par un puits aboutissant à un passage surbaissé par lequel on accède à la chambre funéraire (fig. 502). Cette disposition est d’imitation égyptienne. Dans ces tombes abondent toujours les offrandes funéraires, aliments, boisson, lampes, armes, objets de parure. AMageddo, on a trouvé, entre huit et dix mètres de profondeur, des tombes datant de 2000 à 1500,-auxquelles

on accède par un puits, et qui présentent cette particularité d’être régulièrement voûtées, avec une dalle pour clef de voûte (fig. 503). Quelquefois, on utilisait pour les sépultures des excavations naturelles. C’est ainsi qu’à

mètre de diamètre, pratiqué dans le plafond de la chambre funéraire, et quelquefois accompagné d’un autre trou latéral par lequel on pouvait se glisser jusqu’au sol de la caverne (fig.504). La chambre, à peuprès

503. — Tombe à puits de Mageddo. D’après Vincent, Canaan, p. 223

Gazer une suite de cavernes troglodytiques furent mises en communication pour recevoir les morts d’une colonie égyptienne établie dans le pays vers le xxve siècle. Abraham suivit cet usage, quand il acquit

ronde, avait de six à neuf mètres de diamètre. Quand on agrandissait la caverne primitive, on ménageait un pilier pour soutenir la voûte, si on le jugeait nécessaire. Les morts étaient placés sur des banquettes de

504. — Anciennes tombes Israélites. D’après Vincent, Canaan, p. 226.

la caverne de Macpélah pour la sépulture de Sara et de sa famille. Voir Macpélah, t. iv, col. 520.

4° Chez les Israélites. — Quand ils s’établirent en Chanaan, les Israélites adoptèrent le genre de sépultures que suggérait la nature du sol. Ils utilisèrent les cavernes naturelles, mais en substituant aux puits chananéens et égyptiens un simple trou d’environ un

pierre, mais souvent aussi sur le sol même, couchés sur le côté gauche et les genoux ramenés sous le menton. On les superposait ainsi les uns aux autres. Les offrandes funéraires n’apparaissent plus guère dans ces tombes qu’à l’état de simulacres, tellement la vaisselle devient petite ou intentionnellement fragmentaire. Aux environs de l’an 1000 doivent être rapportées deux

autres espèces de tombes, qui ne sont pas positivement israélites, mais appartiennent probablement aux Philistins et à d’autres peuples contemporains. Ce sont, d’un part, des fosses munies de parements en gros blocs calcaires soigneusement appareillés, avec caisson voûté ou appareil en blocage au-dessus du sol, et, d’autre part, les constructious en pierres brutes, d’allure plus ou moins mégalithique. Cf. H. Vincent, dans la Revue biblique, 1901, p. 278-298 ; Canaan, Paris, 1907, p. 205 mêmes dimensions, et long de l^fë), débouche dans une chambre de 2 m 40 sur l m 25, à mi-hauteur de laquelle ont été évidés des bancs destinés à recevoir les morts. Le plafond, à 2 m 06 de hauteur, est surélevé, au milieu, de 0° » 35, de manière à former une sorte de toit à double pente (fig. 505). Le tout est taillé dans la roche vive. Ce tombeau et d’autres analogues ont subi des modifications ultérieures pour devenir d’abord des cellules de reclus, puis aujourd’hui des caves etdes magasins. Sur

505. — Tombe Israélite de Siloé. D’après Vincent, Canaan, p. 236, 239.

239. — Les plus anciennes nécropoles israélites devaient se composer d’un caveau, comprenant une ou plusieurs chambres funéraires, avec un puits vertical pour y donner accès, sans que l’on sache si ce puits

506. — Monument monolithe de Siloé. D’après Ancessi, Atlas, pi. xx.

était surmonté d’un monument quelconque. En tous cas, les monuments funéraires aujourd’hui recouverts par le village de Siloé donnent une idée exacte des tombeaux de l’époque royale. On pénètre dans l’un d’eux par une petite porte taillée dans une corniche de rocher, avecl mètredehaut et0 m 82de large. Un couloir de

les tombes découvertes aux environs de Samarie, voir Revue biblique, 1910, p. 113.

II. Tombeaux historiques. — l » _Le monolithe de Siloé.

— C’est un édicule de 6 mètres de long sur 5 de large et 2 m 65 de hauteur, surmonté d’une corniche égyptienne et taillé dans le roc même, dont il est isolé de trois côtés (fig. 506). Par une porte haute de l m 45 et large de m 70, on entre dans une chambre carrée, précédée d’un petit vestibule et dans les parois de laquelle ont été pratiquées deux niches cintrées. Cet édicule ressemble aux monuments monolithes qu’on rencontre en Egypte. Il se pourrait que ce fût un tombeau, d’autant plus qu’il se dresse au-dessus de l’ancienne nécropole jébuséenne de Siloé. Il serait alors antérieur à Salomon. Mais comme ce roi établit ses jardins précisément dans le voisinage et qu’il n’eût pas supporté de tombeau si près de lui, il est possible que l’édicule ait eu une destination différente, qu’il ait été construit, par exemple, pour servir de sanctuaire privé à la fille du Pharaon qu’il avait épousée. Cf. de Saulcy, Voyage autour de la mer Morte, Paris, 1853, t. ii, p. 306-313 ; V. Guérin, Jérusalem, Paris, 1889, p. 233-234. La première hypothèse a été rendue beaucoup plus probable par la découverte des vestiges d’un texte hébreu archaïque, indiquant vraisemblablement le titre d’jine sépulture. Cf. Le Camus, Voyage aux pays bibliques, Paris, 1894, t.i, p. S82 ; Perrot, Histoire de l’art, t. iv, p. 306-313.

2° Le tombeau d’Absalom. — Voir t. i, fig. 10, col. 98 ; Main d’Absalom, t. iv, col. 585. De Saulcy, Voyage, t. ii, p. 288-295, incline à croire que ce tom

beau est de l'époque qu’on lui attribue. La plupart des archéologues y voient un monument de la décadence. V. Guérin, Jérusalem, p. 200, serait plutôt d’avis que la partie monolithe est contemporaine de David et que des enjolivements y ont été ajoutés dans les âges suivants. Il faut d’ailleurs observer que le cippe qu’Absalom s'étaitérigé lui-même de son vivant, II Reg., xviii, 18, n’empêcha pas qu’on lui construisit après sa mort un tombeau proprement dit, ce à quoi David dut se prêter volontiers, à cause de l’affection qu’il portait à son fils rebelle.

3° Tombeaux des Rois. — David fut enterré dans la « cité de David ». III Reg., Il, 10. Il en fut de même

tel art que rien ne paraissait aux yeux de ceux qui pénétraient dans le monument. » Josèphe, Ant. jud., VII, xv, 3 ; XVI, vill, 1. Le tombeau de David n’a sûrement rien de commun avec le cénotaphe que les musulmans conservent dans une salle attenante à celle du Cénacle. Mais à plus de deux kilomètres de cet endroit, à environ 770 mètres au nord de la ville, on trouve la nécropole connue sous le nom de Kobour-el-Molouk, « tombeaux des rois », ou Kobour-el-Selathin, « tombeaux des sultans ». Un escalier de vingt-cinq marches, larges de 9àl0 mètres ettaillées dans leroc, donne d’abord accès dans une cour de 27 mètres de côté, dont le niveau est à 7 ou 8 mètres au-dessous du sol. De cette cour, on passe

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507. — Plan du tombeau des Rois.

des rois de Juda, ses successeurs, ainsi qu’il est rapporté de Salomon, II Par., ix, 31 ; III Reg., xi, 43, de Roboam, III Reg., xiv, 31, d’Abia, III Reg., xv, 8, d’Asa, III Reg., xv, 24, de Josaphat, III Reg., xxii, 51, de Joram, IV Reg., viii, 24, d’Ochozias, IV Reg., ix, 28, d’Amazias, IV Reg., xiv, 20, d’Ozias, IV Reg., xv, 7, de Joatham, IV Reg., xv, 38, d’Achaz, IV Reg., xvi, 20, d'Ézéchias, IV Reg., xx, 21 ; II Par., xxxji, 33. Le grandprêtre Joad fut aussi inhumé dans les sépulcres royaux, à cause des services éminents qu’il avait rendus. II Par., xxiv, 16. Par contre, le roi Joas fut inhumé dans la cité de David, mais non dans le sépulcre des rois. II Par., xxiv, 25 ; IV Reg., xii, 22. Sur l’emplacement de la cité de David, voir Jérusalem, t. iii, col. 13511356. Cette cité occupait la colline d’Ophel. C’est donc là que se trouvaient les tombeaux des rois. Cf. II Esd., m, 15, 16 ; Act., xi, 29. Le grand-prêtre Hyrcan et le roi Hérode pénétrèrent dans l’hypogée royal pour y prendre de l’argent ; « mais aucun d’eux ne parvint aux retraites mystérieuses où reposaient les cendres des rois ; car elles étaient cachées sous terre avec un


dans un vestibule rectangulaire, dont l’entrée est surmontée de superbes motifs de sculpture (voir flg. 329, col. 1545). Ce vestibule mène à une antichambre carrée (flg. 507), par une porte très basse, que fermait un disque de pierre roulant dans une rigole, le long de la paroi extérieure. Cf. t. iii, col. 1477. Dans l’antichambre s’ouvrent trois baies surbaissées, fermées jadis par des portes de pierre qu’on poussait du dehors et qui, grâce à la disposition des crapaudines, se rabattaient d’elles-mêmes. On trouve ensuite sept chambres funéraires, renfermant trente et une tombes. Les sarcophages reposaient soit dans des excavations, soit sur des banquettes surmontées d’arcades cintrées. De Saulcy découvrit, dans une chambre basse inexplorée, un sarcophage intact, maintenant au musée du Louvre (fig. 508), et portant cette inscription en araméen : « Zodan » ou « Zoran, reine », et en hébreu : « Sadah » ou « Sarah, reine ». Il y avait donc là une sépulture royale. On pourrait croire que, pour obéir à une observation d'Ézéchiel, xliii, 7-9, cf. Jer., viii, 1, 2, on a transporté les corps des rois, au retour de le captivité, de la cité de David dans

V. - 72

une nécropole située hors de la ville. Exception aurait été faite pour David et pour Salomon, dont les tombes étaient encore dans la cité de David aux époques de Néhémie, d’Hyrcan et d’Hérode. Mais il n’est fait aucune mention de ce transport, et le passage d’Ézéchiel peut ne s’appliquer qu’aux rois de l’avenir. Comme il est fort probable que les rois seuls étaient inhumés dans la cité de David, on a pensé que les Kobour-el-Molouk étaient la sépulture destinée à leurs femmes et à ceux de leurs descendants qui n’arrivaient pas au trône. C’est ce que présume V. Guérin, Jérusalem, p. 215. De Saulcy a défendu son identification des sépultures royales dans plusieurs publications : Voyage autour de la mer Morte, rp. 219-281 ; dans la Revue archéologique, t. ix, 1, 1852, p. 229 ; t. ix, 2, 1853, p. 398-407 ; Voyage en Terre Sainte, Paris, 1865, t. i, p. 345-410 ; dans les Comptes rendus de l’Acad. des Inscript, et Belles-Lettres, , p. 105-113. Quatremère, dansiîeime archéologique, t. ix, 1, 1852, p. 92-113, 157-169, a cru

reconnaître la sépulture des princes asmonéens, car le tombeau du grand-prêtre Jean Hyrcan était voisin des murs de la ville, à moins d’une portée de flèche. Cf. Josèphe, Bell, jud., V, vi, 2 ; vii, 3 ; ix, 2 ; xi, 4.

4° Tombeaux des Juges. — Ils se trouvent à vingt-cinq minutes au nord-ouest de Jérusalem, vers la naissance de la vallée de Josaphat. Ils s’annoncent par une façade décorée d’un élégant fronton avec acrotères aux angles et au sommet (fig. 509). Ils se composent d’une série de chambres funéraires, à différents niveaux, renfermant soixante fours superposés en deux rangées parallèles, dans lesquels on ne pouvait placer que des corps sans sarcophages. Les Kobour-el-Kodha, « tombeaux des Juges s, n’ont pas contenu les anciens Juges d’Israël, presque tous inhumés dans leur propre tribu, mais probablement les magistrats présidents du tribunal suprême, qui devint plus tard le sanhédrin. Le monument paraît être contemporain des rois de Juda. L’ornementation a fort bien pu, ici comme dans d’au 508. — Sarcophage juif. Musée du Louvre.

démontrer que cette nécropole était celle des Hérodes. Cette opinion n’est plus soutenable aujourd’hui. Il paraît beaucoup plus probable que ces tombes sont celles d’Hélène, reine d’Adiabène, de son fils Izates, qui eut à lui seul vingt-quatre garçons, et d’autres membres de la famille royale. Josèphe, Bell, jud., V, ii, 2 ; Ant. jud., XX, iv, 3, a signalé le tombeau d’Hélène au nord et à trois stades de la ville. Saint Jérôme, Epist. cvm, 9, t. xxii, col. 883, note aussi que, pour entrer à Jérusalem, sainte Paule « laissa à gauche le tombeau d’Hélène, reine d’Adiabène. » L’emplacement coïncide donc bien avec celui du tombeau des Rois. La reine Zoran, Zodan ou Zaddan, dont le sarcophage avait été respecté par les pillards, serait une princesse d’Adiabène. Plus récemment, on a retrouvé parmi les décombres un morceau de terre cuite portant l’estampille ttihn « Helena », en vieille écriture hébraïque. Cf. Euting, Sitzungsberichte der Berlin. Akad., 1885, p. 679. Ces indices confirment le bien fondé de l’attribution du tombeau à la famille de la reine Hélène. L’identification est acceptée par Robinson, Palâstina, 2 8 édit., Londres, 1856, t. iii, p. 251 ; R. Rochette, dans Revue archéologique, t. ix, 1, 1852, p. 22-37 ; Renan, dans les Comptes rendus de l’Acad. des lnscript. et Belles-Lettres, 1886, p. 113-117 ; Sepp, Jérusalem, Schaiïhouse, 1873, t. i, p. 307-317 ; Lortet, La Syrie aujourd’hui, Paris, 1884, p. 295 ; Schûrer, Geschichte des jûd. Volkes, t. iii, p. 121 ; Socin, Palâstina und Syrien, Leipzig, 1891, p. 111, etc. Il faut également écarter la pensée d’y

très nécropoles, être modifiée ou exécutée à une époque très postérieure. Notre-Seigneur suppose ces remaniements quand il remarque que les scribes et les pharisiens bâtissent les tombeaux des prophètes et ornent les monuments des justes. Matth., xxiii, 29. Cf. F. de Saulcy, Voyage, p. 332-336 ; V. Guérin, Jérusalem r p. 268-270,

5° Tombeaux des prophètes. — Cette nécropole est située à mi-côte du mont des Oliviers, à l’ouest. Elle, se compose de deux galeries semi-circulaires, reliées entre elles par trois galeries rayonnantes partant d’une chambre centrale et par deux autres petites galeries intermédiaires. La galerie la plus excentrique est pourvue d’une trentaine de fours à cercueil. Sur la foi du nom de Kobour-el-Anbia, « tombeaux des prophètes », attribué à cette catacombe, on a longtemps cru qu’elle était d’origine juive. On a même pensé qu’il fallait y reconnaître le columbarium, 7uspt<rrepewv, dont parle Josèphe, Bell, jud., Y, xra, 2. Cf. de Saulcy, Voyage, p. 281-287 ; V. Guérin, Jérusalem, p. 270-271. Un examen plus attentif du procédé de construction et des graliltes tracés sur les parois anciennes a permis de conclure qu’on était en présence d’une catacombe creusée au rv « ou Ve siècle de notre ère, à l’usage des pèlerins chrétiens qui mouraient à Jérusalem. Cf. H. Vincent, Le tombeau des prophètes, dans la Revue biblique, 1901, p. 72 88.

6° Tombeau de Josaphat. — La vallée du Cédron, appelée aussi quelquefois vallée de Josaphat, voir t. iii,

col. 1652, est presque entièrement remplie de tombeaux et de pierres sépulcrales. Voir t. ii, fig. 121, 122, col. 381, 383 ; t. iii, fig. 233, col. 1651. Un peu au nord-est du tombeau d’Absalom, celui qu’on appelle le tombeau de Josaphat est maintenant rendu inaccessible. Il a un beau fronton élégamment sculpté, voir t. iii, fig. 284, col. 1653, dont la décoration a pu être ajoutée postérieurement à la construction primitive. Il renferme trois chambres sépulcrales. On ne sait à quel Josaphat attribuer ce monument. Le roi de ce nom fut inhumé dans la cité de David. III Reg., xxii, 51. Peut-être avait-il fait préparer ce tombeau pour les membres de sa famille. Cf. de Saulcy, Voyage, p. 295, 296 ; V. Guerin, Jérusalem, p. 272.

du tombeau de saint Jacques, le tombeau de Zacharie est un monolithe isolé de la masse rocheuse (fig. 510). Il est formé d’un cube de 5 m 53 de côté, couronné d’une corniche égyptienne et surmonté d’une pyramide. Le monument est considérablement enterré et les tombes juives s’accumulent de plus en plus tout autour. La porte en est obstruée et l’on n’y peut pénétrer. Les musulmans l’appellent Kabr-Zoudjet-Faraoun, « tombeau de la femme de pharaon ». On ne saurait dire quel Zacharie a donné son nom au mausolée. Au IVe siècle, le Pèlerin de Bordeaux le’regardait comme le tombeau d’Isaïe. Cf. de Saulcy, Voyage, p. 303-306 ; V. Guérki, Jérusalem, 273-274.

9° Tombeau des Hérodes. — D’après les indications

509. — Fronton du tombeau des Juges. D’après Ancessi, Atlas, p. xix.

7c Tombeau de saint Jacques. — Il est à un peu moins de cent pas au sud du précédent. La façade est taillée dans le roc, voir t. iii, fig. 286, col. 1667, avec une frise soutenue par quatre colonnes, et abrite un vestibule qui donne accès à quatre chambres sépulcrales contenant chacune plusieurs loges. Le nom de saint Jacques a été donné à ce tombeau en vertu d’une tradition d’après laquelle l’apôtre s’y serait réfugié pendant la passion du Sauveur et y aurait été lui-même inhumé après, son martyre. Il est impossible de contrôler la réalité de ces faits. Le monument est couvert d’inscriptions hébraïques. Une plus ancienne que les autres, gravée sur l’architrave, indique que le mausolée est celui de huit membres de la famille sacerdotale des Beni-Hésir. Les musulmans appellent ce monument Diouan-Faraoun, « divan de pharaon ». Cf. de Saulcy, Voyage, p. 296-303 ; V. Guérin, Jérusalem, p. 272-273 ; de Vogué, Bévue archéologique, nouv. sér., t. IX, 1864, p. 200-209 ; de Saulcy, ibid., t. xi, 1865, p. 137-153, 398-405.

8°’Tombeau de Zacharie. — À quelques pas au sud

de Josèphe, Bell, jud., V, iii, 2 ; xii, 2, on pensait que les tombeaux des Hérodes devaient se trouver dans le voisinage du Birket-Mamillah, au revers occidental de la colline qui renferme au nord-est les tombeaux des Rois. Cf. de Saulcy, Voyage, p. 325. Ils ont été retrouvés en 1891, à l’ouest du Birket-es-Sultan. Cf. Schick, Q.St. Palest. Fxplor. Fund, 1892, p. 115-120 ; Revue biblique. 1892, p. 267-272. Ils se composent de quatre chambres spacieuses, disposées en croix, et d’une petite chambre centrale communiquant avec les autres par des couloirs (fig. 511). Les chambres ont toutes 2 m 70 de haut ; les troischambres égales ont4mètres de côté et la plus grande 7 m 20 sur3mètres. Un bel appareil do pierres blanches revêt partout les parois du rocher. Une pierre ronde se roulait pour fermer l’entrée du monument. Voir t. iii, fig. 268, col. 1478. Les chambres n’ont ni fours funéraires ni banquettes. Les sarcophages étaient déposés sur le sol ; on en a retrouvé deux dans la plus grande chambre. Voir t. iii, fig. 134, col 647. Un grand nombre d’autres tombes, diversement con

struites et ornées, se trouvent dans la vallée du Cédron et dans celle de Ben-Hinnom, sans présenter d’intérêt au point de vue biblique.

10° Le Saint-Sépulcre. — C'était la tombe construite par Joseph d’Arimathie pour son usage personnel. Elle avait été taillée dans le roc même, dans le jardin voisin du Calvaire. Voir t. iii, fig. 206, col. 1133, 1134 ; t. v, col. 1651. Le mausolée comportait une chambre sépulcrale d’assez faible dimension, dans laquelle on pénétrait, en descendant quelques marches, par une porte basse fermée au moyen d’une pierre roulante. Voir Calvaire, t. ii, col. 79 ; Jésus-Christ, t. iii, col. 1476-1477 ; Revue biblique, 1910, p. 121. Par la suite, le tombeau a été isolé du rocher dont il faisait partie et est devenu un édicule à part. Cf. A. Legendre, Le Saint-Sépulcre depuis l’origine jusqu'à nos jours, Le Mans, 1898, p. 7-20.

l'époque des Asmonéens ou à celle d’Hérode. Le plan, assez régulier, comporte un vestibule donnant accès dans une salle qui communique avec trois chambres à fours (fig. 512). Les coupes longitudinale AB et transversale CD donnent le profil de l’excavation. Les plafonds vont en diminuant de hauteur, de 2 m 10 à l m 70. Il n’y a ni inscriptions ni vestiges quelconques permettant d’identifier l’hypogée. Cf. H. Vincent, Un hypogée juif, dans la Revue biblique, 1899, p. 297-304.

III. Les tombeaux dans la Bible. — 1° La demeure des morts. — En face du danger, les Hébreux demandent à Moïse s’il n’y avait pas assez de sépulcres pour eux en Egypte. Exod., xiv, 11. Le lieu où beaucoup d’entre eux sont frappés dans le désert, à cause de leurs murmures au sujet de la nourriture, prend le nom de Qibrô{-hat-(a'âvâh, « Sépulcres de la concupiscence ». Num., xi, 34 ; xxxiii, 16 ; Deut., ix, 22. Les sépulcres

510. — Tombeau de Zæharie. D’après Ancessi, Atlas, pi. xix.

11° Le tombeau de la Sainte Vierge. — Voir t. iv, col. 802.

12° Autres tombeaux bibliques. — On peut spécialement signaler les tombeaux de Daniel, t. ii, fig. 472, col. 1253 ; d’Esdràs, t. ii, fig. 603, col. 1931 ; d'Ézéchiel, t. ii, fig. 626, col. 2153 ; d’Aaron, t. iii, fig. 152, 153, col. 750, 751 ; de Lazare, t. iv, fig. 43, col. 139 ; de Phinées, t. v, fig. 73, col. 320 ; de Rachel, t. v, fig. 211, col. 925, etc. Voir aussi Nabuthéens, t. iv, col. 14481450, et la nécropole de Pétra, t. v, fig. 31, col. 170 ; la nécropole de Cyrène, t. ii, fig. 450, col. 1177 ; le tombeau de Cyrus, t. ii, fig. 458, col. 1193 ; ceux de Umm-Queis, t. iii, fig. 41, 42, col. 205, 207, etc. — Isaïe, xxii, 16-18, parle d’un fonctionnaire du temps d'Ézéchias, nommé Sobna, qui se creusait un sépulcre dans un lieu élevé et se taillait dans le roc une demeure. Pour le punir de ses méfaits, Dieu le lancera comme une balle à travers la plaine. — Le système de nécropoles creusées dans le roc, avec chambres funéraires et fours à cercueil, a toujours été en faveur chez les Juifs. En 1897, non loin du tombeau des Juges, on a découvert une sépulture de ce genre qui donne une idée exacte de ce que sont les nécropoles israélites. La façade est ornée d’un fronton analogue à celui du tombeau <les Juges. Les diverses sculptures, tant de l’extérieur <|ue de l’intérieur, supposent l’influence de l’art grec, ut permettent de fixer la construction du monument à

sont préparés pour Assur, pour Élam, pour Mosoch et Thubal, Ezech., xxxii, 22, 24, 26, et pour Gog, au milieu d’Israël. Ezech., xxxix, 11. Dieu prépare le sépulcre de Ninive. Nah., i, 14. Antiochus Épiphane voulait faire de Jérusalem le tombeau des Juifs. II Mach., IX, 4, 14.

— On n’a jamais connu le tombeau de Moïse. Deut., xxxiv, 6. Au malheureux accablé d'épreuves, il ne reste plus à espérer que le tombeau, Job, xvil, 1 ; il est content de le trouver. Job, ii, 22. Le juste y entre en pleine maturité, comme la gerbe enlevée en son temps. Job, v, 26. Mais souvent le méchant est porté avec honneur à son sépulcre, et l’on veille sur son mausolée. Job, xxi, 32. Tobie voulut que sa femme fût déposée dans le même tombeau que lui. Tob., xiv, 12. Le roi de Babylone devait être jeté loin de son sépulcre, comme un rameau méprisé. Is., xiv, 19. Les témoins du Christ, mis à mort, resteront aussi quelque temps privés de sépulture. Apoc, xi, 9. Isaïe, xi, 10, annonce que la racine de Jessé se dressera parmi les nations et que sa demeure sera glorieuse ; d’après la Vulgate, « son sépulcre sera glorieux ». Les gens du peuple n’avaient point de sépulcres taillés dans le roc. On se contentait de les enterrer simplement, avec une pierre sur leur tombe, pour empêcher les hyènes de venir les dévorer. Jérémie, xxvi, 23, raconte que le roi Joakim fit périr le prophète Urie et jeta son cadavre dans les sépulcres du commun du peuple. — À la mort du Sauveur, les

sépulcres s’ouvrirent et des morts en sortirent. Matth., xxvii, 52. Dans sa vision de la résurrection, Ézéchiel, xxxvii, 12, vit les morts sortir de leurs sépulcres. Ils en sortiront réellement, à la fin du monde, sur l’ordre du Fils de Dieu. Joa., v, 28. — Le sépulcre est quelquefois mis pour le scheol. Dieu n’a plus le souvenir ds celui qui s’y trouve, le mort est soustrait à sa main et la louange divine ne se fait plus entendre dans le sépulcre, Ps. lxxxviii (lxxxvii), 6, 12, manières de parler signifiant que les conditions d’existence sont tout autres après la mort. — L’Ecclésiastique, xxx, 18, fait allusion aux offrandes d’aliments que les idolâtres mettaient sur les tombes et il les compare aux mets présentés à une bouche fermée. — 2° Le refuge des vivants. — Étant données les dimensions de certaines

511. — Tombeau des Hérodes.

D’après la Revue biblique, 1892, p. 268.

chambres sépulcrales, on conçoit que les vivants aient pu quelquefois y chercher un refuge. Les Israélites infidèles se retiraient dans des sépulcres pour y manger de la viande de porc et des mets défendus. Is., lxv, 4. Les démoniaques géraséniens habitaient dans des sépulcres. Matth., viii, 28 ; Marc, v, 2-5 ; Luc, viii, 27.

— 3° Comparaisons. — Le sein de la mère est le tombeau de l’enfant mort avant sa naissance. Jer., xx, 17. On compare à un sépulcre ouvert, prêt à recevoir les cadavres, le gosier du méchant, qui dévore le prochain par ses propos calomnieux, Ps. v, 11 ; Rom., iii, 13, et le carquois des Chaldéens, qui va faire tant de victimes. Jer., v, 16. — 4° Impureté des tombeaux. — Celui qui touchait un tombeau contractait une souillure légale. Num., xix, 16. Voilà pourquoi Josias, après avoir réduit en poussière l’idole d’Astarthé qui avait été installée dans le Temple, en dispersa les restes sur les tombes des enfants du peuple, comme pour les souiller encore davantage. IV Reg., xxiii, 6. En même temps, il entendait par là rendre ce qui subsistait de l’idole à ses

anciens adorateurs. II Par., xxxiv, 4. Après le retour de la captivité, on prit l’habitude de blanchir à la chaux les tombeaux qui n’étaient pas suffisamment reconnaissables par eux-mêmes, afin d’en signaler la présence aux passants, surtout à l’époque des pèlerinages. Matth., xxiii, 27. Notre-Seigneur compare les pharisiens à des sépulcres qu’on ne voit pas et sur lesquels on marche sans le savoir, Luc, xi, 44, ce qui fait contracter une impureté. Cf. Ohaloth, xvii, xviii. Josèphe, Ant. jud., XVIII, ii, 3, raconte qu’Hérode Antipas, après avoir bâti la ville de Tibériade sur l’emplacement d’une ancienne nécropole, dut prendre toutes sortes de moyens’pour attirer les habitants, les Juifs se refusant à résider en pareil lieu.

H. Lesêtre.
    1. TONNERRE##

TONNERRE (hébreu : ra’am, qôl ou rêa’Yehôvàh, qôlôt ; Septante : ppovtT, , qxovïj ©eoû ; Vulgate : tonitru, tonitruum, vox Domini), bruit que fait la foudre quand elle éclate entre les nuages ou entre les nuages et la terre. — Ce bruit, très puissant, peut devenir formidable, quand il est répercuté par les échos des montagnes. De là, les noms de « voix de Jéhovah » ou « fracas de Jéhovah » qu’on lui donne en hébreu. On l’appelle aussi qôlôt, « les voix », à cause de ses retentissements multipliés. Les orages n’ont lieu en Palestine qu’à la saison des pluies, en hiver. Cependant, il s’en produit parfois tardivement en avril et jusqu’au commencement de mai. Voir Palestine, t. iv, col. 2030. Le tonnerre qui se fit entendre, à la voix de Samuel, au temps de la moisson des blés, I Reg., xii, 17, 18, c’est-à-dire à la fin d’avril ou en mai, était extraordinaire. Le coup que les Juifs crurent entendre dans le Temple, Joa., XII, 29, se produisit en temps normal, vers la fin de mars. — La septième plaie d’Egypte consista en une grêle effroyable qu’accompagna le tonnerre avec le feu delà foudre. Exod., ix, 23, 28, 34 ; Ps. lxxvii (lxxvi), 19. Le phénomène était d’autant plus significatif que la grêle et le tonnerre sont extrêmement rares en Egypte. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. ii, p. 333. Le tonnerre retentit également au Sinaï. Exod., xix, 16. Voir Orage, t. iv, col. 1849. — Job a parlé plusieurs fois du tonnerre. L’idée qu’il a donnée des œuvres de Dieu n’est qu’un « léger murmure », à côté du tonnerre de sa puissance, c’est-à-dire de la grandeur foudroyante des merveilles exécutées par Dieu. Job, xxvi, 14. Dieu a tracé la roule aux éclairs et au tonnerre. Job, xxviii, 26 ; xxxviii, 25. Il prend la foudre en ses mains et lui marque le but qu’elle atteindra sûrement ; son tonnerre le précède et remplit d’effroi les troupeaux. Job, xxxvi, 32, 33.

Écoutez, écoutez le fracas de sa voix, Le grondement qui sort de sa bouche ! Il lui donne libre champ sous l’Immensité des deux, Et-son éclair brille jusqu’aux extrémités de la terre. Puis éclate un rugissement,

Il tonne de sa voix majestueuse ; Quand on entend sa voix, la foudre est déjà partie : Dieu tonne de sa voix d’une manière merveilleuse. Job, xxxvii, 2-4.

Un Psalmiste décrit aussi le tonnerre, qu’il appelle la « voix de Dieu ». Elle gronde au-dessus des nuages, brise les cèdres, ébranle les montagnes et le désert, dépouille les forêts, fait jaillir des flammes de feu et faonner les biches épouvantées. Ps. xxix (xxviii), 3-9. Au bruit du tonnerre, les montagnes fuient. Ps. civ (cm), 7. Il retentit pendant l’ondée et fait trembler la terre. Eccli., XL, 13 ; xliii, 18. — Les écrivains sacrés ne mentionnent aucun homme frappé de la foudre. Ils font cependant allusion à ce genre de mort. I Reg., Il, 10.

Jéhovah tonna des cieux,

Le Très-Haut fit retentir sa voix.

H lança des flèches, et dispersa mes ennemis,

La foudre, et il les consuma. Coupe longitudinale suivant A, B

512. — Plan et coupes d’une nécropole juive. D’après la Bévue biblique, 1899, p. 298, 302.

Coupe transversale suivant C.D

II Reg., xxii, 14, 15. Cf. Ps. xviii (xvii), 14, 15 ; cxliv (cxliii), 6 ; Zach., ix, 14. Jérusalem sera visitée « avec fracas, tonnerre et grand bruit, tourbillon, tempête et flamme de feu dévorant. » Is., xxix, 6. — Le tonnerre intervient souvent dans les événements décrits par l’Apocalypse, iv, 5 ; vi, 1 ; viii, 5 ; x, 3, 4 ; xiv, 2 ; xvi, 18 ; xix, 6. — À raison de leur caractère impétueux, Jacques et Jean, fils de Zébédée, reçurent de Notre-Seigneur le nom de BoavvjpYé ; , « fils du tonnerre ». Marc, iii, 17. — Les mages babyloniens tiraient des pronostics de la production du tonnerre aux différents mois de l’année. Le dieu du tonnerre et de la pluie, Adad, annonçait le plus souvent des révoltes et des calamités ; mais quelquefois, il pronostiquait des faits intéressant la vie agricole. S’il tonne en Tammouz, « la récolte du pays marchera bien ; » en Éloul, « l’épi pèsera quadruple ; » en Tébét, « il y aura des pluies dans les cieux, des crues dans la source ; » en Sabat, « invasion de beaucoup de sauterelles dans le pays. » Cf. Ch. Virolleaud, L’astrologie chaldéenne, Paris, 1905, fasc. 1, p. 1. On sait que les Babyloniens n’ont pas été les seuls à tirer des pronostics de ce genre, qui s’inspirent plus ou moins heureusement, même dans nos contrées, d’observations populaires. Cf. Revue biblique,

1909, p. 324.
H. Lesêtre.
    1. TONTE DES BREBIS##

TONTE DES BREBIS, récolte de la toison des brebis. Cette opération se fait ordinairement au commencement de l’été. Elle était une occasion de réjouissances pour les pasteurs, comme la moisson pour les cultivateurs. Le propriétaire des troupeaux ne manquait pas, à cette occasion, de se transporter au milieu de ses pasteurs. Le tondeur, gozêz, xsi’ptov, tonsor, coupait alors la toison des brebis et des agneaux. Il était cependant défendu de tondre le premier-né des hrebis, parce qu’il appartenait tout entier au Seigneur. Deut., xv, 19. — Jacob profita de l’absence de Laban, qui était allé assister à la tonte de ses brebis, pour s’enfuir lui-même avec sa famille et ses troupeaux. Laban était à une certaine distance, car il ne fut informé de l’événement que le troisième jour. Gen., xxxi, 19-22. Quand le deuil de sa femme fut terminé, Juda s’en alla à Thamna, où l’on tondait ses brebis. Gen., xxxviii, 12-14. Nabal se trouvait à Carmel, pour la tonte de ses 3000 brebis, quand David lui envoya demander des vivres. Nabal ne voulut lui accorder ni pain, ni eau, ni rien du bétail qu’il avait tué pour ses tondeurs. I Reg., xxv, 2-11. Absalom, ayant ses tondeurs à Baal-Hasor, près d’Éphraïm, invita à la fête tous les fils de David et en profita pour faire tuer Amnon. II Reg., xiii, 23-29. — Les dents de l’Épouse sont comparées, à cause de leur blancheur, à un troupeau de brebis tondues qui remontent du lavoir. Cant., iv, 2. Le Messie souffrant a été semblable « à la brebis muette devant ceux qui la tondent. » Is., un, 7 ; Act., viii, 32. La brebis reste muette, parce que la tonte ne la fait pas souffrir. Le Sauveur a gardé le silence au milieu des tourments, comme s’il n’avait pas senti la douleur.

H. Lesêtre.
    1. TOPARCHIE##

TOPARCHIE (grec : Toitapyja), mot employé, IMach., xi, 28, pour désigner trois divisions territoriales ou districts. Ces trois toparchies étaient Aphæréma (qui manque dans la Vulgate, t, 34), Lyda (Lydda) et Ramatha, t- 34, comprenant chacune la ville même et ses environs ou dépendances. Voir Aph^eréma, t. i, col. 721 ; Lydda, t. iv, col. 444 ; Ramatha, t. v, col. 944. Le nom de « toparchie » est remplacé en grec par véjio ; , « division, section », et appliqué aux trois mêmes villes. I Mach., x, 30, 38 ; xi, 34 (Vulgate : civitates). Vers 145 avant J.-C, Démétrius II Nicator confirma la possession de ces trois toparchies de la Samarie à Jonathas Machabée. IMach., xi, 34. Antiochus VI Dyonisos renouvela cette donation, en y ajou tant un quatrième « nome » (Vulgate : civitates), qui n’est pas nommé. D’après Josèphe, Bell, jud., lit, iii, 5, la Judée était divisée en onze toparchies.

    1. TOPAZE##

TOPAZE (hébreu : pitddh ; Septante : T<ma ?iov ; Vulgate : topazius), pierre précieuse.

La topaze de la Bible n’est pas la belle pierre jaune d’or que nous appelons aujourd’hui de ce nom, mais que les anciens nommaient chrysolithe. La topaze des anciens, d’un beau vert jaune, se rapprocherait plutôt de la chrysolithe moderne. Pline, H. N., xxxvii, 32, vante le beau vert de la topaze et en distingue deux espèces, la prasoïde et le chrysoptère, lequel ressemble à la chysoprase par sa couleur, qui est celle du suc de poireau. Généralement on comprend sous le nom de topaze des anciens une pierre dérouleur jaune verdâtre, ou vert jaune, rapportée à la cymophane ou au péridot. Ce n’est pas sans doute la même composition chimique ; l’une étant un aluminate de glucine, l’autre un silicate de magnésie et de fer. Mais les anciens, dans leur dénomination des pierres précieuses, faisaient surtout attention à l’aspect extérieur et rangeaient sous le même terme des espèces en réalité différentes. À l’article Chrysolithe, t. ii, col. 741, fig. 275, nous avons donné en regard l’un de l’autre des cristaux de chrysolithe et de topaze.

On a remarqué que les consonnes du mot grec ou latin sont les mêmes que celles du mot hébreu, avec une simple transposition : t. p. d. du grec et du latin (on trouve topadius pour topazius) ne sont avec métathèse que le p. t. d. de l’hébreu. On a aussi rapproché ces dénominations du mot sanscrit pîla, qui signifie jaune. Le Targum appelle cette pierre, Np"i » nSsio, margela’yarqa’, « la perle verte », qui rappelle Vuriku assyrien, la pierre verte à reflets jaunes, c’est-à-dire la chrysolithe.

La topaze ainsi entendue se rencontrequatre fois dans l’Ancien Testament et une fois dans le Nouveau. C’est la seconde pierre du rational, d’après Exod., xxviii, 17, et xxxix, 19. Voir t. v, col. 422423, et la planche en couleur. Dans l’énuméralion des pierres du rational, Josèphe, Bell. jud. V, v, 7, et Ant. jud., III, vii, 5, conserve le même rang à cette pierre et la nomme to7tai ; o ; . Sur cette pierre du rational, placée la seconde du premier rang, devait être gravé le nom de Siméon.

— La topaze figure parmi les pierres précieuses qui ornaient les vêtements du roi de Tyr. Elle est nommée comme une pierre de très haut prix dans une comparaison du livre de Job, xxviii, 19 :

La possession de la sagesse vaut mieux que les perles, La topaze d’Ethiopie ne l’égale pas.

Ce texte marque en même temps le lieu d’origine, qui serait la terre de Cousch ou d’Ethiopie. C’est dans une île d’Arabie appelée Cytis, ou en Thébaïde, que d’après Pline on trouvait cette pierre précieuse. Cette ile de Cytis n’est sans doute pas différente de celle que Strabon, XVI, iv, 6, appelle Ophiodès, et où l’on rencontre une pierre transparente aux reflets d’or.

Nous retrouvons cette pierre dans l’Apocalypse, XXI, 20, comme un des fondements de la Jérusalem céleste ; mais au lieu d’être placée au second rang comme dans le rational, elle est au neuvième. Voir t. v, col. 424.

Cf. Ch. Barbot, Guide du joaillier, 4e édit., Paris, in-12, p. 74, 112, 279, 341 ; F. Leteur, Traité élémentaire de minéralogie pratique, Paris, in-4°, p. 129 ; Cl. Mullet, Essai sur la minéralogie arabe, Paris, 1868, in-8°, p. 61 ; J. Braun, Vest-ilus sacerdotum hebrœorum, Leyde, 1680, p. 638-520. E. Levesque.

    1. TOPHETH##

TOPHETH (hébreu : Tôfèf ; Septante : T09J6, Tu ?é8, Taqaê8), endroit où l’on offrait des sacrifices dans la vallée de Hinnom. Il n’est nommé que dans IV Reg.,

xxm, 10 ; Is., xxx, 33 ; Jer., vu et xix. — 1° Le mot tôfèt est employé une fois dans Job, xvii, 6, comme nom commun, signifiant quod conspicitur, mais il n’est pas certain que le nom propre Topheth ait la même étymologie que le substantif commun, quoique plusieurs l’admettent. Les rabbins commeRaschi et DavidKimchi, le font venir de tâfaf, « frapper, battre », en supposant qu’on battait du tambour (fôf) et d’autres instruments bruyants, pendant qu’on brûlait des enfants en sacrifice

Moloch. afin d’empêcher les parents d’entendre les cris de ces tendres victimes. Parmi les hébraïsants modernes, plusieurs dérivent le mot d’une racine à laquelle ils attachent le sens de « brûler » ; cf. perse : toften ; grec : « çpa, « cendre » ; latin : tepidus, « tiède ».

2° Saint Jérôme décrit ainsi Topheth, In Jer., vii, 31, t. xxiv, col. 735 : Illum locuni significat, qui Silox fontibus irrigatur et est amœnus atque nemorosus hodieque hortorum prsebet delicias. Il était donc situé dans la vallée d’Ennom, comme le disent expressément Jérémie, vii, 31, et IV Reg., xxiii, 10. La situation précise de Topheth ne peut être aujourd’hui rigoureusement déterminée, mais, comme le dit saint Jérôme, il devait se trouver à l’endroit où les eaux de Siloé entretenaient les jardins royaux et une végétation luxuriante, dans 'e voisinage de la jonction de la vallée d’Hinnom avec celle du Cédron. Voir Gèennom, t. iii, col. 154.

3° La première mention de Topheth se trouve dans Isaïe, xxx, 31-33, dans le passage où il prophétise l'échec de la campagne de Sennachérib contre Ézéchias :

Assur tremblera à la voix de Jéhovah.

[Jéhovah] le frappera de [sa] verge ;

A chaque coup de la verge qui lui est destinée,

Que Jéhovah fera tomber sur lui,

Au son des tambours (fuppîm) et des kinnors,

f Jéhovah] combattra contre lui à coups redoublés,

Car Topheth (Tcfféh) est depuis longtemps préparé,

Il est prêt pour le roi,

Il est large, il est profond ;

Sur le bûcher, il y a du feu et du bois en abondance ;

Le souffle de Jéhovah comme un torrent de soufre l’embrase.

Nous n’avons ici qu’une allusion au Topheth de la vallée d’Hinnom, mais un passage des Paralipomènes nous en explique toute la signification. Isaïe écrivait sa prophétie sous le règne d'Ézéchias. Quelques années auparavant, le père d'Ézéchias, Achaz, sous le règne duquel Isaïe exerçait aussi sa mission prophétique, avait fait passer ses enfants par le feu, dans la vallée d’Hinnom. II Par., xxviii, 2. L’historien sacré ne nomme pas Topheth en cet endroit, mais on ne peut douter, d’après ce que nous savons par IV Reg., xxiii, 10, que ce ne soit là qu’avaient eu lieu les sacrifices inhumains d' Achaz. Faut-il prendre rigoureusement à la lettre la prophétie d’Isaïe et l’entendre en ce sens que l’on brûla en ce lieu les corps des Assyriens tombés dans les environs de Jérusalem ou bien qu’ils furent consumés en un autre endroit appelé par figure Topheth ? Il est difficile de le déterminer. Ce qui est bien certain, c’est que l’impie Achaz sacrifia des enfants dans la vallée d’Hinnom. II Par., xxviii, 2. Son petitfils, le roi Manassé, commit les mêmes actes inhumains, xxxiii, 6. L’un et l’autre eurent dans le peuple des imitateurs. Jérémie, vii, 29-34 ; xtx, 1-13, stigmatisa comme elles le méritaient ces pratiques barbares et le roi Josias, pour en empêcher le retour, rendit Topheth impur. IV Reg., xxiii, 10.

    1. TORRENT##

TORRENT (hébreu : 'âfîq, nafyal ; Septante : x£Î(Ja P" pouc ; Vulgate : torrens), cours d’eau coulant impétueusement dans un lit très incliné. — Les torrents sont nombreux dans un pays accidenté comme la Palestine. Voir Palestine, t. iv, col. 1988-1992 ; 2000-2002 ; Arnon, t. i, col. 1020 ; Besor, col. 1641 ; Cadumim, t. ii, col. 28 ;

Carith, col. 285 ; Cêdron, col. 380 ; Cison, col. 781 ; Egypte (Torrent d'), col. 1621 ; Escol, col. 1928 ; Gaas, t. iii, col. 1 ; Gérare. col. 198-199 ; Jaboc, col. 1056, etc. — Les torrents sont ordinairement à sec hors de la saison des pluies. II Reg., xvii, 7 ; Jos., i, 20. Par suite du ravinement, leur lit est dénudé et formé de pierres. Job, xxii, 24 ; IReg., xvii, 40. Les orages les remplissent parfois subitement, d’où souvent de grands dégâts. Voir Inondation, t. iii, col. 883. Ils roulent les cadavres des morts. Ezech., xxxv, 8. C’est par une bénédiction de Dieu que l’eau y coule, Joa., iii, 18, et, en passant, le guerrier s’y désaltère. Ps. ex (cix), 7. — Les écrivains sacrés comparent aux torrents impétueux la calamité qui fond sur les hommes, Ps. xviii (xvii), 5 ; le souffle de Jéhovah, dont la colère est un torrent de soufre, Is., xxx, 28, 33 ; les captifs revenant d’exil, Ps. cxxvi (cxxv), 4 ; la gloire des nations affluant à Jérusalem, Is., lxvi, 12 ; la sagesse qui se répand abondamment de tous côtés, Prov., xix, 4 ; la justice divine déployée contre les coupables, Am., v, 24 ; les ennemis qui doivent assaillir les Philistins. Jer., xlvii, 2. — Ézéchiel, xlvii, 5 19, suppose un torrent symbolique dans la nouvelle Jérusalem. Job, vi, 15, compare les amis perfides au torrent privé d’eau quand on en cherche. Il faut mentionner aussi les torrents de lait et de miel, Job, xx, 17, les torrents de délices, Ps. xxxvi(xxxv), 9, les torrents de larmes, Lam., ii, 18, les torrents de poix coulant dansÉdompoursuivi par la vengeance. Is., xxxiv, 9.

H. Lesêtre.

TORTUE, reptile de l’ordre des chéloniens, pourvus d’une carapace d’où sortent seulement la tête, les pattes

513. — Tortue de terre (Testudo grseca) de Palestine.

et la queue. Il y a des tortues de terre, des tortues de mer et des tortues d’eau douce. En Palestine, on trouve, parmi les tortues de terre, la testudo marginata, à carapace aplatie par derrière, et surtout la testudo grseca (fig. 513)i qui abonde en été sur les coteaux et

514. —Tortue d’eau (Emys caspica) de Palestine.

dans les plaines et qui, pendant l’hiver, se réfugie dans les trous de rochers. Elle sert de proie à certains oiseaux rapaces et de nourriture aux gens du pays, ainsi que ses œufs, à peu près gros comme ceux d’un pigeon. La tortue aquatique, emys caspica (fig. 514), se trouve dans les cours d’eau, les marais et surtout le lac Houléh. On la rencontre parfois par myriades. Ces tortues d’eau douce sont carnivores ; elles mangent des poissons, des grenouilles et de petits oiseaux. Elles dégagent une odeur très désagréable, particulièrement

pour les chevaux. Elles passent l’hiver dans la vase ou dans les trous du rivage. Leurs œufs oblongs sont déposés dans le sol, mais à l’abri de l’eau. La tortue aquatique se distingue de la tortue terrestre par sa carapace unie et par la longueur de sa queue et de son cou. On a cru parfois que la tortue était mentionnée sous le nom de sâb. Lev., xi, 29. Mais on admet généralement que ce nom désigne une espèce de lézard. Voir Lézard, t. iv, col. 225. — Cf. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 256, 257 ; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 476,

485, 511, 518, 547, 549.
H. Lesêtre.
    1. TOSTAT##

TOSTAT (Tostado Alfons), commentateur espagnol, né à Madrigal, vers 1400, mort à Avila, le3 septembre 1455. Il fit ses études à Salamanque et y enseigna la philosophie et la théologie pendant 22 ans. En 1431, il se rendit au concile de Bâle. Le pape Eugène IV le nomma . évêque d’Avila, où il mourut avec une telle réputation de science qu’on inscrivit sur sa tombe : hic stupor est mundi, qui scibile discutit omne. Ses œuvres, dans l’édition de Venise de 1728, remplissent 27 in-folio, dont 24 contiennent ses commentaires sur la Sainte Écriture, où l’on trouve, malgré des longueurs et des inutilités, des observations intéressantes et ingénieuses.

    1. TOTAPHOTH##

TOTAPHOTH (hébreu : Totâfôf). Exod., xiii, 16 ; Deut., vi, 4-9 ; xi, 13-21. Voir Phylactères, col. 349.

1. TOUR (hébreu : migdâl, serîâh, balzan, dâyêq, ces deux derniers mots désignant des tours d’assiégeants ; Septante : wiipyoç ; Vulgate : turris), construction élevée. — Cette construction, faite en pierres, en briques ou , en bois, est ordinairement à section ronde ou carrée, et s’élève au-dessus des maisons, des palais, des remparts, ou en rase campagne, pour favoriser la défense ou la surveillance. Différentes espèces de tours sont mentionnées par les écrivains sacrés.

1° Tour de Babel, Gen., xi, 4, voir Babel (Tour de), t. i, col. 1346.

2° Tour de défense. — Les anciennes villes chananéennes avaient des remparts munis de tours. « Ces tours, généralement sur plan rectangulaire, flanquaient le rempart souvent sur ses deux faces, d’ordinaire à l’extérieur seulement. Ce sont des constructions massives, peu saillantes sur les courtines — de m 92 à 3 m 66àGazer — ou de véritables bastions avec chambres intérieures, comme dans l’enceinte de Tell el-Hésy. Les portes sont rares, casées au fond d’un angle rentrant, ou couvertes par des avancées massives. » À Gazer, « les énormes tours massives sont en maçonnerie grossière, avec un revêtement de briques d’épaisseur variable. » H. Vincent, Canaan, Paris, 1907, p. 42, 43. D’autres fois, les tours étaient isolées, comme le migdâl (fig. 515) bâti par Séti I" sur la route de Syrie. Les tours d’Ascalon, voir t. i, fig. 286, col. 1061, donnent l’idée de ce qu’était autrefois une ville fortifiée. Les anciennes cités paraissent avoir été flanquées de tours d’après le même système (fig. 516). — Les historiens sacrés mentionnent la tour de Phanuel, rasée par Gédéon, Jud., vin, 9, 17, la tour de Sicbem, à laquelle Abimélech mit le feu, Jud., ix, 47-49, la tour située au milieu de la ville de Thébès, du haut de laquelle une femme lança un morceau de meule sur la tête d’Abimélech, Jud., IX, 51-54, la tour de Jezraêl, d’où la sentinelle annonça à Joram l’arrivée de Jéhu, IV Eeg., IX, 17, la tour de la maison du roi, à Samarie, dans laquelle Phacéia fut assassiné. IV fîeg., xv, 25. Le roi Asa bâtit des villes munies de tours. II Par., xiv, 6. D’autres tours furent élevées par Ozias dans le désert, II Par., xxv_, 10, et par Joatham dans les bois. II Par., xxvii, 4. — Jérusalem était flanquée de tours. Azias en bâtit et les munit de machines de guerre. II Par., xxvi, 9, 15. Jérémie,

xxxi, 38, parle de la tour de Hananéel. Cf. Zach., xiv, 10. Après le retour de la captivité, on trouve mentionnées les tours de Méa, de Hananéel, des Fourneaux, la haute tour et la tour en saillie. II Esd., iii, 1, 11, 26, 27 ; xii, 37, 38. Voir Jérusalem, t. iii, col. 1366, et la tour de David, fig. 259, col. 1374. — À l’époque machabéenne, les Syriens entourèrent la cité de David d’une muraille pourvue de puissantes tours et en firent leur citadelle. I Mach., i, 35. Redevenus maîtres de la ville, les Juifs bâtirent autour de Sion de hautes murailles et de fortes tours, afin de protéger les saints lieux contre les gentils. I Mach., iv, 60. Judas brûla les tours de Béan, avec tous ceux qui étaient dedans, I Mach., v, 5 ; il brûla de même les tours de l’enceinte d’Hébron. I Mach., v, 65. Neuf mille Iduméens s’apprêtaient à soutenir un siège dans deux tours très fortes ; en l’absence de Judas, les assiégeants juifs se laissèrent gagner à prix d’argent et eussent permis aux ennemis de s’échapper si Judas ne fût venu s’emparer des

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515. — Migdâl construit sur la route de Syrie par Séti I". D’après Lepsius, Denkmaler, Th. iii, 1266.

tours. II Mach., x, 18-22. Judas mit encore le feu aux tours de Gazara et s’empara de la ville occupée par Timothée. II Mach., x, 36. Simon rebâtit les forteresses de Judée et les garnit de hautes tours. I Mach., xiii, 33. Il fit une brèche à une des tours de Gaza, ce qui lui permit de s’emparer de la ville. I Mach., xiii, 43, — Ézéchiel, xxvi, 4 ; xxvii, 11, parle des tours de Tyr, qui sont défendues par devaillants hommes, mais qui n’en seront pas moins abattues par les assiégeants. L’auteur de Judith, i, 2, mentionne une tour de cent coudées à Ecbatane. Au temps de Notre-Seigneur, la tour de Siloé s’écroula à Jérusalem et écrasa dix-huit hommes. Luc, xiii, 4.

3° Tours de siège. — Pour saper plus efficacement les murailles des villes qu’ils assiégeaient, les Assyriens montaient des tours en charpente qu’ils recouvraient de cuir ou de grossières étoffes de laine. L’appareil était agencé sur des roues, qui permettaient de l’approcher du mura attaquer. À l’étage inférieur manœuvrait un bélier. Voir t. i, fig. 479, col. 1566. Au sommet de la tourelle, des archers faisaient face aux défenseurs de la place et s’efforçaient de les écarter du rempart (voir fig. 373, col. 1715). Ces machines, que les Romains perfectionnèrent beaucoup dans la suite et dont ils se servirent pour assiéger Jérusalem, cf. Josèphe, Bell, jud., V, VI, 4, produisirent grande impression sur les Israélites. Isaïe, xxiii, 13, parle de celles que les Assyriens employèrent au siège de Tyr. Ézéchiel, iv, 2 ; xvii, 17 ;

xxi, 27 ; xxvi, 8, fait plusieurs fois allusion aux tours d’attaques dressées contre Jérusalem. Les Chaldéens ne manquèrent pas de s’en servir pour prendre la ville.

xxvii, 25. On élevait dans les champs des tours de gardiens chargés de surveiller les récoltes. IV Reg., xvii, 9 ; xviil, 8 ; Eccli., xxxvii, 14 (18). Des tours sem 516. — Ville fortifiée prise par les Assyriens. British Muséum. D’après Maspéro, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. ii, p. 634.

IV Reg., xxv, 1 ; Jer., lii, 4. — Ainsi sapées, les tours I blables existaient dans les environs d’Azot. I Mach., des villes s'écroulaient et livraient passage à l’ennemi. xvi, 10. Il y avait des tours du troupeau, pour y mettre à C’est ce qui fait dire à Isaïe, ii, 15 ; xxx, 25, qu’il y a, | l’abri les bergers et, au besoin, les bêtes elles-mêmes.

517. — Tour de garde dans une vigne. D’après Julllen, L’Egypte, p. 262.

contre les tours superbes, un jour de Jéhovah, un jour de carnage et de la chute des tours.

4° Tours de garde. — Du temps de David, Jonathan était préposé à la garde, des trésors royaux recueillis dans la campagne et enfermés dans des tours. I Par.,

Mich., iv, 8. Enfin, des tours semblables étaient élevées dans les vignes importantes, pour servir de refuge à ceux qui défendaient le raisin contre les maraudeurs et surtout contre les animaux sauvages. Is., v, 2 ; Matth., xxi, 33 ; Marc, xil, 1. VoirMlGDAL-ÉDER, t. iv, col. 1084. « Dans la Palestine, le propriétaire construit sur sa vigne une tour de pierres sèches en forme de tronc de cône, terminée par une terrasse (fig. 517), sur laquelle logent, jour et nuit, les serviteurs ou la famille du vigneron durant tout le temps des fruits ou des raisins. De là ils dominent les figuiers, les oliviers, et surveillent la vigne, abrités sous des branchages contre le soleil et contre le vent. Une échelle en bas, des pierres saillantes en haut, leur servent d’escalier à l’extérieur ; l’intérieur de la tour est leur magasin. Dans les terrains accidentés, la tour est remplacée par un simple abri, élevé sur le point culminant et semblable aux cahutes que les cultivateurs se construisent pour garder leurs champs de melons ou de concombres. Après la saison, on laisse tomber ces misérables abris. » Jullien, L’Egypte, Lille, 1891, p. 263.

5° Autres tours. — Il y avait àBérée une tour remplie de cendres à l’intérieur. On y jetait des condamnés qui y périssaient par asphyxie. II Mach., xiii, 5. — Les Syriens employaient à la guerre des éléphants qui

518. — Tour portée par des éléphants.

D’après une pierre gravée (grossissement au double).

Rich, Dictionnaire des antiquités, 1873, p. 684.

portaient sur leur dos des tours de bois capables de contenir trente-deux combattants, sans compter le cornac. I Mach., vi, 37. Une terre cuite du musée du Louvre, reproduite t. i, fig. 272, col. 999, représente un éléphant portant une tour de dimensions très réduites. D’autres figures (fig. 518) montrent des tours mieux proportionnées. — Celui qui voulait construire une tour commençait par se rendre compte de ses ressources pour ne pas se donner le ridicule de laisser son œuvre inachevée. Luc, xiv, 28.

6° Comparaisons. — Dieu est une tour puissante contre l’ennemi, Ps. lxi (lx), 4 ; le nom de Jéhovah est une tour forte. Prov., xviii, 10. Le Cantique compare le cou de l’Épouse à la tour de David, Cant., iv, 4, et à une tour d’ivoire, Cant., vii, 4, son nez à la tour du Liban, Cant., vil, 5, et ses seins à des tours. Cant., viii, 10. La tour du Liban s’élevait dans le Liban, du côté de Damas. Ces différentes comparaisons font ressortir la rectitude, l’harmonie, la régularité etla grâce des formes

de l’Épouse.
H. Lesêtre.

2. TOUR (Vulgate : tornus), instrument dont se sert le tourneur pour donner à certains objets une forme circulaire parfaitement régulière. — Le texte hébreu ne connaît d’autre tour que la roue du potier. Voir Roue, col. 1213 ; Potier, fig. 153, col. 178. Le tour qui sert à travailler le bois ou d’autres substances n’était pas en usage chez les Hébreux. Il n’en est question que dans la Vulgate. Les mains de l’Épouse sont comme des

cylindres, gelîlè, d’or ; d’après la Vulgate, elles sont faites au tour, tornatiles. Cant., v, 14. Une coupe arrondie devient également tornatilis, faite au tour. Cant., vii, 2. La Vulgate suppose des ouvrages faits au tour, tornatura, torno, là où il n’est question que de sculptures. III Reg., vi, 18, 29. Elle fait aussi tourner au compas des idoles façonnées avec le ciseau. Is., xliv, 13. — Gesenius, Thésaurus, p. 1243, et F. Bùhl, Handwcrterb., 1899, p. 479, entendent le mot miqsâh d’un travail fait au tour. Ainsi auraient été fabriqués les chérubins de l’Arche, Exod., xxv, 18 ; xxxvii, 7, les candélabres d’or, Exod., xxv, 31, 36 ; xxxvii, 17, 22 ; Num., viii, 4, les trompettes d’argent, Nura., x, 2. Il est plus probable qu’il s’agit d’ouvrages en or battu ou en argent battu, dont les formes arrondies ont été obtenues sans l’aide d’un tour proprement dit. Jérémie, x, 5, compare les idoles à « une colonne faite au tour », tomér miqSâh. L’emploi du tour est plus plausible pour une colonne que pour une statue. Au lieu de tomér, la Vulgate a lu tdmâr, palmier, « elles sont

fabriquées en forme de palmier. »
H. Lesêtre.

TOURBILLON. Voir Ouragan, t. iv, col. 1930.

    1. TOURMENT##

TOURMENT (grec : êàsavo ;  ; Vulgate : tormentum), dure souffrance iniligée à quelqu’un. Voir Supplice, col. 1883. — Les méchants infligent des tourments aux justes, dont pourtant l’âme n’est pas atteinte. Sap., ii, 19 ; iii, 1. Les Égyptiens, pendant les dix plaies, ont subi divers tourments, Sap., xi, 10 ; xii, 23 ; xvi, 1 ; xix, 4, d’autant plus pénibles qu’ils en ignoraient la cause. Sap., xvii, 2. Dieu se sert des créatures pour tourmenter les méchants. Sap., xvi, 24 ; cf. Eccli., xxxix, 32, 33. — Antiochus Épiphane infligea d’atroces tourments aux Juifs fidèles à leur loi. II Mach., vi, 18vii, 41. Lui-même mourut dans les tourments, II Mach., IX, 5, ainsi que le grand-prêtre prévaricateur Alcime.

I Mach., ix, 56. — L’enfer est un lieu de tourments. Luc, xvi, 23, 28 ; Apoc, xiv, 11. Les tourments y sont proportionnés aux crimes, Sap., vi, 7 ; Apoc, , xviii, 7, et causent l’effroi de ceux qui en sont témoins. Apoc,

xviii, 10, 15.
H. Lesêtre.
    1. TOURTERELLE##

TOURTERELLE (hébreu : (or ; Septante : Tpûyaiv ; Vulgate : turtur), oiseau du genre colombe, mais d’un aspect plus délicat que le pigeon. Le plumage gris clair est ordinairement orné d’un collier plus foncé. La tourterelle fait entendre un roucoulement triste et plaintif. Elle émigré pour passer l’hiver dans les pays chauds.

II est très facile de l’apprivoiser. Le mâle et la femelle vont habituellement ensemble, ce qui fait de la tourterelle le symbole de l’affection et de la fidélité. — On trouve en Palestine trois espèces de tourterelles. La tourterelle à collier ou tourterelle rieuse, turtur risorius (fig. 519), abonde le long des cours d’eau qui avoisinent la mer Morte, Ui où il y a des arbres. L’été, elle remonte la vallée du Jourdain et fréquente même les parties boisées du Thabor et de Galaad. L’Inde est son habitacle ordinaire, etla Palestine paraît être, à l’ouest, la limite extrême de sa résidence. L’oiseau a environ 35 centimètres de long. La tourterelle des palmiers turtur senegalensis, ou tourterelle d’Egypte (fig. 520), se rencontre surtout dans la plaine de Jéricho, autour de la mer Morte, dans les jardins des environs de Jérusalem et sur l’esplanade du Temple. Dans la plaine de Génésareth, sur les bords du lac, « les tourterelles se trouvent en nombre réellement prodigieux. À chaque pas, elles se lèvent par bandes et quelquefois se touchent toutes sur les arbres où elles vont se percher. » Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 526. Les palmiers sont sa résidence de prédilection ; à Jéricho, où ils n’existent plus, cette tourterelle niche dans les jujubiers et les buissons épineux. On la trouve abon

damment dans le nord de l’Afrique, en Arabie, et dans la péninsule Sinaïtique, où elle servait de facile matière aux sacrifices. Elle se familiarise très facilement avec l’homme, dont elle ne se défie pas. On la distingue à sa couleur châtain, à sa longue queue, à sa petite taille et à son absence de collier, remplacé par des plumes

519. — Tourterelle à collier (Turtur risorius).

noires à reflet métallique. La tourterelle des palmiers n’a guère que 27 centimètres de long. La tourterelle la plus abondante en Palestine est le turtur auritus, ou tourterelle commune ou des bois (fig. 521), longue de 30 centimètres, de couleur cendrée, avec gorge et poitrine rougeâtres, ventre blanc et petites plumes noires et

feu*. Mi : >’520. — Tourterelle des palmiers (Turtur segyptiacus).

blanches sur les côtés du cou. C’est à elle surtout que font allusion divers passages de la Sainte Écriture. Jérémie, viii, 7, joint la tourterelle à la cigogne, à l’hirondelle et à la grue, pour la connaissance des temps où il leur faut émigrer. L’oiseau, en effet, quitte les pays chauds pour se rendre, pendant l’été, dans les pays tempérés. Au printemps, sa voix recommence à se faire entendre dans les campagnes de Palestine. Cant., ii, 11, 12. La tourterelle, par sa simplicité et sa faiblesse, représente le peuple de Dieu, au sujet duquel il est dit : « Ne livre pas aux bêtes la vie de ta tourterelle. » Ps.lxxiv(lxxih), 19. Les tourterelles apparaissent

déjà dans le sacrifice offert par Abraham sur l’ordre de Dieu. Gen., xv, 9. Elles figurent dans les holocaustes, Lev., i, 14, dans les sacrifices pour expier l’impureté de l’homme ou de la femme, Lev., xv, 14, 29, et dans le sacrifice du Nazaréen. Num., vi, 10. Elles sont appelées, conjointement avec les colombes, à remplacer l’agneau ou le chevreau dans les sacrifices offerts par les pauvres, après la délivrance d’une mère, Lev., x, 6, 8 ; Luc, ii, 24, dans les sacrifices pour le péché, Lev., v, 7, ou après la guérison de la lèpre. Lev., xiv, 22, 30. — Cf.TristTam, The natural history of the.Bi&ie, Londres, 1889, p. 217-220 ; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris,

1884, p. 526, 540.
H. Lesêtre.
    1. TRACHONITIDE##

TRACHONITIDE (grec : ïj Tpa-/wvtTi ? x">P a h P avs situé à l’est du Jourdain, mentionné une seule fois dans la Bible, Luc, iii, 1, comme faisant partie de la tétrarchie de Philippe. Cependant, un certain nombre d’auteurs l’identifient avec l’Argob de l’Ancien Testament, Deut., iii, 13. L’opinion est contredite par d’autres. En

521. — Tourterelle commune (Turtur auritus).

tout cas, le territoire d’Argob ne doit pas être restreint à la seule Trachonitide, dont nous avons à rechercher la situation et à esquisser l’histoire. Voir Argob 2, 1. 1, col. 950.

1° Situation. — Strabon, xvi, 2, 20, p. 756, mentionne les Tpâx<ov£ç comme deux collines des environs de Damas : ÙTCspy.ecvrac 8’aux9) ; Sua À£you.£voi ^ôpoiTpà/wveç. Comme le mot grec Tpa^tiv veut dire « lieu rude, raboteux », on reconnaît ici les deux régions volcaniques, pierreuses, très difficiles d’accès, qui s’appellent le Safah, à l’est, et le Ledjah, au sud de Damas. Mais le Safah étant trop éloigné, la province de Trachonitide fut limitée au Ledjah et à ses environs, ainsi que nous allons le voir. Josèphe et les auteurs anciens nous permettent de déterminer approximativement les limites de la contrée, que l’historien juif appelle ô Tpa^wv, Ant. jud., XVI, ix, 1, et ï] Tpaxwi/i-nç, Ant. jud., XVII, II, 1. Elle touchait, vers l’ouest, aux districts d’Ulalha et de Panéas, qui se trouvaient au pied méridional de l’Hermon. Ant. jud., XV, x, 3. Elle était voisine de la Batanée. Ant. jud., XVII, ii, 1, 2. Voir Ba.san, t. i, col. 1486. Suivant Ptolémée, v, 15, elle s’étendait jusqu’au mont Alsadamus, aujourd’hui le djebel ed-Drûz. Eusèbe et saint Jérôme, qui la confondent à tort avec l’Iturée, la placent au-dessus de Bosra, en allant à Damas. Cf. Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 109, 135, 155, 268, 269, 298. Le Talmud dit de même : wns-iia însiab Dnnm, « la Trachonide qui se trouve près de

Bosra ». Cf. A. Neubauer, La géographie du Tàlmud, Paris, 1868, p. 19 ; H. Hildesheimer, Beitrâge zur Géographie Palàstînas, Berlin, 1886, p. 55-57. Enfin une inscriptipn de Musmiyéh, l’ancienne Phsena, dans le nord du Ledjah, appelle cette ville [Aï)Tpoxtû[i£a toO Tpâx w, ">C’Cf. Corpus inscriptionum grxcarum, n. 4551 ; E. Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes, Leipzig, 1901, t. i, p. 426. Ces indications nous conduisent au grand plateau volcanique qui s’étend au nord-ouest des montagnes du Hauran, et qu’on appelle le Ledjah. Voir la carte de la tribu de Manassé, t. iv, col. 647-648.

2° Description. — Le Ledjah est un des pays les plus singuliers que l’on puisse rencontrer. C’est une immense coulée de lave sortie des cratères de la montagne voisine, mais brisée de nfille façons, boursouflée comme la surface de l’eau de savon, sur laquelle on s’amuse à former des bulles. La comparaison est d’un voyageur qui a étudié cette contrée. Cf. G. Rey, Voyage dans le Haouran, Paris, s. d., p. 117. Le terrain est assez pierreux, avec un dédale de chemins difficiles et une foule de cavités qui ont de tout temps servi de & refuge » aux hommes, d’où le nom actuel de Ledjah. Il a cependant par-ci par-là un peu de terre cultivable. Pour plus de détails, voir Abgob. La description qu’en donne Josèphe est d’une exactitude frappante. Parlant du ramassis de pillards qui avaient choisi ce pays comme un repaire inexpugnable, d’où ils sortaient pour ravager les environs et surtout la campagne de Damas, il représente les obstacles qu’il y avait pour les mettre à la raison. N’ayant ni villes ni champs, ils se retiraient dans des cavernes, où ils vivaient en commun avec leurs troupeaux. Pour résister plus longtemps à une attaque, ils avaient soin de se faire d’avance des provisions d’eau et de froment. L’entrée de leurs demeures souterraines était très étroite, mais l’intérieur très vaste. Les sentiers qui y conduisaient, tortueux et malaisés, étaient impraticables sans guide. Il fallait un homme comme Hérode pour réduire des gens qui, ne pouvant plus dépouiller leurs voisins, se pillaient les uns les, autres. Ant. jud., XV, x, 1.

3° Histoire. — L’histoire de la Trachonitide ne commence guère qu’avec l’apparition du nom grec. Le pays était occupé par les Nabuthéens, au moment où Pompée arriva à Damas avec ses légions, 65 avant J.-C. Les Romains, venant au secours des cités grecques, anéantirent dans le Hauran tout pouvoir juif ou arabe, mais ne semblent pas s’être installés dans la contrée elle-même. En 25 avant J.-C, nous voyons le Trachon aux mains d’un certain Zénodore, qui, pour augmenter ses revenus, y pratiquait ! e brigandage, lançant sur les régions environnantes les pillards dont parle Josèphe. Ant. jud., XV, x, 1, 2. Les peuplades ainsi molestées se plaignirent à Varron, gouverneur de Syrie, qui châtia les malfaiteurs. Bell, jud., i, xx, 4. Mais bientôt il reçut ordre de dépouiller Zénodore de sa province pour la donner à Hérode le Grand, qui ramena la paix et la sécurité dans la région. Ant. jud., XV, X, ; Bell, jud., I, xx, 4. Ce n’était que pour un temps, car, pendant un voyage qu’il fit à Rome, les Arabes Trachonites, répandant le bruit de sa mort, recommencèrent leurs déprédations. Les généraux de son armée parvinrent à réprimer les révoltés ; mais, parmi les principaux chefs de ces bandits, plusieurs, effrayés du sort de ceux qui avaient été faits prisonniers, allèrent se réfugier dans le pays des Arabes, d’où ils se mirent à faire des incursions de tous côtés. À son retour de Rome, Hérode envahit la Trachonitide, où il exerça de terribles représailles ; mais les brigands, rendus plus furieux, ne cessèrent de ravager ses États. Ce fut alors une véritable guerre. Le prince finit par aller les forcer dans leur repaire et les réduisit à l’impuissance. Ant. jud., XVI, ix, 1, 2. Par son testament, il donna à son fils

Philippe la Trachonitide avec laGaulonitide, IaBatanée et le territoire de Panéas. Ant. jud., XVII, viii, 1 ; xi, 4 ; XVIII, iv, 6. Voir Hérode Philippe II, t. iii, col. 649. Après la mort de Philippe, en 34 après J.-C, la Trachonitide, avec le reste de la tétrarchie, fut comprise dans la province de Syrie jusqu’en 37, où Caligula donna tout le territoire à Hérode Agrippa I er. Ant. jud., XVIII, vi, 10. C’est surtout depuis le règne de ce prince que, suivant les inscriptions, l’architecture se développa dans la contrée. En 53, la tétrarchie de Philippe passa aux mains d’Hérode Agrippa II, Ant. jud., XX, vii, 1, dont les inscriptions sont nombreuses à travers la Trachonitide. Après lui, ce pays retomba sous le pouvoir direct de Rome, et fit plus tard partie de la province d’Arabie.

4° Bibliographie. — En matière géographique, archéologique et épigraphique, les études sur la Trachonitide sont ordinairement unies à celles qui ont été faites sur le Hauran. Nous donnons les principales : J. G. Wetzstein, Reisebericht ûber Hauran und die 2Yac/joræn, Berlin, in-8°, 1860 ; M. de Vogué, Syrie centrale ; architecture civile et religieuse du i" au vue siècle, 2 in-4°, Paris, 1866 ; W. Waddington, Inscriptions grecques et latines de la Syrie, in-4°, Paris, 1870 ; G. Rey, Voyage dans leHaouran, in-S", Paris, s. d., avec atlas ; H. Guthe, Dr. A. Stûbel’s Reise nach der Diret et-Tulul und Hauran 1882, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, t. xii, 1889, p. 225302, avec carte ; G. R’mdfteisch, Die Landschaft Hauran in rômischer Zeit und in der Gegenwart, dans la même revue, t. xxi, 1898, p. 1-46, avec carte ; G."A. Smith, The historical geography of the Holy Land, Londres, 1894, p. 611-638 ; P. -M. Séjourné, À travers le Hauran, dans la Revue biblique, 1898, p. 275-287, 596-611.

A. Legendre.
    1. TRADITION##

TRADITION (grec : itapâSoui ;  ; Vulgate : traditio), transmission d’une doctrine de génération en génération, ou la doctrine elle-même reçue par cette voie.

1° Tradition juive. — En dehors de la loi consignée dans les Livres Saints, les Juifs se transmettaient oralement des explications de toutes sortes au sujet de cette loi. L’ensemble de ces explications constituait déjà, au temps de Jésus-Christ, une loi orale en concurrence avec la loi écrite. La loi écrite était d’inspiration divine, et la loi orale d’inspiration humaine, ce qui n’empêchait pas cette dernière d’être souvent préférée à la première. La loi orale ou traditionnelle fut mise par écrit, mais seulement après Jésus-Christ, dans laMischna.VoirMiscHNA, t.iv, col.l077.Lespharisienset les scribes prêtaient à la tradition une importance prépondérante, auxdépens de la loi écrite, reléguée par eux au second plan. Voir Pharisiens, col. 209 ; ’Scribes, col. 1536. Notre-Seigneur ne tenait point compte de certaines de ces traditions, qui étaient pour le moins sans autorité, et qui parfois se mettaient en contradiction avec la loi divine. Un jour, les pharisiens lui reprochèrent de les laisser transgresser par ses disciples. Ceux-ci, en effet, se dispensaient de les observer, comme faisaient d’ailleurs la plupart de ceux qui ne professaient pas le pharisaïsme. Dans l’occasion qui donna lieu à l’observation des pharisiens, ils avaient négligé de se laver les mains avant de manger. Saint Marc, vii, 3, 4, cite d’autres prescriptions analogues, auxquelles les disciples contrevenaient, la purification au retour de la place publique, celle des coupes, des vases, des lits, etc. De même nature étaient les contraventions à la loi traditionnelle du repos sabbatique, si souvent reprochées au Sauveur. Voir Sabbat, col. 1291. Notre-Seigneur ne répondit pas directement à l’observation des pharisiens ; il n’avait ni à condamner les purifications, qui n’étaient pas mauvaises en elles-mêmes, ni à disculper ses disciples, qui n’avaient transgressé aucun précepte. Mais, prenant l’offensive, il appliqua

aux pharisiens, d’une manière générale, la remarque d’Isaïe, xxix, 13, au sujet d’un peuple qui a l’hommage sur les lèvres, mais dont le cœur est loin de Dieu. Il leur reprocha leurs vaines observances, qui n’avaient d’appui que sur des doctrines et des prescriptions humaines. Puis, allant plus avant, il les accusa de substituer ces traditions aux commandements de Dieu, tl leur en cita un exemple frappant et qui indignait justement le peuple. La loi ordonnait d’honorer et, par conséquent, d’assister ses père et mère ; les pharisiens prétendaient que le don fait au Temple équivalait à l’assistance prêtée aux parents et en dispensait. Notre-Seigneur conclut en disant : « Vous annulez la parole de Dieu par la tradition que vous vous transmettez, et vous faites beaucoup d’autres choses semblables. » Et il se mita instruire le peuple sur la nécessité de la pureté intérieure et l’inutilité des purifications d’origine pharisaïque. Matth., xv, 1-20 ; Marc, vu, 1-23. La plupart des discussions qu’il eut avec les pharisiens et les scribes furent occasionnées par le peu de cas qu’il faisait de leurs traditions. — Saint Etienne fut accusé d’avoir prétendu que Jésus de Nazareth devait détruire le Temple et changer les traditions, d’après le grec : les coutumes transmises par Moïse. Act., vi, 14. Les traditions peuvent comprendre ici etles véritables institutions mosaïques, et lesrèglesposées par les docteurs, en vertu de l’autorité qu’ils prétendaient tenir de Moïse. Matth., xxiii, 2. Saint Paul, avant sa conversion, fut un fervent adepte des traditions pharisiennes. Gal., i, 14. Il prémunit les Colossiens contre les traditions humaines opposées à la doctrine de Jésus-Christ, de quelque origine qu’elles soient. Col., ii, 8. Saint Pierre rappelle aux chrétiens venus du judaïsme que la rédemption les a soustraits au régime de la tradition de leurs pères. I Pet., i, 18.

2° Tradition chrétienne. — Elle n’est pas, comme la tradition juive, le résultat des opinions des docteurs antérieurs, mais la transmission de l’enseignement même de Jésus-Christ, passant par la bouche des pasteurs de l’Église, autorisés et recevant grâce pour le conserver intégralement. Le Sauveur a confié sa doctrine aux Apôtres, en leur prescrivant de l’enseigner à toutes les nations, par conséquent de la transmettre oralement. Matth., xxviii, 19, 20. Cette doctrine comprenait tout ce que Jésus-Christ avait mission de faire connaître aux hommes : « Tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. « Joa., xv, 15. Saint Paul appelle cet ensemble doctrinal un « dépôt », qui doit être transmis intact par ceux auquel il est confié. I Tim., vi, 20 ; II Tim., i, 14. C’est l’Évangile qu’il prêchait parmi les Gentils, le même que Pierre et les autres apôtres prêchaient parmi les Juifs. Gal., ii, 2, 7-9. Lui-même faisait profession expresse de l’avoir reçu. Il tenait du Seigneur ce qu’il enseignait sur l’eucharistie. I Cor., xi, 23. Il avait également appris ce qui concernait la rédemption. I Cor., xv, 3. Il adresse à son disciple cette recommandation : « Les enseignements que tu as reçus de moi, en présence de nombreux témoins, confie-les à des hommes sûrs qui soient capables d’en instruire les autres. » II Tim., ii, 2. C’est tout le mécanisme de la tradition, reçue par l’Apôtre, enseignée à de nombreux auditeurs, parmi lesquels un pasteur, Timothée, est spécialement chargé de la conserver intacte, pour la transmettre à des pasteurs qui auront le même soin et les mêmes devoirs que lui, et qui la transmettront à leur tour. De leur côté, les fidèles ont l’obligation de s’en tenir à cet enseignement traditionnel : « Gardez les traditions que vous avez apprises, soit oralement, soitpar notre lettre. s II Thess., ii, 14. Ils doivent retenir la doctrine telle qu’elle leur a été annoncée, autrement leur foi est vaine. I Cor., xv, 2. C’est ce que font les vrais fidèles. L’Apôtre les en félicite : « Je vous loue de ce que…

vous retenez mes instructions telles que je vous les ai données. » I Cor., xi, 2. « Grâces soient rendues à Dieu de ce que… vous avez obéi de cœur à la règle de doctrine qui vous a été enseignée. » Rom., vi, 17. Saint Jude, 3, exhorte les chrétiens à « combattre pour la foi qui a été transmise aux saints une fois pour toutes. » Il y a donc là un système d’enseignement très formellement arrêté, dont l’usage a commencé dès la Pentecôte, antérieurement à celui des Écritures du Nouveau Testament, et qui n’a fait que continuer le procédé purement oral dont s’était servi Jésus-Christ pour la prédication de son Évangile. La tradition est ainsi le canal le plus ordinaire par lequel tout l’enseignement de la foi arrive aux hommes. Les Écritures du Nouveau Testament sont d’un emploi postérieur, elles ne contiennent pas tout le dépôt de la foi et leur usage n’est pas essentiel, puisque, pendant bien des années, il. y a eu des disciples de Jésus-Christ, sans qu’aucune partie de son enseignement eût encore été mise par écrit. — Cf. P. Batiffol, L’Église naissante et le catholicisme, Paris, 1909, p. 146-156, 195-260, 317-337.

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TRADUCTIONS DE LA SAINTE ÉCRITURE.

VoirSEPTANTE.VuLGATE, COPTES, ÉTHIOPIENNE, GRECQUES, LATINES, SYRIAQUES, FRANÇAISES.ALLEMANDES, ANGLAISES, ESPAGNOLES, SLAVES (VERSIONS), etC. TRAGÉLAPHE (hébreu : ’Aqqô ; Septante : xpayè-Xaçoç ; Vulgate : tragelaphus), un des animaux purs que la Loi permettait aax Juifs de manger. Deut., xiv, 5. Sur l’identification de l’animal désigné par ce nom, voir Chevreuil, t. ii, col. 697.

    1. TRAIT##

TRAIT (hébreu : massd’, nêség, êukkdh, ziqôt ; Septante : péXo ; , TÔ$eu[ia, SitXa ; Vulgate : telum, arma), arme de jet, analogue à la flèche et au javelot. Voir Flèche, t. ii, col. 2285 ; Javelot, t. iii, col. 1148. Le trait était ordinairement une pièce de bois ayant la forme d’un bâton, bardée de fer ou munie d’une pointe de fer, comme le nêSéq barzél, uiSr, po ; , arma ferrea, Job, xx, 24, et capable d’être enflammée comme les ziqôf, fàl, flamma, Is., L, 11 ; $ir iteituptojisva, tela ignea. Eph., vi, 16. Les traits étaient lancés à la main ou à l’aide d’instruments. Voir Catapulte, t. ii, col. 346. — On s’armait de traits pour le combat, IV Reg., x, 2 ; Is., l, 11, et on en faisait provision en temps de paix. III Reg., x, 25. Ils traversaient l’air pendant la bataille, II Mach., v, 3, les assiégés les lançaient contre les agresseurs. II Sam. (Reg.), xi, 20 ; II Mach., xii, 27, et les combattants contre leurs adversaires. II Mach., x, 30. On fuyait devant eux, Job, xx, 24, et on se mettait la tête à l’abri pour ne pas les recevoir. Ps. cxl (cxxxix), 8. Les vainqueurs pouvaient faire du feu avec les traits de leurs ennemis. Ezech., xxxix, 10. Les traits enflammés étaient particulièrement redoutables, car ils mettaient le feu là où ils tombaient. Aux mains d’un furieux, ils pouvaient causer de grands dégâts. Prov., xxvi, 18. Ces traits étaient probablement pourvus de matières inflammables. Saint Paul veut que les chrétiens se garantissent avec le bouclier de la foi contre les traits enflammés de Satan. Eph., vi, 16. — Les traits sont impuissants à percer la peau du crocodile. Job, xl, 31 ; xli, 18.

H. Lesêtre.

TRAITÉ. Voir Allfance, t. i, col. 383-387.

    1. TRAITRE##

TRAITRE (grec : TtpoSôxm, itapa3t801j ;  ; Vulgate : traditor, proditor), celui qui trompe la confiance d’un autre et lui cause du mal au lieu du bien qu’il lui devait. — Caïn fut le premier traître, quand il entraîna son frère Abel aux champs et le tua. Gen., iv, 8. — Les fils de Jacob agirent en traîtres quand ils voulurent tuer leur frère Joseph et ensuite le vendirent à des Ismaélites.

Gen., xxxvii, 20, 28 ; cf. xlii, 22. — Samson fut trahi par Dalila. Jud., xvi, 19-21. — Doëg, l’Édomite, trahit David, I Sam. (Reg.), xxii, 9, 10, que les habitants de Céïla se disposaient aussi à livrer, I Sam. (Reg.), xxiii,

12, et que les Ziphéens dénoncèrent à Saùl. I Reg., xxvi, 1. Les Philistins craignirent que David ne les trahît pendant le combat contre les Israélites. I Sam. (Reg.), xxix, 4. — Joab attira traîtreusement Abner à l’écart et le tua. II Sam. (Reg.), iii, 27. — David agit en traître quand, après avoir pris Bethsabée, il s’entendit avec Joab pour procurer la mort d’Urie. II Sam. (Reg.), xi, 14-17. — Absalom fit traîtreusement assassiner son frère Amnon. Il Sam. (Reg.), xiii, 28, 29. — Siba trahit son maître Miphiboseth. II Sam. (Reg.), XVI, 1-4. — Achitopel, conseiller de David, le trahit en indiquant à Absaloinles mesures à prendre contre son père. II Sam. (Reg.), xvii, 1-4. — Joab tua Amosa d’un coup d’épée en feignant de le baiser. II Sam. (Reg.), xx, 9, 10. — Plusieurs rois d’Israël furent assassinés traîtreusement par l’un de leurs sujets, Nadab par Baasa, III Reg., xv, 28, Éla par Zambri, III Reg., xvi, 10, Zacharie par Sellum, IV Reg, , xv, 10, Sellum parManahem, IV Reg., xv, 14, Phacéïa par Phacée, IV Reg., xv, 25, Phacée par Osée, IV Reg., xv, 31. En Juda, Joas fut frappé par ses serviteurs, IV Reg., xii, 20, 21, et, en Syrie, Benhadad fut étouffé par Hazaël, son courtisan. IV Reg., vii, 15. Quand Elisée révélait à Joram les projets do Benhadad, celui-ci s’imaginait qu’il y avait un traître dans son conseil. IV Reg., vi, 10, 11. — Job, xvii, 5, dit à propos des traîtres :

Celui qui livre en proie ses amis

Verra défaillir les yeux de ses enfants.

Plusieurs fois, les Psalmistes s’élèvent contre lés traîtres. Ps. lv (liv), 20-22 ; lxiv (lxiii), 3-7 ; cix (cvm), 2-20 ; etc. — À l’époque des Machabées, plusieurs trahisons sont signalées : Simon, de la tribu de Benjamin, dénonça le’trésor du Temple au gouverneur Apollonius. II Mach., iii, 4-6 ; iv, 1. Ménélas, « traître envers les lois et envers sa patrie, » remit les vases sacrés à Antiochus Épiphane. II Mach., v, 15, 16. Ptolémée Macron, appelé traître pour avoir abandonné Chypre, se donna la mort par le poison. II Mach., x,

13. Des Israélites furent gagnés à prix d’argent par les Iduméens assiégés et en laissèrent échapper un grand nombre, ce que Judas punit comme une trahison. II Mach., x, 20-22. Un juif, Rhodocus, fut mis en prison pour avoir livré des secrets à l’ennemi. II Mach., xm, 21. Tryphon trahit Jonathas en lui persuadant de renvoyer ses soldats et en l’enfermant dans Ptolémaïde, puis en gardant ses deux fils, malgré la foi jurée, et en le tuant lui-même. I Mach., xii, 43-xiir, 23. À Jéricho, Ptolémée, fils’d’Abobus, fit aussi périr Simon par trahison. 1 Mach., xvi, 15, 16. — Dans le Nouveau Testament, Judas est le traître par excellence. Les évangélistes le désignent habituellement par ce nom. C’est Judas Iscariote « qui le trahit », Matth., x, 4 ; Marc, ih, 19, « qui fut le traître », Luc, vi, 16. Jésus savait dès le principe « qui devait le trahir », et c’était Judas Iscariote, fils de Simon, « qui devait le trahir, tout en étant l’un des douze. » Joa., vi, 65, 72. La trahison fut arrêtée à prix d’argent, Matth., xxvi, 14-16 ; Marc, xiv, 10, 11 ; Luc, xxii, 3-6, formellement dénoncée par le Sauveur, Matth., XXVI, 21-25 ; Marc, xiv, 18-21 ; Luc, xxii, 21-23 ; Joa., xiii, 10, 11, 18-30 ; xvii, 12, exécutée par Judas à l’aide d’un baiser, Matth., xxvi, 47-50 ; Marc, xiv, 43-45 ; Luc, xxii, 47, 48 ; Joa., xviii, 2-5, puis inutilement regrettée par IuL Matth., xxviii, 3-10 ; Act., i, 16-18. — Saint Etienne accusa les Juifs d’avoir trahi et mis à mort le Juste. Act., vii, 52. — Saint Paul annonce que les hommes des derniers jours seront « traîtres ». I Tim., iii, 4.

H. Lesêtre.
    1. TRANSFIGURATION##

TRANSFIGURATION, changement dans les apparences naturelles d’un être. — La transfiguration de Notre-Seigneur, que la tradition ancienne localise sur le mont Thabor, est indiquée par le verbe u.e-ce[i.opipto8ï), transfiguratus est, qui suppose un changement, non dans la personne elle-même", mais dans les formes et dans la figure avec lesquelles elle se montre habituellement. Les évangélistes expliquent ce qui résulta de ce changement. « L’apparence de son visage devint autre. » Luc, ix, 29. « Son visage resplendit comme le soleil. » Matth., xvii, 2. En même temps, « ses vêtements devinrent blancs comme la lumière, » ou « comme la neige », Matth., xvii, 2, « brillants et très blancs comme la neige, tels qu’un foulon sur la terre n’en peut faire d’aussi blancs, » Marc, ix, 2, « son vêtement devint blanc fulgurant. » Luc, ix, 29. L’aspect général du Sauveur resta donc le même ; les trois Apôtres ne cessèrent pas de le reconnaître, comme firent plus tard Marie-Madeleine, Joa., xx, 14, les disciples d’Emmaûs, Luc, xxiv, 16, et les Apôtres eux-mêmes en diverses circonstances. Matth., xiv, 26 ; Joa., xxi, 4. Pour affermir la foi de ses trois compagnons, Pierre, Jacques et Jean, et les prémunir contre le scandale de sa passion, le Sauveur permit à la gloire de sa divinité de transparaître un moment à travers son humanité, et ses vêtements eux-mêmes revêtirent une splendeur et une blancheur éclatantes, par l’effet du rayonnement que dégageait le corps du divin Maître. Cf. S. Léon, Serm. li, 2, t. liv, col. 310. Quand le phénomène commença, les Apôtres étaient encore appesantis parle sommeil. À leur réveil seulement, ils aperçurent la gloire du Seigneur, ils virent Moïse et Élie qui conversaient avec lui et ils entendirent la voix céleste qui descendait de la nuée. Matth., xvii, 3, 5 ; Marc, ix, 3, 6 ; Luc, ix, 30, 32. Puis tout cessa, et Jésus leur recommanda de ne pas parler de ce qu’ils avaient vii, avant sa résurrection, confirmant par cette défense la réalité du spectacle dont ils avaient été les témoins. Saint Pierre rappela plus tard comment il avait été spectateur de la grandeur de son Maître, de l’honneur et de la gloire dont il fut alors entouré. II Pet., i, 1618. — Saint Paul parle des faux apôtres, artisans de tromperie, qui se transfigurent, [*ETa17-/iriiJi.aTiÇ6jA6voi, transfigurantes se, en apôtres du Christ, afin d’égarer et de perdre les âmes. Il observe que cet artifice ne doit pas surprendre, parce que Satan lui-même se transforme en ange de lumière et que ses ministres se transfigurent en ministres de justice. II Cor., xi, 13-15. Cf. S. Cyprien, Deunit. Eccles., , t. iv, col. 495. L’Apôtre appelle du même nom la figure de langage dont il s’est servi pour parler d’Apollos et de lui-même. I Cor., iv,

6. — Voir Thabor, col. 1683.
H. Lesêtre.
    1. TRAVAIL##

TRAVAIL (hébreu : yegi’a, siblôt, ’âbodàh, ’âmâl, êséb, po’al ; Septante : epyov, xôiioç, u-ôx" » ;  ; Vulgate : labor, opus), exercice de l’activité humaine.

I. La loi du travail. — 1° À l’origine. — Tout être vivant, surtout s’il est pourvu d’intelligence, exerce naturellement les facultés dont il est doué, et l’intensité de sa vie se mesure à celle de son action. Dieu est sans cesse actif. « Mon Père agit jusqu’à présent, et moi aussi j’agis, » dit le Sauveur. Joa., v, 17. L’œuvre de la création est représentée par l’écrivain sacré comme un travail dont Dieu se repose. Gen., ii, 2. Une fois créé, le premier homme ne fut pas abandonné à l’oisiveté ; il eut à cultiver et à garder le jardin d’Éden. Gen., ii, 15. Il trouvait dans le travail l’emploi de ses forces corporelles, pendant que ses facultés intellectuelles s’appliquaient au service de Dieu et à l’étude de la nature. Gen., ii, 19. Le travail n’est donc pas une peine par lui-même ; il apparaît comme la condition normale de la vie de l’homme sur la terre. — Le péché d’Adam modifia la nature primitive du travail, en y

ajoutant le caractère de châtiment. Dieu dit en effet à l’homme pécheur : « La terre est maudite à cause de toi ; c’est par ton travail pénible que tu en tireras ta

nourriture tous les jours de ta vie C’est à la sueur

de ton visage que tu mangeras ton pain. » Gen. » iii, 17, 19. Néanmoins la pénalité fut moins dure, en général, que ne semblaient le comporter les termes de la sentence. Comme se plaisent à le répéter les écrivains sacrés, Eccle., iii, 13 ; v, 18 ; viii, 15 ; ix, 9 ; Prov., xii, 11 ; xxxi, 13 ; etc., le travail devient plus aisé à l’homme à cause des biens qu’il lui assure. — 2° Législation mosaïque. — La loi de Moïse, se référant à un précepte antérieur, règle que le travail s’accomplira durant six jours et que, le septième jour, il sera absolument suspendu. Exod., xx, 9 ; Luc, xiii, 14. Voir Sabbat, col. 1293. Outre le repos de chaque nuit, le Seigneur impose donc celui de tout un jour sur sept. C’est la mesure qu’a jugée nécessaire l’auteur de la nature humaine. Le travail était encore défendu certains jours de fête, le premier et le septième jour de la Pâque, le jour de la Pentecôte, le premier jour du septième mois, pour la fête des Trompettes, le dixième jour du même mois, pour la fête des Expiations, le premier et le huitième jour de la fête des Tabernacles. Lev., xxiii, 7, 8, 21, 24, 28, 35, 36. Quand un Israélite se mettait en service chez l’un de ses frères, on ne devait pas exiger de lui le travail d’un esclave. Lev., xxv, 39. Le salaire de l’ouvrier devait être payé chaque jour. Deut., xxiv, 15. Voir Artisans, t. i, col. 1044 ; Salaire, t. v, col. 1365. — Les Septante et la Vulgate appellent « œuvre servile », gpYOv îiarpsu-nSv, opus servile, c’est-à-dire œuvre d’esclave, le travail défendu les jours de sabbat et de fêtes. Lev., xxiii, 7-36 ; Num., xxviii, 18, 25, 26 ; xxix, 1, 7, 12, 35. Cette traduction provient sans doute de ce que, à l’époque où furent faites les versions, tous les gros travaux étaient exécutés par les esclaves. Le texte hébreu appelle le travail défendu meWkét’âbôdâh, « œuvre de servitude », c’est-à-dire œuvre pénible, par conséquent toute œuvre accomplie par l’homme à la sueur de son front pour assurer sa subsistance, tout travail fatigant pour le corps. Les œuvres de ce genre étaient de nature très diverse. Ainsi ramasser du bois était un travail prohibé. Num., xv, 32-36. Il en était de même d’une marche un peu longue et de beaucoup d’autres actes que la loi ou l’usage déterminèrent. — 3° Loi évangélique. — L’Évangile n’innove rien sur la question du travail. NotreSeigneur accepte pour lui-même la loi du travail, et il est connu comme charpentier, fils de charpentier. Matth., xiii, 55 ; Marc, vi, 3. Les Apôtres qu’il se choisit sont tous des hommes de travail, et lui-même, dans ses paraboles, aime à mettre en scène des travailleurs de toute nature, qui exercent leur activité dans des conditions auxquelles le divin Maître ne trouve rien à redire. Saint Paul résume toute la morale évangélique sur le travail en cette sentence aussi brève que péremptoire : « Si quelqu’un ne veut pas travailler, il ne doit pas non plus manger. » L’Apôtre ne veut pas, en effet, que celui qui peut travailler vive d’aumônes. Les oisifs volontaires doivent « travailler paisiblement pour manger un pain qui leur appartienne. » II Thess., iii, 10, 12.

II. Le travail dans la Bible. — 1° Les travailleurs.

— Dès l’origine de l’humanité, Caîn se livre au travail agricole et Abel au travail pastoral. Gen., iv, 2. Tubalcaïn travaille les métaux. Gen., iv, 22. Le travail était alors particulièrement pénible, parce que l’outillage dont disposaient les hommes était fort imparfait. Aussi Lamech appelle-t-il son fils Noé, nûah, « repos », parce que, dit-il, « celui-ci nous soulagera de nos fatigues et du travail pénible de nos mains, que réclame ce sol maudit de Jéhovah. » Gen., v, 29. Les patriarches sont au travail que leur impose le soin de leurs troupeaux. Jacob surtout est soumis pendant vingt ans,

chez Laban, à un rude labeur que Dieu récompense. Gen., xxxi, 42 ; Sap., x, 10. En Egypte, les Hébreux sont appliqués par leurs oppresseurs à des travaux de plus en plus pénibles, pour les constructions et la culture. Exod., i, 14 ; ii, 11 ; v, 4, 5 ; vi, 6, 7 ; Sap., x, 17. Booz surveille sa moisson. Ruth, iii, 7. Gédéon bat le froment. Jud., vl, 11. Saûl, déjà roi, fait travailler ses bœufs aux champs. I Reg., xi, 5. Le riche Nabal préside à la tonte de ses brebis. I Reg., xxv, 2. Elisée conduit lui-même l’une des douze paires de bœufs qui labouraient ses champs. III Reg., xix, 19. Le propriétaire de Sunain, qui reçut chez lui Elisée, surveillait lui-même ses moissonneurs. IV Reg., iv, 18. Cf. Prov., xxxi, 13 ; Tob., ii, 19. Plus tard, le Sauveur et ses Apôtres travaillent chacun à un métier et saint Paul gagne sa vie à fabriquer des tentes. Act., xviii, 3 ; xx, 34 ; I Cor., iv, 12 ; I Thés., ii, 9 ; II Thés., iii, 8, etc. L’Apôtre suivait en cela l’usage des docteurs juifs, qui associaient l’étude de la loi à l’exercice d’un métier. « Ce double travail purifie du péché. L’étude de la loi sans la pratique d’un métier finira par être troublée et entraîne la faute avec elle. » Aboth, ii, 2. Néanmoins, le métier ne devait venir qu’au second rang pour un docteur. « Donne-toi moins à ton métier et consacretoi davantage à la loi. » Aboth, iv, 10. Il suit de là pourtant que le travail était universellement estimé et pratiqué chez les Israélites et que, si grand et si savant qu’on fût, on ne croyait pas déroger en s’y appliquant.

2° Le travail manuel. — L’élevage et les tracaux des champs, bien que pénibles, doivent occuper beaucoup d’hommes. « Ne hais pas les labeurs pénibles, ni le travail des champs institué par le Très-Haut. » Eccli., vii, 15. C’est Dieu qui a assujetti l’homme à ce travail. Eccle., iii, 10. À raison des circonstances, la manne a été la seule nourriture assurée à l’homme sans travail. Sap., xvi, 20. L’élevage est recommandé. Prov., xxvii, 23-27. Il est souvent fait mention des travaux de la culture. Ps. civ (cm), 23 ; IPar., xxvii, 26 ; Sap., xvii, 16 ; Joa., IV, 10 ; etc. Les gens de métiers sont fréquemment nommés. L’Ecclésiastique, xxxviii, 25-34, parle du laboureur, du charpentier, du constructeur, du graveur, dii forgeron et du potier. Il remarque que chacun de ces hommes est « intelligent dans son métier », qu’il s’y applique avec tout son soin et, par conséquent, n’a pas le loisir d’acquérir la science qui lui permettrait d’être juge ou docteur, que néanmoins la vie ordinaire dépend du travail de ces hommes et que ce sont eux qui « soutiennent les choses du temps ». L’Ecclésiaste, iv, 4, a vu que « tout travail et toute habileté dans un ouvrage est exposé à la jalousie (ou à l’eovie) du prochain. » Cette jalousie pourrait bien n’être pas autre chose que ce que nous appelons la concurrence. Il est encore parlé du travail du forgeron, Is., xliv, 12, du fabricant d’idoles, Sap., xv, 4, 8, du batelier, Marc, VI, 48, du pêcheur, Luc, v, 5, du banquier, Matth., xxv, 16, du marin, Apoc, xviii, 17 ; etc. Cf. Fr. Buhl, La société israélite d’après l’A. T., trad. de Cintré, Paris, 1904, p. 105-121. À tous ces métiers s’ajoutait le commerce. Voir Commerce, t. ii, col. 878. Le paresseux se soustrait au travail manuel, Prov., xxi, 25, l’insensé s’en fatigue, Eccle., x, 15, et l’impie qui prospère s’en exempte, au scandale des justes. Ps. lxxiii (lxxii), 5. Le labeur pénible de la guerre est assimilé à un travail. Ezech., xxix, 20. Comme le travail est pour l’ordinaire fatigant et souvent douloureux, plusieurs des mots qui signifient « travail ï sont fréquemment pris dans le sens de « peine, souffrance wyegVa, Job, xxxix, 16 ; Eccle., xii, 12 ; etc., ’dmdl, Gen., xli, 51 ; Deut., xxvi, 7 ; Job, m, 10 ; xvi, 2 ; Is., lui, 11 ; etc., ’êséb, Gen., iii, 16 ; Prov. xv, 1 ; etc.

3° Fruits du travail. — L’homme travaille avant tout pour se nourrir. Ps. cxxviii (cxxvii), 2. « Tout le travail

de l’homme est pour sa bouche. » Eccle., vi, 7. « Le travailleur travaille pour lui, car sa bouche l’y excite. » Prov., xvi, 26. Celui qui travaille vaut donc mieux que l’oisif ou le hâbleur manquant de pain. Eccli., x, 13. Le travail procure même l’abondance et la richesse. Prov., xii, 11 ; xxvii, 25-27 ; xxviii, 19 ; Eccli., xx, 30 ; xxxi, 3. — Ce résultat ne se produit pourtant pas j toujours, et tel travaille, qui reste pauvre et manque de tout. Eccli., xi, 11 ; xxxi, 4. Il y a un travail qui ne nourrit pas, Is., lv, 2, un labeur inutile et vain. Eccle., iv, 6. Cette inutilité tient à des circonstances malheureuses, à l’inhabileté du travailleur, mais aussi à l’absence de la bénédiction divine. Prov., x, 22. Parfois, Dieu amène la sécheresse sur le travail des mains. Agg., i, 11. En vain bâtit-on, si Dieu ne bâtit lui-même. Ps. cxxvii (cxxvi), 1. Il a donné aux sauterelles le travail des Égyptiens, Ps. lxxviii (lxxvh), 46, ; et a réduit à néant celui de Babylone. Jer., li, 58. Si j l’on n’est point fidèle à Dieu, on voit son travail passer aux mains des autres. Prov., v, 10. Le fruit du travail j est alors mangé par des étrangers, Deut., xxviii, 33 ; ] Ps. cix (cvm), 11 ; Prov., v, 10 ; de même que les Hébreux ont possédé le travail des peuples. Ps. cv (civ), 44. — L’idolâtre recommande en vain son travail à ses faux dieux. Sap., xiii, 19. Les idoles dévorent le produit du travail. Jer., iii, 24. C’est ce qui est arrivé aux Israélites infidèles ; mais, s’ils reviennent à Dieu, les étrangers ne prendront plus le fruit de leurs labeurs. Is., lxii, 8. — L’homme n’emporte pas avec lui le fruit de son travail. Eccle., v, 14. Il le laisse à d’autres, Eccli., xiv, 15, qui entrent ainsi dans les travaux de leurs prédécesseurs. Joa., iv, 38. On fait donc bien de travailler pour avoir de quoi exercer la charité. Act., xx, 25 ; Eph., iv, 28.

4° Le travail intellectuel. — Moïse, au désert, se livrait à un travail de juge que Jéthro estima fort audessus de ses forces et qu’il lui conseilla de répartir entre plusieurs autres. Exod., xviii, 18. L’acquisition de la science est pénible. « Nous avons peine à deviner ce qui est sur la terre, et nous n’apercevons pas sans travail ce qui est devant nos mains. » Sap., IX, 16. Le traducteur de l’Ecclésiastique, Prol., s’est imposé un grand labeur. « Les labeurs de la sagesse produisent les vertus. » Sap., viii, 7 ; ix, 7. Il faut cultiver la sagesse comme on cultive la terre. Eccli., vi, 19, 20. Dans ces conditions, on se ménage le repos et l’on contribue à l’utilité des autres. Eccli., xxiv, 47 ; xxxiii, 18 ; li, 35. Ainsi font ceux qui, par opposition avec les artisans, peuvent consacrer tout leur temps à l'étude de la loi, à la réflexion, à la fréquentation des personnages importants, aux voyages et à la prière. Eccli., xxxix, 1-11. Tout en admettant la pratique modérée d’un métier, les docteurs jugeaient « incapable de devenir un sage, celui qui s’adonnait partrop au commerce. » Aboth, ll, 5.

5° Le travail apostolique. — La prédication évangélique est considérée comme un travail. Joa., iv, 38. Ce travail n’est pas vain. I Cor., xv, 58. Saint Paul, qui ne se fait pas gloire du travail des autres, II Cbr., x, 15, rappelle souvent ses travaux apostoliques. I Cor., xv, 10 ; xvi, 16 ; II Cor., xi, 23, 27 ; Gal., iv, 11 ; Phil., ii, 16 ; iv, 3 ; Col., i, 29 ; I Thés., v, 12 ; I Tim., ii, 9 ; iv, 10 ; v, 17. Ce travail mérite son salaire. Matlh., x, 10 ; Luc, x, 7. Saint Paul le revendique hardiment. I Cor., IX, 3-18 ; II Cor., xi, 8, 9 ; Gal., vi, 6 ; Phil., iv, 10-18. Il exhorte Timothée à travailler comme un bon soldat du Christ, II Tim., ii, 3 ; iv, 5, à l’exemple du soldat romain qui, en temps de paix, était employé à la création des routes et aux constructions publiques. Cf. Cagnat, L’armée romaine d’Afrique, Paris, 1892, p. 427-437. Saint Jean mentionne les travaux de l'évêque d'Éphèse. Apoc, ii, 2. — Au ciel, les serviteurs de Dieu se reposeront de leurs travaux. Apoc, xiv, 13.

H. Lesêtre.


    1. TREMBLEMENT DE TERRE##

TREMBLEMENT DE TERRE, (hébreu : ra’aè ; Septante : attelas, qu<7<Tee<Tfiôç ; Yulgate : terrm motus), mouvement du sol, sous l’influence de causes internes. Ce mouvement peut provenir soit des forces volcaniques agissant dans les profondeurs de certaines couches terrestres, soit de la dislocation d’une partie de l'écorce solide de la terre par suite du refroidissement de la planète. La Palestine a été, aux époques géologiques, le théâtre de puissants phénomènes sismiques, d’où est résultée la profonde et extraordinaire dépression' de la mer Morte et delà vallée du Jourdain. L’activité volcanique a laissé des traces importantes sur les rives orientales du lac de Tibériade et de la mer Morte. Voir Palestine, t. iv, col. 2015. À l'époque historique, la destruction de Sodome et des villes coupables coïncida avec un mouvement sismique qui abaissa une partie du sol au-dessous du niveau des eaux. Voir Morte (Mer), t. iv, col. 1308. — Un tremblement de terre eut lieu à Machmas, au temps de Saùl. I Reg., xiv, 15. Un autre se produisit sous le règne d’Ozias. Am., i, 1 ; Zach., xiv, 5. Les livres historiques se taisent à son sujet. Josèphe, Ant. jud., IX, x, 4, le rattache à la tentative sacrilège du roi. II Par., xxvi, 16-20. — Quand la terre s’entr’ouvrit pour engloutir Coré et ses partisans, Num., xvi, 32, il y eut plutôt un phénomène miraculeux qu’un tremblement de terre. — Celui dont fut témoin le prophète Ëlie, III Reg., xix, 11-12, n’exista probablement qu’en vision, comme celui du songe de Mardochée. Esth., xi, 5. La chute des murs d’Aphec, III Reg., xx, 30, ne suppose pas non plus nécessairement un tremblement de terre. — En l’an 31 avant Jésus-Christ, sous Hérode le Grand, au commencement du printemps, un tremblement de terre secoua la Palestine, y fit périr 30 000 hommes sous les ruines des maisons et causa de grands ravages parmi les troupeaux. Josèphe, Bell, jud., i, xix, 3. Dans Ant. jud., XV, v, 2, l’historien ne parle que de 10000 victimes. — Au moment de la mort de Notre-Seigneur, il y eut un tremblement de terre par suite duquel les rochers se fendirent, voir Calvaire, t. ii, col. 82, et les sépulcres s’ouvrirent. Matth., xxvii, 51, 54. Le même phénomène se reproduisit à l’heure de la résurrection du Sauveur. Matth., xxviii, 2. Ces deux tremblements eurent un caractère surnaturel et peut-être tout local. — Un autre tremblement de terre ébranla les fondements de la prison dans laquelle Paul et Silas étaient enfermés, à Philippes, et prépara la délivrance des deux apôtres. Act., xvi, 26. — Le tremblement de terre est un phénomène grandiose et effrayant, qui évoque l’idée de la puissance de Dieu. Aussi les écrivains sacrés le font-ils intervenir dans les théophanies. Exod., xix, 18 ; Jud., v, 4 ; II Reg., xxii, 8 ; Ps. lxxvi (lxxv), 9 ; lxxvh (lxxvi), 19 ; xcvh (xcvi), 4 ; civ (cm), 32 ; Am., viii, 8 ; Hab., iii, 10 ; Aci., iv, 31. Notre-Seigneur annonce que la ruine de Jérusalem sera précédée de tremblements de terre. Matth., xxiv, 7 ; Marc, xiii, 8 ; Luc, xxi, 11. Les historiens en ont enregistré plusieurs vers cette époque. Cf. Tacite, Annal., xiv, 27 ; xv, 22 ; Sénèque, Quœst. natur., vi, i ; Josèphe, Bell, jud., IV, iv, 5. Saint Jean en signale d’autres qui marqueront la fin des temps. Apoc., vi, 12 ; viii, 5 ; xi, 13, 19 ; xvi, 18. — Sur les tremblements de terre de Palestine, voir Palestine, t. iv, col. 2031. — Pour atténuer les effets des tremblements de terre, on assemblait solidement des charpentes à travers les constructions. Eccli., xxii, 19.

H. Lesêtre.
    1. TREMELLIUS Emmanuel##

TREMELLIUS Emmanuel, savant juif, né à Ferrare en 1510, mort en 1580. Il fut converti à la religion chrétienne par le cardinal Polus et par M. A. Flaminio, mais Pierre Martyr le poussa à embrasser le protestantisme. Il quitta l’Italie et se rendit en Allemagne, puis en Angleterre, où il enseigna l’hébreu à Cambridge. Il retourna en Allemagne après la mort

V. - 73

2307

TREMELLIUS — TRESOR

2308

d’Edouard VI et alla enfin à Sedan, où il fut appelé pour professer l’héLreu. On a de lui entre autres : Rudimenta linguse hebrsess, Vienne, 1541 ; Interpretatio Syra Novi Testamenti hebraicis typis descripta, Paris, 1569 ; Biblia sacra sive libri canonici latini recens ex Uebrxo facti, Francfort, 1579 ; Londres, 1580. Voir Latines (Versions), ii, 4°, t. iv, col. 125.

    1. TRENCH##

TRENCH, Richard Chenevix, théologien anglican, né à Dublin le 5 septembre 1807, mort à Londres le 28 mars 1886. Il commença ses études aux écoles de Tuyford (1816) et de Harrow (1819) et les termina à Cambridge, à Trinity Collège. En 1835, il devint vicaire de Cardridge, dans le Hampshire. C’estlà qu’il inaugura ses Lectures, dont les premières ont fourni la matière de son ouvrage Notes on Parables, publié plus tard. En 1841 il devint le vicaire du recteur d’Alverstoke, Samuel Wilerforce, futur évêque d’Oxford, son ami etprotecteur. En 1844, Trench obtint le rectorat d’Ichenstoke, d’où il fut promu, en 1846, à la chaire d’exégèse du Nouveau Testament de King’s Collège à Oxford. Doyen de Westminster depuis le mois d’octobre 1856, il fut nommé, en novembre 1863, archevêque anglican de Dublin. En 1884, il résigna son siège à cause de son âge avancé et de ses infirmités. Deux ans après, il mourut à Londres et fut inhumé à Westminster.

Nous citerons de lui : Notes on the Parables of our Lord, in-8°, 1841, plusieurs éditions ; Les Paraboles de Notre-Seigneur, traduit librement de l’anglais sur la 13e édition, par Paul Duplan, pasteur, in-8°, Lausanne, 1879 ; Exposition of the Sermon on the Mount, in-8°, 1844 ; Notes on the miracles of our Lord, in-8°, 1846, The Star of the wise men : being a cornmentary on the second chapter of St. Matthew, in-16, 1850 ; Synonyms of the New Testament, in-8°, 1854 ; Synonymes du Nouveau Testament, traduit de l’anglais par C. de Faye, in-8°, Bruxelles, 1869 ; Cornmentary on the Epistles to the Seven Churches in Asia, in-8°, 1861 ; Studies on the Gospels, in-8°, 1867. —Voir L. Stephen, Diciionary of national biography, t. lvii, 1899, p. 190-194. 0. Rey.

    1. TRÉSOR##

TRÉSOR (hébreu : ’ôsâr, genâzim, frosén, matmôn, mikmannîm, sefûnîm, tô’âfôf ; chaldéen : ginezîm ; Septante : 61aavpé(,-fâÇa ; Vulgate : thésaurus, gaza), ace umulation d’or, d’argent et de matières précieuses.

1° Au sens propre. — 1. Trésor des particuliers. — Les frères de Joseph retrouvèrent dans leurs sacs les trésors qu’ils avaient apportés. Gen., xliii, 23. Les malheureux cherchent la mort plus ardemment qu’un trésor. Job, iii, 21. Le trésor des méchants est maudit, parce qu’il est le fruit de l’iniquité. Job, xx, 26 ; Prov., xxi, 6 ; Mich., VI, 10. Le trésor que l’on possède dans le trouble ne vaut pas la médiocrité avec la crainte de Dieu. Prov., xv, 16. La bonne renommée vaut mieux que mille trésors. Eccli., xl, 15. On peut amasser des trésors, mais à condition de les utiliser libéralement, selon le précepte de Dieu. Eccli., xxix, 14. Les mages ti rèrent de leurs trésors les présents qu’ils offrirent à l’enfant Jésus. Matth., 11, 11. Notre-Seigneur conseille de ne pas amasser de trésors sur la terre, où ils peuvent être la proie des voleurs ; d’ailleurs le cœur s’y attache plus qu’il ne faudrait. Matth., vi, 19-21. Il compare le royaume des cieux à un trésor caché, enfoui dans un champ. Celui qui l’a trouvé le cache de nouveau, vend son bien et achète le champ, afin d’entrer en possessi on du trésor. Matth., Xlll, 44. On cachait les trésors so us terre, afin de les soustraire aux atteintes des voleurs. De là les noms de tnatmôn, mikmannîm etsefûn îm, qui désignent les trésors en tant que « choses ca chées ». Le trésor dont parle Notre-Seigneur avait été laissé là par un ancien propriétaire, mort sansavoir pu en révéler l’existence. Le propriétaire actuel ignore

sa présence. Celui qui en fait la trouvaille a sans doute loué le champ pour le cultiver. Il ne se croit pas en droit cependant de s’emparer du trésor. Il achète donc le champ, afin de devenir possesseur légitime de tout ce qu’il contient. Il agit conformémentau droit d’alors, le propriétaire naturel n’existant plus, et lui-même n’étant pas obligé de révéler au propriétaire actuel la valeur accidentelle de son terrain. Un trésor ainsi caché ne sert à rien ; mieux vaut employer l’argent à faire le bien. Tob., xii, 8. — 2. Trésor du sanctuaire. — Dès l’époque de Josué, il est question d’un trésor de Jéhovah, dans lequel on verse certains objets précieux pris sur les ennemis. Jos., VI, 19. Le Temple a un trésor qui subit diverses vicissitudes. Il est constitué par les soins de David et de Salomon. III Reg., vii, 51 ; I Par., xxviii, 12 ; xxix, 8 ; II Par., v, 1. Il est successivement pillé par Sésac, roi d’Egypte, III Reg., xiv, 26 ; II Par., xii, 9, par Baasa, roi d’Israël, II Par., xvi, 2, par Hazaël, roi de Syrie, auquel le roi de Juda, Joas est obligé de le remettre, IV Reg., xii, 18, par Joas, roi d’Israël, IV Reg., xiv, 14, et par Nabuchodonosor. IV Reg., xxiv, 13. Héliodore cherche en vain à s’emparer du trésor du Temple, au nom du roi de Syrie, Séleucus [V.

II Mach., iii, 740. Voir Héliodore, t. iii, col. 570. Sur le trésor du Temple et la manière dont il fonctionnait, voir Gazophylacium, 1. 11, col. 133. Il y avait à Babylone un trésor du dieu de Nabuchodonosor. Dan., 1, 2. —

3. Trésor des princes. — Les rois de Juda avaient un trésor qui partagea souvent le sort du trésor du Temple.

III Reg., xiv, 26 ; xv, 18 ; IV Reg., xiv, 14 ; xvi, 8 ; xviii, 15 ; xx, 13, 15 ; II Par., xxv, 24 ; xxxvi, 18. Ézéchias s’était amassé des trésors. II Par., xxxii, 27. Il les fit visiter avec complaisance par les envoyés du roi de Babylone, Mérodach-Baladan. lsaïe lui prédit alors qu’un jour tous ces trésors seraient emportés à Babylone. IV Reg., xx, 13-17. Les tributaires de l’Egypte portaient au pharaon des trésors empilés sur le dos des chameaux. Is., xxx, 6. Il est fait mention des trésors d’Holoferne, Judith, xii, l, d’Assuérus, Esth., iii, 9 ; iv, 7, d’Artaxerxès, I Esd., vii, 20. Les trésors du roi de Tyr seront pillés. Ezech., xxviii, 4. Par contre, Dieu donnera à Cyrus des trésors cachés. Is., xlv, 3. En Juda, les chefs de la nation s’emparent des biens et des trésors des autres. Ezech., xxii, 25. Antiochus Épiphane en fait autant partout où il passe. I Mach., 1, 24. —

4. Trésor des peuples. — Juda est un pays rempli de trésors. Is., 11, 7. Le Seigneur les livrera au pillage. Jer., xv, 13 ; xvii, 3 ; xx, 5 ; Ose., xiii, 15. Babylone est riche en trésors, jer., ii, 13, qui seront pillés par l’épée. Jer., L, 37. Le même sort est réservé aux trésors de Moab, Jer., xlviii, 7, d’Ammon, .1er., xlix, 4, et de l’Egypte. Dan., xi, 43. Au temps de Zorobabel, on constitua un trésor public pour la réfection des murs de la ville. II Esd., vii, 70-72. Le trésor était gardé dans un lieu appelé « maison du trésor », bét’ôsâr, II Esd., x, 39, ou bétginezayyd’. IEsd., v, 17 ; vi, 1.

2° Au sens figuré. — 1. L’atmosphère. — Dieu a des trésors d’où il tire les vents, Ps. cxxxv (cxxxrv), 7 ; Jer., x, 13 ; li, 16, les nuées, Eccli., xliii, 15, la pluie et le temps favorable, Deut., xxviii, 12, la neige. Job, xxxviii, 22. — 2. La sagesse. — Il faut creuser, c’est-à-dire se donner de la peine, pour découvrir ce trésor. Prov., ii, 4. La sagesse est un trésor qui dépasse tous les autres, Sap., vii, 14 ; Eccli., 1, 26 ; Heb., xi, 26, et leur donne du prix. Prov., viii, 21 ; xxi, 20. La crainte de Dieu, qui est la vraie sagesse, doit être le trésor d’Israël. Is., xxxiii, 6. De ce trésor, l’homme de bien doit tirer toutes sortes de bonnes choses, à rencontre du méchant qui n’en tire que de mauvaises. Matth., xii, 35 ; xiii, 52 ; Luc, vi, 45. La sagesse qu’on tient cachée, comme un trésor enfoui, ne sert de rien. Eccli., xx, 32 ; xli, 17 ; Matth., xxv, 25 ; Luc, xix, 20. Tous les trésors de la sagesse étaient en Jésus-Christ. Col., 11, 3. — 3. Les biens de l’âme. — Trouver un ami fidèle, c’est trouver un trésor. Eccli., vi, 14. Le Tout-Puissant est le trésor du juste. Job., xxii, 25. Les chrétiens ont reçu la grâce de l’Évangile, mais ils portent ce trésor dans des vases de terre, c’est-à-dire dans une nature fragile, afin que la puissance de Dieu paraisse davantage. II Cor., iv, 7. Ceux qui sacrifient les biens du temps s’acquièrent un trésor dans le ciel. Matth., xix, 21 ; Marc, x, 21 ; Luc, xii, 33, 34 ; xviii, 22. —4. Les secrets divins. — Ils sont dans les trésors de Dieu. Deut., xxxii, 34.

TRÉSORIER (hébreu : gizbâr ; chaldéen : gedâbrîn ; Septante : οἰκονόμος ; Vulgate : custos arcæ publicæ, arcarius), préposé à la garde du trésor. — Dès l’organisation de la royauté israélite, il y eut des fonctionnaires chargés de veiller sur le trésor du roi. David choisit Asmoth, fils d’Adiel, pour trésorier, ʿal-ʾoṣrôṭ, ἐπὶ τῶν θησαυρῶν, super thesauros. Jonathan, fils d’Ozias, remplissait la même fonction pour les trésors des champs, c’est-à-dire pour les redevances en nature qui se convertissaient en argent à travers tout le pays. I Par., xxvii, 25. Salomon eut des intendants et des préposés aux impôts qui remplissaient équivalemment les fonctions de trésoriers. III Reg., IV, 2-7. — Des lévites avaient la surveillance des trésors du Temple. I Par., ix, 26 ; xxvi, 20, 22, 26, sous l’autorité d’un intendant en chef des trésors. I Par., xxvi, 24. — À la cour de Nabuchodonosor, il y avait des trésoriers, gedâbrîn, que les versions appellent τυράννοι, tyranni. Dan., ra, 2, 3. — Assuérus avait des fonctionnaires préposés au trésor. Esth., iii, 9. — Artaxerxès employait aussi des gizzabrin, gardiens du trésor. 1 Esd., vii, 21.

— Un eunuque éthiopien était le trésorier de la reine Candace, ἐπὶ πάσης τῆς γάζςαὐτῆς, super omnes gazas ejus. Act., viii, 27. — Saint Paul transmet aux Romains le salut d’Éraste, trésorier de la ville d’où il écrit. Rom., xvi, 23.


TRIBU (hébreu : šébét ; Septante : φυλή ; Vulgate : tribus), groupe de familles descendant de chacun des douze fils de Jacob. La division en tribus était fréquente parmi les Orientaux et elle existe encore chez les Arabes modernes. Les tribus d’Israël, au nombre de douze, sont énumérées dans la Genèse, xlix : 1. Ruben ; 2. Siméon ; 3. Lévi ; 4. Juda ; 5. Zabulon ; 6. Issachar ; 1. Dan ; 8. Gad ; 9. Aser ; 10. Nephthali ; 11. Joseph, dont la descendance se divisa en deux tribus, Éphraïm et Manassé ; 12. Benjamin. Voir ces noms. La tribu de Lévi, consacrée au service de Dieu, ne reçut point de territoire spécial après la conquête de la Terre Promise mais seulement des villes pour y habiter, en sorte que la Palestine ne fut partagée qu’en douze portions, quoique la division de la postérité de Joseph en deux portât le nombre des tribus à treize. De même, la vocation de saint Paul à l’apostolat porta plus tard le nombre des Apôtres à treize. — Les Ismaélites, descendants d’Abraham par Ismaël, comptèrent aussi douze tribus. Gen., xxv, 13-15.— D’après Xénophon, Cyrop., 1, 3, 4, les Perses étaient également partagés en tribus. — La distinction des tribus d’Israël s’est perdue peu à peu depuis la ruine de Jérusalem. Voir J. M. Jost, Allgemeine Geschichte des Isrælitischen Volkes, Berlin, 1832, t. i, p. 407 sq.


TRIBULATION, tout ce qui est de nature à faire souffrir l’homme dans son corps ou dans son âme.

I. Ses différents noms. — L’hébreu a une très grande variété de termes pour désigner les différents maux dont l’homme peut souffrir : ’êd, απωλεία, perditio, Job, XXI, 30, κακώσις, afflictio, Ps. xviii (xvii), 19, la calamité ; —’âvén, ὀδύνη, dolor, Job, xv, 35 ; ἀνομία, iniquitas, Ps. lv (liv), 4 ; πόνος, dolor, Ps. XC ^lxxxix), 10 ; κακόν, malum, Prov., xxii, 8 ; πένθος, Ose., ix, 4 ; κόπος, iniquitas, Hab., iii, 7, la douleur ; — hovâh, ταλαιπωρία, calamitas, Is., xlvii, 11 ; conturbatio, Ezech., vii, 26, le malheur ; — havvâh, ἀνομία, iniquitas, Ps. lvii (lvi), 2, le malheur ; — ḥarṣob, Ps. lxxiii, 4, la douleur ; — ḥêtʾ, ἀμαρτία, peccatum, Lam., iii, 39, 1a peine du péché ; — ḥaattâ’âh, ἀνομία, peccatum, Is., v, 18, la peine du péché ; — ḥôlî, ἀῥῤωστία, miseria, Eccle., VI, 2, le grand malheur ; — ke’ib, πληγή, τραῦμα, dolor, Job, II, 13 ; xvi, 7, la douleur ; — mak’ôb, κακώσις, afflictio, Exod., iii, 7 ; μαλακία, dolor, Job, xxxiil, 19 ; μάστιξ, flagellum, Ps. xxxii (xxxi), 10 ; πληγή, dolor, Is., lui, 3 ; Lam., i, 12, la souffrance ; — massâh, pœna, Job, ix, 23, l’épreuve ; — ma’ăṣêbâh, λυπή, dolor, Is., L, 11, la douleur ; môṣaq, στενοχωρία, angustia, Is., VIII, 22, la détresse ; — mâṣôq, θλίψις, angustia, Ps. cxix (cxviii), 143 ; πολιορϰία, angustia, Jer., xix, 9, 1’angoisse ; — meṣûqâh, θλίψις, angustia, Job, xv, 24, l’angoisse ; — mâṣôr, στενοχωρία, angustia, Deut., xxviii, 53, la détresse ; — mêṣar, θλίψις, tribulatio, Ps. cxviii (cxvii), 5 ; Lam., I, 3, la tribulation ; — murdâf, πληγή, persequens, Is., xiv, 6, la persécution ; — mârûd, διωγμος, transgrestio, Lam., iii, 19, la souffrance ; —’âmâl, κόπος, labor, Ps. xc (lxxxix), 10, la peine ; —’âsqâh, ὀδύνη, vis, Is., xxxviii, 14, la violence ; —’âôn, πτωχεία, paupertas, Ps. xxxi (xxx), 11, la douleur ; — ’ënûṭ, δεήσις, deprecatio, Ps. xxii (xxi), 25, la souffrance ; —’ônî, ταπείνωσις, afflictio, Gen., xvi, 11 ; κακώσις, afflictio, Deut., xvi, 3 ; ὀδύνη, luctus, Prov., xxxi, 5, la douleur ; cf. Gen., xxxv, 18 ; voir Benoni, t. i, col. 1603 ; —’iṣṣâbôn, λύπη, ærumna, Gen., iii, 16, la souffrance de l’enfantement ; voir Enfantement, t. ii, col. 1792 ; — ’aṣṣébéṭ, συντρίμμα, contritio, Ps. cxlvii (cxlvi), 3, la blessure ; — ’êṣéb, λύπη, dolor, Gen., III, 16, les douleurs de l’enfantement ; — pîd, πτώμα, ruina, Job, xxxi, 29 ; ruina, Prov., xxiv, 22, le malheur ; — sôq, angustia, Dan., ix, 25, le malheur ; — sôqâh, στενοχωρία, angustia, Is., xxx, 6, l’angoisse ; —sar, ἀνάγκη, θλίψις, tribulatio, Ps. lv, 2 ; xviii (xvii), 7 ; cvi (cv), 44, la détresse ; — sârâh, θλίψις, angustia, tribulatio, Gen., xlii, 21 ; Ps. cxx (cxix), 1 ; Is., xxx, 6 ; ἀπωρία, tribulatio, Is., viii, 22, l’angoisse ; — râ’âh, κακόν, malum, Gen., xix, 19 ; xxvi, 29 ; xliv, 4 ; III Reg., ii, 44, le mal qu’on fait à un autre ; — šâv’, ὀδύνη, labor, Job, vu, 3 ; Is., xxx, 28, la souffrance ; — šoʿâh, ἀπώλεια, miseria, Is., xlvii, 11 ; Ps., lxiii(lxii), 10, le malheur ;

ṭô’âh, ἀφανῆ, insidiæ, II Esd., iv, 8, le mal fait à une ville. — On rencontre quelquefois plusieurs de ces termes dans le même verset, Prov., i, 27 : ’êd, καταστροφή, interitus ; sârâh, θλίψις, tribulatio ; sôq, πολιορϰία, angustia ; Is., xlvii, 11 : râ’âh, ἀπώλεια, malum ; hovâh, ταλαιπωρία, calamitas ; šoʿâh, ἀπώλεια, miseria, etc. Voir Deuil, t. ii, col. 1396 ; Mal, Maladie, t. iv, col. 600, 611 ; Plaie, Ruine, Souffrance, Tourment, t. v, col. 450 ; 1268, 1855, 2294.

II. Ses différentes espèces. — 1° Ses causes. — Les tribulations ont pour cause première Dieu, qui les envoie ou qui les permet. Il les envoie pour châtier les hommes en particulier ou les nations, il les permet pour éprouver, améliorer ou convertir les âmes. Il se sert dans ce but du démon, à la malice duquel il fixe des limites, des hommes, qui se font persécuteurs de leurs semblables, ou des forces de la nature, qui peuvent constituer en certaines circonstances des fléaux généraux ou particuliers. L’homme est naturellement sensible à tous ces genres de tribulations. Après le péché, beaucoup de maux ont été déchaînés contre l’homme, Gen., iii, 16-19, qui a grand’peine à se défendre contre eux, n’y réussit pas toujours et finit par succomber à la mort. Les tribulations ont donc des causes variées et elles produisent des effets différents, qui permettent de les classer en plusieurs catégories. 2° Les châtiments. — Le mal enfante le malheur. Job, xv, 35. À la suite du péché commis par les premiers parents, la souffrance a été infligée à la femme, surtout quand elle doit enfanter, le travail a été rendu pénible pour l’homme et la mort a été introduite dans l’humanité. Gen., iii, 16-19. Le déluge fut un châtiment motivé par la méchanceté des hommes. Gen., vi, 5-7. Sodome et les autres villes furent détruites par une catastrophe soudaine, à cause des crimes qui s’y commettaient. Gen., xix, 4-28. Les plaies d’Égypte furent le châtiment de la persécution exercée par les Égyptiens contre les Hébreux. Exod., vii, 1-xil, 51. À plusieurs reprises, pendant le voyage à travers le désert, les Hébreux eux-mêmes sont châtiés, à cause de leurs murmures et de leurs révoltes. Num., xi, 33 ;-xiv, 21-35 ; xvi, 28-35 ; xxi, 6 ; xxv, 9. Il leur est annoncé que leurs transgressions attireront sur eux les plus graves châtiments. Deut., xxviii, 15-68. Pendant la période des Juges, l’oppression étrangère, plusieurs fois renouvelée, est la conséquence des infidélités d’Israël. La victoire remportée par les Philistins châtie la faiblesse d’Héli et les prévarications de ses fils. I Reg., ii, 27-36. Sous les rois, les mêmes causes produisent souvent les mêmes effets. Ainsi en est-il sous Saùl, I Reg., xxxi, 110, sous Roboam, III Reg., xii, 20 ; xiv, 25, 26 ; etc.’La destruction du royaume d’Israël et la déportation de ses habitants est le châtiment de l’idolâtrie des Israélites. IV Reg., xvii, 7-23. La même cause entraîne le même effet pourle royaume de Juda. II Par., xxxiii, 9, 10 ; xxxvi, 14-16 ; Lam., iii, 37-45. L’auteur du second livre des Machabées, vi, 12-16, confesse que les calamités qui ont accablé les Juifs, sous la domination syrienne, ont été une punition, et il ajoute que la rapidité du châtiment est une marque de grande bonté de la part de Dieu. « En effet, le souverain Maître, pour punir les autres nations, attend avec patience qu’elles aient comblé la mesure des iniquités ; ce n’est pas ainsi qu’il a jugé à propos d’en agir avec nous, afin de n’avoir pas à exercer sur nous sa vengeance, quand nos péchés auront atteint leur pleine mesure. » Cependant, l’opposition des Juifs à leur Messie devient telle que le Sauveur en vient à leur dire : « Comblez donc la mesure de vos pères ! » Matth., xxiii, 32. Ils le font en condamnant et en mettant à mort le Fils de Dieu. La ruine de Jérusalem et de la nationalité juive et le rejet définitif de l’ancienne race élue sont la conséquence de ce dernier forfait. Matth., xxiii, 37-39 ; xxiv, 5-10 ; Marc, xiii, 6-13 ; Luc, xxi, 10-24. De leur côté, les prophètes ont prédit les châtiments qui durent frapper les peuples ennemis et persécuteurs d’Israël, Égyptiens, Assyriens, Babyloniens, Syriens, etc., et leurs prédictions se sont accomplies d’autant plus exactement que, pour les nations qui n’ont qu’une existence temporelle, la justice doit nécessairement s’exercer sur la terre. — Ce qui est vrai des nations l’est également pour chaque homme en particulier. Le péché appelle nécessairement la réparation ou le châtiment, et habituellement « ce qui sert à l’homme pour pécher sert aussi à son châtiment. » Sap., xi, 15. « Le méchant, durant tous ses jours, est rongé par l’angoisse… Au sein de la paix, il voit fondre sur lui la ruine, …la détresse et l’angoisse tombent sur lui. » Job, xv, 20-24. « Qui sème l’injustice, moissonne le malheur. » Prov., xxii, 8. Le châtiment frappe donc les coupables, Caïn, Gen., iv, 11, 12, Cham, Gen., ix, 25, Sichem, Gen., xxxiv, 2-31, Marie, sœur de Moïse, Num., xii, 10, Saiil, I Reg., xiii, 13 ; xv, 26, David, II Reg., xii, 11 ; xxiv, 10-14, Salomon, III Reg., xi, 11, Jéroboam, III Reg., xiv, 1012, Jézabel, IHReg., xxi, 23, 24, Joram, IV Reg., IX, 25, Âthalie, IV Reg., xi, 16, Ozias, II Par., xxvi, 19, Aman, Esth., vii, 9, 10, Antiochus Épiphane, II Mach., ix, 529, Judas, Matth, xxvii, 5 ; Act., i, 18, Ananie et Saphire, Act., v, 5, 10, Hérode Agrippa, Act., xii, 21-23, etc. Le châtiment est infligé au serviteur impitoyable, Matth., xviii, 34, au serviteur brutal et infidèle, Luc, xii, 46, 47, aux vignerons homicides, Luc, xx, 16, etc.

— Bien que la tribulation soit la juste rémunération du péché sur la terre, il n’est point rare que le pécheur jouisse de la prospérité ici-bas. Ceux qui vivaient sous le régime de l’Ancien Testament s’en étonnaient et parfois même s’en scandalisaient, parce que les récompenses temporelles avaient été formellement promises, aux justes, et le malheur annoncé aux impies. Les amis de Job soutiennent contre lui, comme une règle sans exception, que le malheur est le signe et le châtiment de la méchanceté. Asaph s’étonne aussi du bonheur des méchants :

Pour eux, point de douleurs jusqu’à la mort ;
Leur corps est plein de vigueur,
Ils n’ont point part au labeur des mortels,
Ils ne sont point frappés comme le reste des hommes.

Ps. lxxiii (lxxii), 4, 5.

L’étonnement cesse quand, au lieu d’attendre le triomphe de la justice dans la vie présente, on observe que ce triomphe n’aura lieu que dans la vie future. Sap., iv, 7-v, 23. Voir Impie, t. iii, col. 846. C’est ce que le Sauveur met en lumière dans sa parabole du mauvais riche et du pauvre Lazare. Luc, xvi, 19-31. Les maux de la vie sont donc souvent des châtiments, mais il s’en faut qu’ils aient toujours ce caractère.

Les persécutions. — Ce sont des tribulations causées à l’homme par ses semblables, et habituellement aux justes par les méchants. Les persécutions ont commencé avec le péché. Abel a été persécuté par Caïn, Gen., IV, 5-8, Jacob par Esaü, Gen., xxvii, 41-45, Joseph par ses frères, Gen., xxxvii, 18-28, et par Putiphar, Gen., xxxix, 7-20, les Hébreux par les Égyptiens, Exod., 1, 8-21, et par les différents peuples du pays de Chanaan et des environs, Jud., iii, 7-xvi, 31, David par Saül, I Reg., xviii, 10-xxvi, 25, Élie par Achab, III Reg., xviii, 3-18, Naboth par Jézabel, III Reg., xxi, 5-16, Zacharie par Joas, II Par., xxiv, 20-22, Jérémie par Joakimetles faux prophètes, Jer., xxxvi-xxxviii, les Juifs par les Samaritains, I Esd., iv, 1-24, et les peuples voisins, II Esd., IV, 7-23, puis par Antiochus Épiphane, I Mach., i, 17-67 ; II Mach., v, 11-vn, 41 ; etc. Notre-Seigneur fut en butte aux persécutions d’Hérode, Matth., ii, 718, et ensuite des Juifs, particulièrement des membres du sanhédrin, qui le condamnèrent à mourir. Le même sanhédrin persécuta les Apôtres, Act., iv, 1-12 ; v, 1742 ; VI, 9-60, XII, 1-17. Saint Paul, d’abord persécuteur, I Tim., i, 13 ; I Cor., xv, 9 ; Gal., i, 13. ; Phil., iii, 6, fut à son tour en butte à toutes sortes de persécutions de la part des Juifs et des Gentils. Act., xiii, 50 ; xx, 23 ; Rom., viii, 35 ; I Cor., iv, 12 ; xii, 10 ; II Cor., vii, 5 ; Gal., v, 11 ; II Tim., iii, 11 ; I Thés., iii, 4. Les premiers chrétiens furent persécutés, à peu près partout, à l’instigation des Juifs. Act., IX, 30 ; xiii, 45-51 ; xiv, 18 ; xvii, 5-9 ; xviii, 12 ; xxi, 27-36 ; etc. Saint Paul félicite les chrétiens de Thessalonique d’être restés fidèles au milieu des persécutions et des tribulations. II Thess., I, 4. Par contre, les judaïsants préféraient abandonner la foi plutôt que d’être persécutés pourle Christ. Gal., VI, 12. — La persécution est une sorte de nécessité dans la vie chrétienne. « Ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront, » dit le Sauveur. Joa., xv, 20. « Tous ceux qui veulent vivre avec piété dans le Christ Jésus auront à souffrir persécution, » ajoute saint Paul.

II Tim., iii, 12. Aussi Notre-Seigneur annonce-t-il les persécutions à ses disciples. Matth.. xxiv, 9 ; Luc, xxi, 12. Il proclame bienheureux ceux qui souffrent persécution pour la justice, Matth., v, 10-12, et va jusqu’à recommander de prier pour les persécuteurs. Matth., v, 40 ; Rom., xii, 14. « C’est par beaucoup de tribulations qu’il nous faut entrer dans le royaume de Dieu. » Act., xiv, 21 ; Gal., iv, 29. Mais il ne faut pas s’en

émouvoir, I Thés., iii, 3, comme ceux qui se scandalisent de la tribulation, dès qu’elle apparaît, et en prennent prétexte pour abandonner la vie chrétienne. Matth., xiii, 21 ; Marc, iv, 17. On doit alors se comporter avec patience, Rom., xii, 12, et même avec confiance, car Jésus-Christ a vaincu le monde persécuteur, Joa., xvi, 33, et lui-même est si présent à ses serviteurs qu’il tient comme infligées à sa propre personne les persécutions dont ils ont à souffrir. Aussi dit-il à Saul, qui s’imaginait ne poursuivre que des disciples : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » Act., ix, 4, 5. — La récompense des persécutés est assurée, déjà même en ce monde et surtout en l’autre. Matth., v, 11, 12 ; Marc., x, 30. Un jour le bonheur et la gloire seront assurés à « ceux qui viennent de la grande tribulation. » Apoc, vii, 14.

4° Les épreuves. — Les persécutions sont souvent des épreuves que Dieu permet pour rendre les justes meilleurs et plus méritants. Il y a d’autres épreuves qui résultent soit des conditions mêmes de la vie hnmaine, soit de l’intervention des esprits mauvais. Satan a été la cause des épreuves de Job, et sa malice a été excitée par la droiture et la piété du saint homme. Job, 1, 8. Il a voulu traiter de même les Apôtres. Luc., xxil, 31. Voir Satan, col. 1496. Mais la plupart des maux viennent à l’homme de l’infirmité de sa nature. « L’homme né de la femme vit peu de jours et il est rassasié de misères. » Job, xiv, 1. Il éprouve ici-bas « bien des détresses, bien des souffrances, d Ps. lxxi(lxx), 20. Les années de Phomme s’élèvent à soixante-dix ans et pour les plus forts à quatre-vingts, « et leur splendeur n’est que peine et misère. » Ps. xc (lxxxix), 10. « Tous ses jours ne sont que douleur, ses occupations que chagrins ; la nuit même, son cœur ne repose pas. » Eccle., Il, 23. Son bonheur n’est jamais complet : « même dans le rire, le cœur trouve la douleur, et la joie se termine par le deuil. » Prov., xiv, 13. Aussi Jacob disait-il au pharaon d’Egypte : « Les années de mon pèlerinage sont de cent trente ans : court et mauvais a été le temps des années de ma vie. » Gen., xlvii, 9. Saint Paul a laissé la longue énumération de toutes les tribulations par lesquelles passait un prédicateur de l’Évangile. II Cor., xi, 23-28. Les peines morales s’ajoutent d’ailleurs à toutes les autres. Même quand il veut le bien, l’homme se sent incapable de l’atteindre : « Je ne fais pas ce que je veux et je fais ce que je hais… Je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. » Rom., vii, 15, 19. Il désire être délivré de ce corps de mort, Rom., vii, 24, et dit avec Job, vii, 2-3 :

Comme l’esclave soupire après l’ombre, Comme l’ouvrier attend son salaire. Ainsi j’ai eu en partage des mois de douleur, Pour mon lot, des nuits de souffrances.

Notre-Seigneur a voulu partager la condition de l’homme et connaître par expérience la pauvreté, la faim, la soif, la fatigue, la souffrance et la mort, toutes nos infirmités, pour nous ressembler, hormis le péché. Hebr., iv, 15. Il a déclaré bienheureux ceux qui sont pauvres en esprit, ceux qui pleurent ou qui souffrent persécution. Matth., v, 3-10. Les tribulations de la terre ne sont donc que des maux relatifs dont il est possible de tirer un plus grand bien. — Tout d’abord, elles servent d’aiertissement à l’homme, pour le détourner du mal « et le retirer de l’orgueil, afin de sauver son âme de la mort. » Job, xxxiii, 17, 18. Ensuite, elles contribuent à l’expiation de ses péchés. Voir Pénitence, col. 39-40 ; Satisfaction, col. 1496. Enfin, acceptées avec soumission et courage, elles méritent la récompense éternelle. Matth., v, 12 ; Luc, vi, 23. « Notre légère affliction du momentprésent produit pour nous, au delà de toute mesure, un poids éternel de gloire. » II Cor., iv, 17.

Voir Tentation, col. 2283. — Dieu d’ailleurs n’abandonne pas ses serviteurs en hutte à la tribulation, Il vient en aide aux justes dans la détresse, Ps.xci(xc), 15 ; II Cor., i, 4, et il les en tire au moment opportun, Gen., xxv, 3 ; I Reg., x, 19 ; Tob., iii, 21 ; Ps. ix, 10 ; xxxii (xxxi), 7 ; xxxiv (xxxm), 5 ; cxxxviii (cxxxvil), 7 ; Eccli., iii, 17 ; 1s., xxxii, 2 ; Jer., xiv, 8, etc.

H. Lesêtre.

TRIBULE. Plusieurs exégètes identifient le tribulus de la Vulgate avec une espèce de zygophillée, soit le Tribulus terrestris, soit le Fagonia arabica. Peut-être faut-il y voir plutôt un nom générique de plante épineuse. De fait, il répond à plusieurs mots hébreux : dans Gen., iii, 18 ; Ose., x, 8, il traduit le mot dardar, « centaurée » (t. ii, col. 426). L’expression, Hebr., vi, 8, proferens spinas ac tribulos, est un souvenir de Genèse, m, 18, et doit avoir le même sens. Dans Job, xxxi, 40, tribulus est pris pour hoah, « chardon ». Dans Jud., viii, 7, 16, il traduit barqanim, « ronces ». C’est probablement dans ce dernier sens qu’il faut entendre le proverbe :

Cueille-t-on des raisins sur des épines

Ou des figues sur des ronces (de tribulis flous) 1 !

Matth., vil, 16.

car à la place de àxavBwv et TpîëoXwv, saint Luc donne àxavSûv et (Jâxou (la ronce).

Quant à Eccli., xlhi, 21, o-xoXôtiov axpa, cacumina tribulï, ï n’y a rien de semblable dans le texte hébreu retrouvé. Au lieu des extrémités d’épines que forme le givre en se congelant, l’hébreu porte qu’il produit des fleurs pareilles au saphir. F. Vigouroux, La sainte Bible polyglotte, t. v, p. 949. E. Levesque.

    1. TRIBUN##

TRIBUN (Septante : yù.ià.^yjn ; Vulgate : tribunus), officier supérieur exerçant un commandement dans la légion romaine. Voir Armées, t. i, col. 994. — Comme, à l’époque évangélique, la légion se composait de 6000 hommes et qu’au-dessous du commandant en chef, consul, préteur, légat, etc., elle comptait six tribuns militaires, on pouvait penser que chacun de ces derniers avait mille hommes directement sous ses ordres, d’où le nom grec de ^iXtdcpxo ?, « chef de mille ». Mais il n’en était pas ainsi et les tribuns exerçaient à tour de rôle le commandement sur toute la légion. — Un tribun commandait à Jérusalem la cohorte de l’Antonia. Joa., XVIII, 2. Au temps de saint Paul, le tribun Lysias protégea l’Apôtre contre les Juifs ameutés. Act., xxi, 31-xxin, 30. Voir Lysias, t. iv, col. 458. — Par analogie, la Vulgate donne le nom de « tribuns » aux èdrê’alafîm, « chefs de mille », établis par Moïse, Exod., xviii, 21 ; Num., xxxi, 14, 48, 52 ; Deut., i, 15, à des officiers royaux, I Reg., viii, 12 ; xvii, 18 ; xviii, 13 ; xxii, 7 ; II Reg., (xviii, 1, à des chefs militaires, I Mach., iii, 55 ; Apoc, vi, 15 ; xix, 19, et aux officiers d’Hérode

Antipas. Marc, vi, 21.
H. Lesêtre.
    1. TRIBUNAL##

TRIBUNAL (hébreu : kissê’; Septante : (Sïma), lieu où siège celui qui rend la justice. — Salomon s’était bâti un portique du trône, où il rendait la justice, et un portique du jugement. III Reg., vii, 7. À Jérusalem se trouvaient les tribunaux où l’on rendait les jugements dansles affaires plus importantes. Ps. cxxii (cxxi), 5. Voir Jugement, t. iii, col. 1843. — Il est parlé des tribunaux du gouverneur perse, à Jérusalem, II Esd., iii, 7, de Lysias, ministre syrien, à Ptolémaîde, II Mach., xiii, 26, de Pilate, à Jérusalem, Matth., xxvii, 19 ; Joa., xix, 13, de Gailion, à Corinthe, Act., xviii, 12-17, et de Festusà Césarée, Act., xxv, 6-17. Le tribunal romain se composait ordinairement d’une estrade sur laquelle on plaçait le siège du juge (fig. 522). Cette estrade occupait le fond de la basilique, où l’on se réunissait pour les jugements, ou se dressait en vue de la foule, quand la sentence devait

être rendue dehors, comme pour Notre-Seigneur. — Tous les hommes auront à comparaître devant le tri 522. — Tribunal.

D’après Rich, Dictionnaire des antiquités, p. 613.

bunal du Christ, constitué juge des vivants et des morts.

Rom., xiv, 10 ; II Cor., v, 10.
H. Lesêtre.
    1. TRIBUT##

TRIBUT (hébreu : mas, maèèd’, minhàh, ferûmâh ; chaldéen : belô, midddh ; Septante : <pôpoç,-zéXoq, Stopov ; Vulgate : tributum, vectigal, munus), redevance payée à un souverain étranger. Suivant la coutume orientale, cette redevance prend assez souvent le nom de « présent », minhâh, (erûmdh, Scépov, munus, comme si elle était purement volontaire.

1° Sous Josué et les Juges. — Il avait été prescrit de soumettre au tribut les villes qui se rendraient aux Israélites, ûeut., XX, 10. Les Chananéens furent assujettis au tribut par les hommes de Manassé, Jos., xvii, 13, par ceux de Zabulon, Jud., i, 30, 33, 35, et en général par les Israélites, qui aimèrent mieux les rançonner que les chasser. Jud., i, 28. Au tribut s’ajoutait ou se substituait parfois la corvée. Jos., xvi, 10. Voir Corvée, t. ii, col. 1031. — Il fut prédit à Issachar, trop ami du repos, qu’il serait soumis au tribut. Gen., xliv, 15. En effet, la main indolente est destinée à devenir tributaire. Prov., xii, 24.

2° Sous les rois. — Après avoir vaincu les Moabites, David leur imposa un tribut ; il en fit autant pour les Syriens. II Reg., viii, 2, 6. Salomon fit payer le tribut à tous les peuples compris dans les limites de son royaume. III Reg., iv, 21.. Les Philistins et les Arabes étaient tributaires de Josaphat. II Par., xvii, 11. Le roi d’Israël, Manahem, paya un tribut de 1 000 talents d’argent (8500000 fr.) à PhuJ, roi d’Assyrie. IV Reg., xv, 19-20. Les rois assyriens ne manquaient pas d’assujettir au tribut les peuples qu’ils plaçaient sous leur dépendance. Osée, roi d’Israël, payait tribut à Salmanasar. Quand il cessa de le payer pour se rapprocher de l’Egypte, le roi d’Assyrie en profita pour détruire le royaume d’Israël. IV Reg., xvii, 3-6. Jérusalem, elle aussi, fut prise et rendue tributaire, Lam., i, 1. Les Assyriens devaient payer tribut à leur tour. Is. xxxi, 8. — Au Messie, les rois de Tharsis et des îles, de Saba et de Méroé, apporteront leurs tributs et leurs présents. Ps. lxxii (lxxi), 10.

3° Sous les Perses. — Assuérus établit un tribut sur tous les peuples qui dépendaient de sa domination. Esth., x, 1. Quand les Juifs commencèrent à rebâtir Jérusalem, leurs ennemis écrivirent à Artaxerxès I er que cette ville, une fois relevée, ne voudrait plus payer ni impôt ni tribut. I Esd., iv, 13. Le prince, constatant qu’autrefois on payait tribut aux rois de Jérusalem, fit

surseoir aux travaux de reconstruction. I Esd., IV, 20. Un nouveau décret d’Artaxerxès exempta des impôts et des tributs les prêtres et les serviteurs du Temple. I Esd., vii, 24. Plus tard, Darius ordonna qu’on prît sur le produit des tributs pour l’achèvement du Temple. I Esd., VI, 8.

4° Sous les Ptolémées et les Séleucides. — Alexandre avait soumis au tribut un bon nombre de pays, de nations et de souverains. I Mach., i, 5. Ses successeurs procédèrent de même. Sous Ptolémée Evergète, le grand-prêtre Oniàs II, qui était avare, négligea le paiement d’un tribut de 20 talents (170000 fr.) par an. Son neveu, Joseph, s’interposa pour le disculper. Comme des spéculateurs syriens et phéniciens offraient 8000 talents (68000000 fr.) du fermage des impôts de la Phénicie, de la Célésyrie, de la Samarie et de la Judée, Joseph offrit le double, obtint 2000 soldats pour se faire appuyer et exerça pendant vingt-deux ans avec fermeté le poste de receveur des impôts. Cf. Josèphe, Ant. jud., XII, iv, 1-6. — Les Romains, qui avaient rendu tributaires l’Espagne et beaucoup de rois, I Mach., viii, 2, 4, imposèrent un lourd tribut à Antiochus III le Grand. I Mach., viii, 7. Voir Antiochus III, t. i, col. 691. Antiochus IV Épiphane, qui avait un fort tribut à payer aux Romains, envoya à Jérusalem et dans les villes de Judée un collecteur d’impôts qui exerça toutes sortes de déprédations et de violences. I Mach., i, 30-34. Comme ensuite les troubles suscités dans le pays faisaient baisser considérablement le produit des tributs, le roi résolut de se rendre en Perse, afin d’y recueillir des ressources plus abondantes. I Mach., iii, 29-31. Pendant ce temps, un de ses généraux, Nicanor, se flattait d’amasser le montant du tribut de 2000 talents (17 000000 fr.) dû aux Romains, en faisant campagne contre les Juifs et en vendant les nombreux captifs qu’il ferait, à raison de 90 pour untalent (8500 fr.). Mais il fut honteusement défait et les mille marchands qu’il avait convoqués pour leur vendre des Juifs durent s’en retourner comme ils étaient venus. II Mach., viii, 10, 11, 34-36. Démétrius I « % afin de s’attacher les Juifs, les déchargea des tributs et de diverses autres redevances. I Mach., x, 29, 31, 33 ; xi, 35 ; xui, 39. On sait parvristote, Œconom., ii, 1, i r édit. Didot, t. i, p. 639, que les Séleucides exigeaient, dans les pays de leur dépendance, des redevances « de la terre, des produits du sol, du commerce, des douanes, des troupeaux et d’autres choses. » Parmi ces autres choses est mentionnée une capitation, ÈTtixqjiî.aiov, . à laquelle Josèphe, Ant. jud., XIII, ii, 3, fait allusion, iiiïp xeçaXïiç êxâ<7T7)ç, et qui fut comprise dans la décharge que Démétrius accorda aux Juifs. I Mach., x, 29. Antiochus VII Sidètes réclama plus tard à Simon les tributs arriérés. Une victoire, remportée par les fils de Simon sur le général syrien Cendébée, régla 1° question. I Mach., XV, 30, 31 ; xvi, 8.

5° Sous Rérode. — Rien qu’Hérode le Grand fût sous la dépendance assez étroite de Rome, il ne paraît pas qu’il ait été tributaire régulier des Romains. Sans doute, Pompée avait levé un tribut sur la Judée, . Josèphe, Ant. jud., XIV, iv, 4 ; Bell, jud., i, vil, 6 ; César avait réglementé le tribut juif par une séria d’édits, Ant. jud., XIV, x, 5, et Antoine avait exigé un tribut d’Hérode lui-même, au moment de sa promotion à la dignité royale. Cf. Appien, Bell, av., v, 75. Mais, à l’époque d’Auguste, il n’est plus question d’aucun tribut. On l’infère de ce fait que Josèphe, si bien informé de l’histoire d’Hérode, ne fait allusion à aucun paiement de tribut. Tout au contraire, il présente celui qui fut établi en l’an 7 après J.-C. comme une innovation et une charge inouïe pour les Juifs. Cf. Josèphe, Bell, jud., II, viii, 1 ; xvii, 8 ; Schûrer, Geschichte des jûd. Volkes, t. i, p. 530-533. À la mort d’Hérode, les Juifs réclamèrent vivement une diminution des impôts

levés par ce prince, mais ils ne firent aucune mention d’un tribut romain. Cf. Josèphe, Ant. jud., XVII, xi, 2. 6° Sous les procurateurs. — Le recensement de Cyrinus eut pour but de préparer l’administration directe de la Judée par les Romains. Il fallait, entre autres mesures, déterminer le chiffre des impôts et des tributs. Voir Cyrinus, t. ii, col. 1189. Le cens romain, imposé aux provinces, comprenait deux impôts directs : le tributum soli ou agri, qui se payait soit en nature, soit en argent, et le tributum capitis ou tribut par tête. Cf. Digest., L, 15, 8, 7 ; Appien, Libyca, 135 ; Dion Cassius, lxii, 3 ; Tertullien, Apologet., 13, t ; i, col. 346. En Syrie, ce dernier tribut pesait également sur les femmes et sur les esclaves. Les hommes y étaient obligés à partir de 14- ans, les femmes à partir de 12, et tous jusqu’à l’âge de 65 ans. Cf. Digest., L, xv, 3. La perception de ces tributs se faisait par les publicains. Voir Publicains, t, v, col. 858. Le montant s’en ajoutait aux autres redevances auxquelles les Juifs étaient assujettis. Voir Capitation, t. ii, col. 213 ; Cens, col.422 ; Dîme, col. 1431 ; Impôts, t. iii, col. 851. -Dans le Nouveau Testament, il. est fait quelques allusions aux tributs. Ils sont payés aux rois, non par leurs fils, mais par des étrangers. Matth., xvii, 24, 25. Le Sauveur, interrogé par des pharisiens et des hérodiens, leur déclara que le tribut devait être payé à César, dont la monnaie circulait parmi eux. Marc, xii, 14 ; Luc, xx, 22. Cette déclaration formelle n’empêcha pas les membres du sanhédrin de l’accuser devant Pilate de défendre le paiement des tributs à César. Le procurateur ne tint aucun compte de cette accusation. Luc, xxiir, 2. — Saint Paul, recommandant la soumission aux puissances établies, veut qu’on s’acquitte envers elles de ce qui leur est dû, <p<5poç. tributum, et téXoc, vectigal. Rom., xiii, 1-7. Le premier terme désigne les tributs. Le mot T éXo ; s’applique aux droits de douane et aux autres droits analogues, et le mot vectigal à la fois aux tributs et aux impôts en général.

H. Lesêtre.
    1. TRICLINIUM##

TRICLINIUM, mot qui désigne littéralement une table où, pour manger, les convives s’asseyaient sur trois lits. Voir Architriclinus, t. i, fig. 248, col. 935. LaVulgate emploie trois fois le mot triclinium, I Reg. (Sam.), ix, 22, pour rendre liëkdfâh, in conclave, où Samuel donne un repas au jeune Saùl ; IV Reg., xi, 2, pour traduire frâdar ham-mittôt, « chambre des lits, gynécée », etEsther, ii, 13, pour désigner le palais où vivaient les jeunes filles qui, comme Esther, avaient été choisies pour devenir les femmes du roi de Perse. Le mot triclinium n’est doncjamais employé dans son sens propre dans notre version latine.

    1. TRIPOLI##

TRIPOLI (grec : TptitoXi ; )> ville de Phénicie, aujourd’hui Taraboulous. Elle est située sur la côte de Syrie, au nord de Sidon, entre Byblos et Aradus, au pied de la partie la plus haute de la chaîne du Liban, dans un pays très fertile, qui ressemble à un jardin fruitier (fig. 523). Elle avait reçu le nom de Tripoli ou « les trois villes », parce qu’elle était composée de trois colonies distinctes, des villes de Sidon, de Tyr et d’Aradus. L’Ecriture la mentionne une fois, à l’époque des Machabées. C’est au port de Tripoli que le roi de Syrie. Démétrius I er, fils de Séleucus IV, s’embarqua, II Mach., xiv, 1, probablement pour aller débarquer à Séleucie, à l’embouchure de l’Oronte, et atteindre par là Antioche, lorsqu’il s’échappa de Rome, où il était otage, afin de s’efforcer de recouvrer le trône de ses pères. Voir Démétrius I", t. ii, col. 1358. Cf. Le Camus, Notre voyage aux pays bibliques, 1890, t. iii, p. 1-8.

    1. TRIREME##

TRIREME (grec : tp^pin ; ), navire à trois rangs de rames. II Mach., iv, 20. Voir Navire, I, 6°, t. iv, col. 1504.

    1. TRISTESSE##

TRISTESSE (hébreu : mar’, roa’; Septante : liiii), mxpc’a, xovYipi’a ; Vulgate : tristitia, amaritudo), sentiment pénible que le malheur fait naître dans l’âme. — La Sainte Écriture signale la tristesse des officiers du pharaon dans leur prison, Gen., XL, 6, de Job accablé par les épreuves, Job, vii, 11 ; x, 1, des parents de Tobie encore sans descendance, Tob., vi, 5, d’Esdras et de Néhemie, à la pensée des prévarications et des maux du peuple, I Esd., ix, 4 ; II Esd., ii, 2, du Psalmiste malheureux, Ps. xlii (xli), 6, 12 ; Ps. xlih (xlii), 2, 5, des Juifs persécutés, Esth., îx, 22, d’Antiochus Épiphane contrarié dans ses projets, I Mach., vi, 4-13, du riche auquel le Sauveur parle de renoncer à ses biens, Matth., xix, 22 ; Marc, xiv, 34, des apôtres et des disciples à cause des événements qui terminent la vie de leur Maître, Luc, xxii, 45 ; xxiv, 17 ; Joa., xvi, 6, 20-22, de Notre-Segineur lui-même dontl’àme devient

Echelle

523. — Tripoli de Phénicie et ses environs. « triste jusqu’à la mort », Matth., xxvi, 38 ; Marc, xiv, 34, de saint Paul à la pensée de ses compatriotes, Rom., ix, 2, et à la suite de diverses épreuves, II Cor., n, 1-3 ; Phil., ii, 27, 28 ; etc. — La tristesse est causée par des propos suspects, Prov., xxv, 23, par une méchante femme, Eccli., xxv, 31, par le cœur pervers, Eccli., xxxvi, 22, par l’abandon d’un ami, Eccli., xxxvii, 2 ; etc. Les Juifs infidèles trouvaient triste le service de Jéhovah. Mal., iii, 14. Les pharisiens se composaient un visage triste quand ils jeûnaient. Matth., vi, 16. L’Ecclésiasté, vii, 3, dit que « mieux vaut la tristesse que le rire, parce que le cœur peut être content malgré un visage triste. » D’après les versions, « mieux vaut la colère que le rire, car la tristesse du visage peut améliorer le cœur, » à quoi la Vulgate ajoute « du délinquant ». Il est recommandé de ne pas trop se laisser aller à la tristesse, Eccli., xxx, 22, 24, même après un deuil. Eccli., xxxviii, 17-20. Il faut donner sans causer de tristesseà celui qui reçoit, Eccli., xviii, 15, mais avec joie. II Cor., ix, 7. Il y a une tristesse selon Dieu et une tristesse selon le monde. II Cor., vil, 10. Le chrétien doit vivre comme triste, mais toujours joyeux, c’est-à-dire avec la joie qui vient de Dieu et en renonçant à celle qui vient du monde. II Cor., vi, 10. Saint Jacques, v, 13, assigne, comme remède à la tristesse, la prière.

H. Lesêtre.
    1. TROADE##

TROADE (Nouveau Testament : Tpwâç), ville d’Asie lineure (fig. 524), port de mer sur la côte nord-ouest

524. — Monnaie de Troade.

Troade tonrelée. COL.AV.TROA. — ïj. COL A.VG TRO.

Cheval broutant.

de la Mysie, vis-à-vis de la petite lie de Ténédos, non loin des lieux où s’éleva l’ancienne Troie ou Ilion. Voir Mvsæ, carte, t. iv, fig. 388, col. 4368.

beaucoup de bienveillance, en la considérant comme l’héritière de Troie, d’où, selon la légende célébrée par Virgile, elle tirait elle-même son origine. D’après Suétone, Cses., 79, Jules César aurait imaginé d’en faire le siège de l’-empire et Auguste caressa peut-être quelque idée semblable. Cf. Horace, Carm., iii, 3, 57. Quoi qu’il en soit, Auguste en fit une colonie romaine, sous le nom de Colonia Augusta Alexandria Troas ; elle jouit du jus italicum avec les privilèges qui y étaient attachés, imniunitas et libertas, affranchissement de divers impôts et indépendance du gouverneur de la province, de sorte qu’elle fut gouvernée par ses propres magistrats, deux duoviri et un sénat de decuriones. Elle était divisée en dix vici et ses citoyens faisaient partie de la tribu Aniensis. Rubitschek, lmp. rom. tribut, descript., p. 247. Grâce à ses faveurs et à sa situation, elle devint une des villes les plus florissantes de la province d’Asie. Son port fut le centre des

525. — Ruines de Troade. D’après Choiseul-Gouffler, Voyage pittoresque dans l’empire ottoman, Atlas, in-ꝟ. 1842, pi. 39.

I. Elle fut bâtie après la mort d’Alexandre le Grand, par un de ses généraux qui était devenu maître du pays, Antigone. Il lui donna le nom d’Antigonia Troas et la peupla au moyen des populations voisines. Quelques années après, en 300 avant J.-C, Lysimaque embellit la ville et l’appela’AXsÇivêpeia i Tpoiâr, Strabon, XIII, i, 26 ; Pline H. N., v, 33. Le Nouveau Testament la désigne toujours sous le nom de Troas tout court. Elle passa sous la domination des rois séleucides de Syrie ; quelques-unes des monnaies d’Antiochus II Théos (261-246 avant J.-C.) furent frappées à Troade. Elle fut indépendante pendant un certain temps ou jouit au moins d’une certaine liberté, puisqu’elle battit monnaie de 164 à 65 environ avant J.-C. Plusieurs tétradrachmes de cette époque portent le nom AAEEANAPEQN avec la tête et le nom d’Apollon Sminthéen. Elle passa, en 133 avant notre ère, sous la domination de Rome, qui la traita avec

communications entre l’Asie et la Macédoine. Act., xvi, 8 ; xx, 5 ; II Cor., ii, 12. Elle continua à hanter l’imagination romaine pendant les premiers siècles de notre ère. Quand Constantin voulut transférer en Orient la capitale de l’Empire, il pensa à l’établira Troade, avant de choisir Byzance-Constantinople. Zoiime, Hist., ii, 30, édit. de Bonn, 1837, p. 95 ; Zonaras, Annal., XIII, 3, t. cxxxiv, col. 1105. Encore aujourd’hui, les ruines de Troade portent le nom de Eski-Stambûl ou Vieille-Constantinople. Ses restes sont considérables (fig. 525). II. Troade était dans tout son éclat quand saint Paul y arriva pour la première fois, pendant son second voyage de missions. — 1° C’est là qu’il eut la vision qui le détermina à aller prêcher en Macédoine et à commencer ainsi l’évangélisation de l’Europe, Act., xvi, 8-10, qui devait être si féconde. Il s’embarqua donc pour la Macédoine et prêcha bientôt après à Philippes et à Thessalonique. — 2° L’Apôtre passa de nouveau à

Troade en se rendant d’Éphèse en Macédoine. II Cor., n, 12-13. Il voulait évangéliser les habitants de la ville et y retrouver Tite, mais son disciple n’étant pas venu, il partit pour la Macédoine. — 3° Après avoir visité la Grèce, il revint en Macédoine et se dirigea de là vers Troade. Quelques-uns de ses compagnons l’y précédèrent. Act., xx, 1-5. Il y avait déjà une chrétienté dans cette ville. L’Apôtre y passa une semaine. Il devait en repartir le lundi. Le dimanche soir, pendant qu’on était réuni pour la célébration des saints mystères, il adressa la parole aux fidèles et continua son discours jusqu’au milieu de la nuit. Un jeune homme nommé Eutyque s’endormit sur une fenêtre, tomba du troisième étage et se tua. Paul le ressuscita, continua son discours jusqu’à l’aube et se mit alors en route pour Assos. Act., xx, 6-13. Voir Eutyque, t. ii, col. 2057. — 4° Dans un de ses passages à Troade, saint Paul y avait laissé, chez Carpus, voir t. ii, col. 311, un manteau à capuchon, pœnula, voir Manteau, t. iv, col. 665, 9°, des livres et des parchemins. Voir Parchemin, t. iv, col. 2161. Pendant sa captivité à Rome, l’Apôtre écrivit à Timothéede lui rapporter ces objets de Troade, en venant le visiter. II Tim., iv, 13.

    1. TROGLODYTES##

TROGLODYTES (hébreu : Sukkiyîm ; Septante : TpcoYo81JTai ; Alexandrinus : TpwyXoSO-ai), peuplade ou tribu qui faisait partie, avec les Libyens et les Éthiopiens, de l’armée de Sésac, quand ce pharaon envahit la Palestine. II Par., xii, 3. Voir Sésac, col. 1679. Les Sukkiyîm, d’après la signification de leur nom, n’étaient pas des Troglodytes, c’est-à-dire des habitants de cavernes, comme l’ont traduit les Septante et la Vulgate, mais probablement des Scénites ou nomades habitant sous la tente, comme leur nom l’indique. Les anciennes versions en ont fait des Troglodytes, peut-être parce que Pline, H.N., VI, xxxiv, 4, mentionne une ville (oppidum) appelée Suche parmi les possessions troglodytes. Cf. to Soû^ou t’8p-jp.a, Strabon, XVI, iv, 8. Gesenius, Thésaurus, p. 153, croit que Sukkiyîm est un mot hébreu qu’on ne peut expliquer que par in tentoriis viventes. Parmi les modernes, Kautzsch, daris Riehm, Handwôrterbuch des bibl. Alterthums, t. ii, 1884, p. 1577, ainsi que Dillmann, dans Schenkel, Bibel-Lexicon, t. i, 1869, p. 288, sont portés à l’identifier avec Suakin, sur la mer Rouge, et en font une peuplade éthiopienne, ibid., t. v, p. 429. Cf. Calwer Bibellexicon, 1885, p. 911. Le Bibelwôrterbuch de H. Guthe, 1893, p. 645, prétend que les Sukkiyîm sont les habitants de Succoth (Téku), près de Phithom. L’identification des Sukkiyîm est donc obscure et incertaine. — Quoi qu’il en soit de ces auxiliaires de Sésac, l’Écriture parle ailleurs de véritables Troglodytes qu’elle appelle Horî, Gen., xiv, 6 ; xxxvl, 20-30 ; Deut., ii, 12, 22. Cf. I Par., i, 38-42. Cf. aussi Job, xxx, 6. Voir Horréen, t. iii, col. 757. Cf. F. Vigouroux, La sainte Bible polyglotte, t. iii, 1902, p. 833.

    1. TROGYLE##

TROGYLE (TpwyjXXtov ou TpojfjXiov, Trogilium), promontoire rocheux situé à l’extrémité occidentale du mont Mycale, sur la côte ionienne de l’Asie’Mineure, entre Éphèse au nord et Milet au sud, en face de l’Ile de Samos, dont il n’est séparé que par un canal long et étroit. Voir Ptolémée, V, II, 6 ; Strabon, XIV, 1, 13 ; Pline, H. N., v, 31. Il est mentionné Act., xx, 15, dans un certain nombre de manuscrits grecs D, H, L, M, etc.), où, après les mots Etç 21p.ov, on lit : xat y.zivzvTE ? îv TpMyuXiu °u TpwyuXXîw, « étant demeurés (c’est-à-dire nous étant arrêtés) à Trogyle ». Le Textus receptus a adopté cette leçon, qu’on trouve aussi dans les deux versions syriaques, le sahidique, l’arabe, le slave, dans saint Chrysostome, In Act., hom. xliii, 1, t. lx, col. 304, dans Œcumenius, In Act., xx, 15, t. cxxviii, col. 256, etc. Mais elle est omise par les manuscrits les

plus importants, entre autres par x, A, B, C, E 2, et également par la Vulgate, l’éthiopien, l’araméen, le copte, saint Jérôme, etc. Il est probable, comme le dit Tischendorf, Novum Testant.’grsece, 8e édit., Leipzig, t. ii, 1872, p. 179, que c’est là une interpolation, mais très ancienne, basée sans doute sur une tradition historique certaine. Divers exégètes, notamment Felten, Die Apostelgeschichte ûbersetzt und erklàrt, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1892, p. 376, et Belser, Beitrâge zur Erklârung der Apostelgeschichte, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1897, p. 115, l’adoptent comme authentique. Ce trait n’a rien que de très vraisemblable en lui-même. Saint Paul se rendait alors par mer à Jérusalem, peu de temps avant son arrestation dans cette ville. Le bateau sur lequel il s’était embarqué, et qui naviguait entre la rive asiatique et les îles voisines, put fort bien être obligé de faire escale à Trogyle, soit que la nuit l’y ait surpris, soit que le vent ait cessé tout à coup. Cf. Ramsay, St. Paul the Traveller, in-8°, 5e édit., Londres, 1900, p. 292, 294. La navigation est très compliquée dans ces parages. Non loin de la pointe extrême du promontoire, existe un ancrage appelé aujourd’hui « Port de saint Paul ». Voir Samos, col. 1432 ; Milet, carte, n. 284, t. iv, col. 1086.

L. Fillion.

TROIS. Voir Nombre, vii, 30, t. iv, col. 1688.

    1. TROIS TAVERNES##

TROIS TAVERNES, Act., xxviii, 15. Voir Tavernes (Trois), col. 2016.

    1. TROMM##

TROMM (TROMMIUS) Abraham, savant hollandais, né le 23 août 1633, mort le 29 mai 1719. Il fut pasteur à Harlem et à Groningue. On a de lui Concordantise grsecx versionis vulgo dictée LXX interpretum, 2 in-f », Ulrecht, 1718. Voir Concordances de la Bible, t. ii, col. 901-902. Il avait publié auparavant une concordance pour la traduction flamande de l’Ancien et du Nouveau Testament, Amsterdam, 1685-1692.

    1. TROMPETTE##

TROMPETTE (hébreu : Sôfâr, hâsôsërdh ; Septante : xepait’vTi, crâXiciy ? ; Vulgate : buccina, tuba), instrument à vent, formé d’un tube auquel on fait produire des sons au moyen de l’air insufflé.

I. Description de la trompette. — La trompette la plus primitive, faite d’une corne d’animal, est désignée dans la Bible par les noms de qérén, « corne », voir Corne, 2, t. ii, col. 1010 ; et de Sôfâr, son synonyme, avec lequel il s’échange souvent. Jos., vi, 5, 8. Les Septante traduisent Sôfâr et qérén par xepari’y/) et oiimyZ, sans distinction. Josèphe emploie xépocç. Ant. jud., vi, 5. Cette trompette de corne est antérieure à la trompette de métal, que l’Écriture mentionne à partir de l’Exode, sons le nom de hâsôsërdh, aakm-f !  ; , tuba. L’étymologie du terme hébreu est incertaine : "lîin, « résonner » ; ou bien « étroit » ; yn, « diviser » (les sons). Voir Musique, t. iv, col. 1348. Cf.^ôï-, « tailler, diviser » ; y^a^*., « rassembler ». Cette trompette est le seul instrument musical dont s’occupe Moïse. Les autres instruments furent introduits par David dans le service divin ; mais la trompette resta le seul instrument sacré proprement dit, et, conformément à son institution, l’usage en fut exclusivement réservé aux prêtres. Nam., x, 2-9. Jouer de la trompette se disait tdqa’êôfdr, Jer., vi, l, et tâqa’besôfâr, I Sam., xiii, 3 ; Is., xxvii, 10. MâSaq qérén, « tirer, prolonger le son de la corne », Jos., VI, 5 ; Ose., v, 8. Tèqa’est le « son » de la trompette, Ps. cl, 3 ; et taqô’a, la « trompette » elle-même. Ezech., vii, 14. Par opposition, les sons discontinus sont appelés (ërû’dh, « bruit, cri » ; spécialement les sons bruyants de la trompette, répétés comme des cris. Num., xxix, 1 ; II Sam., VI, 15 ; Nam., x, 9. On dit qôl sôfâr, le son, la « voix » de la trompette,

Exod., xix, 16 ; Ps. lxxxviii (lxxxvii), 6 ; II Sam., vi, 16. Les joueurs de trompettes sont les mahseserim [mafrsôsërtm). I Par., xv, 24 ; II Par., v, 13.

Le texte cité des Nombres suppose un instrument connu, sinon le législateur en décrirait la forme, les dimensions, la matière, comme il le fait pour les autres objets du mobilier sacré ; la trompette du tabernacle doit être l’instrument qui figure sur les monuments égyptiens. D’ailleurs, les Hébreux emportaient d’Egypte des vases et objets de métal précieux. Exod., xii, 35. De plus, il est vraisemblable que. l’Assyrie fut aussi tributaire de l’Egypte pour la trompette, alors que les Grecs, puis les Romains, la reçurentdes Pélasges Tyrrhéniens, qui la tenaient des mêmes Égyptiens.

Au surplus, la description que donne Josèphe de la trompette du Temple est pleinement confirmée par les représentations monumentales. « La trompette, appelée àffiicrpa, est une trompette droite de forme cylindrique, en métal, longue de moins d’une coudée (la coudée commune en Asie Mineure était de m 49 ; la coudée égyptienne avait m 52 et la coudée grecque, m 44. Voir Coudée, t. ii, col. 1062). Son diamètre était à peu près celui d’une grosse flûte syringe. Elle était munie d’une embouchure et terminée par un pavillon, zwSmva, plus « K-Sr’WtWP’i’ssia 1

526. — Trompette égyptienne. Musée du Louvre.

ou moins évasé. » Ant. jud., III, xi, 6. Les trompettes égyptiennes sont généralement courtes, comme l’est encore la trompette abyssinienne. Il en est figuré de semblables sur les monnaies des Machabées et des Hérodes. Toutefois, les trompettes de l’arc de Titus sont deux tubes coniques allongés. Il y eut des trompettes métalliques recourbées ; enfin on possède des représentations de trompettes droites dont le tuyau est renflé à son milieu. Mais les types de fabrication ont peu changé. Entre les spécimens égyptiens et assyriens, les différences sont peu considérables. Cependant, en variant la matière et les dimensions de leurs trompettes, les Grecs obtinrent une famille d’instruments presque aussi étendue que celle des flûtes. Voir Flûte, t. ii, col. 2292.

La matière de ces instruments était le cuivre, le bronze ou l’argent. Les deux trompettes mosaïques furent faites d’argent massif, battu au marteau, qéséf miqêâh, Num., x, 2 ; cf. II (IV) Reg., xii, 14 (13), soit par honneur pour le service sacré, soit pour obtenir une plus belle sonorité. On ne peut déterminer si les trompettes employées hors du culte liturgique, par exemple dans Osée, v, 8, étaient de cuivre, à la façon de celles des Égyptiens et des Assyriens. Le métal était réduit en lames et travaillé au marteau, suivant un procédé de fabrication encore appliqué en Europe, au moyen âge.

La trompette égyptienne du Musée du Louvre (fig. 526) est peut-être le seul spécimen conservé en Europe. Elle est en bronze doré et mesure m 54, deux centimètres seulement de plus que la coudée égyptienne. Eprouvée par V. Loret, L’Egypte au temps des Pharaons, Paris, 1889, p. 137, 138, cette trompette a donné la série d’harmoniques :

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Dépourvues de clefs et de soupapes, les trompettes anciennes, forcément incomplètes au point de vue mélodique, ne pouvaient avoir dans le concert instrumental le même usage que les flûtes et haubois, et surtout que les instruments à cordes, dont les séries de sons pouvaient être complètes pour chacune des diverses gammes ou modes musicaux. C’est pourquoi, en dehors de son emploi comme signal, nous voyons que la trompette se joint aux instruments de percussion (fig. 527). I Esd., iii, 10. Voir I Par., xvi, 42. Elle concerte aussi avec le Sôfâr. Ps. xcvm (xcvn), 6 ; Ose., v, 8. Dans la fête du transport de l’Arche, les trompettes, les cymbales et les tambourins figurent avec les harpes, les nables et le chœur des chanteurs. I Par., xiii, 8 ; xv, 24, 28. Banaïas et Jaziel, prêtres, sont investis de la fonction de joueurs de trompettes devant l’Arche. I Par., xvi, 6.

527. — Trompette et tambour égyptiens. D’après Wilkinson, Manners, 1. 1, p. 456, fig. 224.

II. Usage de la trompette dans la Bible. — Les trompettes du Tabernacle sont destinées à convoquer le peuple, Num., x, 2, à annoncer les néoménies, les fêtes, jr. 10. Ce sont les fils d’Aaron, les prêtres, qui sonnent de la trompette dans les cérémonies religieuses. Num., x, 8. Cf. I Par., xv, 24, 28 ; xvi, 6 ; II Par., vii, 6 ; xm, 14 ; II Par., xxix, 28 ; I Esd., iii, 10 ; II Esd., xii, 41. La trompette sert aussi pour annoncer la guerre, Num., x, 9 ; Ezech., vii, 14 ; I Mach., iv, 40 ; v, 31, 34 ; xvi, 8 ; Ose., v, 8 ; mais ce sont les prêtres qui la font entendre. Num., xxxi, 6. On la trouve dans les solennités, par exemple au couronnement de Joas. II (IV) Reg., ii, 14 ; II Par., xxiii, 13. Comme instrument sacerdotal, la trompette faisait partie du mobilier sacré. Il(IV)Reg., su, 14 ; II Par., xiii, 12 ; xxix, 26 ; I Esd., iii, 10. Même après l’introduction des instruments de musique dans la liturgie hébraïque, la trompette conserva son emploi sacré. Elle accompagnait l’offrande des sacrifices, Num., x, 10, à part des chants et du jeu des autres instruments. Dans le second temple, les deux prêtres trompettes se tenaient, avec les joueurs de cymbales, à droite et à gauche de l’autel des holocaustes, à distance des chanteurs. Leur sonnerie n’accompagnait pas le chant, mais pouvait seulement, comme les instruments de percussion, précéder, couper ou suivre l’exécution des cantiques anciens, tels que ceux de l’Exode et du Deutéronome. Les trompettes avaient en outre un rôle semblable à celui de nos cloches d’église. On s’en servait dans le second temple pour annoncer chaque matin l’ouverture des portes, par une triple sonnerie,

qui appelait les lévites et les serviteurs à leur office et avertissait le peuple. On annonçait de même, le vendredi, l’ouverture du sabbat, et les sacrifices du matin’et du soir étaient accompagnés de neuf sonneries. J. Weiss, Die musikalischen Instrumente in den H. Schrifien, Graz, 1895, p. 97-98.

La trompette de corne, ou sôfâr, est employée comme un signal ou un appel. I Sam., xiii, 3 ; Is., xxvii, 13. Elle annonce les néoménies, Ps. lxxxi (lxxx), 4 ; les fêtes, Ps. xlvii (xlvi), 6 ; xcvm (xcvn), 6, cl, 3, le sacre de Salomon, I (III) Reg., i, 39, le jubilé, Levit., xxv, 9. Elle sert aussi à la guerre. Jud., iii, 27 ; Jer., VI, 1 ; Isaïe, xviii, 3 ; Job, xxxix, 24, 25. Ce sont encore sept trompettes de corne, Sôfërôt hay-yôbèlîm, voir Corne, t. ii, col. 1011, que les prêtres font entendre autour des murs de Jéricho, Jos., vi, 4-9, et que Gédéon met aux mains de ses soldats. Jud., viii, 8. Enfin un son de trompette très puissant, qôl Sôfâr hâzâq më’ôd, se fait entendre au milieu du tonnerre et des éclairs, au moment de la promulgation de la Loi. Exod., xix, 16.

Le Sôfâr est le seul instrument ancien dont les Juifs aient conservé l’usage, dans l’enceinte des synagogues, aux deux fêtes du Premier de l’an et du Grand Pardon, suivant le précepte du Lévitique, xxv, 9 [Sôfâr), et xxiii, 24 (terû’âh). On le sonne de trois manières. La première sonnerie, appelée (eqî’âh, donne un son prolongé, formé de la fondamentale suivie de sa quinte supérieure :

=f=t

3=

ou encore de la quinte, puis de l’octave :

p. cresc. ff.

_Q_C£

Hli

^^=

La seconde sonnerie, ou (erâ’dh, qui alterne avec la précédente, donne les deux premiers intervalles plusieurs fois « répétés » :

fenT^^TT^

. Enfin, la dernière, dite êëbârîm, <n brisements », e st un trille du son fondamental, terminé par sa quinte :

D’après S. Naumbourg, Agadat Schirim, Recueil de chants religieux et populaires des Israélites, Paris, 1874, p. vi. Or, la formule musicale très simple de cette sonnerie de trompette, analysée suivant les principes de la musique orientale, appartient à un mode mineur, et représente sous cette forme le noyau mélodique sur lequel a été modulé l’hymne hébraïque de la fête du Premier de l’an, ’Adonaî bëqôl Sôfâr, l’un des plus beaux du répertoire ancien de la synagogue orientale de Damas. Voir Musique, t. iv, col. 1356.

J. Parisot.

    1. TROMPETTES##

TROMPETTES (FÊTE DES) (hébreu : zikrôn ou yôm (erû’dh ; Seplante : (j.vi, (id<ruvov <ra).ii ! YYwv ï|(jtipa « rripairi’at ; Vulgate : memoriale clangentibus tubis, dies, clangoris et tubarum), une des fêtes des Juifs.

1° Les prescriptions légales. — Cette fête se célébrait le premier jour du mois de tiSri (septembre-octobre), qui était le septième mois de l’année religieuse. Ce jour devait être marqué par un repos solennel, un

rappel au son de la trompette, une assemblée sainte, l’abstention des œuvres serviles et l’offrande de sacrifices particuliers. La sonnerie de trompettes était la caractéristique de cette fête, appelée pour cette raison zikrôn terû’âh, c< mémorial de retentissement », Lev., xxm, 24, 25, et, yôm terû’âh, « jour de retentissement ». On offrait en holocauste un jeune taureau, un bélier et sept agneaux d’un an, accompagnés chacun d’une offrande de fleur de farine pétrie à l’huile, 3/10 d’éphi (11 1. 65) pour le taureau, 2/10 (7 1. 77) pour le bélier et 1/10 (3 1. 88) pour chaque agneau. On ajoutait un bouc en sacrifice pour le péché. Num., xxix, 1-6. Comme ce même jour était la néoménie du mois de tiSri, voir Néoménie, t. iv, col. 1588, les sacrifices de la fête s’ajoutaient à ceux de la néoménie et au sacrifice perpétuel. Cf. I Esd., iii, 6 ; II Esd., viii, 1. — Il convenait que le premier jour de tiSri fût consacré à Jéhovah d’une manière plus solennelle et plus complète encore que le premier jour de chaque mois. Ce mois, en effet, était particulièrement remarquable au point de vue religieux, puisque la fête de l’Expiation se célébrait le dixième jour, et qu’à partir du quinzième on solennisait pendant sept jours celle des Tabernacles, Lev., xxiii, 27, 34. Le son des trompettes représentait la voix de Dieu, qui appelait son peuple à lui rendre hommage et à le servir. Cf. Exod., xix, 16, 19 ; Is., LVHl, 1 ; Ose., viii, 1 ; Jo., Il, 1. La fête est appelée zikrôn, « mémorial, rappel », sans doute pour une raison qui est indiquée à propos de la guerre : « Vous sonnerez des trompettes avec éclat, et vous serez rappelés au souvenir de Jéhovah, votre Dieu, et vous serez délivrés de vos ennemis. » Num., x, 9. Il y avait donc là un signal spécialement destiné à faire souvenir le peuple que Jéhovah serait toujours son protecteur, à condition qu’on se rappelât qu’il fallait lui obéir. Mais surtouttiSri étaitle septième mois del’année religieuse, par conséquent le mois sabbatique, et à ce titre il méritait d’être inauguré plus solennellement que les autres. Il marquait également le début des années sabbatiques et jubilaires. Lev., xxv, 4, 9. Soa importance était donc considérable à divers points de vue. Les sacrifices qu’on offrait à la fête des Trompettes étaient les mêmes qu’aux autres fêtes. Num., xxviii, 11-30. Leur signification ne présentait donc rien de spécial. Cf. Bâhr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1839, t. ii, p. 567, 592-601.

2° Les coutumes juives. — Elles sont consignées dans le traité Rosch haschana de la Mischna. Comme les néoménies ordinaires, la fête se célébrait durant deux jours, à cause de la difficulté de déterminer à temps la date de la néoménie pour toute la Palestine. Voir t. iv, col. 1591. Mais le second jour de la fête était aussi saint que le premier. Schabbath, xix, 5. On apportait un soin spécial à la détermination de la néoménie de tischri, à cause des fêtes qui dépendaient de cette date. Néanmoins on s’arrangeait de manière qu’elle ne tombât pas le premier, le quatrième ni le sixième jour de la semaine. On ne voulait pas que la fête de l’Expiation tombât le premier, le troisième ni le sixième jour de la semaine. Cf. Reland, Antiquitates sacrx, Utrecht, 1741, p. 247. Pour empêcher que le dixième jour du mois fût un samedi, un lundi ou un jeudi, il fallait éviter que le premier fût lui-même un jeudi, un samedi ou un mardi. On se servait pour cette fête du Sôfâr, ou corne de bélier, tandis qu’aux autres néoménies et à la fête de l’Expiation on employait la hâsosrâh. Voir Trompette, col. 2322. On sonnait de la trompette du matin au soir ; mais si la fête tombait le jour du sabbat, quand on n’avait pu faire autrement, on ne sonnait qu’à Jérusalem. Rosch haschana, IV, 1.

— Nulle part, dans la Bible, le premier jour de tisri n’est considéré comme le commencement de l’année. Celle-ci commençait en nisdn. Exod., xii, 2. Ce fut

seulement sous la domination macédonienne que les Juifs, pour se conformer à l’usage grec, fixèrent le début de leur année civile au premier jour de tisri, qui devint ainsi rôs has-sânâh, « tête de l’année ». Voir Année, t. i, col. 645-647. Mais la liturgie mosaïque de la fête des Trompettes ne fait aucune allusion à cette circonstance, l’importance de tiSri lui venant surtout de ce qu’il est le mois sabbatique. Le nom de Rosch hasehana, que la Mischna donne à la fête des Trompettes, ne doit donc pas faire illusion. — Cf. Reland, Antig. sacr., p. 255 ; Iken, Aniiquitates hebraicse, Brème, 1741,

p. 137-139, 325, 326.
H. Lesêtre.

TRONC. Voir Ga.zophyla.cium, t. iii, col. 134.

    1. TRONE##

TRONE (hébreu : kissê’; chaldéen : ftdrsê’; Septante : 6p6voç ; Vulgate : thronus), siège d’apparat à l’usage des rois.

1° Le trône royal. — Salomon, devenu roi, prit place sur son trône et fit asseoir sa mère sur un autre trône, à sa droite. III Reg., Il, 19. Il se fit faire ensuite un trône d’ivoire avec des ornements d’or pur. III Reg., s, 18, 19. Voir Lion, t. iv, fig. 90, col. 278. Joachin, captif à Babylone, fut placé par Évilmérodach sur un trône, au-dessus du trône des autres rois déportés comme lui. IV Reg., xxv, 28 ; Jer., lii, 32. — Nabuchodonosor jurait par son trône d’exercer sa vengeance. Judith, i, 12. Jérémie, xliii, 10, prédit qu’un jour le trône de Nabuchodonosor serait placé à Taphnès, en Egypte, sur des pierres qu’il venait lui-même de faire disposer. Ce prince fut déposé de son trône pendant sa folie. Dan., v, 20.

2° La royauté. — Le trône est pris parfois pour la dignité royale de celui qui l’occupe. Dieu promit de maintenir à jamais le trône de David. II Reg., iii, 10 ; vu, 13, 16 ; III Reg., ii, 33, 45 ; ii, 6 ; viii, 20, 25 ; I Par., xvii, 14 ; xxviii, 5 ; Ps. lxxxix (lxxxviii), 30, 38. La femme de Thécué souhaitait que l’éloignement d’Absalom ne nuisit pas au trône de David. II Reg., xiv, 9. Adonias tenta d’occuper ce trône, III Reg., i, 24, 27, qui fut assuré à Salomon. III Reg., i, 47 ; iii, 12 ; IX, 5 ; x, 9 ; II Par., vi, 10, 16 ; vii, 18 ; ix, 8. Le trône de David fut ensuite occupé par Joas, IV Reg., xi, 19, et par toute une suite de rois. Jer., xiii, 13 ; xxii, 2, 4. Jérémie, xxxiii, 17, 21, annonça qu’il ne manquerait jamais de roi sur ce trône, ce qui se vérifia dans la personne du Messie. — Le trône d’Israël fut assigné à Jéhu pour quatre générations. IV Reg., x, 30 ; xv, 12.

— Un trône royal est affermi par la bonté et par la justice. Prov., xx, 28 ; xxv, 5 ; xxix, 14.

3° Le trône de Dieu. — Comme Dieu est le Roi des rois, un trône lui est attribué. Jérusalem est son trône sur la terre. Jer., iii, 17. Il a dans le ciel un trône de justice et de majesté, Ps. ix, 5, 8 ; Eccli., i, 8, un trône de saphir, Ezech., i, 26, et de flammes, Dan., vil, 9, où il est béni. Dan., iii, 54. Le Fils de Dieu occupe au ciel un trône de grâce. Heb., i, 8 ; iv, 16. Saint Jean fait souvent allusion au trône de Dieu. Apoc, I, 4 ; iii, 21 ; iv, 5, 9, 10 ; v, 1-13 ; etc. — Notre-Seigneur défend de jurer par le trône de Dieu, Matth., v, 34, parce que c’est jurer par Dieu lui-même. Matth., xxiii, 22.

4° Les trônes symboliques. — Dieu fait asseoir les justes sur des trônes, comme les rois. Job, xxxvi, 7. Les Apôtres siégeront un jour sur douze trônes, pour juger les douze tribus d’Israël. Luc, xxii, 30. Les vingt-quatre vieillards, représentant les douze chefs de l’ancien peuple et les douze Apôtres, occupent des trônes autour du trône de Dieu, dans le ciel. Apoc, iv, 4.

H. Lesêtre.

TROPH1ME (grec : Tpdqnnoç), compagnon de saint Paul. Il était originaire d’Éphèse et païen de naissance. Act., xxi, 28-29. Il fut un des compagnons de saint Paul, à l’époque du troisième voyage de missions de l’Apôtre Il le suivit avec Tychique et quelques autres depuis la Macédoine jusqu’à la province d’Asie. Act., XX, 4. Tychique paraît n’être pas allé plus loin, mais Trophime continua la route avec saint Paul jusqu’à Jérusalem et là il devint l’occasion involontaire et inconsciente de l’arrestation de l’Apôtre par les Juifs. Ceux-ci, très irrités contre leur ancien coreligionnaire devenu l’une des colonnes de l’Église naissante, voulaient se défaire de sa personne et ils cherchèrent par conséquent à s’en emparer. Pour justifier leur violence à son égard, les Juifs d’Asie, ayant vu Paul dans le Temple, l’accusèrent d’y avoir introduit, en violation de la loi, le gentil Trophime, ce qui était inexact. Mais la foule soulevée saisit Paul et il n’échappa à la mort que par l’intervention du tribun romain, qui l’envoya ensuite au procurateur romain, à Césarée. Que devint alors Trophime ? Son nom ne reparait plus qu’une fois, et longtemps après, dans le Nouveau Testament. Dans sa seconde lettre à Timothée, écrite peu de temps avant son martyre à Rome, saint Paul dit à son disciple, II Tim., iv, 20, qu’il a laissé « Trophime malade à Milet ». Ce dernier avait donc accompagné son maître dans le voyage qu’il avait fait en Orient entre sa première et sa seconde captivité à Rome. L’Église d’Arles honore saint Trophime comme son premier évêque. Saint Paul, après sa délivrance de la première captivité de Rome, l’aurait emmené comme un de ses compagnons en partant pour l’Espagne et, en passant à Arles, il l’y aurait institué évêque. VoirBaronius, Annal., adann. 62, ’§4. Que Trophime soit devenu évêque d’Arles à cette époque, cela se concilie bien difficilement avec le fait qu’un certain temps après, saint Paul fut obligé de le laisser malade à Milet. II Tim., iv, 20. « H est difficile, dit un savant historien de l’Église d’Arles, de fixer précisément l’époque de la prédication de l’Évangile à Arles. L. Bonnement, chanoine d’Arles, M émoires pour servir à l’histoire de l’Église d’Arles, dans l’édition Migne de Calmet, Dictionnaire de la Bible, 1846, t. iv, col. 873… Des monuments respectables donnent [le titre de fondateur] à saint Trophime… Il faut cependant reconnaître que les monuments de l’histoire ne nous apprennent presque rien de certain touchant les combats et les conquêtes de notre premier apôtre. » On célèbre sa fête, à Arles, le 29 décembre. Les grecs l’honorent le 14 avril et disent qu’il eut la tête tranchée à Rome, par ordre de Néron. Voir Acta sanctorum, augusti t. i, p. 314.

    1. TROUPEAU##

TROUPEAU (hébreu : ’êdér ; Septante " : (iouxoXtov, « troupeau de bœufs », tioi’uvïi, 7rof(j.viov, « troupeau de brebis et de chèvres », àyélri, « troupeau de porcs » ; Vulgate : armentum, grex), assemblage de quadrupèdes domestiques.

1° Au sens propre. — Abel fut le premier à faire paître des troupeaux. Gen., iv, 4. Les patriarches, qui menaient la vie nomade, étaient possesseurs de nombreux troupeaux. Comme de grands espaces étaient nécessaires à la subsistance de ces troupeaux, les propriétaires nomades se trouvaient dans la nécessité de vivre à distance les uns des autres. Gen., xiii, 8-11 ; xxxvi, 6-8. Des disputes s’élevaient entre les bergers de troupeaux différents, pour l’usage d’un pâturage ou d’un puits. Gen., xiii, 7 : xxvi, 19-22. L’abreuvage des troupeaux était en effet une question importante. Gen., xxix, 8 ; xxx, 38 ; Exod., ii, 16 ; etc. Les troupeaux étaient sous la garde des chiens. Job, xxx, 1. Le bouc marchait à la tête, Jer., L, 8, et l’on faisait passer les animaux sous la main pour les compter. Jer., xxxiii, 13. La disette effarait les troupeaux, Jo., i, 18, et le lionceau épouvantait les brebis. Mich., v, 8. Les villes ruinées devenaient des lieux de pacage pour les troupeaux. Is., xvii, 2 ; xxxii, 14 ; Soph., ii, 14. Le maître doit connaître l’état de son troupeau et en prendre soin.

Prov v xxvii, 23. — En quittant l’Egypte, les Hébreux emmenèrent avec eux tous leurs troupeaux au désert. Exod., x, 26. Quand les Israélites réclamèrent un roi, Samuel les avertit que celui-ci prendrait la dîme de leurs troupeaux. I Reg.,-vm, 17. David, II Reg., vii, 8 ; I Par., xyii, 7, et Amos, vii, 15, menaient les troupeaux quand le Seigneur les appela. Salomon fut possesseur d’immenses troupeaux. Eccle., ii, 7. Les armées assyriennes menaient avec elles de nombreuxtroupeaux. Judith, II, 8. Des bergers, qui gardaient leurs troupeaux pendant la nuit, furent avertis par les anges de la naissance du Sauveur. Luc, II, 8. Notre-Seigneur permit aux démons de s’emparer d’un troupeau de porcs qu’ils précipitèrent dans le lac de Tibériade. Matth., viii, 30 ; Marc, v, 11 ; Luc, viii, 32. Voir Bœuf, t. i, col. 1826 ; Brebis, col. 1911 ; Chèvre, t. ii, col. 692.

2° Au sens figuré. — Les troupeaux sont naturellement l’image des peuples, conduits par leurs chefs qui sont comme des pasteurs. Les Hébreux étaient comme un troupeau que Dieu mena à travers le désert, Ps. lxxviii (lxxvii), 52, et dont Moïse était le berger. Is., lxiii, 11. Les Israélites sont fréquemment appelés le troupeau de Jéhovah. Is., xl, 11 ; Jer., xiii, 17, 20 ; xxiii, 1-3 ; xxxi, 10 ; li, 23 ; Bar., iv, 26 ; Mich., ii, 12 ; Zach., ix, 16 ; x, 3 ; xi, 7-17. Les chefs du peuple sont les bergers de ce troupeau, et souvent ils s’acquittent mal de leur fonction. Jer., x, 21 ; xxv, 34-36 ; l, 6 ; Ezech., xxxiv, 2-31 ; Zach., x, 2. — Les Israélites étaient, en face’des Syriens, comme deux petits troupeaux de chèvres. III Reg., xx, 27. Les enfants se multiplient, Job, xxi, 11, et Dieu multipliera son peuple comme des troupeaux. Ezech., xxxvi, 37, 38. Les cheveux de l’Épouse sont comparés à un troupeau de chèvres, et ses dents à un troupeau de brebis tondues. Gant., iv, 1, 2 ; vi, 4, 5. — Notre-Seigneur appelle aussi ses disciples un « petit troupeau », Luc, xii, 32, qui sera momentanément dispersé quand le Pasteur sera frappé. Matth., xxvi, 31. Les pasteurs de l’Église doivent veiller avec soin sur ce troupeau. Act., xx, 28, 29. I Pet., v, 2, 3.

H. Lesêtre.
    1. TRUELLE##

TRUELLE (Vulgate : trulla), instrument dont le maçon se sert pour prendre et placer le mortier. — Ce mot se lit deux fois dans la Vulgate. Une fois, il traduit le pluriel yd’îm, qui veut dire * pelle ». IV Reg., xxv, 14. Le mot yâ’im, dont le singulier n’apparait nulle part, a embarrassé les traducteurs. Il désigne un des instruments en usage au sanctuaire. Il est ainsi rendu dans les différents passages où il en est question : Exod., xxvii, 3 ; xxxviii, 3 : xaXuxiifjp, « couvercle », forceps, « pince » ; Num., iv, 14 : xaXimnijp, fuscinula, « fourchette » ; III Reg., vil, 40, 45 : 6£pu.ao-rpî ; , « pince », I scutra, <r plateau » ; II Par., IV, 11 : xpedcYpa, creagra, « fourchette » ; II Par., IV, 16 : àvay]irnip, « vase à puiser », creagra, IV. Reg., xxv, 14 : lau.ïv, qui n’a pas de sens, Irulla ; Jer., iii, 18 : xpeâypa, creagra. Dans le Targum, yd’îm désigne une pelle. — La Vulgate traduit encore par trulla cœmentarii, « truelle de maçon », le mot’ânàk, dans Amos, vil, 7, 8. Les Septante le rendent par àSâpiai ; , « diamant ». Comme’ânâk signifie « plomb », on traduit ordinairement par « fil à plomb ». Voir Fil a plomb, t. ii, col. 2244. Knabenbauer, Proph. min., Paris, 1886, p. 314, suppose un crépissage avec le plomb contenu dans la trulla, qui a aussi le sens de « vase ». Le P. Condamin, Le prétendu « fil à plomb » de la vision d’Amos, dans la Revue biblique, 1900, p. 586-594, voit dans le’ândk un métal très dur, analogue au diamant des Septante, le fer, symbole de la guerre, que le Seigneur va déchaîner sur Israël. Pour V. Hoonacker, Xes douze petits prophètes, Paris, 1908, p. 265-267, le’ânâk désignerait 1’  « affliction », d’après une racine arabe, ou même simplemeut le « plomb », que Dieu veut mettre dans Israël afin de l’avilir, comme on met du plomb dans un creuset con tenant des minerais divers dont on ne peut tirer parti. En tous cas, on ne voit guère comment le mot hébreu pourrait avoir le sens de « truelle ».

H. Lesêtre.
    1. TRYPHÈNE##

TRYPHÈNE (grec : Tpûçaiva), chrétienne de Rome, que saint Paul salue dans son Epitre aux Romains, xvi, 12. « Saluez, dit-il, Tryphène et Tryphose qui travaillent pour le [service du] Seigneur. » Ces deux noms ont été retrouvés dans les inscriptions des colombaires de la maison des Césars à Rome. Corpus insci’iptionum lalinarum, t. vi, n os 4866 (Tryphosa) ; 5035, 5343 (Tryphæna). Le nom de Tryphène, figure aussi dans les Acta Pauli et Theclx, où « la reine Tryphène » joue un rôle important à Antioche de Pisidie. Une monnaie de Pisidie porte au droit BASIAEQ2 IIOAEMQNOS et au revers BA2IAISSH2 TPÏ"*AINH2. Cette Tryphène était fille de Polémon, roi d’une partie de la Lycaonie et de la Cilicie, femme de Cotys, roi de Thrace, et mère d’un autre Polémon, roi de Pont. Elle était arrière-petite-fille de Marc-Antoine et parente éloignée de l’empereur Claude. Son frère Polémon embrassa le judaïsme. Voir W. M. Ramsay, The Church in the Roman Empire before A. D. 170, in-8°, Londres, 1893, p. 382.

    1. TRYPHON##

TRYPHON (grec : Tpûçiov, « le dissolu » ), usurpateur, roi de Syrie, 170-174 de l’ère des Séleucides,

528. — Monnaie d’argent de Tryphon, roi de Syrie. Tête de Tryphon, à droite, diadémée. — i$. BASIAEQE || TPr*QNŒ || AÏ"TOKPATOPO£. Dans une couronne, un casque orné d’une corne. Monogramme.

142-139 avant J.-C. (fig. 528). Il s’appelait de son vrai nom Diodote, Strabon, XVI, ii, 10 ; Appien, Syr., 78, et, d’après ce dernier, il prit le surnom de Tryphon en s’emparant du pouvoir. Cf. Tite-Live, Epist., lui, lv. Il était né à Casianes, place forte du district d’Apamée, et il fut élevé à Apamée même. Strabon, XVI, ii, 10. Sous Alexandre Balas, il fut attaché à la cour. I Mach., xi, 39 ; Diodore, Fragm., xxi, dans Didot, Histor. grsecor. Fragment., ii, 17. Il semble avoir pris part, vers la fin du régne de ce roi, à la conspiration destinée à livrer la Syrie à Ptolémée Philométor, roi d’Egypte. Diodore, Fragm., xxi. Après la déchéance d’Alexandre Balas, il se tourna d’abord vers Démétrius II Nicator, mais voyant son impopularité (Tite-Live, Epist., lu ; Justin, xxxvi, 1), il lui opposa le fils d’Alexandre Balas, encore enfant, qui était élevé par l’Arabe Émalchuel. I Mach., xi, 39. Celui-ci, après beaucoup de résistance, avait fini par consentir à le confier à ce dangereux protecteur. Voir Émalchuel, t. ii, col. 1714. Antiochus n’était encore qu’un enfant. Tryphon se servit de lui pour combattre et chasser Démétrius II, qui s’était rendu impopulaire en Syrie, et il gouverna sous le nom d’Antiochus VI, après s’être emparé d’Antioche. I Mach., XI, 54-56. Il chercha à s’attacher Jonathas Machabée, en le faisant confirmer dans sa dignité de grand-prêtre par le roi, qui accompagna cette faveur de plusieurs autres et de riches présents, ꝟ. 57-59. Voir Antiochus VI, t. i, col. 703. Cepen

dant Tryphon s’aperçut bientôt que Jonathas était trop loyal pour se prêter à ses projets ambitieux ; il s’empara de sa personne par trahison, et le mit finalement à mort. IMach., xii, 39-49 ; xiii, 12-24. Voir Jonathas 3, t. iii, col. 1623. Une fois débarrassé de celui qui pouvait être d’un puissant secours pour le jeune Antiochus VI, il se défit de son malheureux pupille, $àu>, dit le texte grec, I Mach., xiii, 31 ; en faisant opérer sur cet enfant de dix ans, dit Tite-Live, Epit., ly, une opération chirurgicale mortelle, par les médecins qu’il avait gagnés (170 avant J.-C). Tryphon prit alors le titre de roi. Il exerça le pouvoir avec la cruauté, la cupidité, la violence que présageaient ses antécédents. Sa tyrannie devait le rendre odieux à ses sujets. Il se montra particulièrement rapace à l’égard des Juifs. Simon Machabée eut recours alors contre lui à Démétrius II, qui ne demanda pas mieux que de s’assurer un tel auxiliaire contre son ennemi, I Mach., xiii, 34-40, et prépara une expédition pour combattre Tryphon. Mais, étant allé en Médie pour se procurer des secours dont il avait besoin pour sa campagne, Démétrius Nicator fut fait prisonnier par un des généraux d’Arsace VI, roi des Parthes, ou, selon le titre que lui donne l’Écriture, « roi de Perse et de Médie ». I Mach., xiv, 1-3. Voir Arsace VI, t. i, col. 1034. Le trône paraissait ainsi assuré à Tryphon. Justin, xxxvi, 1 ; Diodore, Leg., xxxix. Celui-ci n’avait plus qu’à réduire les généraux de Démétrius qui lui résistaient encore. Mais un adversaire plus dangereux se leva bientôt contre lui. Un frère cadet du roi captif, connu depuis sous le nom d’Antiochus VII Sidète, en apprenant à Rhodes, où il était, le malheur arrivé à son aîné, s’empressa de quitter l’Ile, pour tenter de ceindre sa couronne. Il fut mal accueilli en Syrie, et n’eut pas d’abord le succès qu’il avait espéré, à cause de la crainte qu’inspirait Tryphon, mais sa belle-sœur Cléopâtre fit tourner la fortune en sa faveur. Après avoir épousé Alexandre Balas, elle était devenue la femme de Démétrius II et possédait la ville de Séleucie. Pour la conserver, elle offrit à son beau-frère de l’épouser, afin qu’il pût la défendre contre Tryphon. Ce mariage mit Antiochus en état d’attaquer l’usurpateur et lui amena de nombreux partisans, qui abandonnèrent son ennemi. Celui-ci fut réduit à s’enfuir à Dor, sur la côte de Phénicie. Assiégé dans cette ville, il y fut serré de près. I Mach., xv, 10-14. Il n’eut d’autre ressource que de s’échapper par mer pour aller se réfugier d’abord à Ptolémaïde, Charax, Didot, Hist. grsec. fragm., t. iii, n. 40, p. 644, . puis à Orthosiade, I Mach., xv, 37, et enfin à Apamée, où il fut de nouveau assiégé et où il périt, d’après Josèphe, Ant. jud., XIII, vii, 2. D’après Strabon, XIV, v, 2, Antiochus VII. l’obligea à se donner la mort à Coracésium. Cf. Appien, Syr., 68.

    1. TRYPHOSE##

TRYPHOSE (grec : Tpuçùira), chrétienne de Rome, saluée par saint Paul. Rom., xvi, 12. Voir Tryphêne, col. 2330.

    1. TSADÉ##

TSADÉ, s, ?, dix-huitième lettre de l’alphabet hébreu. Les uns ont cru qu’elle représentait, sous son ancienne forme phénicienne, voir Alphabet, t. i, col. 407-408, un hameçon ; d’autres, une faulx ou une faucille. Voir Gesenius, Thésaurus, p. 1143. — Le tsadé est une sifflante dentale, qui se décompose en t et s. Les Septante et, à leur suite, saint Jérôme, l’ont rendu par une simple s, comme EaëatS ! ), pour Çeba’ôf ; EeSextaç, pour §idqiydh ; Siôtiv, §îdôn ; Vulgate, Sabaoth, Sedecias, Sidon, de sorte que, dans les versions, le tsadé est rendu comme le samech, le sin et le schin.

    1. TUBALCAIN##

TUBALCAIN (hébreu : Tùbal Qa’in ; Septante : & Q6êeX), Caïnite, fils de Lamech et de Sella. Gen., iv, 22. Il forgea toutes sortes d’ouvrages d’airain et de fer.

Vulgate : Fuit malleator et faber in cuncta opéra seris etferri. C’est tout ce que l’Écriture nous apprend de lui. Les rabbins ont raconté à son sujet diverses légendes sans fondement. Josèphe, Ant. jud., i, ii, 2, dit que Tubaleaïn était distingué par sa force prodigieuse et par ses succès dans la guerre. On a donné de son nom lesétymologies les plus diverses, mais aucune ne s’impose. On a rapproché de Tubaleaïn les Thubaliens, qu’Ézéchiel, xxvii, 13, mentionne sous le nom de Thubal, entre Javan (Vulgate : Grœcia) et Mosoch.

    1. TUBIANÉENS##

TUBIANÉENS (grec : Tovôuivot ; Alexandrinus : Touêeîvoi), habitants du pays de Tob. II Mach., xii, 17. L’Écriture nomme ainsi des Juifs qui s’étaient établis dans le pays de Tob et que Judas Machabée y rencontra lorsqu’il poursuivait le général syrien Timothée, qu’il avait pensé atteindre en cet endroit mais qui en était déjà reparti. VoirToB, col. 2256 ; Characa, t. ii, col. 577.

TUBIN.VoirTuBiANÉENS ; Tob, col. 2256.

    1. TUILE##

TUILE (grec : xÉpajio ;  ; Vulgate : tegula), morceau de terre cuite, ordinairement en forme de rectangle ou de trapèze, et servant à la couverture des toits. Il est possible que les, tuiles qui recouvraient les terrasses de Palestine aient affecté la dimension et l’épaisseur de dalles. — Pour descendre le paralytique devant Notre-Seigneur, onfit une ouvertnre dans le toit. Marc, II, 4. Saint Luc, v, 19, dit que l’on descendit le malade Stà râv v.Epâ[iwv, per tegulas. Cette expression suppose des tuiles enlevées. Néanmoins, comme les mots per tegulas, dans les classiques, signifient seulement « à travers l’ouverture » ménagée au milieu d’un atrium ou d’un péristyle, sans qu’il y ait eu déplacement de tuiles, il se pourrait que saint Luc ait en vue ce dernier sens et n’ait voulu parler que du trou pratiqué par les porteurs. Cf. Rich, IHct. des antiq. romaines et grecques, trad. Chéruel, Paris, 1873, p. 627.

H. Lesêtre.
    1. TUMEUR##

TUMEUR, excroissance qui se forme dansles tissus du corps et peut être bénigne, quand elle ne gêne que par son volume ; ou maligne quand elle fait souffrir et devient dangereuse. Moïse range les tumeurs parmi les maux qui affligeront les Israélites infidèles. Sur le genre de tumeurs auxquelles il fait allusion, voir Hémorroïdes, t. iii, col. 587 ; Ofalim, t. iv, col. 1757.

H. Lesêtre.
    1. TUNIQUE##

TUNIQUE, espèce de vêtement. Voir Vêtement.

I. Dans l’Ancien Testament. — En hébreu, plusieurs mots servent à désigner ce que les versions appellent « tunique ».

1° Ketànéf, y.iitiv, tunica, correspondant à l’assyrien kitinnû, qui désigne un. vêtement de laine. Le kefônéf est un vêtement assez étroit qui prend la forme du corps. Dieu donne à Adam et Eve une tunique de peaux. Gen., iii, 21. Job, XXX, 18, se plaint que, par la violence du mal, son corps est tellement amaigri que son vêtement a l’air d’une tunique. Cette tunique est à l’usage d’Aaron et des prêtres, Exod., xxviii, 40 ; Lev., x, 5 ; xvi, 4, etc., de l’Épouse, Cant., v, 3, de l’intendant Sobna. Is., xxil, 21. Joseph a un kefônét passîm, vêtement qui descend jusqu’aux mains et aux pieds, Xtttiv 7101x£Xoi ; , tunica polymita, tunique de diverses couleurs. Gen., xxxvil, 3, 23, 32. C’était une tunique de valeur supérieure aux tuniques ordinaires, puisqu’elle est la marque d’une tendresse particulière de la part de Jacob. Thamar, sœur d’Absalom, portait une tunique de même nom, yiTtbv xapitMtôç, tunique à manches descendant aux poignets, tunica talaris, tunique descendant aux talons. Il Reg., xiii, 18, 19. Il y a encore le ketônét tasbês, jtltwv y.O(rj(16ô>Toç, une tunique à franges, tunica et linea stricta, une tunique de lin étroite, destinée à Aaron. Exod., xxviii,

4. — 2° Me’îl, probablement tunique de dessus, sans manches, communément appelée par les versions ShO.olc, pallium, chlamys, bien que cène soit pas un manteau, comme l’indique l’usage qui lui est attribué dans plusieurs passages. Voir Manteau, t. iv, col. 663. C’est la tunique que la mère de Samuel fait chaque année pour son jeune fils, I Reg., ii, 19, celle de Job

II. Dans le Nouveau Testament. — 1° Notre-Seigneur conseille à son disciple d’abandonner son manteau à qui lui prend sa tunique, Matth., v, 40 ; Luc, VI, 29, c’est-à-dire d’être prêt à tous les sacrifices plutôt qu’à celui de la paix et de la charité. Le prédicateur de l’Évangile ne doit pas avoir deux tuniques, Matth., x, 10 ; Marc, vi, 9 ; Luc, ix, 3, pour ne pas

529. — La sainte tunique d Argenteuil. — D’après A. Jacquemot. Elle est représentée en noir sur une étoffe destinée à la soutenir.

530. — Le tissu de la sainte tunique. D’après une photographie des Gobelins.

et de ses amis, initia, « rroVr, , vestimenta, vestes, Job, i, 20 ; ii, 12, de Samuel, I Reg., xv, 27 ; xxviii, 14, de Jonathas, ènôvSjrrj, tunica, I Reg., xviir, 4, de Saiil, I Reg., xxiv, 5, 12, et des filles du roi. II Reg., xhi, 18. — 3° Ma’âtâfâh, palliolum, tunique plus ample à l’usage des femmes. Is., iii, 22. — 4° Médév, u.av£ûïi, tunica, sorte de casaque à l’usage d’Esdras. I Esd., ix, 3. — 5° Pattîs, vestes, nom chaldéen des tuniques que portent les trois jeunes hommes dans la fournaise. Dan., iii, 21. — Les versions traduisent encore par iiav51j7 ; , £v8uu. : x, tunica stricta, tunique serrée, le hâgôr que porte Joab, II Reg., xx, 8, mais ce mot désigne une ceinture. I Reg., xviii, 4 ; Prov., xxxi, 24.

s’embarrasser du superflu. Celui qui a deux tuniques doit en donner une à celui qui en manque. Luc, iii, 11. À l’approche du siège de Jérusalem, il ne faudra pas rentrer dans sa maison pour prendre sa tunique, tant le danger sera pressant. Matth., xxiv, 18. La tunique était donc un vêtement de dessus que l’on quittait à la maison pour vaquer à différentes occupations sur son toit. Les pêcheurs la quittaient pendant leur travail. Joa., xxi, 7. Tabilha faisait des tuniques pour les pauvres veuves. Aot., ix, 39. Saint Jude, 23, veut que le chrétien haïsse « jusqu’à la tunique souillée par la chair, » c’est-à-dire jusqu’aux apparences de la corruption.

2° La tunique du Sauveur était appaçoç, inconsutilis, sans couture, par conséquent tissée d’une seule pièce depuis le haut jusqu’en bas. Joa., six, 23. Elle était ainsi à peu près semblable à celle des prêtres, dont Josèphe, Ant. jud., III, vii, 4, fait cette description : « C’est une tunique talaris, que nous appelons dans notre langue iieeîp (me’îl)… Cette tunique ne se compose pas de deux pièces, ayant des coutures sur les épaules et sur les côtés ; mais c’est un vêtement d’une seule pièce, tissé danstoule sa longueur, que l’on entre par le cou au moyen d’une ouverture en forme de fente longitudinale allant depuis la poitrine jusqu’au haut du dos, entre les épaules. On y ajoute un bord,

531. — La sainte tunique de Trêves.

D’après Friedlieb, Archéol. de la Passion, p. 377.

pour cacher la difformité de la fente. Elle a également des ouvertures pour passer les mains. » Cf. Braun, De vest. sacerd. hebrseor., Leyde, 1680, p. 342. Le procédé employé pour fabriquer des vêtements sans couture ne s’est pas perdu en Orient. Cf. Rosenmûller, Dos alte und neue Morgenland, Leipzig, 1818, t. v, p. 273. Il est clair qu’une tunique sans couture perdrait toute sa valeur si on la divisait en plusieurs morceaux ; aussi les soldats qui avaient crucifié le Sauveur préférèrent-ils tirer la sienne au sort. — Il est à croire que des disciples du Sauveur ont racheté ses vêtements aux soldats. Cependant on ne possède à ce sujet aucun document authentique qui soit antérieur au xi’siècle. Des fragments de vêtements du Sauveur sont conservés en différents endroits, particulièrement au Latran. Mais les deux tuniques les plus célèbres sont celles d’Argenteuil et de Trêves.

La tunique d’Argenteuil (fig. 529) mesurait l m 45 de haut, quand elle était entière, elle avait une ouverture au col et des manches. L’étoffe est un tissu de laine,

fabriqué sur un métier primitif, mais très régulier (fig. 530). On y a reconnu, à l’analyse, des taches de sang. La tunique de Trêves (fig. 531), également sans couture, a été conservée entière. Elle mesure en hauteur 1<°48 par devant et l m 57 par derrière, en largeur 1 I °09 en bas et m 70 en haut, avec des manches larges de m 33 et longues de m 46. Il est fort possible que Notre-Seigneur ait porté plusieurs tuniques sans couture. On suppose que celle de Trêves était la tunique de dessus, et celle d’Argenteuil la tunique de dessous. Cf. £. Bessel, Geschichte des heiligen Rockes, Trêves, 1889 ; C. Willems, Der heilige Rock zu Trier, Trêves, 1891, trad. par Furcy Raynaud ; La sainte robe de N.-S. J.-C. àlTrèves, Trêves, 1891 ; Id., La sainte robe de Trêves et la relique d’Argenteuil, Paris, 1894 ; A. Jacquemot, La tunique sans couture de N.-S. J.-C, conservée dans l’église d’Argenteuil, Lille, 1894 ; J.-B. Vanel, Histoire de la sainte tunique d’Argenteuil (manuscrit de dom Wyard, bénédictin de Saint-Maur du xviie siècle), Paris, 1894 ; J. H. Friedlieb, Archéologie de la Passion, trad. Martin, Paris, 1897,

p. 358-381.
H. Lesêtre.
    1. TURBAN##

TURBAN (hébreu : pe’êr ; Septante : xi’Sapcç, [juTpa ; Vulgate : corona, coronula, vitta), espèce de coiffure. Le turban de lin est attribué aux prêtres, concurremment avec la mitre, dout il ne devait pas différer beaucoup, puisque les Septante les confondent. Voir Cidaris, t. ii, col. 750 ; Mitre, t. iv, col. 1135. La forme de cette coiffure était celle d’une sorte de bonnet qui entourait la tête et s’attachait par derrière. Voir t. v, fig. 172, col. 647. La Vulgate l’appelle tantôt coronula, Exod., xxxix, 28, tantôt, vitta, Ezech., xliv, 18. En tous cas, ce n’était pas une coiffure vulgaire, puisqu’elle servait aux prêtres dans l’exercice de leurs fonctions sacrées. Mais il est impossible de dire en quoi elle différait des autres coiffures analogues. Voir Tiare, col. 2205. — Le turban était aussi en usage dans la vie civile. Les femmes élégantes le portaient. Is., iii, 20. Il servait de coiffure au nouveau marié. Is., lxi, 10. En rendant pe’êr par 8ô ?a, « gloire », et corona, Is., lxi, 3, les versions donnent à entendre que c’était une coiffure de fête, probablement pourvue de certains ornements. Isaïe, lxi, 3, et Ezéchiel, xxiv, 17, 23, supposent que le pe’êr se portait aux jours de joie et de paix, et remplaçait la cendre des jours de deuil. Dans les deux derniers passages d’iizéchiel, les Septante ne voient dans le pe’êr qu’un agencement particulier de la chevelure, Tpcxii[j.a, y.ûy.at. H. LESÊTRE.

TUTEUR’fgrec : èiuiTpÔ7uoç ; Vulgate : procurator, tutor), celui qui est chargé d’élever un mineur et de gérer sa fortune. — Mardochée a rempli vis-à-vis d’Esther le rôle de tuteur et de nourricier, ’omên. Esth., il, 7. Voir Nourricier, t. iv, col. 1699. — Lysias, parent d’Antiochus Eupator, fut le tuteur du jeune roi et le régent du royaume. II Mach., xi, 1 ; xiii, 2 ; xiv, 2. — Saint Paul dit que l’héritier encore enfant « est soumis à des tuteurs, èirn-pônoi ; , tutoribus, et à des curateurs, oîxovô(j.ouç, actoribus, jusqu’au temps marqué par le père. » Gal., iv, 2. Ces tuteurs et ces curateurs exercent probablement leur charge après la mort du père qui, de son vivant, prenait soin lui-même de l’éducation et des intérêts de son enfant. C’est la loi qui fixait l’âge de l’émancipation de l’héritier, ce qui porterait à conclure que les tuteurs sont ici de simples administrateurs des biens ou des intendants aux pouvoirs desquels le père, encore vivant, assigne le terme qu’il veut. Mais rien ne prouve que saint Paul se réfère au droit romain plutôt qu’au droit naturel, qui laissait au père le pouvoir de fixer la durée de la tutelle. D’ailleurs, si le père était encore vivant, il émanciperait son fils à l’époque suggérée par les circonstances, tandis qu’il y a

ici un « temps marqué à l’avance » ; irpo^suina, prsefi"nitum tenipus, qui a dû être réglé par le père avant sa mort. L’Apôtre applique cette comparaison à l’humanité, qui a été en état de servage, comme un héritier en tutelle, pendant les siècles qui ont précédé, mais qui entre en jouissance de l’héritage de salut, au moment librement fixé par les décrets divins. Cf. Cornely, Epist. ad Galat., Paris, 1892, p. 591, 592 ; Pral, La théologie de saint Paul, Paris, 1908, p. 251.

H. Lesêtre.
    1. TYCHIQUE##

TYCHIQUE (grec : Tjxixo ?, nom qui a le même sens en grec que Fortunatus et Félix en latin), compagnon de saint Paul. — 1° Il était originaire de la province d’Asie. Act., xx, 1, et il accompagna saint Paul dans son troisième voyage de missions, ꝟ. 4, mais pas d’une manière continue. Lorsque l’Apôtre se rendit à Jérusalem avec Trophime, xxi, 29, Tychique resta en Asie, probablement à Milet, xx, 15, 38. — 2° Pendant l’emprisonnement de Paul à Rome, nous retrouvons Tychique auprès de lui, sans que nous sachions précisément ce qu’il avait fait dans l’intervalle. Son maître l’envoya auxColossiens, afin qu’il pût se rendre compte de leur situation et l’en informer exactement, tout en leurdonnant de ses nouvelles. Dans son Épitre, il le leur présente comme un frère bien-aiméetun ministre fidèle, serviteur comme lui du Seigneur, ainsi qu’Onésime, leur compatriote, qui l’accompagne. Col., iv, 7-8. Ils devaient porter l’un et l’autre la lettre que saint Paul adressait aux Colossiens. — 3° Saint Paul avait chargé aussi Tychique de porter aux Éphésiens l’Épitre qu’il leur écrivait. Voir Éphésiens (épître aux), t. ii, col. 1852. Il l’appelle de la même manière que dans l’Épitre au* Colossiens, charissimus frater et fidelis minister in Domino. Eph., iv, 21. — 4° Dans son Épitre à Tite, iii, 12, saint Paul lui annonce qu’il lui enverra en Crète Tychique ou Artémas et il lui demande de venir lui-même le rejoindre promptement à Nicopolis, où il veut passer l’hiver. — 5° Dans sa seconde Épitre à Timothée, écrite à Rome pendant son emprisonnement, saint Paul dit à son disciple, IV, 12, qu’il a envoyé Tychique à Ephèse. Les commentateurs ne sont pas d’accord sur l’époque précise de cette mission. — Le Nouveau Testament ne nous apprend pas autre chose sur Tychique. Suivant la tradition, il devint évêque de Chalcédoine en Bythinie. D’après le Ménologe grec, au 8 décembre, il succéda à saint Sosthène, comme évêque de Colophon en Ionie. Voir Acla sanctorum, t. m julii, p. 613.

TYMPANUM. Voir Tambour, col. 1982.

    1. TYPIQUE##

TYPIQUE (SENS), un des noms du Sens spirituel. Voir Sens de l’Écriture, ii, 2, col. 1610 ; Spirituel (Sens), col. 1858.

TYR (hébreu : Sûr ; Septante : Tûpo ;  ; en assyrien : Surru ; iparra), aujourd’hui Sûr, ville de Phénicie, à 35 kilomètres au sud de Sidon, et à une distance un peu moindre au nord de Saint-Jean-d’Acre, sur la Méditerranée (fig. 532).

I. Situation. — Son nom, qui signifie « rocher », lui vient de son emplacement. En effet, elle était bâtie, du inoins en grande partie, sur un ilôt rocheux, alors situé à environ 600 mètres du continent. Le papyrus Anastasi I parle de Tyr comme d’une ville entourée par les flots de la mer. Ézéchiel, xxvi, 4, 14, et xxvii, 4, dit aussi qu’elle s’élève « au cœur des mers », et qu’après sa ruine elle sera semblable à « un rocher nu ». Cf. Is., xxiii, 4. Par sa situation, complétée par de solides remparts, Tyr devint promptement une forteresse de premier ordre, Jos., xix, 29 ; II Reg., xxiv. 7, etc. Son territoire et celui de la tribu d’Aser étaient limitrophes. Sa beauté et celle de ses alentours sont


mentionnées plusieurs fois dans la Bible. Cf. Ezech., xxvii, 3, 4, 10, 11 ; Ose., ix, 13. L’île tyrienne n’ayant qu’une étendue restreinte (22 stades de périmètre, c’est-à-dire environ 4000 mètres), on avait dû donner aux maisons une élévation peu ordinaire chez les anciens ; elles étaient plus hautes qu’à Rome. Strabon, XVI, Il

532. — Monnaie d’argent de Tyr. Melkarth à cheval sur un hippocampe ai té ; sous les flots, un dauphin. — $. Chouette debout à droite portant le fléau et le sceptre égyptien.

23. Manquant d’eau potable, elle s’en procura par un système fort bien combiné de canaux, qui allaient en chercher jusqu’aux sources abondantes du Ras-el-Aïn, sur le continent, à environ une heure et demie de marche de l’île, dans la direction du sud. Voir Ménandre d’Ephèse, dans Josèphe, Ant. jud., IX, xiv, 1 ; Arrien, Anabas., ii, 20, etc. — Tyr (fig. 533) avait deux ports naturels : l’un au nord, du côté de Sidon, et nommé sidonien pour ce motif ; l’autre au sud, le port égyptien. Par des travaux considérables, dont on admire encore les restes, on les avait abrités tout à la fois contre le vent, les vagues et les ennemis extérieurs. Strabon,

533. — Plan de Tyr insulaire.

XVI, ii, 23 ; Pline, H. N., v, 17 ; Arrien, Anab., ii, 20 21. Cf. Ezech., xxvii, 3.

En face de la Tyr insulaire, dans la plaine peu large (2 kil. seulement), mais très longue, qui s’étale entre le rivage et les collines de l’est, voir le plan, fig. 535, col. 2344, était construite la cité continentale, dont le point central paraît avoir été le rocher nommé aujourd’hui Tell-el-Machoûkh, et qui s’étendaitau sud, jusqu’au Ras-el-Aîn. Elle dut être, aux jours les plus florissants de son histoire, plus considérable encore que la ville

V. - 74

bâtie dans l’île. Les anciens historiens ou géographes grecs et romains parlent d’elle sous les noms de Ila-XatTvooç, 7] xâ).ai TOpo ; , Vêtus Tyrus. Cf. Ménandre, dans Josèphe, .Anf. jud. r IX, xiv, 2 ; Diodore de Sicile, xvii, 40 ; Strabon, XVI, ii, 24 ; Pline, H. N., v, 17 ; Quinte-Curce, IV, ii, 18 ; Justin, XI, x, II, etc. Pline affirme que les deux villes réunies auraient eu un périmètre de 19 milles romains (28 kil. 1/2) et une largeur de 22 stades (4 kil.). Comme son nom même l’indique, la ville continentale aurait été la plus ancienne. L’emplacement de Palætyr et l’époque de sa construction ont été de nos jours l’objet d’assez vives discussions. Guthe, dans Realencylopàdie fur }frolest. Théologie, 3e édit., t. xviii, p. 285. Voir la Tyr actuelle, fig. 534.

II. Le commerce et la richesse de Tyr, ses vices, menaces de châtiments. — D’après la Bible, comme au dire des écrivains classiques qui se sont occupés de Tyr, cette ville était particulièrement renommée pour son vaste commerce et pour les immenses richesses qu’il lui procurait. Ses marins n’étaient pas moins célèbres par leur hardiesse que par leur habileté, et c’est grâce à eux surtout qu’elle était devenue, selon le mot d’Isaïe, xxiii, 3, « le marché des nations. » Ézéchiel, xxvii, 12-27, commentant pour ainsi dire cette parole, dresse une longue et éloquente nomenclature des peuples avec lesquels Tyr était en relations commerciales, et des marchandises qu’elle importait, exportait et échangeait. Elle était vraiment, comme il l’écrit, xxvii, 3, « le marchand de peuples d’îles nombreuses, » c’est-à-dire qu’elle trafiquait avec un grand nombre de contrées. Au moyen de ses vaisseaux de petites dimensions, qui, chargés de produits de toute nature, longeaient les rives de la Méditerranée sans en excepter une seule, remontaient le Nil, n’avaient pas craint de franchir le détroit de Gibraltar et d’explorer non seulement les îles Canaries et les côtes occidentales de l’Afrique, mais même le littoral anglais, elle avait fondé sur tous ces points des factoreries, des centres commerciaux, des colonies. Elle entretenait aussi un grand commerce par la voie de terre avec les régions du nord et de l’orient. Elle était ainsi le trait d’union des peuples et favorisait singulièrement l’industrie, la civilisation, les relations de contrée à contrée. En cela, elle envisageait avant tout son propre profit. Si elle ne manifesta aucune envie de conquérir le monde les aTnes à la main, elle chercha constamment à s’enrichir le plus possible aux dépens des autres. Ses produits spéciaux étaient le verre et la pourpre qui portait son nom. Voir Phénicie, t. v, col. 233.’Si les prophètes hébreux signalent son opulence et sa grande puissance, Is., xxiii, 8 ; Ezech., xxvii, 25, 33 ; xxviii, 5 ; Zach., ix, 3, etc., ils n’oublient pas de lui reprocher son orgueil, son luxe coupable, son avidité, sa ruse, et de prédire les châtiments terribles que ces vices devaient lui attirer de la part du Seigneur. Is., xxiii, 8-14 ; Jer., xxv, 22 ; xxvii, 3 ; xlvii, 4 ; Ezech., xxvi, 221 ; xxvii, 26-36 ; xxviii, 1-19. Cf. Matth., xi, 21-22 ; Luc, x, 13-14.

III. Histoire. — L’histoire de Tyr, en tant qu’elle se confond d’une manière générale avec celle des Phéniciens, a été racontée plus haut. Voir Phénicie, col. 242247. Nous n’avons à en exposer ici que les traits particuliers les plus saillants.

1° Ses débuts sont très obscurs. Tyr remonte certainement à une haute antiquité, Is., xxiii, 7 ; Strabon, XVI, II, 22 ; mais ses origines, telles que les racontent les anciens historiens, sont remplies de détails légendaires. C’est ainsi qu’Hérodote, ii, 44, s’appuyant sur le témoignage des prêtres du dieu tyrien Melkarth, fait remonter sa fondation à l’année 2750 avant Jésus-Christ. Il est frappant, sous ce rapport, ’de constater que Tyr n’est mentionnée nulle part dans le Pentateuque, tandis que Sidon, qui fut tour à tour sa rivale, sa

suzeraine et sa vassale, est signalée dans la Table ethnographique de la Genèse, x, 15. D’autre part, Josèphe ; An t. jud., VIII, iii, 1, abaisse beaucoup trop l’origine de Tyr, lorsqu’il affirme qu’elle ne fut bâtie que 240 ans avant la construction du Temple de Salomon, vers l’année 1250. Le passage biblique où elle fait sa première apparition, Jos., XIX, 29, nous apprend qu’elle était déjà une « ville forte » lorsque les Hébreux prirent possession de la Terre Promise (environ 1450 av. J.-C). Homère ne cite nulle part son nom. Cf. Strabon, XVI, n, 22. Sur ses monnaies, Sidon se dit la « mère » de Tyr comme de toutes les autres cités phéniciennes, et, d’un autre côté, Isaïe, xxiii, 12, nomme cette dernière ville la « fille de Sidon » ; mais ces termes sont généraux, et ils ne signifient pas d’une manière absolue que Tyr ait été fondée par Sidon. Elle existait depuis longtemps déjà, lorsqu’elle fut « remplie par les marchands de Sidon, » Is., xxiii, 2, qui vinrent s’y réfugier lorsque les Philistins eurent pris et saccagé leur cité (1252 avant J.-C). C’est surtout à partir de cette date que Tyr exerça sur la Phénicie entière une hégémonie qui dura jusqu’en 877.

2° Période d hégémonie. — Les relations de Tyr avec les Hébreux appartiennent spécialement à cette époque florissante. (D’après les Septante et la Vulgate, Eccli., xlvi, 21, Samuel aurait écrasé les Tyriens, mais l’original hébreu porte : « il soumit les chefs des ennemis. » Sôr = « adversaire, ennemi ».) Un peu plus tard, un des plus grands rois de Tyr, Hiram I er (voir Hiram, t. iii, col. 717-718), qui régna de 969-936, noua des relations très étroites d’amitié et de commerce, soit avec David, II Reg., v, 11, soit avec Salomon. III Reg., ix, 11-14, 26-28 ; II Par., ii, 11-16 ; viii, 2, 17-18. D’après de précieux fragments des historiens grecs Dios et Ménandre, conservés par Josèphe, Contra A-pion., i, 17-18 (cf. Ant. jud., VIII, v, 3), Hiram agrandit et embellit notablement la Tyr insulaire, à laquelle il réunit le petit îlot qui portait le temple du Zeus phénicien. Il reconstruisit aussi les sanctuaires de Melkarth et d’Astarté (Hérodote, ii, 44), et établit à l’est de la ville une grande place qui reçut plus tard le nom i’Eurychnron. Un des successeurs d’Hiram I", l’Ethbaal de la Bible (t. iii, col. 2005), qui donna sa fille Jézabel en mariage à Achab, roi d’Israël, régnait tout à la fois sur Tyr et sur Sidon. Si l’esprit de spéculation des Tyriens rendit quelques services aux Hébreux, il pesa parfois lourdement sur le peuple théocratique : de là, les graves dénonciations et les menaces des écrivains sacrés. Cf. Ps. lxxxii, 6-8 ; Joël, m, 4-8 ; Amos, i, 9-10 ; Is., xxiii, 1-14 ; Jer., xxv, 22, et xlvii, 4 ; et surtout Ezech., xxvi-xxviii. Sur la description du commerce de Tyr par Ezéchiel, voir G. Rawlinson, Pliœnicia, 1889, p. 150-164 ; id., History of Phœnicia, 1889, p. 271-308. Même à l’époque de sa grandeur et de son opulence, Tyr eut souvent à souffrir de luttes intestines.

3° Tyr et l’Assyrie. — C’est dès le ixe siècle avant J.-C., sous le règne d’Ethbaal, que les Assyriens commencèrent à pénétrer dans l’histoire de Tyr. Vers 865, cette ville est mentionnée sur le monolithe de Nimroud, parmi les contrées qui payaient le tribut à Assurbanipal. Au vm* siècle, nous la retrouvons dans les listes analogues de Salmanasar II, de Ramman-nirar III, de Théglathphalasar III. Vers l’année 724, Salmanasar IV ayant envahi la Syrie et la Phénicie, Tyr osa seule lui résister. Il en fit le blocus pendant plusieurs années, sans pouvoir s’en emparer. Sargon, son successeur, ne fut pas plus heureux. Une transaction mit fin à cet état de choses : le roi tyrien Élouli s’engagea à payer un tribut annuel, et les Assyriens levèrent le siège. Lorsque Scnnachérib eut succédé à Sargon, Élouli crut le moment favorable pour supprimer sa redevance ; mais l’armée assyrienne accourut et réussit [Image à insérer] 534. - Ville de Tyr actuelle. cette fois à prendre Tyr. Cette défaite porta un grand coup à la puissance tyrienne, qui avait déjà beaucoup décru ; néanmoins, la ville conserva sa flotte et son commerce durant toute cette période de la domination assyrienne. Âsarhaddon, fils de Sennachérib, cite à son tour la ville de Tyr parmi ses vassaux et tributaires. En 667, elle eut encore quelque velléité de révolte ; mais les Assyriens s’en emparèrent de nouveau. 4° Tyr sous les Chaldéens et les Perses. — Au vle siècle avant notre ère, Tyr, alors gouvernée par Ethbaal ou Ithobaal 111, était encore assez puissante pour tenir tête au conquérant Nabuchodonosor II, qui vint l’assiéger aussi. Le siège dura treize ans, et les habitants résistèrent avec vaillance. Mais l’heure était venue où devaient s’accomplir les oracles d’Isaïe, de Jérémie et d’Ézéchiel : en 574, la ville fut prise d’assaut. Voir Ménandre, dans Josèphe, Contr. Ap., i, 21. C’est probablement d’alors que date la disparition de la Tyr continentale. Une période d’anarchie succéda à ce grand malheur. Ibid. En 536, Tyr passa sous la domination des rois de Perse, cf. I Esd., iii, 7, dont le joug fut moins lourd que celui de Babylone. Cyrus rendit la liberté à ceux des Tyriens qui avaient été emmenés en captivité par Nabuchodonosor.

5° Tyr sous la domination grecque et sous les Romains. — Après la bataille d’Issus (333 avant J.-C), Alexandre le Grand reçut la soumission de la plupart des villes phéniciennes ; mais Tyr, vaillante jusqu’à l’audace, lui ferma ses portes. Elle s’était rangée du côté de Darius Codoman, et elle voulut lui rester fidèle même après sa défaite. Arrien, Anab., II, v, 10 ; xvii, 5. Vivement irrité, le jeune conquérant en fit le siège. Ne voulant pas perdre son temps à un long blocus, il fit construire par ses soldats, avec les débris de Palætyr, une chaussée gigantesque qui réunit au continent l’Ile sur laquelle Tyr était bâtie. De la sorte, il put s’approcher jusqu’au pied des remparts et donner victorieusement l’assaut (332). Il fut d’ailleurs aidé par sa propre flotte, qui immobilisa celle des Tyriens. Sa vengeance fut terrible. Il détruisit la ville en partie ; 8000 habitants furent massacrés, 30000 vendus comme esclaves. Cf. Arrien, Anab., II, xxi, 2 ; Diodore de Sicile, xvii, 40 ; Quinte-Curce, IV, iv, 10-18. Après la mort d’Alexandre, en 323, Tyr à demi ruinée partagea le sort très accidenté de la Syrie. Elle appartint aux Ptolémées jusqu’en 198 et passa ensuite aux Séleucides. Les livres des Machabées la mentionnent trois fois durant cette période. I Mach., xi, 59, et II Mach., iv, 18, 44. Grâce à ses relations commerciales d’autrefois, elle parvint à reprendre une certaine vie. Strabon, XVI, il, 23. L’an 126, elle acheta son autonomie, qui fut confirmée par Pompée, lorsque Tyr passa, avec toute la Syrie, au pouvoir des Romains (64 avant J.-C). Cf. Josèphe, Ant. jud., XV, iv, 1. Mais Auguste restreignit ses libertés (20 avant J.-C.). Voir Dion Cassius, liv, 7. 6° Tyr durant lapériode chrétienne. — Les habitants de Tyr sont cités, Marc, iii, 8 ; Luc, vi, 17, parmi les foules qui accouraient en Galilée pour voir et entendre Notre-Seigneur. Jésus paraît être allé lui-même jusque sur son territoire. Matth., xv, 21 ; Marc, vii, 24. Il l’a nommée avec Sidon, dans un de ses discours, comme une ville très coupable, mais qui aurait pu se convertir v à sa voix. Cf. Matth., xi, 21 ; Luc, x, 13-14. — Au livre des Actes, xii, 20, il est dit que les Tyriens vinrent trouver à Césarée, avec des paroles de regret, le roi Hérode Agrippa I », dont ils avaient excité la colère. Un passage du même livre, xxi, 3-6, nous apprend que, lorsque saint Paul vint à Tyr par mer, au cours de son voyage à Jérusalem qui s’acheva par un long emprisonnement (59 après J.-C), il y trouva une chrétienté déjà considérable. — L’antique cité conserva longtemps une certaine prospérité commerciale et industrielle. Pline l’Ancien, H. N., ix, 60 ; xxi, 22 ; xxxv,

26, signale, dans la seconde moitié du i « siècle de notreère, sa pourpre, ses tissus et sa métallurgie. Au ive siècle, . saint Jérôme écrit, In Ezech., xxvi, 7, et xxvii, 2, t. xxv, col. 242, 247, que Tyr était encore la plus belle et laplus florissante des villes phéniciennes. Les Sarrasinss’en emparèrent, l’an 638 de notre ère, sous le khalifat d’Omar. De 1124 à 1291, elle fut au pouvoir des croisés, , qui en firent une place forte de premier ordre. Elleredevint ensuite la propriété des mahométans, qui rasèrent ses murs. Elle ne recommença à avoir une histoire qu’en l’année 1766, grâce aux Arabes métoualis, qui vinrent s’y établir. La nouvelle ville, détruite enpartie par le tremblement de terre de 1837, fut relevéepar Ibrahim-Pacha. Voir Phénicie, col. 241-247. IV. État actuel. — La prédiction des prophètes 535. — Tyr et ses environs.

D’apiès Gaillardot, dans E. Renan, Mission de Phénicie.

d’Israël s’est accomplie d’une manière saisissante sur-Tyr, qui est à peine aujourd’hui l’ombre d’elle-même. « Les deux tiers au moins de l’emplacement qu’occupait (la cité) sont maintenant envahis par la solitude, , par des cimetières, par des jardins et par des décombresinformes.

  • V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 194. La ville

actuelle, réduite à moins de 6000 habitants (métoualisen majorité, grecs orthodoxes, chrétiens maronites, , juifs, etc.), s’élève « sur une presqu’île autrefois entièrement détachée du continent, auquel se rattachemaintenant un isthme sablonneux ; l’Ile primitive, basseet rocailleuse, était parallèle à la côte et mesurait environ 1609 mètres de long. Les deux extrémités forment les bras de la croix de chaque côté de l’isthme .(voir le plan, fig. 535), et, se prolongeant encore parune ligne d’écueils, interceptent deux baies au sud et au nord. La ville est construite de ce côté, au point de jonction de l’Ile et de l’isthme. » Chauvet etlsambert, . Syrie, Palestine, Paris, 1887, p. 563-564. La chausséeélevée par Alexandre existe donc toujours ; par l’effet des vents et des vagues qui, des deux côtés, ont apporté des masses de sable, elle s’est même considérablement élargie et consolidée. Dans sa partie la plus étroite, elle mesure au delà de 600 mètres de largeur ; sa longueur, y compris l’Ile, est d’environ 1 kil. et demi. Le port du sud est complètement ensablé ; celui du nord l’est en partie notable. — Les ruines de la Tyr insulaire, plusieurs fois explorées scientifiquement (en particulier, au xix « siècle, par MM. de Bertou, E. Renan, J. N. Sepp et V. Guérin), n’ont rien de bien remarquable. Elles consistent dans les remparts, aux trois quarts détruits, qu’avaient bâtis les croisés, dans les restes d’une cathédrale construite au iv » siècle sur les débris d’une basilique encore plus ancienne (Origène et Frédéric Barberousse y ont été ensevelis), en de nombreux fûts de colonnes enfoncés sous terre, encastrés dans les murs ou visibles dans les flots, lorsque la mer est calme, "V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 182-184, 187, en plusieurs piliers ou blocs gigantesques. La plupart de ces colonnes et

[Image à insérer] 536. — Le tombeau d’Hiram.

piliers avaient été apportés d’Egypte et avaient servi à orner les temples des dieux tyriens ou les autres édifices publics. — De Palætyr, la cité continentale, il reste moins de souvenirs encore : pas un seul édifice, mais, dans la plaine déserte et sans culture, seulement quelques tombeaux (grottes sépulcrales taillées dans le roc, hypogées funéraires, sarcophages), des cuves à pressoir, des pans de mur, etc. Le monument qui porte le nom de « tombeau d’Hiram » (fig. 536) remonte à une haute antiquité, bien que la tradition qui le rattache au roi Hirajn présente fort peu de garantie. — Quant au commerce qui remuait tout l’ancien monde, il est réduit à un peu de coton, de tabac, d’épongés et à quelques meules de moulin. La flotte tyrienne se compose de quelques barques de pêcheurs et de caboteurs, qui ne se risquent qu’à de courtes distances.

V. Bibliographie. — Robinson, Palâstina und die angrenzenden Lânder, in-8°, Halle, 1842, t. iii, p. 659684 ; comte de Bertou, Essai sur la topographie de Tî/r, in-8°, Paris, 1843 ; F. C.Movers, DiePhônizier, in —8°, Bonn, 1841-1856, t. ii, 1° part., p. 188-201 ; Poulain de Bassay, Tyr et Palxtyr, in-8°, Paris, 1863 ; E. Renan, Mission de Phénicie, in-fol., Paris, 1864, p. 527-694 ; Thomson, The Land and the Book, nouv. édit., in-12, Londres, 1876, p. 178-194 ; H. Prutz, Aus Phônizien, JGeogr. Skizzen und litterar. Studien, in-8°, Leipzig,

1876, p. 202-225 ; J. N. Sepp, Meerfahrt nach Tyrus zur Ausgrabung der Kathedral, in-8°, Leipzig, 1879, et Dos Résultat derdeutschen Ausgraburtgen in Tyrus, dans Historische Zeitschrift, t. vm (1880), p. 86-115 ; V. Guérin, Description de la Palestine, La Galilée, in-8°, Paris, 1880, t. ii, p. 180-231 ; G. Ebers et H. Gutbe, Palâstina in Bild und Wort, in-fol., Stuttgart, 1884, t. ii, p. 67-80 ; D. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, infol. , Paris, 1884, p. 117-144 ; Fr. Lenormant etBabelon, Histoire ancienne de l’Orient, jusqu’aux guerres médiques, in-4°, Paris, 1888, t. vi, p. 471-534 ; A. Jeremias, Tyrus bis zur Zeit Nebukadnezar’s, in-8°, Leipzig, 1891 ; Lukas, Geschichte der Stadt Tyrus zur Zeit der Kreuzzûge, in-8°, Marbourg, 1895 ; H. Winckler, Altorientalische Forschungen, in-8°, Leipzig, 1898, t. ii, p. 65-70 ; E. SchraderWinckler, Die Keilinschriften und dasvlte Testament, in-8°, Berlin, 1903, p. 126-132 ; P. Cheminant, Les prophéties d’Ézéchiel contre Tyr (xxvi-xxviii, 19), in-8°, Paris, 1912.

L. Fillion.

    1. TYRAN##

TYRAN (Vulgate : tyrannus). La Vulgate a traduit par ce mot divers noms de dignité. — 1° Dans Esther, vi, 9 ; Dan., i, 3 (cf., iii, 2, 3), les tyranni sont les grands ou les premiers personnages de la cour de Perse que l’hébreu appelle partemim. — 2° Dans Job, xxxiv, 19, la Vulgate porte : (Deus) non cognovit tyrannum, cum disceptaret contra pauperem. On lit dans l’original : « Dieu ne distingue pas le riche du pauvre. » — 3° Dans Job, xxxv, 9, tyranni traduit le mot ràbbînx, (t puissants ?, et 4° Dans Habacuc, i, 10, le motrôznîm, « princes ». Cf. Jud., v, 3 ; Ps. ii, 2 ; Prov., viii, 13, 15 ; xxxi, 4 ; Is., XL, 23. — 5° Le texte de l’Ecclésiastique, xi, 5, multi tyranni sederunt in throno, rend inexactement, d’après’les Septante, l’hébreu qui porte : « Beaucoup qui étaient humiliés [a>toi : ] ont occupé le trône. » — 6° Dans Sap., xit, 14 ; xiv, 16 ; I Mach., i, 5 ; II Mach., IV, 40 ; v, 8, TÙpocvvo ; = tyrannus, est pris dans le sens de chef ; II Mach., iv, 25 : vii, 27, dans le sens de cruel.

    1. TYRANNUS##

TYRANNUS (grec : T-jpawo ; ), rhéteur d’Éphèse, dans l’école duquel logea saint Paul. Act., xix, 9. L’Apôtre y prêcha l’Evangile pendant son séjour de deux ans, après qu’il eut quitté la synagogue. Les salles où enseignaient à cette époque les philosophes portaient le nom de tr^oXai. Tyrannus était sans doute un rhéteur ou philosophe grec qui avait de nombreux auditeurs et il pouvait mettre ainsi à la disposition de Paul un local assez vaste pour y prêcher l’Evangile aux païens qui voudraient l’entendre. Tyrannus n’était pas sans doute chrétien lui-même quand il accueillit saint Paul dans son école, puisque saint Luc ne lui en donne pas le titre et l’appelle simplement « un certain Tyrannus », mais il le. devint probablement dans la suite. — Suidas, Lexicon, édit. Bernhardy, Halle, 1853, t. ii, col. 1247, mentionne un sophiste appelé Tûpawoç, mais on ne sait si c’est celui dont parlent les Actes.

TYROPŒON (VALLÉE DE), à Jérusalem. Voir Jérusalem, t. iii, fig. 237, col. 1325-1326 ; fig. 247, col. 1351-1352 ; fig. 249, col. 1355-1356. u

U. Voir Vav, col. 2369.

UBIL (hébreu : Vïin ; Septante : ’A61a ;  ; Alexandrinus : O-jëi’aç), intendant des chameaux du roi David.

I Par., xxvii, 30. Il était d’origine ismaélite. Son nom signifie le chef des chameaux, d’après Gesenius, Thésaurus, p. 15. Les Ismaélites, vivant en Arabie, devaient être plus entendus que les Juifs pour l’élève des chameaux.

UCAL (hébreu : ’Ukâl), fils ou élève d’Agur, d’après unejnterprétation assez commune parmi les modernes. Prov., xxx, 1. Voir, sur le sens de ce passage obscur, Agir, t. i, col. 288, Ithiel et Jakéh, t. iii, col. 1039, 1111.

    1. UGOLINO Blasio##

UGOLINO Blasio, savant juif converti de Venise, né en 1748, est l’éditeur de la célèbre collection intitulée Thésaurus antiquitatum sacrarum complectens selcclissima clarissimorum virorum opuscula, in quibus veterum Hebrseorum mores, leges, instiluta, ritus sacri et civiles illustrantur, 34 in-f°, Venise, 1744-1769.

II contient les écrits des savants les plus célèbres du XVIIe et du xviiie siècle sur les antiquités bibliques, avec une traduction de plusieurs traités du Talmud et des Midraschim. Il y a là réunis de nombreux opuscules qu’il est aujourd’hui difficile de trouver ailleurs, de Buxtorf, Hottinger, Bonfrère, Selden, Lowth, Reland, Huet, Bochart, Carpzov, etc. Le t. xxxiv renferme quatre index du contenu de l’œuvre entière : Index auctorum, locorum S. Scriptures, dictionum hebraicarum, et Rerum et Verborum.

ULAI (hébreu : ’Ûlâï ; Septante : OùW), fleuve de la Susiane, mentionné dans Daniel, viii, 2, 16. Les auteurs classiques l’appellent Eulœus et Pasitigris ; il porte aujourd’hui le nom de Karoun. Pline, U. N., vi, 27, dit qu’il entourait la ville de Suse. Daniel, viii, 2, 16, décrit une vision (celle du bélier et du bouc), qu’il eut à la porte de Suse, appelée d’Ulaï. Les rivières de la Susiane ont tellement modifié leur cours dans la suite des siècles qu’il est difficile d’en faire une description certaine. Voici ce qu’on en sait aujourd’hui : Le Karoun ou Eouran est formé des torrents de la Susiane du nord et du Louristan méridional. Il était autrefois navigable jusqu’à la mer, mais il « ne roule plus qu’une faible partie de ses eaux directement au golfe [Persique] ; un canal artificiel l’a détourné vers le Chat-el-Arab, et maintenant il n’est plus guère qu’un affluent du grand fleuve… [Près de Suse, ] la rivière Dizfoul, affluent du Karoun, se rapproche de la Karkha ; les deux cours d’eau, développant leurs méandres à la rencontre l’un de l’autre, ne sont plus qu’à une distance de quinze kilomètres, et la plaine qui les sépare est assez unie pour qu’on y ait creusé de nombreux canaux d’irrigation dérivés des deux rivières ; — en outre, un canal naturel d’écoulement, le Chapour ou Chahwer, assez large et assez profond pour recevoir les embar cations dé commerce, s’est formé en amont de Suse, et descend au sud-est vers la rivière Karoun : la plaine de Suse est donc une petite Mésopotamie et le sol en est aussi fécond que celui des bords de l’Euphrate ; c’est à peine si au printemps les chevaux peuvent traverser l’herbe épaisse qui recouvre les campagnes arrosées par le Chapour. » Elisée Reclus, Nouvelle géographie universelle, Paris, 1884, t. ix p. 177, 292. Voir la carte de Babylonie, fig. 410, t. i, col. 1361-1362. Sur le Karoun, voir J. Dieulafoy, La Perse, la Chaldée et la Susiane, in-f », Paris, 1887, p. 525, 536-539, 718.

ULAM (hébreu’Ûldm ; Septante : O0), â(j.), nom de deux Israélites.

1. ULAM, fils deSarès. descendant de Galaad, le petit-fils de Manassé. Il eut pour fils Badan. I Par., vii, 16-17. Voir Badan 2, 1. i, col. 1381.

2. ULAM (Septante : Aî>dcn ; Alexandrinus : OùXâ[i), fils aîné d’Ésec de la tribu de Benjamin et de la descendance de Saùl. Ses fils furent de vaillants archers et eurent cent cinquante fils et petits-fils. I Par., viii, 39-40.

    1. ULCÈRE##

ULCÈRE (hébreu : màzôr, sehîn ; Septante : êXkoç ; . Vulgate : ulcus), lésion spontanée et purulente d’une des parties molles du corps, spécialement de la peau ou des membranes muqueuses. Cette lésion provient essentiellement d’une cause interne ou d’un vice local. Les versions ne rendent pas le mot mâzôr, Jer., xxx, 13, ou le traduisent par o8uv^, « douleur », vinculum, « lien ». Ose., v, 13. — 1° À la sixième plaie d’Egypte, Moïse prend de la cendre et la jette en l’air pour qu’elle produise des ulcères sur les hommes et sur les animaux. Les magiciens ne peuvent imiter ce fléau et en sont eux-mêmes atteints. Exod., ix, 9-ll. Ces ulcères bourgeonnaient en pustules. Voir Pustules, col. 881. Moïse désigne sans doute un mal de même nature, quand il menace Israël infidèle de « l’ulcère d’Egypte », celui qui était endémique sur les bords du Nil et qui s’était généralisé à la sixième plaie. Deut., xxviii, 27. Il parle ensuite d’un ulcère malin et inguérissable, qui frappera les rebelles aux genoux et aux cuisses. Deut., xxviii, 35. Il s’agit ici probablement de l’éléphantiasis, dont Job fut également affligé. Job, II, 7. Voir Éléphantiasis, t. ii, col. 1662 ; Ebstein, Die Medizin im A. T., Stuttgart, 1901, p. 93. — 2° Les ulcères purulents accompagnent aussi la lèpre, à un certain degré de son développement. Lev., xiii, 18-20. Voir Lèpre, t. iv, col. 176. — 3° La maladie d’Ézéchias était causée par un ulcère. IV Reg., xx, 7 ; Is., xxxviii, 21. Elle réduisait le patient à une extrême faiblesse : « Comme un lion, il brisait tous mes os, » Is., xxxviii, 13, et elle allait causer sa mort. IV Reg., xx, 1. Le siège en était cependant localisé, puisque Isaïe guérit le malade par l’application d’un cataplasme de figues sur l’ulcère. IV Reg., xx, 7 ; Is., xxxviii, 21. II n’y a

pas de relations à établir entre cette maladie du roi et la peste pernicieuse qui fit périr 185000 Assyriens aux environs de Jérusalem. IV Reg., xix, 35. Car> bien que les deux récits se suivent dans la Bible actuelle, il est très probable que la maladie d’Ézéchias précéda l’invasion assyrienne. Voir Ézéchias, t. ii, col. 2145. Les renseignements fournis par le texte sacré ne permettent pas de déterminer exactement la nature de la maladie. L’application du cataplasme de figues ne paraît pas non plus très significative à cet égard, car il ressort du texte que la guérison fut surtout miraculeuse. Voir Figue, t. ii, col. 2241 ; Ebstein, Die Medizin, p. 100. — 4° Le pauvre Lazare gisait T|).xu>[j.évoî, ulceribus plenus, c< couvert d’ulcères », à la porte du mauvais riche. Ses ulcères suppuraient et il n’avait pas la force d’écarter les chiens qui venaient impunément les lécher. Luc, xvi, 20, 21. La misère et le manque de soins avaient déterminé en lui cette décomposition douloureuse. — 5° Jérémie, xxx, 13, compare le péché d’Israël à un ulcère que personne ne soigne. Osée, v, 13, appelle du même nom l’infidélité de Juda.

H. Lesêtre.
    1. ULFILAS##

ULFILAS, évéque goth et auteur de la version gothique de la Bible.

I. Vie et œuvres. — l°Wulphila (Wôlflin, le « petit loup » ) était le fils d’un Goth et d’une femme de l’Asie Mineure, qui probablement avait été faite prisonnière à la guerre et était esclave. Il était chrétien. Comme il parlait grec, il fut choisi pour remplir la fonction de lecteur. À l’âge de trente ans, il accompagna une ambassade des Goths à la cour de l’empereur. Il fut sacré évêque par Eusèbe de Nicomédie, probablement à Antioche, lors du synode réuni en cette ville en 341. Il adopta les erreurs ariennes et appartint au parti homéen, dont les doctrines prévalurent au concile de Constantinople en 360. Sa profession de foi, publiée au mois de juin 383 peu avant sa mort, énonce les mêmes doctrines. Il était retourné parmi les Goths, mais la persécution d’Athanarich l’obligea à repasser sur le sol de l’empire avec un grand nombre de ses fidèles. Selon Auxentius, il aurait, après son sacre, vécu sept années au pays barbare et trente-trois années en terre grecque. Il mourut en 383, âgé de 70 ans environ.

2° Son disciple Auxentius nous apprend qu’il a prêché en grec, en latin et en goth et qu’il a publié en ces trois langues plures tractatus et multas interpretationes. De ces homélies et explications de l’Ecriture, il ne nous est rien parvenu. On lui a attribué cependant plusieurs écrits : 1. Krafft lui a rapporté les fragments d’un commentaire arien sur l’Évangile de saint Luc, publiés par le cardinal Mai, Scriptorum velerum collectio, t. iii, 2, p. 191-207, dont un morceau se trouvait aussi dans le fragment de Bobbio, ibid., p. 208-239. Cf. Mercati, Antique reliquie liturgiche Ambrosiano-Romane, con un excursus sui fragmenti dogmatici ariani del Mai, dans Studie Testï, Rome, 1902, t. vii, p. 47. Mais ces fragments de commentaire n’ont rien à voir avec Ulfilas. Cf. Zeitschrift fur wissenschaft liche Théologie, t. xlvi, p. 244-245. — 2. Au 44e congrès des philologues allemands, tenu à Dresde en septembre 1897, Friedberg a prétendu qu’Ulphilas était l’auteur de VOpus imper fectum in Matthxum, longtemps attribué faussement à saint Jean Chrysostome. On a montré que l’auteur de cet écrit, qui est, du reste, de la fin du ive siècle, sinon du v « siècle, n’était pas un Goth. Cf. Allgemeine Zeitung de Munich, 1897, n » 44 ; Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1898, t. xxx, p. 361-362, 431. F. KaufTmann a soutenu que ce commentaire reproduisait au moins des parties d’un écrit goth. Zur deutschen Alterlumskunde aus Anlass des sogenannten Opus imperfectum, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1899, t. xxxi, p. 451 ; 1900, t. xxxii, p. 464-472 ; Zur Frage nach den Queilen des Opus im perfectum, ibid., 1902, t. xxxv, p. 4 ; 1903, t. xxxv, p. 483-491 ; Th. Paas, Das Opus imperfectum in Matthseum, Krefeld, 1907. — 3. Une explication de l’Évangile de saint Jean en goth : Skeireins Aiivaggeljont pairte Jôhannân, dont les fragments retrouvés ont été publiés par Massmann, à Munich, en 1834, et par W. Braun, DieMailânden Blàtter der Skeireins, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1898, t. xxxi, p. 426-451, a été attribuée à Ulfilas par l’éditeur, par Krafft, Kirchengeschichte, t. i, p. 348, et par Dietrich, qui l’a rééditée : Die Bruchstùcke der Skeireins, dans Texte und Untersuchungen zur altgermanischen Religionsgeschichte. Texte, Strasbourg, 1902, t. il. Mais le Skeireins diffère de la Bible gothique notamment par l’emploi des participes absolus ; il n’est donc pas d’Ullilas, quoiqu’il soit important pour l’étude de la version gothique du quatrième Évangile. Cf. Stolzenberg dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1905, t. xxxvii, p. 388 ; K. Marold, Die Schriftcitate der Skeireins und ihre Bedeutung fur die Textgeschichte der gotischen Bibel, Kœnigsberg, 1893. Cl. Auxentius, Epistola de fide, vita et obitu Ulfilse, édit. par G. Waitz, Ueber das Leben und die Lehre des Ulfila, Hanovre, 1840, et par F. Kauffmann, Aus der Schule des Wulfila, dans Texte und Untersuchungen zur altgermanischen Religionsgeschichte. Texte, Strasbourg, 1899, t. l ; Philostorge, H. E., 1. II, n. 5, t. lxv, col. 468-469 ; Socrate., H. E., 1. II, c. xli ; Sozomène, H. E., 1. IV, c. xxiv. ; 1. IV, c. xxxvii, t. lxvii, col. 349, 1189, 1404-1408 ; Cassiodore, Historia triparlita, 1. VIII, c. xiii, t. lxix, col. 1118-1120 ; W. Krafft, Die Anfànge des Christentums bei den germanischen Volkern, Berlin, 1854, t. i, ; W. Bessel, Ueber das Leben des Ulfilas und die Bekehrung der Goten zum Christenthum, Goettingue, 1860 ; E. Bernhardt, Wulfila oder die gotische Bibel, dans Germanistische Handbibliothek de Zacher, Halle, 1875, t. m ; G. Kauffmann, Kritische Untersuchung der Queilen zur Geschichte Ulfilas, dans Zeitschrift fur deutsches Alterthum, t. xxvii, p. 193 ; F. Kauffmann, Der Arianismus des Wulfila, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1898, t. xxx, p. 93-113 ; Stamm, Ulfilas, 11e édit., par Heyne, Paderborn, 1908 ; H. Bohmer, art. Wulfila, dans Realencyclopàdie fur proteslantische Théologie und Kirche, Leipzig, 1908, t. xxi. p. 548-558.

II. Sa. version gothique de la Bible. — L’évêque goth Ulfilas, voulant traduire l’Écriture Sainte en sa langue maternelle, inventa l’alphabet goth, et sa traduction de la Bible fut le premier document écrit en goth. D’après Socrate, il l’aurait faite au pays des Goths, vers 369. Ses motifs étaient d’ordre pratique : le manque de prêtres ou de lecteurs sachant le grec et pouvant traduire le texte grec de l’Écriture et le grand nombre d’églises chez les Goths le déterminèrent à faire une traduction écrite pour le’service liturgique. D’après Philostorge, H. E., . ii, n.5, t.Lxv, col. 469, il n’aurait pas traduit les quatre livres des Rois pour ne pas exciter l’ardeur guerrière des Goths par la lecture des récits de batailles et de victoires. La traduction de ces livres n’existait pas encore vers le milieu du Ve siècle. On ne sait pas au juste si Ulfilas a traduit lui-même tout le reste de lu Bible. De nos jours, les spécialistes sont portés à ne lui attribuer personnellement que la traduction des Évangiles ; les autres livres du Nouveau et de l’Ancien Testament auraient été traduits en goth après lui. D’ailleurs [il est difficile de se prononcer catégoriquement à ce sujet, puisqu’il ne nous reste qu’un petit nombre de fragments delà version gothique de l’Écriture. C’est exclusivement par ces fragments que nous pouvons la juger.

1° Ancien Testament. — Il ne nous est parvenu que de rares fragments : Gen., v, 3-30, d’après un manuscrit de Vienne ; les deux versets 2 et 3 du Ps. lui (lii)

dans le Skeireins avec les citations des Psaumes qu’on trouve dans les Évangiles de saint Luc et de saint Jean et dans l’Épître auxÉphésiens ; enfin quelques noms propres, extraits de Neh., v-vn plutôt que d’Esdras, il. Cf. A. Uppstrôm (pour Néhémie), Upsal, 1868 ; O/Ohrlolï, Die Bruchstûcke nom A. T. der Gotischen Bibelûbersetzung kritisch untersucht, Halle, 1873 ; Die alttestamenttictien Bruchstûcke der gotischen Uebersetzung, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, Halle, 1876, t. vii, p. 251-295 ; E. Laugner, Die gothischen Nehemiafragmente, Sprottau, 1903(programme) ; "J. Mùhlau, Zur Frage nach der gotischen Psalmenûbersetzung, Kiel, 1904 (dissert.). Paul de Lagarde avait supposé que cette version était faite sur la recension de Lucien. Librorum V. T. pars prior, p. xiv. Cf. A. Kiseh, Der Septuaginta-Codex des Ulfdas, dans M onatschrift fur Geschichte undWissenschaft des Juclenthums, Breslau, 1873, t. xxii, p. 42-46, 85-89, 215-219. F. Kauffmann l’a clairement démontré. Zur Quellenkritik der gotischen Bibelûbersetzung, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1897, t. xxix, p. 315-337. Mais il conclut que, dans le fragment de Néhémie, ce texte a été traité capricieusement, que la version n’est pas d’Ulfilas et qu’elle n’a pas été faite au IVe siècle.

2 ? Nouveau Testament. — Nous n’avons que des fragments des quatre Évangiles et des Épîtres de saint Paul. Il ont été successivement découverts, publiés et étudiés.

1> Les textes. — a) Le Codex Àrgenteus d’Upsal. Voir son histoire, sa description et ses éditions, avec un fac-similé, t. i, col. 948-949. Ajoutons seulement qu’en 1665 ce manuscrit se trouvait en Hollande en la possession d’Isaac Vossius et qu’il fut transcrit ligne par ligne par ûerrer. Le manuscrit et sa copie furent achetés en 1662 par le comte Magnus Gabriel de la Gardie, qui les donna à l’université d’Upsal. La copie périt dans un incendieen 1702. Voir encore G. J. Heupel, Dissertatio de Vlphila a versione 1 V evangelislarum gothica, 1683 ; Vlphilas illustratus de Ihre, reproduit avec d’autres écrits du même par Bùsching, Berlin, 1773. S. Haushall a publié saint Matthieu à Londres en 1807, et J. A. Schmeller de même à Stuttgart en 1827. Sur l’édition d’Uppstrôm, voir Gabelentz et Lobe, Vppstrôm’s Codex Argenteus. Eine Nachschrift zu der Ausgabe des Ulfilas, Leipzig, 1860. Guillaume Uppstrôm a réédité à Stockholm en 1861 les fragments de saint Matthieu de l’édition de son père, André Uppstrôm. N. Skeat a donné à Londres, en 1882, les fragments de saint Marc. Voir enfin I. Peter, Die Zahl Blâlter des Codex Argenteus, dans Germania, Vienne, 1885, nouv. série, t. xviii, p.’314-315 ; E. Meyer, dans Zentralblatt fïir Bibliothekwesen, décembre 1911.

6) Le Codex Carolinus de Wolfenbûttel. — Sous quelques feuilles d’un manuscrit, écrit en Espagne au ix* siècle et reproduisant les Origines de saint Isidore de Séville, F. A. Knittel, bibliothécaire de Wolfenbûttel, découvrit quelques fragments de l’Épître aux Romains, xi, 33-36 ; xii, 1-5, 17-21 ; xiii, 1-5 ; xiv, 9-20 ; xv, 3-13, à côté du texte latin correspondant. Il les publia à Brunswick, en 1762. J. Ihre les réédita à Upsal l’année suivante, et cette réédition est reproduite par Bùsching, Berlin, 1773, p. 97. Zahn les réédita encore avec le Codex Argenteus, en 1805. Ce manuscrit goticolatinus est du ve siècle.

c) Nouveaux fragments des Évangiles et desEpîtres.

— Angelo Mai en 1817 découvrit à l’Ambrosienne de Milan sous un palimpseste du VIIIe siècle, provenantde Bobbio et reproduisant les Homélies de saint Grégoire le Grand sur Ézéchiel, G, 22, des fragments de toutes les Épitres de saint Paul sauf les deux Épitres aux Thessaloniciens et la lettre aux Hébreux. Sous un autre palimpseste du IXe siècle, contenant en seconde écriture

le commentaire de saint Jérôme sur Isaïe, il remarqua des extraits des mêmes Épitres hormis celles aux Bomains et aux Hébreux. Un manuscrit latin des Évangiles contenait une feuille d’un codex plus ancien, reproduisant en latin et en goth deux passages de saint Matthieu, xxv, 38-xxvi, 3 ; xxvi, 64-xxvii, qui comblaient partiellement les lacunes du Codex Argenteus. Mai fut aidé dans son travail de déchiffrement par le comte Charles-Octave Castiglione, et ils publièrent ensemble une notice sur leur découverte, avec la description des manuscrits et un spécimen du texte, Milan, 1819. Mai, devenu bibliothécaire du Vatican, laissa au comte Castiglione le soin de la publication. Celui-ci s’en acquitta par morceaux : en 1829, il donna II Cor. ; en 1834, Rom., I Cor., Eph. ; en 1835, Gal., Phil., Col., I Thés., eten 1839, II Thés., I et II Tim., Tit., Philem., le tout à Milan, avec une traduction, des notes et un glossaire. J. F. Massmann trouva dans un manuscrit du Vatican le Skeireins, dont nous avons déjà parlé, et le publia à Munich en 1834. Ce commentaire de saint Jean fournit, en dehors du texte du quatrième Évangile, des citations des trois autres Évangiles et de l’Épître aux Hébreux. H. C. de Gabelentz et J. Lobe recueillirent tous les fragments connus tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, collationnèrent soigneusement les manuscrits et, aidés par le comte Castiglione, ils donnèrent un texte plus soigné avec une traduction latine, un glossaire et une grammaire goths, rédigés en allemand, Altenbourg et Leipzig, 1836, 1. 1 ; Leipzig, 1843, t. n. Cet ouvrage a été reproduit par Migne, Patr. lat., t. xviii, col. 455-1558 ; mais la grammaire et le glossaire ont été traduits de l’allemand en latin par Tempestini. Ces textes ont été reproduits et étudiés, comme étant les plus anciens documents de la langue allemande, par J.Gaugengigl, Vlfilas, Urschrift, Sprachlehre, Wôrterbuch, Passau, 1848, et sous un titre nouveau : Aeltesle Denkmàler der deutschen Sprache erhalten in Ulfilas gotischen Vebersetzung, 3e édit., 1853 ; 4e édit., 1856 ; par lî. F. Massmann, Vlfilas, Stuttgart, 1855, 1857 ; par F. L. Stamm, Ulfila oder die uns erhaltenen Denkmàler der deutschen Sprache (texte, grammaire et dictionnaire), Paderborn, 1858 ; depuis la 5e édit., en 1872, cet ouvrage a été revu par M. Heyne ; 11e édit., 1908 ; A. Uppstrôm, Fragmenta gothica selecta, Upsal, 1861 ; Codices gotici Ambrosiani, etc., Upsal, 1868. Reilferscheid découvrit à Turin quatre feuilles ayant appartenu au manuscrit de Milan, et Massmann les édita, Turiner Blàtler der gotischen Bibelûbersetzung, dans Germania, Vienne, 1868, t. xiii, p. 271-284. Les fragments nouveaux étaient des Épîtres aux Galates et aux Colossiens. E. Bernhardt, qui avait publié : Krilische Vntersuchungen ûber die gothische Bibelûbersetzung, Meiningen, 1864, 1869, donna deux éditions de la version gothique de l’Écriture : Vulfllaoder die gotische Bibel, mit derti entsprechenden Text, Halle, 1875 ; Die gotische Bibel des Vulfda (texte, variantes et glossaire), Halle, 1884. G. H. Balg a édité cette Bible avec introduction, syntaxe et glossaire : The flrst Teulonic (Germanie) Bible, Milwaukee, 1891 ; P. Odefey, Das gotische Lukas-Evangelium, Flensburg, 1908 ; W. Streitberg, Die gotische Bibel, dans Germanische Bibliothek, part. II, t. iii, 1, Heidelberg, 1908 ; t. iii, 2 (dictionnaire goth, grec, allemand), 1910. Cf. K. Marold, Stichometrie und Leseabschnitte in den golhischen Episteltexten, Kœnigsberg, 1890 ; J. M. N. Kapteijn, Die Uebersetzungstechnik der gotischen Bibel in den Paulinischen Briefen, dans Indogerm. Forschungen, 1911, t. xxiXi fasc. 3 et 4.

d) Un nouveau fragment bilingue, gothique-latin, comme le Codex Argenteus, a été acheté au cours des années 1907-1908 auprès d’Antinoé dans la Haute-Egypte et apporté à Berlin en 1908. Il appartient maintenant à

la bibliothèque de l’université de Giessen, n. 651/20. Deux pages de parchemin reproduisent incomplètement le texte latin de Luc, xxiii, 2-6 ; xxiv, 5-9, et le teste gothique de Luc, xxiii, 11-14 ; xxiv, 13-17. Le fragment latin a été étudié par P. Glaue et le fragment goth par K. Helm, Das gotisch-lateinische Bibelfragment der Universitâls-bibliothek zu Giessen, Giessen, 1910. M. Glaue a montré que le texte latin se rapprochait de très près de celui du Codex Brixianus de l’ancienne Italique et il pense que le fragment bilingue a été apporté en Egypte par un soldat, un clerc ou un moine goth. Des indices paléographiques permettent de le dater du commencement du v B siècle, et le texte est écrit per cola et commata. La reconstitution du texte gothique a été d’autant plus difficile à M. Helm que le texte est incomplet et qu’il n’a pas son pendant dans les fragments connus jusqu’à présent. F. Ruhl a étudié l’origine de ce fragment bilingue, et il conclut que vraisemblablement il a été rédigé en pays vandale et apporté en Egypte par les soldats. Zur Herkunft der iateinisch-gotischen Bibelfragmente, dans Zeilschrift fàr neutestamentliche Wissenschaft, 1911, t. xir, p. 8586. Cf. Journal of theological Sludies, 1910, t. xi, p. 711-613. W. Streiberg s’en est occupé dans l’introduction de la seconde partie de Die gotische Bibel, Heidelberg, 1910. Cette découverte récente est venue confirmer les conclusions qu’on avait précédemment tirées sur les caractères de la version gothique du Nouveau Testament.

2. Caractères de cette version. — Ils se rapportent à deux points : a) dépendance directe du texte grec antiochien ou syrien ; b) ressemblances avec la version latine dite l’Itala. — a) Dépendance directe du texte grec d’Anlioche. — E. Bernhardt avait cru que la version gothique du Nouveau Testament se rapprochait de très près du Codex Alexandrinus B et il en avait conclu qu’Ulfilas avait traduit le texte grec sur un manuscrit parent de B. La comparaison exacte de la traduction gothique avec ce manuscrit n’autorise pas cette conclusion. En réalité, cette version a été faite sur un texte grec semblable à celui que présentent les manuscrits antiochiens du texte dit syrien, spécialement à celui que cite et commente saint Jean Chryspstome dans ses Homélies sur saint Matthieu et saint Jean, avec quelques divergences toutefois. Sur les rapports de saint Jean Chrysostome avec les Goths, voir Batiflol, dans la Revue biblique, 1899, p. 568-569. Tous les critiques antérieurs, depuis Fell, avaient reconnu cette parenté. F. Kauffmann, dans Zeilschrift fur deutsche Philologie, 1897, t. xxix, p. 306-315. Les manuscrits onciaux, auxquels ressemble la version gothique, sont EFGHSUVAIT. F. Kauflmann, ibid., 1898, t. xxx, p. 143-183 ; 1899, t. xxxi, p. 181-190 ; 1903, t. xxxv, p. 433-453, 458-463 ; E. Dietrich, Die Bruchstucke des Skeireins, Strasbourg, 1903. H. von Soden a reconnu aussi à la base de la versiota gothique un texte grec tout à fait analogue à celui des Pères cappadociens et de saint Chrysostomei un texte de la KolvVJ, dans lequel des leçons de /avaient pénétré ça et là. Aussi comme cette traduction a peu de leçons particulières au sens propre du mot, elle peut servir à la reconstitution du texte de la Koivt|. Die Schriften des N. T., Berlin, 1907, 333, p. 1469-1470. Le traducteur, en effet, a suivi de très près le texte grec, sur lequel il travaillait, et dans la plupart des cas, il le traduit mot à mot ; le plus grand nombre des différences provient du génie propre de la langue gothique, desrègleB de sa syntaxe ; elles sont purement grammaticales. H. Stolzenberg, Die Uebersetzungstechnik des Wulfila unlersucht auf Grund der Bibelfragmente des C. A., dans Zeilschrift fur deutsche Philologie, 1905, t. xxxvii, p. 145-193, 352-388. Le traducteur insère dans son œuvre des mots grecs et latins. C. Elis, Ueber die Fremdworte und fremden

Eigennamen in der gotischen Bibelùbersetzung in grammatischer und archâologischer Hinsichl (dissert.), Gœttingue, 1903 ; K. Gæbeler, Die griechischen Beslandteile in der gotischen Bibel, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1911, t. xliii, p. 1-118.

6) Ressemblances avec l’Itala. — Cependant la version gothique contient quelques leçons dites occidentales, qui se rencontrent notamment dans la version latine nommée l’Itala. Bangert, Der Einfluss lateinischer Quellen auf die gothische Bibelùbersetzung des TJlfila, Rudolstadt, 1880 (progr.), et Marold, Kritische Untersuchungen ùber den Einfluss der lateinischen auf die gotische Bibelùbersetzung (dissert.), Kœnigsberg, 1881, en avaient conclu qu’elle avait été revue au VIe siècle, à l’époque où les Goths occupaient l’Italie, sur la’ulgate latine, qui n’est qu’une revision de Yltala. Mais un examen plus attentif du sujet a montré que la version gothique ressemblait étonnamment au Brixianus et au Monacensis, deux manuscrits de Yltald non revisée. Cf. F. Kauffmann, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1899, t. xxxi, p. 177-180, 190194 ; F. Conybeare, dans The Journal of theological sludies, 1899-1900, t. i, p. 129-134 ; H. C. Hoskier et F. Conybeare, ibid., 1911, t. xii, p. 456-459 ; H. Stolzenberg, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, t. xxxvii, p. 388-392. Bien plus, le Brixianus a les mêmes lettres d’argent et la même écriture violette que le Codex Argenteus d’Upsal ; ils sont tous deux de la même école calligraphique italienne. Or, le Brixianus contient deux feuillets étrangers, que Bianchini avait édités, Evangeliarium quadruplex, et qui sont reproduits par Migne, Pair, lat., t. xii, col. 18-19, et par Bernhardt avec une traduction allemande, Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1870, t. ii, p. 295 sq. Voir aussi J. Drâseke, Der Gothen Sunja und Frithila Prœfalio zum Codex Brixianus, dans Zeitschrift fur wisscnschaftliche Théologie, 1907, t. L, p. 107-117. Ils contiennent un fragment d’une polémique contre saint Jérôme et le mode de traduction, qui tient compte du sens plutôt que des mots, qu’il a suivi dans sa revision de l’Itala. Or, le saint docteur répond aux mêmes reproches que lui avaient faits deux prêtres goths, Sunnia et Fretella, au sujet de sa traduction des Psaumes. Epist. cvi, ad Sunniam et Fretellam, t. xxii, col. 857. Cf. J. Mûhlau, Zur Frage nach der gotischen Psalmenùbersetzung, Kiel, 1904, p. 19-26. Enfin, on remarque dans la version gothique des notes marginales sur les étymologies des mots grecs et latins. Toutes ces considérations ont amené F. Kauffmann, dans Zeilschrift fur deutsche Philologie, 1900, t. xxxii, p. 305-335, à conclure que Sunnia et Fretella sont les auteurs de la préface, intercalée dans le Brixianus, et qu’ils l’ont placée en tête d’une édition critique de la version gothique, faite, vers 410, par eux en vue de la rendre plus littérale. Au vie siècle, cette édition fut mise en rapport étroit avec le Bi-ixianus et la Vulgale de saint Jérôme, en un manuscrit bilingue ou peut-être même trilingue, dont nous avons un reste dans le Carolinus de Wollfenbûttel. Le Brixianus aurait été copié sur un manuscrit goticolatinus, dont le texte gothique est reproduit dans le Codex Argenteus, écrit, comme le Brixianus, dans le nord de l’Italie. La découverte du fragment goticolalinus d’Antinoé vient confirmer ces conclusions, et M. Glaue pense même que ce fragment, antérieur au VIe siècle, est un reste du travail de Sunnia et Fretella. Das gotisch-lateinische Bibelfragment der Universitâtsbibliothek zu Giessen, p. 9-14.

Toutefois, M. von Soden, loc. cit., n’admet pas cette revision de la version gothique et il croit que les manuscrits nous donnant le texte pur d’Ulfilas. Il explique autrement les ressemblances de cette version avec les manuscrits de l’Itala. Selon lui, elles proviennent de ce que l’Itala a subi l’influence de la recension I, dont

la version golhique reproduit certaines leçons. Mais M. Nestlé y trouve avec raison des traces d’une revision postérieure ; et il en signale quelques-unes. Einfuhrung indas GriechischeNeueTestament, 3e édit., Gœttingue, 1909, p. 154-155. Cf. F. G. Kenyon, Randbook to the textual criticism of theNew Testament, Londres, 1901, p. 204 ; K. Lake, The text of New Testament, 4e édit., Londres, 1908, p. 46.

Cf. J. L. Hug, Einleitung in die Schriften desN. T., 4e édit., Stuttgart et Tubingue, 1847, § 130-142, t. i, p. 431-460 ; E. Sievers, Gotische Literatur, dans H. Paul, Grundriss der germanischen Philologie, Strasbourg, 1889, t. ii, p. 65-70 ; E. Eckstein, Ulfilasund die gotische Uebersetzung der Bibel, dans Illustrierte Monatschrift, décembre 1892, p. 403-407 ; Dictionary of the Bible, de Hastings, Edimbourg, 1902, t. IV,

1. UR (hébreu : ’Ûr ; Septante : ©upoçâp), nom probablement altéré du père d’un des vaillants soldats de David, appelé Éliphal. I Par., xi, 35. Dans IIReg., xxiii, 34, Éliphal est appelé ÉliDhéleth, fils d’Aasbal. Voir Éliphéleth 1, 1. 1, col. 1686.

2. UR DES CHALDÉENS (hébreu : ’Ûr Kasdim ; Septante x">P æ T&v XaXSSùiiv), ville de Chaldée. En assyrien’ûr signifie « ville », et c’est pour distinguer cette ville des autres villes en général qu’elle est appelée Ur des Chaldéens. — 1° La Genèse, xi, 28, nous apprend qu’elle était la patrie d’Aran, fils de Tharé et frère d’Abram (Abraham), et c’est de là que partit Tharé avec Abraham, son fils, pour se diriger vers la terre de Chanaan. Gen., xi, 31. — 2° Le second livre d’Esdras, ix, 7, rappelle cette origine du père des’  « sm^^fs®^ t

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537. — Ruines d’Ur (Mugheir). D’aprèsTaylor, Journal ofthe Asiatic Society, 1855, t. xv, entre p. 260 et 261.

p. 861-863 ; CE. Gregory, Textkritik des N. T., Leipzig, 1902, t. ii, p. 730-733 ; 1909, t. iii, p. 1343 ; E. Nestlé, Einfuhrung in das Griechische Neue Testament, 3e édit., Gœttingue, 1909, p. 153-155 ; A. Risch, Die gotische Bibel, dans Studien und Kritiken, t. lxxxiii, 1910, p. 515-619 ; F. Kauffmann, Zw Textgeschichte der gotischen Bibel, dans Zeitschrift fur deutsche Philoloflfie, 1911, t. XLin, p. 118-132 ; Id., Beitrâgezur Quellenkritik der gotischen Bibelùberseltung, ibid., p. 401-428.

E. Mangenot. UNICORNE (hébreu : re’êm ; Septante : jjiovo/.épw ; , àaSpôç), animal sauvage nommé dix fois dans l’Écriture. Num., xxiii, 22 ; xxiv, 8 ; Deut., xxxiii, 17 ; Job, xxxix, 9, 10 ; Ps. xxii, 22 ; xxix, 6 ; xlii, 10 ; xcii, ll ; Is., xxxiv, 7. La Vulgate traduit re’êm par unicornis, Ps. xxi, 22 ; xxviii, 6 ; lxxvh (hébreu : lxxviii), 69 : « les hauteurs » ; rdmîm) ; Ps. xci, 11 ; Is., xxiv, 7. Elle le rend par rhinocéros, Num., xxiii, 22 ; xxiv, 8 ; Deut., xxxiii, 17 ; Job, xxxix, 9, 10. Voir Rhinocéros, col. 1088. Le re’êm ou rêm est en réalité le bœuf sauvage, l’aurochs. Voir Aurochs, t. i, col. 1260 ; Licorne, t. iv, col. 244.

    1. UPSAL##

UPSAL (CODEX D’). Voir Codex Argenteus, 1. 1, col. 948-949, le fac-similé, fig. 252, vis-à-vis col. 948 ; Ulfilas, col. 2351.

Juifs sorti de’Ûr Kaidîm pour aller dans la contrée destinée à devenir le séjour de ses descendants. Dans ce passage, les Septante traduisent yûçx twv Xoc).-Saitov, comme ils l’avaient fait dans la Genèse, xi, 28, mais la Vulgate latine, au lieu de Ur Chaldseorum, nom dont elle s’était servie avec raison dans la Genèse, traduit de igné Chaldseorum, en adoptant une légende juive, fondée sur ce que le mot’ûr en hébreu a, entre autres significations, celle de « feu », ce qui avait fait croire aux rabbins que les compatriotes d’Abraham avaient voulu le faire brûler dans une fournaise. Rien ne prouve que cette légende ait le moindre fondement. — 3° Saint Etienne, dans son discours, Act., vm. 4, dit en parlant d’une manière générale qu’Abraham « sortit de la terre des Chaldéens, et alla habiter à Haran, » indiquant ainsi d’une manière très précise le pays où était situé Ur.

Ur Kasdim porte aujourd’hui le nom de Mughéir. Quand le voyageur descend le cours de l’Euphrate, à peu près à moitié distance entre Babylone et l’embouchure du Chat el-Arab dans le golfe Persique, il remarque à l’ouest, sur une légère élévation, un monceau de ruines (fig. 537). Ce sont les restes d’Ur Kasdim. La plaine à l’entour est si basse que, lorsque les eaux grossissent annuellement, elle devient un véritable

marais, au milieu duquel Mughéir prend l’apparence d’une île où l’on ne peut aborder qu’en bateau. Il n’en était pas ainsi quand y naquit Abraham. Les eaux de l’Euphrate, « la vie de la contrée », comme l’appellent les textes assyriens, Cuneifomi inscriptions of Western Asia, t. ii, pi. 51, 25, n’inondaient point alors impétueusement la campagne, mais, emprisonnées dans des canaux et savamment distribuées, elles la fertilisaient au lieu de la rendre malsaine. La ville d’Ur était florissante, luttant pour la grandeur et la civilisation avec la Babylone contemporaine. Les sciences et les arts y étaient cultivés et on y écrivait sur l’argile des livres dont les copies nous ont été partiellement conservées. On y a.trouvé les restes encore imposants d’un temple à étages (voir fig. 537), construit en l’honneur du dieu Sin (la lune), d’où sans doute le nom de Kamarina (de kamar, en arabe, « la lune » ), qui était donné à Ur. Eupolème, dans Eusèbe, Prsepar. Ev., ix, 17, t. xxi, col. 708. Ce temple avait été construit longtemps avant Abraham. Ses ruines ont plus de vingt mètres de hauteur. Il était à trois étages, de forme rectangulaire, parfaitement orienté et construit en larges briques. Il s’élevait sur une plate-forme dont la longueur était de plus de soixante mètres et la largeur de quarante 538. — Maison chaldéenne d’Ur.

D’après Taylor, Notes on the ruins of Muqeyer,

dans Journal of the Royal Asiatic Society, t. xv, p. 266.

quatre. Abraham a dû voir souvent le monument dont les débris subsistent encore, après avoir reçu plusieurs réparations successives.

Les fouilles nous ont fait aussi connaître ce qu’étaient les habitations des anciens habitants. « On a mis au jour parmi les ruines (d’Ur)… les restes de quelques maisons où logeaient sans doute des gens de bonne famille. Elles sont construites en belles briques, dont une couche mince de bitume cimente les lits, et elles n’aventurent au dehors que des lucarnes percées irrégulièrement vers le haut des parois ; la porte basse, cintrée, défendue de lourds vantaux en bois, forme un corridor aveugle et sombre qui aboutit d’ordinaire à la cour, vers le centre des bâtiments. On distingue encore à l’intérieur de petites salles oblongues, tantôt voûtées, tantôt couvertes d’un plafond plat que des troncs de palmier soutiennent ; les murs atteignent le plus souvent une épaisseur considérable (fig. 538), dans laquelle on pratiquait çà et là des niches étroites. La plupart des pièces n’étaient que des magasins et contenaient les provisions et la richesse de la famille ; d’autres servaient à l’habitation et recevaient un mobilier… fort simple. » G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. i, p. 745-746.

C’est peut-être dans une maison de ce genre que naquit Abraham et que s’écoula son enfance. Cependant un certain nombre de savants pensent que Tharé, son père, menait la vie pastorale et vivait en nomade sous la tente à Ur ou dans son voisinage. Les Septante, ne connaissant pas d’ailleurs peut-être l’existence de la ville d’Ur, le font vivre simplement s dans la terre des Chaldéens. »

Les commentateurs ont été aussi très partagés et le sont même encore sur l’identification d’Ur Kasdim. Il

n’est plus guère possible de soutenir avec quelque vraisemblance, comme on l’a fait autrefois, que Ur Casdim est Orfah ou Édesse en Mésopotamie. Ad. Neubauer, La géographie du Talmud, in-8°, Paris, 1868, p. 379, a émis l’opinion singulière que Cutha est peut-être l’Ur Casdim de la Bible. Les titres de la ville antique, sur les débris de laquelle s’élève aujourd’hui Mughéir, semblent bien les mieux établis pour réclamer la gloire d’avoir donné le jour au patriarche Abraham. — Voir F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. i, p. 417-433.

URAI (hébreu : ’Irî ; Septante : Oùpi), cinquième fils de Bêla, de la tribu de Benjamin. I Par., vii, 7.

    1. URBAIN##

URBAIN (grec : Oùpëdcvoç, nom latin grécisé), chrétien de Rome. Saint Paul le salue dans son Épitre aux Romains, xvi, 9, et l’appelle « notre coopérateur (<yuvepY <Sv) dans le Christ Jésus. » I1 n’est connu que par ce passage dans le Nouveau Testament. Il mourut martyr ; sa fête est marquée au 31 octobre. — Un esclave appelé Urbain est mentionné Corpus inscript, lat., t. vi, n. 4287.

    1. URBINAS##

URBINAS (CODEX). Ce manuscrit grec des Évangiles appartient au fonds d’Urbino de la Bibliothèque Vaticane. Il fut apporté d’Urbino au Vatican par le pape Clément VII. C’est un manuscrit d’écriture cursive, XIIe siècle, de 325 feuillets à une colonne, mesurant 18 cent, sur 13. Majuscules dorées, exemplaire de luxe, exécuté pour l’empereur Jean II Porphyrogénète, et, croit-on, en 1128. Le texte en est composite et présente des leçons anciennes remarquables. Il a été collationné par Scholz, et avant Scholz étudié par Bianchini. Voyez Gregory, Prolegoniena, ^. 500-501.

P. Batiffol.

URI (hébreu : "Ûrî de’ûr, « enflammé » ), nom de trois Israélites.

1. URI (Septante : Oùpeia ;  ; Oùpec, dans I Par., Il, 20), fils d’Hur, descendant de Caleb, fils d’Hesron, de la tribu de.Tuda, et père de Béséléel. Exod., xxxi, 2 ; xxxv, 30 ; xxxviii, 22 ; I Par., ii, 20 ; II Par., i, 5.

2. URI (Septante : ’A5ai ; Lucien : ’ASôocî), père de Gaber, l’un des préfets de Salomon, chargé de l’approvisionnement de sa cour dans le pays de Galaad. III Reg., iv, 19.

3. URI (Septante : ’Q80û6 ; Alexandrinus : ’QSouî ; Lucien : Oùpîa^), un des Lévites portiers. IEsd., x, 24. Il avait épousé une femme étrangère et fut obligé de s’en séparer du temps d’Esdras.

URIE (hébreu : ’Ûriyâh, ’Ûriydhû, « Jéhovah est ma lumière » ou « flamme de Jéhovah » ), nom d’un Héthéen et de trois Israélites.

1. URIE (Septante : O-jpeca ; ), héthéen, un des trente vaillants soldats de David, II Sam. (Reg.), xxiii, 39 ; I Par., xi, 41, et mari de Bethsabée. II Reg., xi, 3 ; Matth., i, 6. Quoique étranger, son langage, II Reg., xi, 11, montre qu’il pratiquait la religion juive. Il épousa Bethsabée, femme d’une rare beauté, et ce fut pour son malheur. Sa maison à Jérusalem était au-dessous du palais royal. David l’aperçut sur le toit de sa demeure, lorsqu’elle prenait un bain, et conçut pour elle une passion criminelle à laquelle elle ne résista point. En ce moment, CJrie était loin, prenant part au siège de Rabbath Ammon dans l’armée de Joab. Pour dissimuler sa faute, David se fit envoyer Urie sous prétexte de lui apporter des nouvelles de la guerre, mais il ne put décider ce vaillant soldat à aller passer

la nuit dans sa propre maison. « L’arche de Dieu, et Israël et Juda, lui répondit-il, habitent sous la tente, et mon seigneur Joab et les serviteurs de mon seigneur demeurent en rase campagne, et moi j’entrerais dans ma maison ! » II Reg., xi, 11. Sa généreuse conduite fut la cause de sa mort. Le roi, n’ayant pu le déterminer à rentrer chez lui, le fit porteur d’une lettre à Joab, dans laquelle il chargeait ce dernier d’exposer Urie à l’endroit le plus dangereux du combat, afin qu’il y trouvât la mort, et le général israélite n’hésita pas à exécuter cet ordre inique et cruel et à faire périr ce brave soldat. II Reg., xi. Le prophète Nathan reprocha au roi avec raison d’avoir frappé lui-même Urie par l'épée des filsd’Ammon. II Reg., XII, 9. Ce fut là la grande tache du règne de David, III Reg., xv, 5, et Dieu la lui fit expier sévèrement, II Reg., xii, 11, 14-18, quoiqu’il lui pardonnât à cause de sa pénitence exemplaire, y. 13.

2. urie (Septante : OOpt’a ; ), grand-prêtre du temps d’Achaz, roi de Juda. Sur l’ordre de ce prince, il construisit, IV Reg., XVI, 10, un autel au sujet duquel les | opinions sont partagées, ainsi que sur la nature du sacrifice qui y fut offert. D’après les uns, ce sacrifice fut célébré en l’honneur des dieux de l’Assyrie, d’après les autres en l’honneur du vrai Dieu, parce qu’il fut offert par le souverain pontife et conformément aux prescriptions de la Loi. Ces derniers, pour justifier leur opinion, s’appuient sur ce que dit Isaïe d’Urie, qui, viii, 9, le compte comme un des deux témoins fidèles qui peuvent attester l’authenticité de la prophétie concernant Maher-Salal-haS-baz. Il n’est pas certain que l’Urie constructeur de l’autel soit le même que celui dont parle Isaïe, mais c’est néanmoins fort probable. Quoi qu’il en soit, le fait raconté dans Isaïe est antérieur à l'événement rapporté dans les Rois ; Urie n’aurait donc été infidèle à son devoir que postérieurement à ce que dit de lui le prophète. — Urie n’est pas nommé dans la généalogie sacerdotale, I Par., vi, 4-15, mais il y a des lacunes entre Amasias, y. 11, et Sellum, y. 13.

3. URIE (hébreu : 'Ûriydkû ; Septante : OCipîaç), prophète, fils de Séméi de Cariathiarim. Il prophétisa sous le roi Joakim contre Juda et Jérusalem et ce prince voulut le faire mettre à mort. Pour échapper à sa colère, Urie se réfugia en Egypte, mais Joakim l’y fit poursuivre par ses gens qui, avec le consentement du pharaon, le ramenèrent en Palestine et le remirent entre les mains du roi. Joakim le fit périr par le glaive et ordonna de jeter son corps au milieu des tombeaux de la populace. Jer., xxvi, 20-23.

4. URIE (Septante : Oûpia ; ), chef de la septième famille sacerdotale, cf. I Par., xxiv, 10, père de Mérémoth. Celui-ci revint avec Esdras de la captivité en Palestine. I Esd., viii, 33 ; II Esd., iii, 21 ; viii, 4. Voir Mérémoth, t. iv, col. 996.

    1. URIEL##

URIEL (hébreu ' : 'ÛrVêl, « El (Dieu) est ma lumière

  • ; Septante : OOpufjX), nom de deux Israélites.

1. URIEL, fils de Thaheth et père d’Ozias, Lévite, chef des Caathites. IPar., vi, 24 (9) ; xv, 5, 11. Il vivait -du temps de David et prit part, comme chef des Caathites, avec 120 d’entre eux, au transport de l’arche de la maison d’Obédédom à Jérusalem.

2. URIEL, de Gabaon, grand-père maternel d’Abia et père de la reine Michaïa ou Maacha, femme de Roboam. Il Par., xiii, 2. Voir Maacha 4, t. iv, col. 465.

    1. URIM et THUMMIM##

URIM et THUMMIM (hébreu : 'ûrîm ve-tùmmîm ; Septante : 6rjXa)<71 ; ou 6tj).oi x « l àï.rfiv.x ou ôsiôtt, ;  ; Yul gate : doctrina et veritas), oracle au moyen duquel les anciens Israélites connaissaient la volonté de Jéhovah. Ce qui concerne l’Urim et Thummim est enveloppé d’obscurité.

1° Signification des mots. — Les anciens traducteurs ont attribué aux deux mots des étymologies qui trahissent leur embarras. Si 'ûrîm vient de 'or, « lumière », ou de 'ûr, t feu », mots dont le sens était bien connu, pourquoi les traductions 8r|Xw<rtî ou SïjXoi, « indication », action de rendre visible ? Aquila rend plus littéralement par 9<diH7, aoî, « illuminations ». La Vulgate traduit par doctrina, donnant ainsi à 'urîm un sens intellectuel qu’il n’a pas, et qui d’ailleurs ne convient pas à la chose, puisqu’il ne s’agit pas ici de révélation sur le dogme ou la morale. Quant à tùmmîm, qui ne^pourraitvenir que de fôm, « plénitude, totalité, perfection », Aquila : teXskôcti ; , on ne voit pas qu’il puisse aboutir régulièrement au sens de àXïjôsia, veritas, « vérité », ou âmÔTïiç, « sainteté ». Il est donc à croire que les anciens traducteurs ne connaissaient plus exactement le sens originel des deux mots 'ûrîm et (ûmmîm, et qu’ils les ont rendus par à peu près, en s'écartant notablement de la signification courante de 'or et de tôm. Ils ont supposé d’ailleurs avec raison que la forme

539. — Pectoral égyptien, représentant le dieu Ra et la déesse Ma.

D’après Wilkinson, Manners and customs, édit. Birch,

t. iii, p. 183.

plurielle des deux mots pouvait marquer l’excellence des objets plutôt que leur pluralité. — Gerber, Die hebrâisch. Verba denominativa, 1896, p. 195, pense que 'ûrîm viendrait plutôt de 'ârar, « exécrer », en assyrien arâru, et Schwally, dans Zeitschrift fur die àlltest. Wissenschafl, t. xi, p. 172, prête à tûmmîmle sens de berâkàh, « bénédiction ». De la sorte, le Thummim serait favorable et l’Urim défavorable. — Des commentateurs croient retrouver en Egypte l’origine de l’Urim et Thummim. Le grand-prêtre égyptien, quand il rendait ses jugements comme souverain juge, portait un pectoral sur lequel était représenté Ra, le dieu de la lumière, d’où Urim, et Ma, avec l’article Tma, la déesse de la justice (fig. 539), Riehm, Handwôrterbuch des biblischen Altertums, 2e édit., 1893, 1. 1, p. 931. — D’après Dhorme, Les livres de Samuel, Paris, 1910, p. 124, le sens des deux mots devrait être emprunté à l’assyrien : 'ûrîm viendrait de urê, de la même racine que urlu, « précepte, loi », et fûmmim, pluriel de tummu, dériverait de tamû, « prononcer une conjuration, une formule magique ». — L’Urim et le Thummin sont ordinairement nommés ensemble. Une fois, Deut., xxxiii, 8, les deux termes sont intervertis, et deux autres fois. Nom., xxvii, 21 ; I Reg.j xxviii, 6, l’Urim est nommé seul. Le plus souvent, il est seulement question de « consulter Jéhovah ».

2° Institution. — Moïse reçut nie Dieu cet ordre : « Tu mettras au pectoral du jugement l’Urim et le Thummim, pour qu’ils soient sur le cœur d’Aaron lorsqu’il se présentera devant Jéhovah, et qu’ainsi il porte constamment sur son cœur, devant Jéhovah, le jugement des enfants d’Israël. » Exod., xxviii, 30 Lev., viii, 8. L’expression employée dans ce passage, nàtatta 'él ItoSén, êTciÔïjtjeiç èiti tô Xofeïov, pones in ralionali, « tu mettras dans le pectoral » ou « sur le pectoral », est identique à celle qui ordonne de mettre

dans l’Arche les labiés de la loi : ndtatld’él hd’ârôn, è|/.6aXetç et ; tt, v xiëtoTov, portes in arca. Exod., xxv, 16. On peut déjà conclure de là que l’objet en question est distinct du pectoral et qu’il est réel et visible. Sa destination fait donner au pectoral le nom de « pectoral du jugement », c’est-à-dire au moyen duquel Dieu fait connaître ses jugements, ses décisions. Il est nécessaire qu’il soit sur le cœur d’Aaron. Dans le poème chaldéen de la création, i, 137, on voit Tiamat donner à son lieutenant, Qingou, « les tablettes du destin » et les accrocher à sa poitrine. Cf. Dhorme, Textes religieux assyro-babyloniens, Paris, 1907, p. 19. De même, l’Urim et Thummim sont fixés sur la poitrine du grandprêtre. Après Aaron, Eléazar se servira de l’objet pour faire connaître à Josué les volontés de Jéhovah : c< Il se présentera devant le prêtre Éléazar, qui consultera pour lui le jugement de l’Urim devant Jéhovah ; c’est sur son ordre que Josué sortira, sur son ordre qu’il entrera, lui, tous les enfants d’Israël et toute l’assemblée. » Num., xxvii, 21. Il suit de là que l’Urim et le Thummim est comme l’oracle de Jéhovah, l’organe de son pouvoir théocratique. Il est aux mains du grandprêtre, qui seul peut le consulter devant Jéhovah, c’est-à-dire avec l’intention d’obtenir de Jéhovah une réponse. Cependant l’oracle ne s’occupe pas des intérêts particuliers ; il est seulement à l’usage du peuple tout entier et de son chef. Le texte sacré ne fournit pas d’autres détails précis sur la nature et le fonctionnement de l’oracle.

3° Consultations. — Les livres historiques enregistrent un certain nombre de consultations adressées à Jéhovah par l’Urim et le Thummim, sans qu’on puisse assurer qu’elles aient été les seules. Ces consultations fournissent certains renseignements sur la manière dont l’oracle répondait. Il est probable d’ailleurs qu’on ne recourait à l’oracle que quand on ne pouvait être éclairé par les moyens ordinaires. Quand Josué et les Israélites se laissèrent tromper par la feinte des Gabaonites, ce fut « sans consulter la bouche de Jéhovah. » Jos., ix, 14. Ils auraient dû, en cette occasion, en appeler à Jéhovah. Il est à croire que, conformément à l’ordre reçu, Num., xxvii, 21, Josué ne manqua pas de le faire en plusieurs autres circonstances importantes. Il est possible que les communications faites à Josué par Jéhovah aient eu l’Urim et le Thummim pour intermédiaire. Jos., i, 1 ; iii, 7 ; iv, 1 ; etc. — Après la mort de Josué, les Israélites demandent à Jéhovah qui doit prendre la tête de l’invasion contre les Chananéens, et l’oracle répond : « Juda montera ; voici que j’ai livré le pays entre ses mains. » Jud., 1, 2. — Pendant la guerre contre les Benjamites, l’oracle est consulté par trois fois, et il commande à Juda de marcher en avant, et à tout Israël de marcher contre Benjamin. Jud., xx, 18, 23, 28. — Après l’élection de Saùl, l’oracle révèle la cachette où se tient le nouveau roi. I Reg., x, 22. — Deux fois Saûl, devenu infidèle, consulte Jéhovah, pour savoir s’il doit poursuivre les Philistins, I Reg., xiv, 36, 37, et ce qu’il doit faire à Gelboé. I Reg., xxviii, 6. En ces deux circonstances, l’oracle ne répond pas ; les songes et les prophètes n’en disent pas davantage. Jéhovah se refuse donc formellement à diriger le roi réprouvé. — David, déjà oint par Samuel, se réfugie à Nobé, près du grand-prêtre Achimélech. Le traître Doëg rapporte ensuite à Saül qu’Achimélech a consulté Jéhovah pour David. Pour se défendre, Achimélech dit à Saùl : « Est-ce anjourd’hui que j’aurais commencé à consulter Dieu pour lui ? » faisant entendre, sans doute, qu’il avait déjà interrogé l’oracle à l’occasion des missions confiées par le roi à son gendre, mais qu’il n’aurait pas commencé à le faire le jour où Saül accusait David de rébellion. I Reg., xxii, 10-15. — À Ceïla, David dit à Abiathar, successeur d’Achimélech : « Apporte

l’éphod, » et il demande si Saül viendra et si les habitants de Céïla le livreront. L’oracle répond : « Il descendra » et « Ils te livreront. » I Reg., xxiii, 9-12. On voit ici que l’Urim et Thummim est inséparable du pectoral et de l’éphod. — Une autre fois, David demande de la même manière s’il doit poursuivre une bande d’Amalécites, qui avaient fait captives deux de ses femmes et celles de ses gens. Il lui est répondu de poursuivre et qu’il recouvrera ce qu’on lui a pris.

I Reg., xxx, 7-8. — Après la mort de Saùl, il consulte pour savoir s’il doit monter dans une ville de Juda et dans laquelle. L’oracle répond : « À Hébron. » II Reg., h, 1. — Plus tard, il demande s’il faut marcher contre les Philistins, et l’assurance lui est donnée qu’il legbattra. II Reg., v, 19. — Comme les ennemis reviennent à la charge, l’oracle lui dit de les tourner par derrière et que Jéhovah marchera avec lui pour lui assurer la victoire. II Reg., v, 23, 24. — Il est à remarquer que ces réponses ne sont pas faites seulement par « oui » et. « non », mais que plusieurs d’entre elles fournissent des indications circonstanciées qui dépassent les termes de l’interrogation. Ces réponses sont positives et claires ; elles n’ont rien du vague et de l’ambiguïté des oracles païens. Ce qu’elles indiquent s’accomplit toujours à la lettre. On ne les obtient que par l’intermédiaire du grand-prêtre, sans qu’un autre, pas même le roi, puisse les provoquer directement. Malgré le caractère officiel de la consultation et la promesse de Jéhovah, Dieu se réserve de refuser une réponse quand il le juge à propos, comme il le fait deux fois pour Saùl. L’exemple de Josué, dans l’affaire des Gabaonites, montre d’ailleurs que l’on n’était pas toujours fidèle à consulter l’oracle quand il l’aurait fallu. Enfin, il faut encore observer que Jéhovah ne prend jamais l’initiative de faire savoir sa volonté par l’Urim et le Thummim. Il ne parle que quand il est interrogé. Jéhovah parlait aussi dans le deblr ou sanctuaire proprement dit. Il s’y adressait à Moïse ou au grand-prêtre pour donner ses ordres, mais sans avoir besoin d’être consulté, ce qui distinguait le debîr de l’Urim et Thummim. Voir Oracle, t. iv, col. 1846. — Après David, l’histoire n’enregistre plus de consultations de Jéhovah par l’Urim et le Thummim, d’où il faut conclure probablement qu’elles cessèrent à partir de la construction du Temple. On voit dès lors les prophètes intervenir directement, et même dès les derniers temps de David, pour faire connaître les volontés de Dieu sur ce qui était à faire ou à éviter. Le prophétisme remplaça donc l’Urim et le Thummim. Après la captivité, on exclut du sacerdoce les prêtres qui ne pouvaient justifier de leur généalogie, « jusqu’à ce qu’il s’élevât un prêtre pour consulter l^Urim et le-Thummim, » c’est-à-dire pour consulter Dieu efficacement par l’ancien oracle sur la réalité de leur origine sacerdotale. I Esd., ii, 63 ; II Esd., vii, 65. Les versionstraduisent kohên le’ûrîm ûletàmmim par iepeùç toîç 9(ou’t ; ou<71 xat totc TSAst’ocç, « prêtre pour les choseslumineuses et parfaites », sacerdos dodus atque perfectus, « prêtre instruit et parfait ». Josèphe, Ant.jud., III, viii, 9, dit que l’Urim et Thummim n’était disparu, à son époque, que depuis deux cents ans. Mais son. renseignement est suspect. Les rabbins affirmaient que cinq choses manquaient dans le second Temple : l’Arche d’alliance, le feu céleste, l’Urim et Thummim, la Sekîndh (voir Gloire, t. iii, col. 252) et l’huile sacrée. Cf. Gem. Yoma, 21, 2. La disparition de l’oracle remontait donc très haut, peut-être même à la fondation du premier Temple. Dans son éloge d’Aaron, l’Ecclésiastique, xlv, 12, dit qu’il était vêtu, entre autres choses, Xoyeîcii xpioeut ; SVjXotç Hrfielcn ; , « t du pectoral du jugement, des manifestations de la vérité », judicio et veritate prsediti, <t doué de jugement et de vérité ».

II y a dans le texte hébreu : « du pectoral du jugement, .

de l’éphod et de la ceinture. » L’Urim etleThummim ne sont pas nommés expressément. Ils peuvent être compris dans l’éphod, comme le supposent plusieurs anciens textes. I Reg., xxiii, 9 ; xxx, 7.

4° Fonctionnement. — Les textes ci-dessus rappelés permettent de conclure à l’objectivité et au caractère surnaturel des réponses adressées au grand-prêtre par l’Urim et le Thummim. Mais ils n’expliquent pas le fonctionnement de l’oracle, soit qu’il fût bien connu à l’époque où vivait l’historien sacré, soit plutôt qu’il dût rester mystérieux et que le grand-prêtre et quelques autres fussent seuls à connaître le secret. Ce secret n’a pas été transmis ; aussi s’est-on livré aux conjectures les plus diverses pour expliquer de quelle manière l’Urim et le Thummim rendaient des oracles divins. — 1. Josèphe, Ant. jud., III, viii, 9, confond l’Urim et le Thummim avec le pectoral lui-même, et il dit qu’avant la bataille les pierres du pectoral rayonnaient avec un éclat qui annonçait le secours divin et la victoire. Il semble ainsi borner l’emploi de l’oracle aux cas de guerre, ce qui ne se justifie pas au moins en deux circonstances. I Reg., x, 22 ; II Reg., ii, 1. Abarbanel et d’autres Juifs ont adopté la donnée de Josèphe en la spécialisant. D’après eux, le grand-prêtre obtenait la réponse en lisant les lettres qui brillaient successivement à ses yeux parmi celles qui composaient les noms des douzes tribus inscrits sur les pierres du pectoral. « Les mots Urim et Thummim désigneraient les lumières et les obscurités qui passaient sur la face du pectoral, lorsque, placé vis-à-vis du chandelier à sept branches, quelques-unes des lettres gravées sur les pierres précieuses s’illuminaient, tandis que les autres restaient baignées d’obscurité. Peut-êlre alors, d’après des règles qui restaient un des secrets du sanctuaire, le grandprêtre groupait les caractères lumineux pour former la réponse de l’oracle. » Ancessi, Atlas géogr. et archéol., Paris, 1874, Index archéol., p. 19. Mais à l’ensemble des lettres qui formaient les noms des douze fils de Jacob, il en manquait quatre pour faire un alphabet complet : ii, ts, s, ]3, de sorte qu’on n’aurait pu, par exemple, lire le nom de la ville d’Hébron, qui commence par un ii, Hébrôn. Cf. II Reg., il, 1. Quelques rabbins supposent qu’à ces noms étaient joints ceux des patriarches, Abraham, Isaac et Jacob, ce qui ajoutait au total les trois lettres ii, i, p. D’autres compliquaient encore la lecture en faisant intervenir le nom de Jéhovah. Il est difficile de prendre en considération ces différentes hypothèses, parce qu’elles ne maintiennent pas la distinction qu’imposent les textes entre le pectoral et l’Urim et Thummim. — 2. Philon, Vit. Mos., 3 ; De monarch., 2, édit.Mangey, t. ii, p. 152, 226, imagine que deux images, ÔYc<>(<.aTa, appelées 8° j-Xomtic et àMjŒia, étaient jointes au pectoral. D’autre part, on sait par Diodore de Sicile, i, 48, 75, et Élien, Var. Hist., xiv, 34, que’le grand-juge égyptien portait sur la poitrine une image appelée : Vérité. Voir plus haut, col. 2360. Mais cet insigne n’ajoute rien à la valeur personnelle du juge, tandis que l’Urim et Thummim est l’organe essentiel des consultations obtenues de Jéhovah, si bien que, s’il fait défaut, le grand-prêtre ne peut plus rien. Dans les grandes circonstances, les prêtres babyloniens suspendaient aussi à leur cou une étoffe rouge garnie de plusieurs sortes de pierres précieuses. Cf. Lagrange, Étud. sur les relig. sémit., Paris, 1905, p. 236. Il ne faut donc pas se hâter de tirer des conclusions de ressemblances extérieures qui ne suffisent pas à justifier la parité entre les institutions hébraïques et celles des autres peuples. — 3. D’après d’autres, l’Urim et Thummim serait une espèce de Théraphim, voir col. 2174 ; cf. Ose., III, 4 ; Spencer, De leg. Hebr.ritual., La Haye ; 1686, III, 7, ou des sortes de dés de diamant, l’un brillant, l’autre rouge, sur lesquels était gravé le nom de

Jéhovah, et dont le grand-prêtre interprétait les combinaisons, de préférence devant l’Arche. Zûllig, Comm. invpoc, Stuttgart, 1834, Excurs., ii.Pour Braun, Vest. sacerdot. Hebr., Amsterdam, 1701, t. ii, p. 614, l’Urim et le Thummim n’aurait été qu’un symbole et les communications divines au grand-prêtre auraient eu un caractère exclusivement interne. Cf. Bâhr, Symbolik des mosaisch. Cuit., Heidelberg, 1835, p. 136-141. Il serait difficile de justifier par les faits ces différents systèmes. — 4. Plus commune est l’explication de l’Urim et Thummim par un tirage au sort. Cette explication est suggérée par un épisode de l’histoire de Saûl. Quand Dieu refusa de lui répondre pour la seconde fois, le roi attribua son silence à une faute commise soit par lui-même, soit par son fils Jonathas, soit par le peuple. 4 Le texte hébreu paraît avoir souffert en cet endroit. On y lit seulement : « Dieu d’Israël, fais paraître la perfection, hàbâh famîn. » I Reg., xiv, 41. Le texte des Septante est beaucoup plus complet : « Si l’iniquité est en moi ou en Jonathas, mon fils, Seigneur, donne la clarté, Sôç ôrjî.ouç, et si telle est la réponse, donne à ton peuple d’Israël, donne la sainteté, 8bç ô<ri(kï)Ta. » Le sort désigne alors Saül et Jonathas, et, à une seconde épreuve, Jonathas seul. La Vulgate reproduit à peu près les Septante : da ostensionem, … da sanctitatem. Il est possible qu’ici les mots SrjXoi, ostensio, traduisent ûrîm, disparu du texte hébreu, et que ôctiott) ?, sanctitas, soit mis pour {ûmniîm, que les massorètes ont lu fânitm. Cf. Dhorme, Les livres de Samuel, Paris, 1910, p. 123. On aurait alors ici, pris sur le vif, le fonctionnement de l’Urim et Thummim. C’était un sort plus solennel, tiré à l’aide de deux pierres que le grand-prêtre conservait dans le pectoral, et qui était officiellement garanti par Jéhovah. On n’y avait recours que dans les circonstances d’intérêt public ou en faveur des chefs de la nation. Des consultations de ce genre étaient coutumières chez les Babyloniens. « Aux consultations précises adressées par le roi sur l’opportunité ou le succès de ses entreprises, Shamash ou Adad devaient répondre par oui, annu, ou par non, ullu, par une réponse proprement dite, supiltu, par un oracle, tamit, tertu, piristu, parsu, par un jugement, dîna dînu, une sentence, purussu, par une illumination, napalm, ou encore par une vision ou une parole… Le dieu dictait ou inspirait son oracle, abîtu, à ses prêtres. » F. Martin, Textes religieux assyriens et babyloniens, Paris, 1903, p. xxvi. Voir le texte de plusieurs consultations, p. 28, 108, 300. Il y a donc analogie entre la pratique babylonienne et celle des Israélites ; de plus, l’illumination, napafyu, se retrouve dans l’idée exprimée par’ûrim, et l’oracle, tamit, dans tûmmim. Il n’est pas anormal qu’une coutume babylonienne ait été en vigueur chez les Hébreux ; mais Jéhovah a voulu faire pour son peuple ce que les divinités assyriennes ne pouvaient faire pour le leur. — Néanmoins, quelques difficultés subsistent avec cette explication de l’Urim et Thummim. Si l’on admet deux pierres différentes qui, tirées au sort, pouvaient signifier « oui » ou « non », à quoi reconnaissait-on le refus de répondre ? I Reg., xiv, 36 ; xxviii, 6. Michælis, Mosaisch. Recht, Francfort-s.-M., 1775, t. i, p. 293 ; t. vi, p. 162 ; Iahn, Archseol. biblic, iii, 4, 358, dans le S. Scripturae curs. compl. de Migne, t. ii, col, 1040, etc., imaginent qu’aux deux premières pierres en était jointe une troisième qui marquait l’absence de réponse. Mais les textes ne mentionnent que deux objets ; ils auraient fait allusion à un troisième, s’il avait réellement existé pour remplir le rôle important qu’on lui attribue. Il faut penser que le refus de réponse résultait d’une combinaison que nous ignorons. Une autre difficulté provient du genre de réponses fournies par l’Urim et Thummim. Il est malaisé de les réduire toutes à des

réponses par « oui » ou « non ». On pourrait néanmoins supposer que l’histoirien sacré a parfois résumé sous forme d’indication positive ce qui résultait de l’élimination de différentes hypothèses proposées par le consultant. Ainsi, quand il est dit à David de monter à Hébron, II Reg., ii, 1, la réponse peut être la conséquence de plusieurs questions successives : Faut-il monter dans une ville de Juda ? Oui. À telle ou telle ville ? Non. À Hébron ? Oui. De même en est-il pour l’attaque contre les Philistins, II Reg., v, 23, 24 : Faut-il monter contre les Philistins ? Non. Faut-il les prendre par derrière ? Oui. Du côté des mûriers ? Oui. Jéhovah marchera-t-il avec moi ? Oui. Me donnera-t-il un signe de son assistance ? Oui. Lequel ? Fera-t-il un bruit dans les cimes ? Oui ; etc. — En tout cas, à s’en tenir au texte de l’Exode, xxviii, 30, il semble bien que l’Urim et Thummim n’était pas une institution récente qu’il’ait été nécessaire de décrire en détail, mais plutôt quelque chose d’ancien, qui fonctionnait déjà depuis longtemps et que Dieu, pour détourner son peuple de la consultation des oracles idolâtriques, jugea à propos de conserver en lui communiquant un caractère sacré. Cf. De Hummelauer, In Exod., Paris, 1897, p. 285.

H. Lesêtbe.

    1. URINE##

URINE (hébreu : sê’în ; Septante : o 7 joo-> : Vulgate : urina), produit liquide de l’excrétion chez l’homme et les quadrupèdes. — Il n’en est question qu’une fois, dans l’apostrophe grossière que le rabsacès assyrien adresse aux assiégés de Jérusalem pour les menacer, s’ils ne se rendent, d’en être réduits à manger leurs excréments et à boire leur urine. IV Reg., xviii, 27 ; Is., xxxvi, 12. — Quand on veut parler d’exterminer toute une population, on dit qu’elle sera détruite jusqu’à tnasfin beqîr, oùpoûvca Ttp’oç toix’, v, mingentem ad parietem, « celui qui urine au mur ». Cette expression revient six fois, mais seulement dans les livres des Rois. I Reg., xxv, 22, 34 ; lit Reg., xiv, 10 ; xvi, ll ; xxi, 21 ; IV Reg., IX, 8. Les rabbins ont prétendu qu’elle désigne le chien ; mais cet animal ne compte pour rien en Orient. Voir Chien, t. ii, col. 698. Plusieurs pensent qu’elle indique seulement le sexe masculin, ce qui devient insignifiant dans les textes cités, qui supposent une extermination atteignant jusqu’à ceux qu’elle épargne d’habitude. D’autres croient qu’il s’agit plutôt ici des garçons en bas âge. La loi imposait des précautions particulières pour certaines nécessités, Deut., xxiii, 12-14, et les hommes s’y assujettissaient même pour uriner. Cf. Hérodote, ii, 35 ; Xénophon, Cyrop., i, 2, 16 ; Ammien Marcellin, xxiii, 6. On ne pouvait astreindre les jeunes garçons à ces prescriptions et l’on se contentait de les faire tourner vers le mur. Les Syriens avaient la même expression, cf. Assemani, Bibl. orient., t. ii, p. 260, probablement avec le même sens. Elle désigne l’universalité des êtres, dont elle représente les plus humbles et les plus inoffensifs.

H. Lesêtre.

US (hébreu : ’0 ? ; Septante : "û ; ), fils aîné d’Aram, descendant de Sem. Gen., x, 23. Dans I Par., i, 17, son nom est écrit Hus. Voir Hus 1, t. iii, col. 782.

    1. USURE##

USURE (hébreu : nésé k ; Septante : tôxoç ; Vulgate : usura), intérêt abusif tiré de l’argent. — L’intérêt tiré de l’argent paraissait vexatoire aux anciens Israélites. Du verbe nâsâh, « prêter », ils rapprochaient le verbe nàsak, « mordre », auquel ils ajoutaient le sens de « tirer intérêt, pratiquer l’usure ». Voir Pbêt, col. 617.

1° La loi. — Dans la pensée des anciens, le prêt d’un objet quelconque était un service que l’on rendait gratuitement à ses voisins. En Chanaan, l’abondance des fruits de la terre donna lieu à des réalisations en argent, au ccmmerce et à des prêts d’argent. La loi dut prévoir cet état de choses. Une première disposition règle qu’on ne peut exiger d’intérêt pour l’argent

prêté à un compatriote, que le défaut de ressources oblige à emprunter. Exod., xxii, 25. L’intérêt réclamé en pareil cas serait donc de l’usure. Une seconde loi étend la première au gêr, à l’étranger qui vit à demeure au milieu des Israéliles, et elle porte non plus seulement sur l’argent, mais aussi sur les vivres. On ne peut donc tirer intérêt ni de l’argent, ni des objets d’alimentation, et on doit les prêter gratuitement au compatriote et au gêr qui en ont besoin. Lev., xxv, 35-37. Une dernière loi aggrave considérablement celle de l’Exode, en prohibant d’exiger intérêt « ni pour argent, ni pour vivres, ni pour aucune chose qui se prête. » Deut., xxiii, 19-20. Il était donc défendu de tirer profit des prêts, quels qu’ils fussent, quand il s’agissait des compatriotes ou des étrangers mêlés à la vie de la nation. — Mais chez un peuple qui avait tant d’aptitude et de goût pour les opérations commerciales, il était difficile d’interdire tout prêt lucratif. L’Israélite fut donc autorisé à se rabattre sur le nokrî, l’étranger qui n’était pas assimilé au compatriote, celui qui gardait son autonomie, ses mœurs, et en général son habitation en dehors de la terre d’Israël. Avec le Phénicien, le Philistin, le Syrien, l’Arabe et les autres trafiquants analogues, le prêt à intérêt était permis. Deut., xxiii, 20. Dieu promettait même à son peuple que cette source de bénéfices lui serait largement ouverte, et que, par contre, l’Israélite deviendrait assez riche pour n’avoir pas à emprunter lui-même. Deut., xv, 6 ; xxviii, 12. Voir Prêt, col. 618.

2° La pratique. — En général, les Israélites observaient la loi qui les liait vis-à-vis de leurs compatriotes. On prêtait sans y regarder argent et vivres à ceux qui se trouvaient dans l’embarras, et ces prêts n’exposaient pa3 d’ordinaire à de grands sacrifices. Luc, xi, 5. Parfois cependant on hésitait à risquer ce qui ne devait rien rapporter. On prêtait sur gages, même dans des conditions exorbitantes. II Esd., v, 2-12. La saisie mettait aux mains du créancier la personne et les biens de l’emprunteur, La loi du prêt gratuit était ainsi tournée. D’autres préféraient éviter toute espèce de risque et ils se refusaient à prêter. Notre-Seigneur donne un conseil radicalement opposé à cette pratique. Matth., v, 42. Il y en avait enfin qui transgressaient ouvertement la loi et ne consentaient à prêter qu’à intérêt, même à leurs frères. Ps. xv (xiv), 5 ; Ezech., xviii, 8, 13, 17 ; xxii, 12. De leur côté, les emprunteurs trouvaient quelquefois leur avantage à coopérer à l’infraction de la loi. Vers l’époque évangélique, il s’en trouva qui décidaient leur prêteur par un présent préalable ou le dédommageaient par un présent subséquent, au moment où ils se libéraient, ce que rabbi Gamaliel appelait « usure préalable » et. « usure tardive ». Cf. Baba mezia, v, 8 (11). Quant à ceux qui pratiquaient ouvertement l’usure, ils étaient frappés d’incapacité judiciaire. Cf. Sanhédrin, iii, 5, 6. — Le prêt a intérêt restait toujours légitime vis-à-vis des étrangers, et c’est sur sa pratique que se fondaient les opérations de banque auxquelles Notre-Seigneur fait allusion. Matth., xxv, 27 ; Luc, xix, 23. Sur le taux de l’intérêt, voir col. 620. Le développement des affaires financières amena d’autres combinaisons qui permirent de passer à côté de la loi sans la heurter directement entre compatriotes. Il reslait défendu de prêter de l’argent aux marchands avec stipulation d’intérêts. Alors le marchand et le prêteur s’associaient pour une entreprise, à la suite de laquelle le marchand retirait d’abord la part qui revenait à son industrie personnelle ; puis il partageait également le bénéfice avec son bailleur de fonds. Cette sorte d’association supposait donc une valeur active au capital-argent. Cf. Baba metsia, v, 3 (5). On recourait encore au contrat de louage, qui permettait non plus seulement de prêter à titre gratuit un outil, un animal et même les bras d’un homme, mais

de les louer et ainsi d’en tirer revenu. D’ailleurs, la loi elle-même prévoyait déjà certaines locations. Voir Location, t. iv, col. 319 ; Baba mezia, vi. Cependant les docteurs maintinrent l’interdiction des spéculations sur les objets fictifs ou sur les valeurs que l’offrant n’avait pas en mains. Cf. Baba mezia, v, 1, 2. Mais ils admettaient l’escompte sur les paiements anticipés. Un logement d’un sicle par mois se payait seulement 10 sicles par an, si le paiement était effectué d’avance. Cf. Baba mezia, v, 2 ; Schwalm, La vie privée du peuple juif, Paris, 1910, p. 409-431. I

H. Lesêtre.
    1. UTHAI##

UTHAI (hébreu : ’Ûfaï, « secourable » ; Septante : Où9a’: ), « des fils » de Bégui. Lui et Zachur, de la même famille, accompagnèrent Esdras à son retour en Pales. tine avec soixante-dix hommes de leur 1 parenté. I Esd., vin, 14. — Le texte hébreu mentionne un autre Israélite qu’elle appelle aussi’Ûlaî. La Vulgate a écrit son nom Ôthéi. Voir Othéi, t. iv, col. 1926.

    1. UTILITÉ##

UTILITÉ (hébreu : bésa’, et dans l’Ecclésiastique, xli, 14 : tô’alàh, du même radical yâ’al que l’hiphil ho’il, * être utile » ; Septante : û>çé).£ia ; Vulgate : Militas), ensemble d’avantages qu’un être peut procurer.

1° Ce qui est utile est souvent appelé tôb, « hon ». Les auteurs sacrés énumèrent parmi les choses utiles : les astres, Bar., vi, 59, les troupeaux, Eccli., vii, 24 (22), les meubles, Sap., xiii, 11, les vases, Bar., vi, 58, images des hommes utiles, II Tim., ii, 21, certains remèdes, Tob., vi, 5. Dans un sens supérieur, sont également utiles les vertus, Sap., viii, 7, la pratique des bonnes œuvres, Tit., iii, 8, la piété, I Tim., iv, 8, l’épreuve, Heb., xii, 10, la, manifestation de l’Esprit, ICor., xii, 7, la Sainte Écriture. II Tim., iii, 16. Onésime était utile à Philémon et à saint Paul, Phil., 11, et Marc à ce dernier. II Tim., iv, 11.

2° Ce qui est inutile peut aller jusqu’à devenir Sâve’, « mauvais ». Sont simplement inutiles le bois de la vigne stérile, Ezech., xv, 4, le vase brisé, Bar., VI, 15. le sel affadi, Luc, xiv, 35, le don de l’insensé, Eccli-, xx, 14 (13), le trésor et la sagesse cachés, Eccli., xx, 32 (29) ; xli, 17 (14), le docteur qui ne sait se conduire soi-même, Eccli., xxxvii, 21 (19). Pour les chrétiens, la loi ancienne, Heb., vii, 18, et la circoncision, Rom., m, 1, ont perdu toute utilité. Parmi les choses inutiles, mauvaises et nuisibles, il faut ranger les idoles, Is.. xliv, 10 ; Ps. xxxi (xxx), 7 ; Sap., xiii, 10, 18, 19 ; la postérité des impies, Sap., IV, 3, 5 ; les œuvres des méchants, Sap., iii, 11 ; les paroles oiseuses, Matth., xii, 36 ; les disputes de mots. II Tim., ii, 14 ; Tit., iii, 9. Les impies regardent le juste comme inutile. Sap., ii, 11, 12. Le serviteur inutile aux yeux de Dieu sera châtié dans l’autre vie. Matth., xxv, 30. Mais, en ce monde, tout serviteur de Dieu doit, par une juste appréciation de son mérite, se regarder comme inutile. Luc,

xvii, 10.
H. Lesêtre.

1. UZAL (hébreu : ’Ûzâl ; Septante : Aîgr, À), fils de Jectan, descendant de Sem. Gen., x, 27. Dans les Paralipomènes, I, i, 21, son nom est écrit Huzal. Voir HuzAL, t.m, col. 786-787. VoiraussiMosEL, t. iv, col. 1318. C’est sous cette dernière forme qu’est nommé le pays occupépar la descendance d’Uzal dans Ezéchiel, xxvii, 19.

2. UZAL (hébreu : ’Uzal ; Septante : Codex Vaticanus, ’ActtJ). ; Cod. Alexandrinus : ’Aaxrik ; Vulgate : Mosel)

nom hébreu d’une ville de l’Arabie dont il est question

dans Ezéchiel, xxvii, 19, comme fournissant aux

marchés de Tyr du fer travaillé et des parfums. Le

texte massorétique porte tiixd, me- ûzzal.La ponctuation t :

semble indiquer un participe pu’al, et la comparaison

avec des racines semblables en araméen, en syriaque

et en arabe, amène au sens de « tissé, tissu ». Mais on

préfère généralement la leçon bi=iND, mé’Uzâl, avec la

T

préposition min, leçon appuyée par plusieurs manuscrits hébreux. Cf. B. de Bossi, Variée lectiones Veteris Testamenti, Parme, 1785, t. iii, p. 147. Les Septante ont lu de même : IÇ’Ati-}] ; de même aussi Aquila et la version syriaque. Il faut donc voir ici un nom propre de ville, et traduire : « de Uzal ». On identifie communément cette ville avec $an’à, la capitale de l’Yémen. Malgré l’opinion contraire de.1. Halévy, Rapport sur une mission archéologique dans le Yémen, Paris, 1872, p. 11, les voyageurs anciens et modernes, les savants arabes et européens admettent l’identification. On cite, en particulier, parmi les auteurs arabes, le témoignage d’El-Hamdânî, mort en 945, qui a écrit deux ouvrages sur les antiquités et la géographie de l’Yémen. Il dit que le nom de la ville de $an’a était autrefois Azâl (ou Izâl), et que les Syriens l’appellent San’â le Château, tjfan’a el-qasbah. Un autre géographe, El-Bakri, mort en 1094, nous apprend que « le premier qui habita cette ville fut San’â, fils d’Udhâl (lisez : Uzâl), dont elle tira son nom. » « D’autres, ajoute-t-il, prétendent que les Abyssins, en y entrant et la voyant bâtie en pierres, s’écrièrent : San’â, Çan’â, ce qui, dans leur langue, signifie « château fort » et le nom lui en resta. » De fait, l’éthiopien ijSene’e signifie « forteresse », comme le grec o/Opwjjia. Cf. Corpus inscriptionum Semiticarum, part. IV, t. i, 1889, p. 1-2. Le nom de Ijian’au a été retrouvé dans une inscription que Glaser fait remonter au deuxième siècle avant notre ère. Cf. E. Glaser, Die Abessinier in Arabien und Afrika, Munich, 1895, p. 117, 121. D’après les descriptions qui en sont données et les ruines qu’elle renferme, cette ville mérite bien l’appellation de « forteresse ». La citadelle de Gumdân surtout était remarquable. Voir les deux plans qui se trouvent dans le Corpus inscript. Semit., part. IV, t. i, p. 3, 4. Uzal se rattache à la tribu jectanide de ce nom. Gen., x, 27 ; I Par., i, 21. Voir Huzal, t. iii, col. 786 et fig. 160.

A. Legendfe. V

V. Voir Vav.

    1. VACHE##

VACHE (hébreu : pdrâh, la vache qui engendre, égldh, la génisse ; Septante : <30-jç, SâjjiaXtç ; Vulgate : bos, vacca, vitula), la femelle du bœuf. — 1° La vache est un animal précieux à différents titres. On l’emploie à traîner des fardeaux, I Reg., VI, 7, à labourer, Jud., xiv, 18, à fouler le blé. Ose., x, 11. Elle est féconde, Job, xxi, 10, dès l’âge de 18 mois, et porte neuf mois. Elle nourrit de son lait, Is., vii, 21, et ensuite de sa propre chair. Tob., viii, 22. Aussi est-ce un riche présent que de donner des vaches à quelqu’un. Gen., xxxii, 15 ; Tob., x, 10. — 2° La génisse de 3 ans est pleine d’ardeur et de vivacité. Is., xv, 5. (Quelques-uns prennent cependant’égla( selisiyâh, « génisse de trois ans », pour un nom propre de lieu. Cf. Jer., xlviii, 34.) La génisse bondit dans la prairie. Jer., l, 11. L’Egypte est comparée à une génisse très belle, Jer., xlvi, 20, Israël à une génisse rétive, Ose., iv, 16, Éphraïm à une génisse bien dressée, Ose., x, 11, les femmes de Samarie aux vaches de Basan, à cause de leur vie sensuelle, Am., iv, 1, le veau d’or de Bethel aux génisses de Bethaven, par mépris. Ose., x, 5. L’homme des champs prend souci de donner du fourrage à ses génisses. Eccli., xxxvin, 27. — Au Psaume lxviii (lxvii), 31, il est question de veau et non de vaches. — 3° Les génisses étaient utilisées pour les sacrifices. Gen., xv, 9 ; Lev., m, 1 ; I Reg., xvi, 2. Dans le cas d’homicide commis par un inconnu, les anciens prenaient une génisse qui n’avait pas encore travaillé, lui brisaient la nuque près d’un ruisseau, et se lavaient les mains au-dessus de son cadavre, pour protester de leur innocence. Deut., xxi, 3-7. -=- 4° Dans le songe du pharaon, sept vaches belles et grasses étaient dévorées par sept vaches laides et maigres. Joseph expliqua que c’était l’annonce de sept années d’abondance, qui seraient suivies de sept années de famine. Gen., xli, 2-4, 26, 27.

H. Lesêtre.
    1. VACHE ROUSSE##

VACHE ROUSSE (hébreu : pârdh’âdummdh ; Septante : SôftaXiç mippà ; Vulgate : vacca rufa), vache dont la cendre servait à purifier du contact d’un mort.

1° La loi. — _ Elle est formulée dans le livre des Nombres, xix, 2-22. La vache doit êlre rousse, sans tache ni défaut, et n’ayant jamais porté le joug. Le prêtre Eléazar la fait sortir du camp pour qu’on l’égorgé devant lui. Avec son doigt trempé dans le sang de l’animal, il fait sept aspersions du côté de l’entrée du Tabernacle. Puis on brûle la vache intégralement et on jette dans le brasier du bois de cèdre, de l’hysope et du cramoisi. À la suite de cette opération, le prêtre, celui qui a brûlé l’animal et l’homme pur qui a recueilli les cendres pour les déposer en un lieu pur hors du camp, ont à se purifier en lavant leurs vêtements et en se baignant eux-mêmes ; néanmoins leur impureté persévère jusqu’au soir. — L’eau dans laquelle on a mis de la cendre de la vache rousse sert pour la purification de celui qui a touché un cadavre humain. Celuici demeurait impur pour sept jours ; il avait à se purifier avec cette eau le troisième et le septième jour,


sous peine de retranchement. L’impureté atteignait celui qui touchait un cadavre, ou même des ossements humains ou un sépulcre. L’impur devait être aspergé avec l’hysope trempée dans Peau de purification par un homme pur ; puis il lavait ses vêtements et se baignait, pour devenir pur le soir du septième jour. On aspergeait avec la même eau la tente, les ustensiles de l’impur et les personnes présentes. Celui qui faisait l’aspersion, qui touchait l’eau ou l’impur, devenait lui-même impur, mais seulement jusqu’au soir,

2° Signification du rite. — Le rite de la vache rousse est un des plus compliqués et des plus mystérieux du cérémonial lévitique. Il s’agit de purifier l’homme du contact avec la mort et, chose singulière, tous ceux qui participent à la confection du rile purificateur deviennent eux-mêmes impurs. La mort est en effet le signe de la souillure par excellence. Elle est le salaire du péché et sa conséquence ; elle rappelle la souillure de l’âme pécheresse dont la corruption cadavérique n’est qu’une image. La loi qui prescrit la purification à la suite du contact avec le cadavre symbolise donc l’obligation beaucoup plus impérieuse qui commande la purification de l’âme après le péché. — Les détails du rite tirent leur signification de ce principe général. Ce sont les Israélites eux-mêmes qui amènent la victime au prêtre. Le rite est donc solennel et national. Tous en effet sont, sans exception, coupables de péché et sujets à la mort. La victime est un animal femelle. Un animal de cette espèce est sans doute préféré à cause de la rareté du rite, et aussi afin de procurer une plus grande quantité de eendre. Comme cette cendre doit servir d’antidote contre certaines conséquences de la mort, on choisit pour la fournir un animal qui ordinairement engendre à la vie. Il est possible aussi que le choix de la vache ait été inspiré à Moïse par une idée de réaction contre la vénération dont les Égyptiens entouraient cet animal.

En Egypte, on immolait des bœufs, mais jamais des génisses, parce qu’elles étaieut consacrées à Isis. Cf. Hérodote, ii, 41. Moïse ne jugea pas à propos de permettre l’immolation habituelle des vaches, à raison du préjudice qui en fût résulté pour son peuple. Mais, en prescrivant l’immolation et la combustion de la vache rousse, en vue d’un rite de purification, il montrait aux Israélites que cet animal ne méritait ni les honneurs, ni l’embaumement que lui décernaient les Egyptiens. — La vache devait être rousse. Les docteurs prétendent que les vaches de cette couleur étaient de plus grand prix, à cause de leur rareté. Cette assertion est problématique. D’autres observent que la couleur rousse était celle de Typhon, le principe mauvais, Diodore de Sicile, Hist., i, 88, et qu’on disqualifiait la vache, sacrée aux yeux des Égyptiens, en lui prêtant la même couleur qu’au principe du mal. Cf. Spencer, De leg. Hebrseor. ritual., Tubingue, 1732, t. ii, p. 489 ; Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 162. On peut penser aussi que, le rouge étant pris parfois comme la couleur symbolisant le péché, Is., i, 18, voir Couleurs, t. ii, col. 1070, la couleur rousse était choisie comme celle

V. - 75

qui se rapprochait le plus du rouge dans le pelage des animaux. Ces explications ne s’imposent pas. L’Épître aux Hébreux, ix, 13, établit une relation figurative entre l’aspersion avec la cendre de la vache rousse et le sang du Christ, d’où la conclusion tirée par saint Augustin, In Heptat., iv, 33, t. xxxiv, col. 733, que la couleur rousse figurait le sang rédempteur. À ce compte, cette couleur eût été exigée à plus forte raison pour les victimes immolées sur l’autel du Temple. Il est plus probable que Moïse a suivi ici une coutume léguée par les anciens, qui attachaient une signification sinistre à la couleur rousse. Cf. De Hummelauer, In Num., Paris, 1899, p. 151. L’animal, destiné à un usage sacré, devait être sans défaut, comme les victimes ordinaires, et n’avoir servi à aucun usage profane. Il n’est pas remis au grand-prêtre Aaron, mais à son fils Éléazar, par conséquent à un dignitaire, qui aura la charge de faire sortir la vache du camp et de présider à son immolation. Cette victime a des rapports trop étroits avec la mort et ses souillures pour qu’on l’immole à proximité du Tabernacle, centre de sainteté et de vie. Avec son sang, le prêtre fait des aspersions comme celles qui sont de règle pour le péché du grand-prêtre ou de tout le peuple, Lev., iv, 6, 17, mais de loin, puisque cette victime dont la cendre purifiera garde elle-même une souillure qu’elle communique. — La victime est brûlée sous les yeux du prêtre, mais on jette dans le brasier <lu cèdre, dé l’hysope et du cramoisi, trois matières employées pour la purification du lépreux. Lev., xiv, 6, 49. Elles ont une signification d’incorruptibilité et de purification. La cendre provenant de la victime est recueillie avec soin et déposée dans un lieu pur. On en met ensuite dans l’eau d’aspersion nécessaire pour les purifications. Il est à remarquer que cette eau n’a d’autre vertu que de purifier ceux qui sont souillés par le contact d’un mort. Les autres qui s’en servent contractent une souillure, Dieu voulant empêcher ainsi l’emploi de cette eau pour des usages superstitieux. Le rite de la vache rousse est appelé hattâ’f, « sacrifice pour le péché », Num., xix, 9 ; cf. Lev., vi, 18, 23 ; mais c’est un sacrifice d’un caractère exceptionnel, car l’immolation et la combustion ont eu lieu loin du sanctuaire. — La cendre joue ici un rôle très particulier ; elle semble renforcer l’action de l’eau, qui est naturellement purificatrice ; car la cendre est elle-même le produit d’une purification complète par le feu, qui détruit tous les éléments corrompus ou corruptibles. Le mélange de la cendre avec l’eau, dans les purifications, était familier aux anciens peuples, Indiens, Perses, Grecs, Romains, etc. Cf. Virgile, Eclog., viii, 101 ; Ovide, Fast., IV, 639, 725, 733 ; Rosenmûller, Dos dite und neue Morgenland, Leipzig, 1818, t. ii, p. 200 ; Bàhr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1839, t. ii, p. 493-511.

3* La pratique. — Le rite de la vache rousse n’a pas cessé d’être en vigueur chez les Israélites jusqu’à la ruine de leur nationalité. Le traité Para de la Mischna lui est consacré. Les docteurs avaient précisé certains détails du cérémonial. Le prêtre appelé à présider à l’immolation et à la combustion se purifiait pendant sept jours à l’avance. Para, iii, 1. Bien que la loi ne prescrivît pas l’intervention du grand-prêtre, il présidait ordinairement à l’accomplissement du rite, et revêtait pour cette occasion ses plus riches vêtements. Para, iii, 8. La vache était achetée aux frais du trésor du Temple, parce qu’il s’agissait d’un rite intéressant la communauté tout entière. Elle devait être entièrement rousse. La Loi réclamait une vache’adummâh femîmâh, « rousse parfaite », c’est-à-dire sans défaut. Les docteurs joignaient ensemble les deux mots et exigeaient un animal d’un roux complet, cf. Josèphe, Ant. jud., IV, iv, 6, si bien qu’on le rejetait si on lui trouvait seulement deux poils blancs ou noirs. Cf.

Hérodote, ii, 38 ; Maimonide, De voce. » « /., i> 2, Amsterdam, 1711, p. 8. Le prêtre faisait sortir la vache du Temple par la porte orientale et la conduisait au mont des Oliviers. Mais, pour lui faire éviter toute espèce d’impureté, on la menait par un chemin artificiel construit sur étais au-dessus du sol. Para, iii, 6. Quand la vache était immolée, le prêtre recueillait de son sang dans la main gauche et y trempait un doigt de la main droite pour asperger sept fois du côté du Temple. Après la combustion complète de la victime, la cendre était recueillie avec soin et déposée en trois endroits : au mont des Oliviers pour l’usage du peuple, au Temple pour l’usage des prêtres, et dans le mur extérieur de la ville, en souvenir de la combustion. Para, m, 11. Les docteurs prétendaient que neuf vaches rousses seulement avaient été brûlées depuis Moïse, dont une par Éléazar, et les huit autres depuis Esdras. Para, iii, 5. Ce renseignement paraît absolument invraisemblable. Chaque année, la combustion de la vache rousse se faisait en adar, un mois avant la Pàque. Cf. S. Jérôme, Epist., cviii, 12, t. xxii, col. 887. Il est probable qu’à l’occasion de la Pàque on emportait de la cendre dans les principaux centres du pays, afin de rendre possibles les purifications dont le besoin devait être assez fréquent. Autrement il faudrait admettre que la plupart de ceux qui avaient été fouillés par le contact d’un cadavre, d’ossements humains ou d’un sépulcre, attendaient pour se purifier l’oceasion d’un voyage à Jérusalem pour la Pàque ou quelque autre fête ou pour l’offrande d’un sacrifice. — L’eau d’aspersion était puisée à la fontaine de Siloé. À défaut de cette eau, il fallait de l’eau vive et pure. La quantité de cendre à y mettre n’était pas déterminée ; il suffisait qu’on pût apercevoir cette cendre à la surface du liquide. Gern. Jer. Sota, 18, 1. L’aspersion se faisait par un homme en état de pureté légale, sans que ce fût nécessairement par un prêtre. Parfois même on faisait remplir cette fonction par un enfant, afin que la condition de pureté fût plus assurée. Cf. Reland, Anliquitates sacrée, Utrecht, 1741, p. 114 ; Iken, Antiquitates Hebraicm, Brème, 1741, p. 248. — Les formalités à remplir à la suite du contact d’un mort expliquent pourquoi Notre-Seigneur recommande à ses disciples de laisser à, d’autres le soin d’ensevelir les morts. Matth., viii, 22 ; Luc, ix, 60. — Quelques-uns ont pensé que le baptême pour les morts, Otop tôv vsxpôv, dont parle saint Paul, I Cor., xv, 29, pourrait être l’aspersion reçue par les Israélites « à cause » des morts, la préposition iinsp ayant aussi ce sens. « Ceux qui se font baptiser vizkp xôv vsxpûv » seraient alors des Juifs résidant à Corinthe ou des chrétiens venus du judaïsme et encore fidèles à cette ancienne pratique. L’Apôtre invoque ce baptême comme preuve en faveur de la résurrection. Ce raisonnement seul indique qu’il ne saurait être ici question de l’aspersion de l’eau contenant la cendre de la vache rousse, car cette aspersion n’évoque aucune idée de résurrection et se base uniquement sur la souillure communiquée par le contact du cadavre. Cf. Prat. La théologie de S. Paul, Paris,

1908, p. 189.
H. Lesêtre.
    1. VAGAO##

VAGAO (Septante : Ba-j-mac), eunuque d’Holoferne. Judith, xii, 10-12 (15 grec) ; xiii, 3 (grec) ; xiv, 13 (14). Il lui servit d’intermédiaire auprès de Judith. — L’eunuque qui emprisonna le roi de Perse Artaxerxès Ochus s’appelait aussi Bagoas = Vagao. Pline, H. N., XIII, iv, 9, dit que ce nom en Perse est l’équivalent d’eunuque (Bagou). Voir Bagoas, t. i, col. 1383.

    1. VAHEB##

VAHEB (hébreu : Vâhêb ; Septante : Zu>6ê ; ils ont lu nn zaïn au lieu d’an vav) localité inconnue du pays des Amorrhéens, nommée dans une citation obscure, L peut-être altérée pour les noms propres, des

Guerres du Seigneur. Num., xxi, 14. Il est dit dans le texte que Vaheb était en Suphah, ce qui a fait croire à quelques commentateurs que Suphah était la Safiék actuelle, mais la lettre initiale de Suphah est un samedi, d, et celle de Satiéh est un ^j>, èad, qui ne peut guère reproduire le samech hébreu. Suphah est aussi inconnu. Quelques lexicographes ont pensé que Vaheb pouvait être un nom de fleuve. Les Septante ont traduit ; « On lit dans le livre : la guerre du Seigneur a consumé Zoab et les torrents d’Arnon. » La Vulgate porte : « Il est dit dans le livre des Guerres du Seigneur : comme il a fait dans la mer Rouge, ainsi il fera dans les torrents d’Arnon. »

VAISSEAU. Voir Navire, t. iv, col. 1502-1505.

1. VALLÉE(héhreu : ’afîq, biq’âh, gay’ou gê’, nahal, Vme’g/chaldéen ; biq’â' ; Septante : xoc>âç> vora-r, , çâpayE ; Vulgate : vallis, convdllis), dépression de terrain, entre les flancs de collines ou de montagnes, qui va en s’inclinant et en s’élargissant. — Il y a beaucoup de vallées dans une région montagneuse comme la Palestine. Voir Palestine, t. iii, col. 1985, 2037. La vallée dans laquelle coule le Jourdain est particulièrement remarquable à tous les points de vue. Voir Jourdain, t. iii, col. 1710. Un certain nombre d’autres vallées sont mentionnées dans la Bible. Voir Achor, t. i, col. 147 ; Baca, col. 1372 ; Bénédiction, col. 1583 ; Escol, t. ii, col. 1928 ; Géennom, ! . iii, co ! . 153 ; Jephtahel. col. 1249 ; Josaphat, col. 1651 ; Raphaïm, t. v, col. 977 ; Salines, col. 1373 ; Savé, col. 1520 ; Séboïm, col. 1552 ; Sorec, col. 1845 ; TérébinthitheI, col. 2089. Sur la vallée des Bois, voir Morte (Mer), t. iv, col. 1306. Il est aussi parlé d’une vallée des Artisans, I Par., iv, 14 ; II Esd., xi, 35. Sur la vallée du Tyropœon ou des Fromagers, voir Jérusalem, t. iii, col. 1328, Cf. Reland, Palsestina illuslrata, Utrecht, 1714, p. 347-359. — Les vallées de Palestine étaient fertiles et bien cultivées. Job, xxix, 10 ; Ps. lxiv(lxiii), 14 ; Cant., vi, 10 ; Jer., XLix, 4. Les sources y coulaient. Ps. civ (cm), 10. On y habitait de préférence. Num., xiv, 25 ; Jud., i, 19. Balaam compare auxvallées le beau spectacle des tentes d’Israël. Num., xxiv, 6. Ailleurs, il y avait des vallées affreuses. Job, xxx, 6. Les anciens Chananéens occupaient les vallées palestiniennes et ils y faisaient manœuvrer des chars de guerre, ce qui empêcha parfois les Israélites de les en déloger. Jud., i, 19. Par la suite, les Syriens ne pouvaient atteindre ces derniers dans les montagnes et s’efforçaient de les attirer dans les plaines et dans les vallées. III Reg., xx, 23. Les envahisseurs suivaient naturellement le cours des vallées pour arriver dans le pays.Is., xxii, 7 ; Judith, xvi, 5. C’est pourquoi les prophètes annoncent qu’elles seront ruinées, Jer., xlviii, 8, el qu’elles se fondront comme la cire, Mich., i, 4, au moment de l’invasion des ennemis. — Un jour, Dieu comblera les vallées et abaissera les montagnes, Is., xl, 4 ; Bar., v, 7 ; Luc, iii, 5, c’est-à-dire qu’il rendra aisé le chemin qui doit mener au salut.

H. Lesêtre.

2. VALLÉE DES ARTISANS (hébreu : Gê’hârâ-Htn ; Septante : ’Ayeaôôaip, 1 Par., iv, 14 ; ’QvwYï)apauei’i »., II Esd., xi, 35), vallée des environs de Jérusalem, au nord, où étaient des artisans dont elle tirait son nom, I Par., IV, 14, et qui étaient les fils ou les descendants de Joab, de la tribu de Juda. Voir Joab 2, t. iii, col. 1549. Sa position est déterminée approximativement par II Esd., XI, 35, qui nous apprend qu’elle était dans la plaine d’Ono. VoirONO 2, t. iv, col. 1821.

VAN (hébreu : mizréh, nâfdh, rahat ; Septante : xiiiov, Xt’xjioç ; Vulgate : ventilabrum), ustensile qui sert aux vanneurs, zârîm, ventïlatores, pour vanner,

zârâh, Xixjiîv, ventilare, c’est-à-dire pour séparer la paille d’avec le grain. — Pour procéder au vannage, les anciens se servaient d’une fourche à trois ou quatre dents, ventilabrum, au moyen de laquelle ils enlevaient la paille mêlée au grain et la lançaient très loin en l’air. Le vent entraînait la paille, tandis que le grain plus lourd retombait sur le sol. Ensuite on reprenait ce grain avec une pelle de bois, ttcûom, et on le lançait transversalement à la direction du vent, qui emportait les fétus et les rebuts, ne laissant retomber que le

540. — Vanneurs égyptiens.

D’après Wilkinson, Manners of the ancient Egyptians,

1878 ; t. ii, p. 423.

grain (fig. 540). Cf. Moisson, fig. 305, registre d’en bas, à gauche, t. iv, col. 1217. Quand le vent faisait défaut, on employait le vannus, grand panier d’osier peu profond, et muni de deux anses (fig. 541). On y mettait le grain on le projetait en l’air au moyen de brusques secousses et on le ressaisissait quand il retombait, abandonnant à chaque coup une partie des matières plus légères. Il est probable que les Israélites se servaient de ces différents procédés pour vanner. Les trois mots hébreux désignent des instruments différents, dont les versions n’ont pas toujours défini le sens précis. — Il n’est question du van au sens propre que dans Ruth, iii, 2 : Booz doit vanner la nuit l’orge qui est dans son aire. Le travail se fait la nuit, pour éviter la chaleur du jour ; mais il ne l’occupe pas tout entière, car Booz

541.

Panier d’osier servant à vanner.

D’après Rich, Dictionnaire des antiquités, p. 694.

doit prendre son repas et se coucher, bien avant le milieu de la nuit. Ruth, iii, 8. — Dans les autres passages, il n’est parlé de van qu’au sens figuré. Isaïe, xxx, 24, décrivant l’état d’Israël régénéré, dit que les animaux qui travaillent la terre mangeront l’herbe et le grain « que l’on aura vanné avec le ralfat et le mizréh, » peut-être la fourche ou la pelle et le van. Il ajoute que Dieu « vannera les nations avec le van, nâfâh, de la destruction, » qui les dispersera comme la paille. Is., xxx, 28. « Tu les vanneras, fisrêm, XixiiTJo-Eti ; , ventilabis, et le vent les emportera. » Is., XLI, 16. — Jérémie, IV, 11, 12, parlant du châtiment qui va fondre sur Israël, le compare à un. vent violent du désert, plus fort que celui qui sert à vanner et à chasser la paille. Dieu vannera avec un van les Israélites aux portes du pays. Jer., xv, 7. Cf. Job, xxvii, 21. Il lâchera sur Babel « des vanneurs qui la vanneront. » Jer., li, 2. — Ézéchiel, v, 2, pour figurer le châtiment, doit prendre les cheveux et la barbe d’un homme, en brûler un tiers, couper en menus morceaux le second tiers, et vanner au vent le troisième tiers — Amos, &

ix, 9, dit que la maison d’Israël sera secouée au crible, kebdrâh, cribrum. Les Septante traduisent par Xxpoc, « van ». Voir Crible, t. ii, col. 1118. — L’Ecclésiastique, y, 9 (11), recommande de ne pas « vanner atout vent », c’est-à-dire de ne pas changer d’opinion à tout propos.

— Saint Jean-Baptiste annonce que le Messie va paraître le van à la main pour nettoyer son aire et ne garder que le bon grain, c’est-à-dire pour séparer les

542. — Paysan romain occupé à vanner. D’après A. Bich, Dictionnaire des antiquités, p. 446.

méchants d’avec les bons et les envoyer au feu qui ne s’éteint pas. Matth., tu, 12 ; Luc, iii, 17. — Notre-Seigneur dit que la pierre rejetée par les constructeurs écrasera celui sur qui elle tombera, conteret eum ; dans le texte grec : Xix[nrjæi ocutôv, « le vannera », le rejettera au loin comme le vent emporte la paille, ce qui constitue une allusion à la parole de saint Jean-Baptiste.

Matth., xvi, 44 (Bg. 542).
H. Lesêtre.
    1. VAN ESS Léander##

VAN ESS Léander, né le 15 février 1772 à Warbourg en Weslphalie, mort le 13 octobre 1847 à Aiïblderbach in Odenwald. Il entra en 1790 comme novice chez les bénédictins et il fut ordonné prêtre en 1796 à l’abbaye bénédictine de Marienmûnster dans la principauté de Paderborn. En 1812, il devint professeur extraordinaire de théologie catholique à l’université de Marbourg. Il se fit surtout connaître par ses travaux de traduction de la Bible et par son zèle à en propager la lecture. Il publia d’abord avec son frère Charles Die h. Schriften des Neuen Testamentes, Brunswick, 1807, et ensuite, avec la collaboration de H. J. Wetzer, un de ses élèves, Die h. Schriften des Alten Testamentes, mit beigesetzten Vergleichungen der lateinischen Vulgata und erhlàrenden Parallelstellen ûbersetzt, Sulzbach, 1822-1836. Sa version est faite sur le texte hébreu et n’est pas sans reproche. Voir Werner, Geschichte der katholischen Théologie, Munich, 1866, p. 398-400. On a aussi de lui : Pragmatischkritische Geschichte der Vulgata in Allgemeinen, und zunâchst in Beziehung auf das Tridentische Décret. Oder ist der Katholik gesetzlichan die Vulgata gébundent Tubingue, 1824. On lui doit également une édition stéréotypée des Septante, Leipzig, 1824, une édition de la Vulgate, 1822-1824, et une édition du Nouveau Testament grec avec la Vulgate, 1827, etc. — Voir H. Reusch, dans l’Allgemeine deutsche Biographie, t. vi, Leipzig, 1877, p. 378 ; Wetzer et YVelte, Kirchenlexicon, 2e édit., t. iv, 1886, col. 909-910.

    1. VANIA##

VANIA (hébreu : Vanyâh ; Septante : Oûouavfa), un des fils ou descendant de Bani qui avait épousé une femme étrangère. Esdras l’obligea à la renvoyer. I Esd., x, 36.

    1. VANITÉ##

VANITÉ (hébreu : ’avén, ’élil, hébél, Mqêr ; Septante : p-araiÔTir, ;  ; Vulgate : vanitas), ce qui n’a aucune valeur, qui ne mérite pas qu’on s’en occupe, qui est inutile ou nuisible. — Le mot’avén s’entend de tout ce qui est vain, l’idolâtrie et les idoles, I Reg. r xv, 23 ; Is.,

lxvi, 3, voir Idole, t. iii, col. 816 ; le mensonge, Ps. xxxvi (xxxv), 4 ; Prov., xvii, 4, voir Mensonge, t. iv, col. 973, de même que séqér, Ps. xxxm (xxxii), 17 ;

I Reg., xxv, 21 ; Jer., iii, 23 ; la méchanceté, Num., xxiii, 21 ; Job, xxxvi, 21 ; l’épreuve. Ps. lv (liv), 4 ; Prov., xxii, 8, et même la douleur. Gen., xxxv, 18 ; Ose., ix, 4. Le mot’élîl marque l’inutilité, Job, xiii t 4 ; Zach., xi, 17, et hébél le souffle, Lam., iv, 17 ; Jer., x, 3, 8. Voir Souffle, col. 1853. Les Hébreux rangeaient donc ainsi très philosophiquement parmi les chose » de néant les choses mauvaises elles-mêmes, parce qu’elles ne participent pas à ce qu’il y a de positif et de réel dans l’être. — Parmi les vanités, les auteurs sacrés rangent en outre les hommes eux-mêmes, au moins quant à leur nature mortelle, Ps. lxii (lxi), 10, les méchants et leurs œuvres, Is., xli, 29, les Israélites infidèles, Jer., ii, 5, les faux prophètes et leurs visions, Ezech., xiii, 6 ; xxii, 28, les faux docteurs et leurs théories,

II Pet., ii, 18, les gentils, leur conduite et leurs pensées ; Eph., iv, 17 ; I Pet., i, 18 ; Act., xiv, 14, les pensées de l’homme en général, Ps. xciv (xcm), 11, même celles des sages, I Cor., iii, 20, les secours de l’homme, Ps. cvm (cvn), 13, les espérances de l’insensé, Eccli., xxxiv, 1, la divination, les augures et les songes, Eccli., xxxiv, 5, les disputes sur la loi, Tit., iii, 9, la religion de celui qui a mauvaise langue, Jacob, i, 26, le trésor mal acquis, Prov., xxi, 6, la beauté, Prov., xxxi, 30. L’Ecclésiaste énumère avec complaisance ce qu’il appelle hâbêl hâbàlim, « vanité des vanités ». Il la trouve dans la sagesse humaine, i, 12-18, dans les joies profanes, ii, 1-11, dans la richesse, ii, 18-25, dans l’impuissance de l’homme en face des choses de. ce monde, iii, 1-15, et des maux de la vie, IV, 1-16, dans l’ignorance de l’homme, viii, 16-17, dans le sort commun du juste et de l’injuste, ix, 1-10, et il conclut qu’une seule chose n’est pas vanité : craindre Dieu et observer ses commandements, xii, 13. — Saint Paul dit que « la création a été asservie à la vanité. i> Rom., vin, 20. En effet, les choses de la nature, mises par Dieu à la disposition de. l’homme, ont été employées par ce dernier, non pas uniquement au service de Dieu et à sa propre utilité, mais encore à la satisfaction de ses passions dépravées et de ses vices. Aussi la nature attend son affranchissement de la vanité.

H. Lesêtre.
    1. VAPEUR##

VAPEUR, sorte de brouillard qui se dégage de certains corps par suite de l’humidité, de la chaleur, de la combustion d’un parfum, etc. La vapeur est ainsi sensible soit à la vue, comme un nuage, soit au toucher, comme une bouffée de chaleur, soit à l’odorat, comme l’odeur d’un parfum. C’est en ce sens tout vulgaire que les auteurs sacrés parlent de vapeur. — Dans le commencement, une vapeur, ’êd, montait de la terre et arrosait la surface du sol. Gen., ii, 6. C’est le principe du phénomène de la pluie auquel la Sainte Écriture fait plusieurs fois allusion. Job, xxxvi, 27 ; Jer., x, 13 ; li, 16 ; etc. Voir Pluie, t. v, col. 470. Les anciennes versions ont fait de’êd une source, nifff, fons. On a cherché à expliquer ce mot par l’assyrien édû, « flot, inondation ». On lui donne plus généralement le sens de vapeur, par comparaison avec l’arabe, sens qui d’ailleurs convient mieux dans Job, xxxvi, 27. — Avant le feu s’élève la vapeur. de la fournaise, ctT[u’ç, vapor, c’est-à-dire l’air chaud qui précède la flamme^Eccli., xxii, 30. Cette vapeur brûle les membres du forgeron. Eccli., xxxviii, 29. Au jour du jugement, Dieu fera paraître du sang, du feu et timrôp’âsân, des « palmes de fumée ». Joël, ii, 30. Les versions traduisent par àf[iîç xa-icvoO, vapor fumi, et le texte des Actes, ii, 19, reproduit leur traduction. Le sens général est d’ailleurs le même. La Sagesse, xi, 19, parle d’animaux soufflant un air enflammé, jrupnvoov aoBjia, vaporem ignium, « une vapeur de feu ». —La

nuée du parfum qui doit couvrir te propitiatoire, 'ânan, est appelée vapeur par les versions. Lev., xvi, 13. Ezéchiel, viii, 11, nomme aussi 'd(ar, « vapeur », la nuée qui s'élève de l’encens. La sagesse est la « vapeur », àîij. ; ' ; , vapor, de la puissance de Dieu, le doux parfum que cette puissance dégage. Sap., vii, 25. — Saint Jacques, iv, 15, compare la vie.de l’homme à une wapeur qui paraît un moment pour s'évanouir ensuite.

H. Lksètee. VAPSI (hébreu Vofsî ; Septante : 2a6î ; Alexandrinus : 'laaai), père de Nahabi, de la tribu de NephIhali. Nahabi fut rai des douze espions envoyés par Moïse pour explorer la Palestine. Num., xiii, 15 (hébreu, 14).

VASE (hébreu : keli, sinsénéf, éséb, mérqàl.iàh, qérén. ; chaldéen : mâ'n ; Septante : àyYEÏov, axeûoç, irr<i[Avoç ; Vulgate : vas, vasculum), récipient dans lequel on peut verser du liquide et des matières sèches en poudre ou en grains. — Le mot kelî, le plus ordinairement employé, a des acceptions diverses : ustensile en général, instrument, arme, outil, bagage, etc. Le grec <tx£Ûoç se prête à des acceptions analogues. Dans Ja Vulgate, le mot vas, qui traduit littéralement keli et ffxsûoç, ne signifie donc pas toujours un récipient.

1° Vases ordinaires. — Il y a des vases d’argile, Ps. ii, 9 ; Sap., xv, 7 ; etc., voir Poterie, col. 570, de fcois ou de pierre, Exod., vii, 19, d’airain, II Reg., viii,

10, d’argent, Prov., xxv, 4, d’or, III Reg., x, 21, et de grand prix. Jer., xxv, 34. Les vases peuvent contenir de l’eau, Nuoo., xix, 17 ; de l’huile, Num., iv, 9 ; IV Reg., iv, 3-6 ; Judith, x, 5 ; Matth., xxv, 4, quelquefois enfermée dans le creux d’une corne, I Reg., xvi, 1, 13 ; III Reg., i, 39 ; du miel, Gen., xliii, 11 ; III Reg., xiv, 3 ; du vinaigre, Joa., xix, 29 ; des parfums, Gen., xliii

11, spécialementenfermés dans une mérqâhdh, è?âXeiitipov, Job, xli, 23 ; des liquides que l’on transvase, Jer., xlviii, 11, 12 ; des provisions, II Reg., xvil, 28 ; des poissons, Matth., xiii, 48 ; des cendres, Exod., xxv, 38 ; etc. La manne conservée dans l’Arche avait été versée dans un sinsénét, <rrà(jivo ; , « cruche ». Exod., xvi, 33. Les vases servaient surtout à contenir les breuvages. III Reg., x, 21 ; xvil, 10 ; Esth., i, 7 ; etc. Voir Coupe, t. ii, col. 1074. — Les lois de purification contiennent des prescriptions concernant les vases souillés. Le vase dans lequel on a fait cuire une victime pour le péché doit être brisé, s’il est de terre, nettoyé et passé à l’eau, s’il est de métal. Lev., VI, 28. Le traitement est le même pour le vase souillé par le cadavre d’une bête impure, Lev., xi, 33, et pour celui qu’aura touché un homme atteint d’une maladie impure ; le vase de bois sera seulement lavé. Lev., xv, 12. À la mort d’un homme, tout vase découvert qui se trouve dans sa demeure devient impur. Num., xix, 15. Cf. Matth., xxiii, 25, 26 ; Luc, xi, 39, 40. — Les Juifs distinguaient six espèces de vases sujets à la souillure, les vases de terre, de peau (outres), d’os, de verre, de métal et de bois. Us exigeaient des vases différents pour préparer la viande et les autres aliments, lait, beurre, fromage, poisson. Ils regardaient comme interdit de préparer dans le même plat ces aliments, ou même de les manger ensemble ou immédiatement l’un après l’autre. Cf. Reland, Antiq. sacr., Utrecht, 1741, p. 105 ; Iken, Antiq. hébr., Brème, 1741, p. 556.

2° Vases sacrés. — Parmi les ustensiles du sanctuaire se trouvaient des vases proprement dits. Des vases d’or de diverses sortes furent fabriqués pour l’usage du Tabernacle. Exod., xxv, 38 ; xxvii, 3 ; xxxvii, 16, 23 ; xxxviii, 3 ; Num., vii, 84, 85. David offrit à Jéhovah des vases d’or, d’argent et d’airain dont on lui avait fait présent. II Reg., viii, 10. Salomon fit fabriquer d’autres vases précieux pour le service du Temple. III Reg., vu, 45, 50. Asa en donna aussi. III Reg., xv, 15. Joas,

roi d’Israël, s’empara des vases du Temple, IV Reg., xiv, 14 ; II Par., xxv, 24. Les Chaldéens emportèrent les vases sacrés qu’ils trouvèrent au moment de la prise de la ville. IV Reg., xxv, 14 ; II Par., xxxvi, 18. Balthasar s’en servit dans son festin de Babylone. Dan., v, 2, 3, 23. Cyrus les rendit aux Juifs. Jer., xxvii, 16 ; I Esd., i, 7. Plus tard, Antiocbus Épiphane les pilla de nouveau. I Mach., i, 23. Le grand-prêtre Ménélas en fit autant à son époque. II Mach., iv, 32. — Isaïe, lii, 21, invite à se purifier ceux qui portent les vases de Jéhovah. L’offrande est présentée au Temple dans un vase pur. Is., lxvi, 20.

3° Comparaisons. — Le grand-prêtre Onias est comparé à un vase d’or massif. Eccli., l, 10. Des ornements d’argent ne vont pas mieux à un vase d’argile que des lèvres brûlantes à un cœur mauvais. Prov., xxvi, 23. Le vase fêlé, brisé, vide, est l’image de ce qui est impuissant et méprisable. Ps. xxxi (xxx), 13 ; Eccli., xxi, 17 ; Jer., xxii, 28 ; li, 34 ; Bar., vi, 15. La sagesse vaut mieux qu’un vase d’or fin. Job, xxviii, 17. — Les vases d'élection, Act., ix, 15, de colère ou de miséricorde, Rom., IX, 22-23, désignent les hommes qui sont l’objet du choix de Dieu, de sa vengeance ou de sa bonté. — Isaïe, xxii, 24, compare les membres d’une famille à des vases de différentes tailles, depuis la coupe jusqu’aux jarres. Le vase de terre dans lequel on porte le don de Dieu est le corps fragile. Il Cor., iv, 7. Saint Paul donne le nom de vase au corps du chrétien qu’il faut maintenir dans la pureté. I Thés., iv, 4. Saint Pierre appelle la femme « un vase plus faible », que le mari doit traiter avec honneur. I Pet., iii, 7. David emploie lemot kelim, vasa, dans un sens physiologique plus étroit, pour certifier la continence de ses compagnons. I Reg., xxi., 5. Cf. Dhorme, Les livres de Samuel,

Paris, 1910, p. 195.
H. Lesêtre.

VASES DU TEMPLE DE JÉRUSALEM. Voir Mer d’airain, t. iv, col. 982 ; bassins, col. 987.

    1. VASSENI##

VASSENI (hébreu : Vasnî ; Septante : Eavi'), fils aîné de Samuel, d’après I Par., vi, 28. Comme d’après I Sam. (Reg.), viii, 2, le fils aîné de Samuel s’appelait Joël et le secondvbia, il est probable quele nom deJoel est tombé dans les Paralipomènes et que comme Vasseni signifie « le second », il faut rétablir ainsi le texte des Paralipomènes : « Fils de Samuel : le premier-né Joël et le second Abia. » C’est ainsi qu’on lit dans la Peschito et dans la version arabe de la Polyglotte de Walton.

    1. VASTHI##

VASTHI (hébreu : Vastî ; Septante : 'Aort’v), reine de Perse, femme d'Àssuérus. Son nom signifie peutêtre « excellente », d’après le perse vahista. Elle était d’une beauté remarquable et le roi voulut la montrer aux grands de sa cour pendant un festin. Elle donnait elle-même un repas pendant ce temps à ses femmes, et, pour ne pas violer les usages perses, elle refusa de se montrer sans voiles et désobéit au roi. Assuérus la répudia etEsther devint reine à sa place. Esther, i, 9, 11, 12, 15, 16, 17, 19 ; ii, l, 4, 17.

    1. VATABLE ou VATEBLÉ François##

VATABLE ou VATEBLÉ François, hébraïsant français, né à Gamaches en Picardie, mort à Paris le 16 mars 1547. Quand François I er fonda le collège de France (1630), ii y fut le premier professeur d’hébreu et ses cours eurent la plus grande réputation. Il n’a rien écrit sur l'Écriture, mais Robert Eslienne publia à Paris, sous le nom de ce savant, des notes prises à ses cours, qu’il joignit à la Bible traduite en latin par Léon de Juda sur le texte hébreu, in-8°, Paris, 1545, avec d’autres notes empruntées à Calvin, Munster, Fagius, etc. L’imprimeur les attribua à Vatable, sans doute afin d’empêcher la censure de la Sorbonne, mais cela n’empêcha pas les docteurs de Paris d’en discerner le venin

et de les condamner en 1547. Robert Estienne s’étant retiré à Genève défendit son œuvre et la rendit encore plus calviniste en la réimprimant, in-f°, Genève, 1547, avec la traduction latine de Sanctes Pagninus et des noteB tirées de ce dernier et d’autres, au lieu de la traduction de Léon de Juda. Les docteurs de Salamanque en publièrent en 1584 une édition corrigée. Nicolas Henri, professeur d’hébreu au Collège royal, en donna une autre, édition, 2 in-f°, 1729-1745. Les notes sont littérales et critiques, claires et précises, et elles se distinguent par leur caractère philologique de celles des commentaires de cette époque qui sont surtout dogmatiques et polémiques. Robert Estienne publia à part les Psaumes, Genève, 1556, avec des notes plus étendues qui avaient peut-être été recueillies aux cours deVatable. Ges. notes furent insérées dans les Critici sacri et réimprimées aussi à Halle, in-8°, 1767, avec celles de Grotius, par G. J. L. Vogel. — Voir H. Strack, dans Herzog-Hauck, Real-Encyklopàdie fàrprot. Théologie, 3e édit., XX, 1908, p.431 ; Cl.-P. Gouget, Mémoires hist. et littér. sur le collège de France, in-4°, Paris, 1758, p. 88-92.

    1. VATICANUS##

VATICANUS (CODEX). Ce manuscrit célèbre de la Bible grecque appartient à la bibliothèque du Vatican, où il est coté Vatican, gr. 1209 (fig. 543). L’écriture est onciale, d’une main qu’on attribue au iv" siècle. Chaque page a trois colonnes de texte, chaque colonne 42 lignes. Dans les livres poétiques, où le texte est distribué en stiques, on ne compte que deux colonnes à la page. Le parchemin est d’une extrême finesse. Pas d’initiales plus grosses que les caractères courants, mais la première lettre des chapitres (ou ce qui peut être pris pour tel) dépasse un peu en marge. Pas d’accents, pas d’esprits, de première main du moins. Ponctuation très rare, remplacée le plus souvent par un léger espacement des mots à interponctuer. Hauteur du manuscrit : 27 à 28 centimètres ; largeur : 27 à 28 aussi. Le manuscrit compte 759 feuillets, dont 617 pour l’Ancien Testament, 142 pour le Nouveau. Les livres des Machabées n’ont jamais figuré dans le manuscrit. Par accident, il manque Gen., i, 1-xlvi, 28 ; Ps., cv, 27-cxxxvii, 6 ; Hebr., ix, 14-xm, 25 ; les deux Épitres à Timothée, l’Épitre à Tite, l’Épitre à Philémon, l’Apocalypse. Les parties accidentellement manquantes ont été suppléées par un habile copiste du xve siècle. Le texte oncial, si l’on en croit Tischendorf, serait l’œuvre de trois copistes ; le Nouveau Testament serait tout-entier du même copiste. Le texte oncial aurait été corrigé successivement par deux mains, dont la première serait contemporaine des copistes ; la seconde serait du xi=-xiie siècle.

Ce manuscrit. est de premier ordre pour l’établissement du texte grec de la Bible. Tischendorf a émis l’opinion qu’il avait été copié dans le même scriptoriunt que le Codex Sinaiticus, simple possibilité. On a dit souvent qu’il figurait dans les anciens catalogues de labibliothèque du Vatican de la fin du XVe et du XVIe siècle : je l’ai cherché vainement dans l’inventaire du pape Nicolas V, dans celui du pape Léon X, dans celui du pape Paul III. Il n’a été classé à son numéro d’ordre, Vat. gr. 1209, qu’à l’époque du pape Paul V (1605-1621), car il est précédé de peu dans les rayons d’un manuscrit (Vat. 1190) offert à ce pape par Alexandre Turriano, et d’un autre (Vat. 1191) qui a été acquis en 1612. Le Vat. 1208 qui le précède immédiatement est le célèbre manuscrit des Actes des Apôtres écrit en lettres d’or, qui fut donné au pape Innocent VIII par la reine de Chypre, manuscrit qui ne figure pas davantage aux inventaires de Léon X et de Paul III. Il est possible que, possédés par le Saint-Siège pendant tout le xvr siècle, le Vat. 1208 et le Vat. 1209 aient été conservés à part, car le Vat. 1209 était célèbre dès lors. En 1533, Jean Genesius de Sepulveda adresse à Érasme 356 leçons prises à ce manu scrit, leçons que lui a communiquées Paul Bombasio, par une lettre datée de 1521. Nestlé, Septuaginta-Studien, p. 5. En 1546, Sirleto écrit au cardinal Cervini : In quello esemplare chee nella libreria di N. S. il quale un tempo haveva don Basilio, ve son le précise parole que allega S. Paolo, eùipp<iv6r)Te stivri peza toû Xaou axrcov. Rom., xv, 10, pris à Deut., xxxii, 43. Cette lettre de Sirleto est mentionnée dans mon petit livre sur La Vaticane de Paul 111 à Paul V, Paris, 1890, p. 86. J’ignore qui est le don Basilio men~ tionné par Sirleto. En 1583, le même Sirleto écrit à Barthélémy Valverde, qui l’a interrogé sur quelques passages difficiles de la Bible, que les difficultés tiennent moins à la nature du sujet qu’à l’impéritie des copistes ou des éditeurs. Donc, pour les résoudre, Sirleto a le dessein de collationner ces passages cum exemplari grxco Vaticanse bibliothecm, quod tam mires vetustatis est, ut doctorum virorum judicio prseferatur omnibus quse in publicis vel in privatis bibliotheds inveniuntur. Op. cit., p. 84. Nicolas Maggiorano, qui était correcteur à la Vaticane avant de devenir, en 1553, évêque de Molfetta, a colligé une série observationum quas-ar grxco ulriusque Testamenti codice vetustissimo Vaticano annotarat. Ibid. En 1560, Latino Latini rapporte que Sirleto lui a dit que multa szmt in eo codice non temere vulganda, ne novarum rerum studiosis, id est Arianis et Macedonianis huius setatis, maior insaniendi occasio prssbeatur. Op. cit., p. 85. En 1586, l’édition sixtine des Septante est publiée par ordre de Sixte-Quint et par les soins du cardinal Carafa on a pris pour base notre manuscrit, dont Carafa dit, dans la préface : lnlelleximus, cum ex ipsa collatione, tume sacrorum veterum scriptorum consensione, Vaticanum codicem non solum vetustate, verum etiani bonitate cse.te.ris anteire ; quodque caputest, ad ipsam quant quserebamus Septuaginta interpretationem, si non loto libro, maiori certe ex parte, quamproxime accedere. Op. cit., p. 88.

L’édition sixtine des Septante suffit longtemps aux besoins de la critique. En 1669, cependant, un correcteur de la bibliothèque Vaticane, Jules Bartolocci, prit une collation du Nouveau Testament sur l’édition d’Aide de 1518, collation que possède la Bibliothèque nationale, Supp. gr. 53. Voyez Gregory, Prolegomena, p. 361. Nouvelle collation en 1720, pour Bentley : elle est conservée à Cambridge, dans la bibliothèque de Trinity Collège B, 17, 3 et 20. Gregory, ibid. En 1809, le manuscrit était à Paris, où il fut étudié par Léonard Hug, qui publia peu après une dissertation De antiquitate codicis Vaticani, Fribourg, 1810. Le manuscrit fut restitué au Vatican, avec les autres trésors que Napoléon avait enlevés ; puis le cardinal Mai entreprit d’en éditer le texte : on l’imprima, de 1828 à 1838, mais le cardinal Mai, conscient de l’imperfection de son travail, se refusa à le publier jusqu’à sa mort, qui arriva en 1854. La publication fut alors confiée au P. Vercellone, qui s’en acquitta en 1857 une première fois, et à nouveau pour le Nouveau Testament en 1859. Quand on sait quelle difficulté, présente une semblable édition diplomatique, on ne s’étonne pas que celle de Mai et de Vercellone laisse infiniment à désirer. On s’y reprit une troisième fois ; le travail échut, après la mort de Vercellone, au P. Cozza, et l’édition parut de 1868 à 1881. La critique la plus indulgente a estimé que cette dernière tentative ne Tachetait pas le défaut des précédentes. Voyez H. Swete, The Old Testament in greek, Cambridge, 1887, t. i, p. xviii. Nous avons eu enfin une reproduction photographique du Vaticanus, qui coupe court aux critiques, Codicese Vaticanis selecti phototypice expressi, Rome et Milan, 1902 sq. ; Bibliorum græcorum Codex Vaticanus 1209, pars 1, Testamentum Velus, Milan, 1905-1906 ; pars 11, Testamentum À T owm, / Milan, 1904.

P. Batiffol.
Imp. G. Deberque
CODEX VATICANUS
II Par., xxxvi. 11. - Esd., i, 5.
VAUDOISES (VERSIONS) DE LA BIBLE.

Ouand on parle aujourd’hui de versions « vaudoises » de l’Écriture, on n’enlend plus des traductions en langue vulgaire, faites, avant 1170, soit par le Lyonnais Valdo, fondateur de la secte vaudoise, soit par ses premiers adhérents. On entend par là des versions bibliques, rédigées dans le dialecte parlé au xiv « siècle par les habitants des Vallées vaudoises des Alpes. Si les premiers vaudois du xii « siècle avaient à leur disposition une traduction de la Bible (ce qui n’est pas démontré), elle n’avait pas été faite dans ce dialecte, et nous ignorons en quel idiome roman elle aurait été composée. Les manuscrits qui nous restent d’une version biblique en dialecte des Vallées vaudoises sont plus récents et reproduisent un texte différent de celui qu’on attribue à Pierre Valdo de Lyon. Voir Ed. Reuss, Fragments littéraires et critiques relatifs à l’histoire de la Bible française, dans la Revue de théologie de Strasbourg, juin 1851, t. ii, p. 321-364. Les vaudois, du reste, ont eu à leur usage une version provençale du xiii" siècle, qui a exercé de l’influence sur les traductions en idiome vaudois. Voir t, v, cot. 775-776. Celles-ci comprennent le Xouveau Testament en entier et des parties ou fragments de l’Ancien Testament.

I. Nouveau Testament.

Les manuscrits.

1. Le plus ancien de tous a été signalé par le P. Lelong, Bibliothèque sacrée, 1. 1, p. 369, comme appartenant à Henri-Joseph de Thomassin, seigneur de Mazauges, d’après Rémerville de Saint-Quentin, Pièces fugitives, 1704, t. ii, p. 270. Après 1743, il fut acheté par l’évêque de Garpentras, Inguimbert, qui le donna à sa ville épiscopale. Il se trouve aujourd’hui encore à la bibliothèque Inguimbert de Carpentras. Il est du xrv s siècle et d’une écriture arrondie du midi de la France. Il contient, à la suite du Nouveau Testament, les livres sapientiaux de l’Ancien. Chaque livre est précédé d’un prologue ou argument. Rien ne prouve l’origine vaudoise de ce manuscrit qui pourtant a dû être entre les main » de vaudois, comme semble l’indiquer une note italienne du xv » siècle dressant la liste des livres dcutérocanoniques de l’Ancien Testament. S. Berger a publié quelques extraits du texte, dans Romania, 1889, t xvtii, p. 379-382.

2. Vient ensuite, par ordre de date, le manuscrit de Dublin, Trinity Collège, A. 4, 13, daté de 1522. Il provient de l’archevêque Ussher, qui l’avait acheté vers 1634, avec une collection d’écrits vaudois, ayant appartenu au ministre dauphinois J.-P. Perrin. Ces manuscrits avaient été recueillis dans la vallée du Pragela et envoyés par le synode des Vallées à Perrin pour son Histoire des vaudois, Genève, 1618. Cf. op. cit., t. i, p. 57 ; J. Léger, Histoire générale des Églises évangéliques de » Voilées de Piémont ou vaudoises, Leyde, 1€69, t. i, p. 24. W. S. Gilly l’a signalé le premier, en adonné un fac-similé et en a publié l’Évangile de saint Jean, mais d’une façon très fautive. The romaunt Version oftJie Gospel according to St. John, Londres, 1848. M. Herzog, en a pris une copie qu’il a déposée à la bibliothèque royale de Berlin. Cf. Herzog, Die romanisclien Waldenser, p. 55, 99 ; Grûzmacher, Jakrbûcher fur roman, und angl. Litteratur, 1862, t. iv, p. 372 ; Todd, The Boohs of tlte Vaudois, Londres et Cambridge, 1865, p. 1 ; P. Meyer, iîecuei ! d’anciens textes, 1874, p. 32 ; Al. Muston, L’Israël des Alpes, ty èdit., 1879, t. iv, p. 95 ; H.Haupt, DiedeutscheBibelûbersetzung der mitteralterlichen Waldenser, Wurzbourg, 1886, p. 20 ; K Comba, Histoire des vaudois d’Italie, 1887, 1. 1, p. 225 ; C. Salvioni, Bulletin de la Société d’histoire vaudoise, 1889, n. 5, p. 35. Comme le précédent, ce manuscrit contient le Nouveau Testament et les livres sapientiaux ; il n’en est pas cependant la reproduction, puisqu’il s’étend jusqu’au c. xxm de l’Ecclésiastique, alors que le manuscrit de Carpentras s’arrête à xvi, 4.

3. Les manuscrits de Grenoble, bibliothèque municipale, U. 860, et de Cambridge, bibliothèque de l’université, DD. 15. 34, sont du commencement du xv « siècle et reproduisent le même texte, jusqu’aux fautes de copie et aux erreurs. Le premier comprend tout le Nouveau Testament avec une partie des livres sapientiaux de l’Ancien, mais le second n’est qu’un abrégé du Nouveau Testament. Le manuscrit de Grenoble vient de l’évêque Caulet (f1771). Entête de chaque livre, on lit une préface ou argument, dont la traduction est différente de celle du manuscrit de Carpentras et dont le texte latin se rencontre, dès le milieu du xme siècle, dans presque tous les manuscrits de la Vulgate. À la fin, une autre main, dont l’écriture n’est pas antérieure au milieu du xv siècle, atranscritun lectionnaireque l’abbé Misset, parle moyen des fêtes propres, a reconnu pour un lectionnaire de Prague. Or, cette circonstance démontre l’origine vaudoise du manuscrit, car on sait qu’au xve siècle les vaudois ont été en rapports étroits avec les Bohémiens. Champollion-Figeac a publié la parabole de l’enfant prodigue. Nouvelles recherches sur les patois, Paris, 1809, p. 113. Voir encore Gilly,

: op. cit., p. xliv, qui donne un fac-similé ; P. Meyer, 

op. cit., p. 32 ; Muston, op. cit., p. 95 ; Comba, op. cit., p. 224. Le fragment de Cambridge a été retrouvé par Bradshaw au milieu d’une collection de manuscrits vaudois rapportés en Angleterre en 1658 par sir Samuel Morland, commissaire de Cromwel ! auprès du duc de Savoie. Morland les avait reçus de l’historien J. Léger, modérateur des Eglises des Vallées. H. Bradshaw, On the recovery of the long lost Waldensian mss. (rapport lu le 10 mars 1862), Antiquarian communications de la Cambridge antiquarian Society, 1864, t. ii, p. 203, reproduit par, 1. H. Todd, op. cit., p. 214. Cf. Ed. Montet, Histoire littéraire des vaudois, 1885, p. 3 ; Comba, op. cit., p. 224. Son texte se rattache étroitement à celui des manuscrits de Carpentras et de Dublin. Il présente cependant cette particularité qu’à partir du c. xvi, 9, des Actes, commence une nouvelle version qui n’est qu’une paraphrase. Elle est faite littéralement sur le texte italien de la version du dominicain frère Dominique Cavalca, mort en 1342. S. Berger, La Bible italienne au moyen âge, dans Romania, 1894, t. xxiii, p. 37-39.

4. Une dernière copie du Nouveau Testament vaudois se trouve à Zurich, bibliothèque de la ville, C169. Ce manuscrit, qui présente quelques lacunes, a été donné en 1692 à l’universitéde Zurich par Guillaume Malanot, pasteur d’Agragne dans les Vallées vaudoises. Il avait appartenu d’abord à un habitant de la vallée de Pragela, Ed. Reuss, qui l’a étudié à fond, a démontré que le texte a été copié sur un original retouché d’après le Nouveau Testament d’Lrasme de 1522. Revue de tliéologie, décembre 1852, t. v, p. 341-349 ; février 1853, t. vi, p. 80-86. Il reproduit, en effet, le verset des trois témoins célestes. Le manuscrit date donc de 1530, époque à laquelle les vaudois piémontais se sont rapprochés des protestants et se sont initiés à la critique biblique. L’original semble dériver de l’ancêtre commun des manuscrits de Dublin et de Grenoble. Le texte corrigé, et donc le moins bon, du manuscrit de Zurich a été publié par C. Salvioni, dans VArchivio glottologico italiano de M. Ascoli, 1890, t. xi. Cf. Gilly, op. cit., p. lis ; Muston, op. cit., p. 96 ; Comba, op. cit., p. 226.

Caractères de cette version.

1. Elle n’est pas vaudoise de doctrine. Bien qu’elle ait été à l’usage des vaudois comme l’attestent les citations bibliques des ouvrages vaudois, qui sont évidemment empruntées à un texte absolument identique à celui du manuscrit de Carpentras ; il n’est pas sûr cependant qu’elle soit leur œuvre. M. Reuss croyait y découvrir quelques traces de dualisme et des doctrines cathares, étrangères aux idées vaudoises. Elle lui paraissait éviter le mot de créa-

tion etles formules analogues et employer des expressions qui rappelleraient l’éternité de la matière. L’examen plus attentif des manuscrits y a fait retrouver les termes qu’on prétendait avoir été écartés à dessein. Les expressions qui ont paru trahir une tendance à l’ascétisme n’ont pas de portée spéciale. Le mot « Fils de la vierge » pour traduire Films hominis de la Vulgate se retrouve dans une version normande du xme siècle ; il est répété au xve dans différentes traductions dû Nouveau Testament et on ne peut y voir une tentative pour rompre le lien qui unit le Christ à la nature humaine ou à la matière. Pas un mot ne trahit les opinions particulières du traducteur, et la version vaudoise du Nouveau Testament est parfaitement orthodoxe.

2. Elle est faite, d’ailleurs, sur la Vulgate et, aussi bien que les traductions provençales, sur le texte languedocien du xiu 8 siècle. Comme la version provençale du manuscrit du Lyon, à laquelle elle ressemble, voir t. v, col. 776, elle est littérale à l’excès. Cette exactitude littérale a été ici spécialement recherchée tant au point de vue du vocabulaire, qui rend le mot latin le plus près possible, que de la grammaire et de la syntaxe. En outre, on remarque dans les deux versions, vaudoise et provençale, certaines expressions singulières et certaines traductions libres ou inexactes qui leur sont communes, quelques leçons qu’on n’a pas encore retrouvées dans aucun texte latin. Les versions provençales ont donc influencé la traduction vaudoise du Nouveau Testament. Leur origine n’est pourtant probablement pas la même. On constate entre les deux groupes des différences innombrables et de toute nature. La plus importante peut-être est que leur texte latin, quoique languedocien, n’est pas absolument le même et présente des variantes de détail qu’un simple travail de retouche n’expliquerait pas. Celui que représente la’version vaudoise n’est pas de très bon aloi ; il contient des interpolations, provenant d’un déplacement des textes et des passages répétés ou doublets et dont quelques-uns se retrouvent dans les manuscrits languedociens les moins anciens, dans ceux qui ont déjà, comme la traduction vaudoise, les chapitres modernes, . Les textes vaudois ont peut-être été souvent retouchés, parce qu’ils étaient d’un grand usage, et ces retouches auraient été faites d’après les versions provençales.

II. Parties et fragments de l’Ancien Testament. — _ 1° Les livres sapientiaux. — Nous avons déjà constaté que les manuscrits de Carpentras, de Dublin et de Grenoble contenaient, à la suite du Nouveau Testament, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique, les dix premiers chapitres de la Sagesse et les quinze ou vingt-trois premiers de l’Ecclésiastique. Ces livres ne sont complets dans aucun manuscrit, et il n’y a pas de raison qu’ils l’aient jamais été. Le manuscrit de Grenoble reproduit quelques versets de l’Ecclésiastique, xi, 15, 16 ; xii, 166-18 a, qui ne sont pas dans celui de Carpentras. Le texte latin, sur lequel la traduction a été faite, est ce texte parisien qui, sous l’influence de l’université de Paris, est devenu peu à peu général en France, à partir du milieu du xme siècle. On y retrouve les interpolations qui le caractérisent. On n’y remarque par contre aucune des particularités du texte languedocien du xme siècle, qui a servi de base à la version vaudoise du Nouveau Testament. On peut par suite se demander si la traduction des livres sapientiaux vient du même atelier que la précédente. Dans les manuscrits vaudois, le Cantique est accompagné de rubriques allégoriques, qui se présentent sous deux formes quelque peu différentes. Celles du manuscrit de Carpentras semblent avoir été empruntées, presque sans changement, aux Bibles d’Alcuin les plus anciennes et les meilleures. Celles du manuscrit de Grenoble dérivent des manuscrits languedociens les plus anciens ; elles seraient donc les plus anciennes dans la version vau doise. Comme les autres livres sapientiaux ont été traduits sur un texte parisien, qui n’avait pas ces rubriques, on peut se demander si le Cantique n’a pas été traduit à part et peut-être le premier.

2° Autres fragments de l’Ancien Testament. — Les manuscrits qui les contiennent sont vaudois d’origine^ ils ont été donnés à sir Morland par Jean Léger, l’historien des vaudois. Ils paraissent remonter à la seconde moitié du XVe siècle et sont conservés à la bibliothèque de l’université de Cambridge, DD. 15, 29 ; DD. 15, 31. 1. Le ms. À de Morland contient, en tête de différents traités, les neuf premiers chapitres de la Genèse. Le texte latin, sur lequel cette traduction a été faite, n’est pas le texte parisien du xme siècle. La version est assez exacte. — 2. Le ms. C de Morland, un des plus petits manuscrits qu’on connaisse, contient dans la langue des Vallées : à) le supplice des frères Machabées, II Mac, vi, 5-41 ; 6) les trois premiers chapitres de Job et le c. xlii sous le titre de c. ty ; c) le livre entier de Tobie. Le texte latin de Job ne semble pas être exactement le texte parisien du XIIIe siècle ; la version est généralement exacte ; on remarque une leçon singulière, Job, i, 5.

Voir, sur ces versions, les études de Reuss, dans la Revue de théologie de Strasbourg, juin 1851, t. ii, p. 223 ; décembre 1852, t. v, p. 321-349 ; février 1853, t. vi, p. 65-96, et de S. Berger, Les Bibles provençales et vaudoises, dans Romania, 1889, t. xviii, p. 377-414, 416-422, qui remplacent toutes les autres. Nous n’avons fait que les résumer. E. Makgenot.

    1. VAUTOUR##

VAUTOUR, oiseau de proie, de l’ordre des rapaces diurnes. — Les vautours ont une petite tête, un bec robuste et recourbé vers la pointe, un cou long et dénudé, de grandes ailes et une queue courte. Ils s’élèvent très haut en tournoyant, mais d’un vol lourd. Ils sont lâches et voraces, s’attaquent aux petits animaux et, à leur défaut, se contentent de substances en putréfaction. Ils répandent une odeur infecte. Leur habitation ordinaire est dans les hautes montagnes. Les vautours sont représentés dans la Bible par le Gypaète, t. iii, col. 371, et le Pernocptère.I. v, col. 124, ou vautour d’Egypte. — Il y a trois mots hébreux qui désignent pour les versions soit le vautour, soit le milan ; dd’ah, yû’l/, « vautour », milvus, s milan » ; ’ayyâh, ïxtivoç, « milan », vultur, « vautour », Lev., xi, 14 ; voir Dâ’âh, t. ii, col. 1195 ; ’ayyâh et dayyâh, le vautour et le milan, également interdits, Deut., xiv, 13 ; dayyôf, rnilvi, « milans » qui se rassemblent dans les déserts, et que les Septante appellent des « cerfs », eXaçoi, Is., xxxiv, 15 ; enfin le’ayyâh de Job, xxviii, 7, qui a l’œil perçant et dont les versions font un vautour. Le’ayyâh est plus probablement le milan royal. Voir Milan, t. iv, col. 1084. D’après Bochart, Hierozoicon, t. ii, p. 196, et Gesenias, Thésaurus, p. 335, dayyâh désignerait une espèce de vautour. Il faut croire, avec la plupart des versions, que c’est le nom d’un milan. Ce sens devient le plus probable, si l’on observe que, chez les Arabes, h’dayah est le nom du milan noir, le milvus migrans, distinct du milan roux ou royal. Cet oiseau a environ m 55 de long. Il porte un plumage uniforme d’un brun noir sur le dos et fauve en dessous. Sa queue est longue, mais moins fourchue que celle du milan roux. Sa ponte est de deux ou trois œufs. C’est un oiseau migrateur, qui disparaît de Palestine durant les trois mois d’hiver et revient en mars. On le trouve alors un peu partout, spécialement auprès des villages, qui lui procurent une provende facile. Il n’attaque par les poules, mais leur dispute leurs détritus. Quand on abat quelque bétail, il est là en nombre, profitant de l’inattention pour enlever quelque morceau et tenant à l’écart les rusés et avides corbeaux. Il est très maladroit dans le 2385

VAUTOUR - VEAU D’OR

2386

choix d’un emplacement pour son nid, qu’il pose généralement sur un arbre, dans une gorge, mais parfois entre les racines dénudées d’un arbuste et sur le bord même du rocher. Ce nid est pitoyablement construit de branchages et garni de tous les chiffons qui se peuvent rencontrer. Néanmoins, le vol de l’oiseau est élégant et ses mouvements sont agréables à l'œil. Le milvus legyptius a le plumage plus clair. On le rencontre fréquemment en Palestine, mais les Arabes le confondent avec le précédent. Comme tous les oiseaux de proie, le milan a été prohibé par Moïse. Deut., xiv, 13. Cf. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 181 ; Wood, Bible animais, Londres, 1884,

p. 358.
H. Lesêtre.

VAV, sixième, lettre de l’alphabet hébreu, i, v. « crochet, clou », objet dont elle a conservé la forme, C’est une lettre servile dont la langue hébraïque fait le plus grand usage.

    1. VEADAR##

VEADAR, mois complémentaire juif, Les mois de l’année juive étaient comme les nôtres au nombre de douze, mais leur année était lunaire, par conséquent plus courte de onzejours que l’année solaire. Pour la faire accorder avec l’année solaire, on ajoutait tous les trois ans environ un treizième mois, qui n’est pas mentionné dans la Bible, Veadar, ainsi appelé parce qu’on le plaçait entre adar et nisan.

VEAU (hébreu : par, 'égél ; Septante : iiôa-^oç, LoayJtptov ; Vulgate : vitulus, juvenculus), jeune taureau. 1° Le veau bondit dans les champs où on l’engraisse, Ps. xxix (xxviii), 6 ; Mal., iv, 2, et y vit indompté. Jer., xxxi, 18. Il paît là où s'élevaient autrefois des villes, Is., xxvii, 10, et, avec les autres bêtes des champs, il devient la proie des envahisseurs. I Reg., xiv, 32 ; Is., xxxiv, 7. À l'âge d’or, figure de la restauration spirituelle, il habitera avec le lion. Is., xi, 6. Les mercenaires d’Egypte sont comparés à des veaux gras, à cause de leur force et de leur belle apparence. Jer., xl vi, 21. — 2° Le veau sert à la nourriture de l’homme, et le veau gras figure dans les festins. Gen., xviii, 7 ;

I Reg., xxviii, 24 ; III Reg., i, 9 ; Am., yi, 4 ; Luc, xv, 23. — 3° Le veau est employé dans les sacrifices pour la consécration des prêtres, Exod., xxix, 1 ; Lev., viii, 2, dans l’holocauste, Lev., i, 5, dans le sacrifice pour le péché, Lev., iv, 3 ; îx, 2 ; xvi, 3, ou pour l’erreur, Kum., xv, 24, à la néoménie, Num., xxviii, 11, à la Pâque, Num., xxviii, 19, à la Pentecôte, Num., xxviii, 27 ; Lev., xxiii, 16, aux fêtes des Trompettes, Num., xxix, 2, de l’Expiation, Num., XXIX, 8, et des Tabernacles. Num., xxix, 13. Cf. Mich., vi, 6. Un veau gras fut immolé pendant le transport de l’Arche à Jérusalem.

II Reg., vi, 13. Cyrus ordonna de fournir des veaux pour les sacrifices des Juifs. I Esd., vi, 9. Le Seigneur préférait la prière et la pratique de la vertu à de tels sacrifices. Ps. lxix (lxviii), 32 ; Is., i, 11. — On passait entre les deux moitiés d’un veau pour contracter une alliance. Jer., xxxiv, 18. Voir Sacrifice, col. 1317. — Les versions parlent quelquefois de veaux quand il s’agit de taureaux dans le texte hébreu. Voir Bœuf, t. i, col. 1833 ; Chérubin, t. ii, col. 663 ; Taureau,

col. 2015.
H. Lesêtre.
    1. VEAU D’OR##

VEAU D’OR (hébreu : 'êgél massêkâh ; Septante : u.ô<r/oç 3( <oveUT0 'c i Vulgate : vitulus confîatilis), veau de métal fabriqué pour être l’objet d’un culte idolâtrique.

1° Au désert. — Pendant les quarante jours que Moïse demeura sur le Sinaî pour y recevoir la loi de Jéhovah, Exod., xxiv, 18 ; Deut., ix, 11, les Israélites se découragèrent en s’imaginant qu’il ne reviendrait plus pour les guider. Ils s’adressèrent donc à celui qui était le plus qualifié pour leur venir en aide, Aaron, et

lui demandèrent de leur faire 'ëlohim 'âsér yêlkû lepanênû, ôîo’jç oi.'itpoTtopsûg’ovTixi T|[i<ôv, deos qui nos procédant. Ce pluriel, qu’on reproduira bientôt en l’appliquant à une effigie unique, Exod., xxxil, 1, 4, est évidemment à entendre au singulier, sinon dans la pensée du peuple, du moins dans celle d’Aaron. Peutêtre le peuple réclamait-il plusieurs simulacres, figurant, comme en Egypte, les différents attributs de la divinité. Il est possible d’ailleurs, comme l’insinue saint Paul, I Cor., x, 7, que ce désir n’ait pas été partagé par le peuple tout entier. Il était en effet radicalement contraire à la loi du Décalogue qui venait d'être promulguée. Exod., xx, 4. Aaron ne se sentit pas en mesure de résister à la requête qui luiétaitadressée par des hommes égarés, capables de se porter à de redoutables extrémités, peut-être même de reprendre le chemin de l’Egypte. Quelle responsabilité n’eût-il pas encourue aux yeux de Moïse, si celui-ci, à son retour, n’eût plus retrouvé qu’un peuple révolté et disses miné à travers le désert ? Il se décida donc à faire cequ’on lui demandait, mais à une condition qui devait donner à réfléchir et qui peut-être ferait renoncer lepeuple à son exigence. Il demanda qu’on lui apportât les anneaux d’or que les femmes, leurs fils et leurs, filles portaient aux oreilles. Le sacrifice fut consenti sans hésitation et Aaron dut exécuter ce qu’on atten-dait de lui. Il fit fondre le métal précieux et fabriquerun veau d’or. Voir Or, t. iv, col. 1839. Tenta-t-il, en faisant exécuter hâtivement un simulacre grossier, dedécourager les Israélites et de leur faire comprendrel’inconvenance de leur désir ? Il n’y réussit certainement pas ; car, dès que l'œuvre fut achevée, ses inspirateurs dirent à tout le peuple : « Israël, voici tes. dieux, qui t’ont fait monter du pays d’Egypte. » Les Septante et le Syriaque attribuent ces paroles à Aaron lui-même. Il serait donc possible que, par un changement de ponctuation, les anciens transcripteurs hébreux aient mis le pluriel, pour atténuer la responsabilité d’Aaron. Tous savaient que Jéhovah avait été l’auteur de la délivrance de son peuple. On ne pouvait donc voir dans l’effigie d’or qu’une représentation de Jéhovah, que seuls les plus grossiers seraient tentés de confondre avec lui. — Voyant l'état d’esprit du peuple et ne sachant lui-même quand Moïse reparaîtrait, . Aaron dressa un autel devant le veau d’or et dit i « Demain, il y aura fête en l’honneur de Jéhovah ! » C'était une manière d’affirmer la souveraineté de Dieu qui s'était révélé à Moïse et d’empêcher des écarts nettement idolâtriques. Par la célébration de la fête, Aaron pouvait aussi gagner du temps et calmer l’impatience inquiète des Israélites. Averti par le Seigneur, Moïse intercéda pour son peuple et descendit de la montagne. Il trouva tout le camp en fête, s’indigna vivement et interpella Aaron : « Que t’a fait ce peuple, pour que tu aies amené sur lui un tel péché ? » Aaron. s’excusa en rappelant les exigences des Israélites.. Moïse broya le veau d’or et le fit réduire en poudre ; , il répandit cette poudre dans l’eau et ordonna auxenfants d’Israël de la boire. Profitant de ce que la plupart des coupables étaient désarmés, il fit appel à ceus. qui voudraient venger l’offense faite à Jéhovah. Les enfants de Lévi se présentèrent, fondirent sur les prévaricateurs au milieu de leurs festins et en massacrèrent 3000 (et non 23000, comme porte la Vulgate actuelle). De retour auprès de Jéhovah sur la montagne, Moïse implora et obtint le pardon de son peuple. Exod., xxxii, 1-35. — Cette tentative avait mis en lumière les instincts idolâtriques des Israélites. Legrossier emblème du veau d’or fut détruit ; mais, par la suite, le Seigneur ordonna la construction de l’Arched’alliance, qui devait être comme le signe sensible de sa présence au milieu de son peuple. Moïse revint plus, tard sur ce triste épisode. Il rappela combien Jéhovah 2387

VEAU D’OR — VENCE (BIBLE DE)

2388

avait été irrité contre son peuple, et particulièrement contre Aaron qu’il eût fait périr sans la supplication de Moïse. Deut., ix, 8-21. Aaron s’était donc montré gravement coupable de faiblesse, en se prêtant à l’exécution d’un pareil attentat contre la gloire de Jéhovah. Cf. Ps. cti (cm), 19-23 ; II Esd., ix, 18 ; Act., vii, 40, 41. 2° En Samarie. — En attribuant à Jéroboam la royauté sur dix tribus, le Seigneur lui promit, s’il était fidèle à ses lois, de bénir sa maison comme il l’avait fait pour David. III Reg., xi, 37, 38. La division du royaume demeurait donc compatible avec le maintien du culte traditionnel. Jéroboam n’eut pas une foi suffisante en cette promesse divine. Il s’imagina que la fréquentation du Temple de Jérusalem par ses sujets porterait préjudice à la solidité de son pouvoir et amènerait fatalement les Israélites à se replacer sous la domination des descendants de David. Pour parer à ce danger, il fit fabriquer deux veaux d’or, qu’il

544. — Taureau sacré.

Modèle de sculpture, au musée de Gizéh.

installa aux deux extrémités de son royaume, à Dan et à Béthel. Puis il dit aux Israélites, comme on avait dit autrefois au désert : « Israël, voici ton Dieu qui t’a fait sortir du pays d’Egypte. » Enfin il institua un nouveau culte et Un nouveau sacerdoce, pour que son peuple n’eût rien à envier à celui de Juda. Le Seigneur fit signifier à Jéroboam combien son entreprise lui déplaisait. III Reg., xii, 26-33 ; xiii, 1-10. Le roi d’Israël n’avait pas le dessein d’ériger des idoles, mais seulement des représentations visibles de Jéhovah. Néanmoins son initiative était condamnée par le texte du Décalogue et par les suites qu’avait entraînées l’aventure du veau d’or d’Aaron. En outre, la nouvelle institution détournait pratiquement les Israélites du culte qui leur était prescrit dans le Temple de Jérusalem. Abia, roi de Juda, reprocha en vain à Jéroboam son entreprise sacrilège. II Par., xiii, 8. Les deux veaux d’or demeurèrent en place. Jéhu fit disparaître les idoles de Baal, mais laissa subsister les veaux d’or. IV Reg., x, 29. À quelques exceptions près, les Israélites leur rendaient un culte assidu. Tob., i, 5. Osée, vm, 6, prédit la mise en pièces du veau de Samarie. Il reproche à Israël de s’abaisser à adorer des veaux. Ose., . xiii, 2. Il était inévitable, en effet, que les Israélites en vinssent peu à peu à prendre l’effigie pour la divinité elle-même et à tomber ainsi dans la plus grossière idolâtrie. Cette adoration des veaux d’or est signalée comme l’une des impiétés qui amenèrent la ruine du royaume d’Israël. IV Reg., xvii, 16. En souvenir de ce culte idolâtrique, le nom de fiéthaven, « maison de la vanité » ou « de l’idole », fut attribué à Béthel. Voir

    1. BÉTHAVEN##

BÉTHAVEN, t. i, col. 1666.

3° Raison du symbole. — Il y a lieu de se demander

quel motif put déterminer Aaron et plus tard Jéroboam à choisir un jeune taureau comme symbole de Jéhovah, Les Hébreux sortaient d’Egypte, où ils avaient vu les habitants adorer un bœuf. En faisant fondre un veau d’or, Aaron devait savoir qu’il répondrait ainsi à la pensée des Israélites accoutumés à voir plusieurs divinités égyptiennes qui se personnifiaient dans un taureau, principalement le dieu Apis (Hapi) qui est la seconde vie de Phtah ; il était honoré à Memphis. Apis mort était Osiris, d’où les Grecs firent Sérapis. On trouve aussi représenté sous forme de bœuf ou de taureau : Mnévis ou l’âme de Rà à Héliopolis ; le dieu Kem à Thèbes ; Mentou à Hermonthis. Voir APIS, t. I. col. 741. Ces dieux étaient censés marquer de certains stigmates les sujets qu’ils animaient. Ces stigmates consistaient en taches noires disposées comme dans la figure 544 ; Cf. Mariette, Notice des principaux monuments, 1876, p. 222, n. 666 ; Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 119. Le choix de cette représentation divine rappelait d’ailleurs aux Hébreux de vieilles traditions ancestrales. Les Babyloniens et les Assyriens avaient un dieu Hadad ou Adad, qui présidait aux vents, aux orages et aux tonnerres. Identique à Ftammàn, voir Remmon, t. v, col. 1036, il était symbolisé par le taureau, comme l’Indra védique. Or, au Sinaï, Jéhovah venait de se manifester au milieu des éclairs et des tonnerres. Exod., xix, 16-20. Il était donc naturel que, pour rappeler à son peuple la présence de Jéhovah qui l’avait tiré d’Egypte, Aaron empruntât le symbole du dieu babylonien des orages, Hadad, le dieu sémite, pour représenter la protection divine assurée à Israël. Hadad devint le dieu le plus vénéré et le plus répandu de la Syrie. Voir Hadad, t. iii, col. 391. Les rois de Damas, comme ceux d’Assyrie, aimaient à faire entrer son nom dans la composition du leur. — Jéroboam fit plus tard comme Aaron en érigeant sîs veaux d’or à Dan et à Béthel. II fusionnait ainsi dans un même symbole l’idée du vrai Dieu et celle d’une des divinités sémites les plus populaires. Cf. Dhorme, Les Sémites, dans Où en est l’histoire des religions, Paris, 1911, 1. 1, p. 147, 165, 166, 177 ; Lagrange, Études sur les religions sémitiques, Paris, 1905, p. 93, 94 ; H. Vincent,

Canaan, Paris, 1907, p. 467.
H. Lesêtre.

VÉGÉTAUX. Voir Arbres, t. i, col. 888-894 ; Herbacées (Plantes), t. iii, col. 596-599, et les noms de chaque plante.

VEILLE. Voir Heure, t. iii, col. 683.

    1. VEINE##

VEINE, conduit qui ramène le sang vers le cœur. Il n’en est point parlé dans la Bible. Mais la Vulgate se sert du mot vena pour désigner le canal naturel par où passe l’eau d’une source, et ce mot traduit mâqôr, Tifr, e. source ». Il est ainsi question de veine d’eaux vives, Jer., xvii, 13, de source de la mer, Jer., n, 36, de veine desséchée, Ose., xiii, 15, ou corrompue, Prov., xxv, 26, et, par métaphore, de la veine de la vie, Prov., v, 18, et de la parole qui enseigne le bien. Prov., x, 11. —La Vulgate emploie le même mot pour parler du filon d’argent dans une mine, traduisant ainsi mâqôm, toitoç, « lieu ». Job, xxviii, 1.

H. Lesêtre.

VEL (hébreu : ’Ûêl ; Septante : OOriX), un des fils ou descendants de Bani, qui avait épousé une femme étrangère. Esdras l’obligea à la renvoyer. I Esd., x, 34.

    1. VENCE##

VENCE (BIBLE DE). H. François, abbé de Vence (vers 1675-1749), publia à Nancy, 22 in-12, 1738-1743, une nouvelle édition de la Bible de Carrières (voir Carrières, t. ii, col. 323), en y ajoutant des dissertations. Ces dissertations furent insérées depuis dans la Bible de Calmet. Rondet (1717-1785) en donna une édition nou

velle à Avignon, J7 in-4°, 1767-1773. Cette édition est connue sous le nom de Bible de Vence.

    1. VENDANGE##

VENDANGE (hébreu : bâçir ; Septante : xpu-piTÔç ; Vulgate : vindemia), récolte des raisins (voir fig. 165, col. 613).

1° En Palestine, la vendange commence dès le début de septembre dans les vallées chaudes, pour se terminer en octobre dans les régions plus froides. Elle rejoint donc les semailles, qui se font en novembre. C’est ce que le Seigneur avait promis à son peuple, s’il lui restait fidèle. Lev., xxvi, 5 ; Am., ix, 13. La Vendange des raisins spontanés ne devait se faire ni l’année sabbatique, ni l’année jubilaire. Lev., xxv, 5, 11. Les autres années, le vendangeur devait laisser de quoi grappiller à l’étranger, à l’orphelin et à la veuve. Deut., xxiv, 21. Voir Grappillage, t. iii, col. 308. Les pauvres en étaient quelquefois réduits à marauder dans les vignes de leurs oppresseurs. Job, xxiv, 6. — La vendange devait manquer à Israël devenu infidèle. Deut., xxviii, 30 ; Is., xxxii, 10. — La récolte des raisins se faisait avec d’autant plus de joie qu’elle terminait toutes les autres. Ps., iv, 8. Ainsi on voit les gens de Sichem vendanger, fouler, faire la fête et continuer les festins dans la maison de leur dieu. Jug., ix, 27. Le foulage du raisin s’exécutait en effet à mesure qu’il était cueilli, les pressoirs se trouvant disposés dans les vignes ou à proximité. Voir Pressoir, fig. 164-169, col. 612-616. En temps de détresse, « dans les vignes, plus de chants, plus de cris de joie. t> Is., xvi, 10. « On ne foule plus au bruit des cris de joie ; le cri de joie n’est plus. » Jer., xxv, 30 ; xlviii, 33. La vendange mettait tout le monde en fête, tant à cause de l’extension des vignobles qu’à raison de la richesse des produits et du profit qu’on en pouvait tirer.

2°, Le sort d’un peuple châtié par Dieu est comparé à celui d’une vigne à la suite de la vendange et du grappillage. Is., xxiv, 13 ; Jer., xlix, 9 ; Mich., vii, 1. Édom est pillé comme par des vendangeurs qui n’ont rien laissé. Abd., 5. Après le châtiment d’Israël, les restes du peuple sont comme une vigne où le vendangeur ne trouve plus que des sarments. Jer., vi, 9. Le Seigneur a vendangé Jérusalem au moyen des Chaldéens. Lam., I, 12, 22 ; ii, 20. Il vendange l’orgueil des puissants. Ps. lxxvi (lxxv), 13. Le jugement du monde est comparé à une vendange. Apoc., xiv, 18, 19. — Gédéon, de la famille d’Abiézer, dit aux Éphraïmites mécontents de n’avoir pas pris part au combat contre les Madianites : « Le grappillage d’Éphraïm ne vaut-il pas mieux que la vendange d’Abiézer ? » Judr, viii, 2. On ne vendange pas des raisins sur des ronces, Luc, vi, 44, c’est-à-dire on n’attend pas de bons fruits de mauvais arbres. — La sagesse fait déborder la science comme le "Géhon au temps de la vendange, Eccli., xxiv, 25 (37), c’est-à-dire comme un fleuve qui déborde au commencement de l’automne, ainsi que le Nil. Le fils de Sirach a recueilli la sagesse comme celui qui grappille après la vendange, parce que d’autres l’ont précédé, mais qui cependant en trouve assez pour remplir le pressoir comme le vendangeur. Eccli., xxxiii, 16.

H Lfsètre

VENDEURS DU TEMPLE. Voir Marchand, t. iv, col. 747.

1. VENETUS (CODEX), manuscrit important de la Bible grecque, à la bibliothèque de Saint-Marc à Venise, sous la cote i. Écriture du vm-ixe siècle, format in-folio. Le manuscrit a compté 360 feuillets, dont les 196 premiers ont disparu. Deux colonnes à la page, soixante lignes à la colonne. Initiales en vedette dans la marge. Le manuscrit, tel que nous l’avons, commence au livre de Job (xxx, 8) et contient à la suite les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique, la Sagesse, l’Ecclé siastique, les petits Prophètes, Isaïe, Jérémie, Baruch, les Lamentations, Daniel (avec ses portions deutérocanoniques), Tobie, Judith, les quatre livres desMachabées. A l’issue de Daniel et du dernier Macchabée, le copiste a transcrit une table chronologique, commençant à Adam, s’arrêtant à l’empereur Justinien : on infère de là que l’archétype du manuscrit remontait au VIe siècle.

— Le Codex Venetus a appartenu à la bibliothèque du cardinal Bessarion, qui le légua à Saint-Marc. Il a servi à l’établissement du texte de l’édition sixtine des Septante, à laquelle il a, pense-t-on, fourni le texte des trois premiers livres des Machabées qui manquent au Codex Vaticanus. II a été décrit par Zanetti, Grseca D. Marci bibliotheca codd.mss., Venise, 1740, p. 1-13. Il fut collationné en 1789 par Holmes et Parsons. Il a été utilisé pour les Machabées par H. B. Swete, The Old Testament in Greek, Cambridge, 1894, t. iii, p. xrv-xvi. P. Batiffol.

2. VENETUS (CODEX), manuscrit grec oncial des quatre Évangiles, à la bibliothèque de Saint-Marc à Venise, sous la cote /, vin. Écriture du rxe-x" siècle, format in-quarto, 491 feuillets, à deux colonnes. Grande écriture onciale, avec accents et esprits, grandes initiales en tête des paragraphes. Ce manuscrit a été collationné par Tischendorf et par Tregelles. Gregory, Prolegomena, p. 393 ; Mingarellr, Grseci codices manuscripti apud Nanianos, Bologne, 1784, p. 1.

P. Batiffol.

    1. VENGEANCE##

VENGEANCE (hébreu : nâqdm, neqâmâh ; Septante : 6 ! xï), èxBfxviiriç, xpi’oi ;  ; Vulgate : vindicta, ultio), traitement de rigueur infligé à ceux qui ont fait le mal.

1° Vengeance divine. — Dieu se réserve le droit de vengeance : i À moi la vengeance et la rétribution ! » Deut., xxxii, 35 ; Rom., xii, 19 ; Hebr., x, 30. Le jour où il exerce sa justice contre’les coupables est appelé « jour de la vengeance », Eccli., v, 7, ce qui est particulièrement vrai du dernier jugement. Luc, xxi, 22. La vengeance contre les méchants est pour Dieu comme un vêtement, Is., nx, [18vTentourant ainsi que sa justice. Il se venge de ses ennemis, Deut., xxxii, 41, 43, des impies et des pécheurs, Eccli., vii, 19(16) ; xii, 7 (6), des orgueilleux, Eccli., xxvii, 31 (28), des nations, Mich., v, 14 ; Ps. cxlix (cxlviii), 7, des ennemis de son peuple, Is., xxxv, 4, spécialement des Madianites, Nnm., xxxi, 3, des Ammonites, Jud., xi, 36, des Philistins, Ezech., xxv, 17, des Égyptiens, Jer., xlvi, 10, des Iduméens, Is., lxiii, 4 ; Ezech., xxv, 14, de Tyr et de Sidon, Jo., iii, 4, de Ninive, Nah., i, 2, de Babylone, Is., xl vii, 3 ; Jer., l, 15, 28 ; li, 6, 11, 36. Il venge sur Jézabel le sang de ses serviteurs. IV Reg., ix, 7. — Il exerce ainsi sa vengeance en faveur de son peuple. Is., xxxiv, 8 ; lxi, 2. Mais, quand son peuple deviendra infidèle, il se vengera aussi de lui. Lev., xxvi, 25 ; Ezech., xxiv, 8. — Les éléments de la nature concourront à l’exercice de cette vengeance divine. Sap., v, 18 ; Eccli., xxxix, 33, 35 (28, 30). — Dieu vengera Caïn sept fois, et Lamech soixante-dix fois sept fois. Gen., IV, 24. Il vengera Jérémie contre les faux prophètes. Jer., XI, 20. Un jour, il vengera de même ses élus. Luc, xviii, 7.

Les justes appellent la vengeance de Dieu contreleurs persécuteurs. Ps. lxxix (lxxviii), 10 ; I Reg., xxiv, 13 ; I Mach., ii, 67 ; vii, 38. « Dieu des vengeances, parais… Rends aux superbes selon leurs œuvres ! » s’écrie le Psalmiste. Ps. xciv (xcm), 1, 2. David remercie Jéhovah de lui avoir accordé des vengeances. Ll Reg., xxii, 48 ; Ps. xviii (xvii), 48 ; Judith, viii, 34. À ces désirs des justes de l’Ancien Testament, Notre-Seigneur substitue la règle évangélique : « Bénissez ceux qui vous maudissent, … priez pour ceux qui vous maltraitent. » Matth., v, 44. — Il reste toujours nécessaire de dire à Dieu : « Ne tirez pas vengeance de mes péchés. » Tob., m, 3.

Vengeance humaine.

Dieu défendit la vengeance aux Israélites, au moins à l’égard de leurs frères : « Tu ne le vengeras pas, tu ne garderas pas de rancune contre les enfants de ton peuple. » Lev., xix, 18. « Celui qui se venge éprouvera la vengeance divine, et le Seigneur conservera soigneusement ses péchés. s Eccli., xxviii, 1. II y a cependant des vengeances justes, celles que Samson tire des Philistins, Jud., xv, 7 ; xvi, 28 ; celle que David exerce sur ces mêmes Philistins au nom de Saûl, I Reg., zvin, 25 ; celle des Hébreux contre leurs ennemis à Gabaon, Jos., x, 13 ; celle de Jonathas et de Simon contre les meurtriers de leur frère, I Mach., ix, 42 ; celle du mari outragé contre l’adultère. Prov., vi, 34. D’autres vengeances sont exagérées ou même totalement injustes, celle de Siméon et de Lévi contre les insulteurs de leur sœur, Gen., xxxiv, 27, celle de Joab contre Abner, II Reg., iii, 27, celle des ennemis de Jérémie contre le prophète, Jer., xx, 10, celle des Iduméens contre les Juifs, Ezech., xxv, 12. celle des Juifs de Perse contre leurs ennemis, Esth., viil, 13, celle des Syriens contre les Juifs. I Mach., 111, 15 ; cf. II Mach., viii, 11. — Saint Paul recommande expressément aux chrétiens de ne pas se venger eux-mêmes, mais de laisser agir la justice de Dieu. Rom., xii, 19. — Sur les sentiments de vengeance exprimés dans les Psaumes, voir Imprécation, 5°, t. iii, col. 854.

H. Lesêtre.

VENIN. Voir Poison, col. 493.


VENT (hébreu irûdh ; Septante : ctvsfio ; , uvj0|jia, 7cvoîi ; Vulgate : venins, spiritus), mouvement plus ou moins rapide des masses d’air atmosphérique, généralement dans le plan de l’horizon, et se propageant par insufflation ou par aspiration. Le vent résulte des différences de densité de l’air par suite de l’inégal échauffement du sol terrestre, et de quelques causes accessoires. Les anciens ignoraient la cause du vent. Les écrivains sacrés n’en parlent que comme d’un phénomène de la nature qui les intéresse surtout par ses effets. — Sur le régime des vents en Palestine, voir Palestine, t. iv, col. 2026.

Origine du vent.

Dieu a créé le vent, Am., iVi 13, comme toutes les autres forces de la nature. Il le tire de ses réservoirs, Jer., li, 16, et de ses trésors. Ps. cxxxv (cxxxiv), 7. Lui-même en règle la force, Job, zxviii, 25, et la direction. Eccli., xliii, 17. C’est pourquoi les écrivains sacrés appellent le vent « souffle des narines de Dieu », Exod., xv, 8, « souffle de la bouche de Dieu », Job, xv, 30, ou « souffle de Jéhovah ». III Reg., xviii, 12 ; IV Reg., ii, 16 ; Is., xl, 7 ; lix, 19, etc. — Notre-Seigneur a commandé au vent et s’en est fait obéir. Matth., viii, 26 27 ; Marc, iv, 37-40 ; Luc, viii, 23-25.

Différentes espèces de vents.

Les Hébreux distinguaient quatre vents, correspondant aux quatre points cardinaux d’après leur direction. Ezech., xxxvii, 9 ; Dan., viii, 8 ; Zach., ii, 36 ; Matth., xxiv, 31 ; Apoc, vii, 1. Il y a des vents de diverses natures, depuis la brise rafraîchissante, Gen., iii, 8 ; Cant., ii, 17 ; iv, 6, voir Souffle, col. 1853, jusqu’aux vents les plus violents. Voir Ouragan, t. iv, col. 1930. — Le vent du midi, ddrôm, têmân, vôto ; , auster, est un vent chaud, Job, xxxvii, 17 ; Luc, xii, 55, qui fait exhaler le parfum des fleurs. Cant., iv, 16. C’est celui qui, avec le vent d’orient, amena les cailles au désert. Ps. lxxvih (lxxvii), 26. Cf. Num., xi, 31. — Le vent du nord, sdfôn, mezàrim, poppô ; , aquilo, arcturus, amène les frimas, Job, xxxvii, 9, la pluie, Prov., xxv, 23, et même la gelée. Eccli., xun, 22 (30). — Le vent d’est, qddîm, y.aOuwv, « le brûlant », venins urens, arrive du désert et dessèche la végétation, Gen., xli, 6, 23, 27 ; Is., ii, 7 ; Ezech., xvii, 10 ; xix, 12 ; Jon., iv, 8 ; Ose., xiii, 15, brise les vaisseaux de Tharsis, Ps. xlvhi (xlvii), 8, amène les sauterelles en Egypte, Exod., x, 13, en attendant que le vent de nord-ouest, rûâh yâm, àirb 6a).àa-(7ïi ; , « de la mer », ab accidenté, les remporte. Exod., x, 19. Dans ce dernier passage, les Septante substituent au qddîm le vôto ; , vent du midi, ce qui supposerait que les sauterelles sont venues d’Ethiopie, tandis qu’en réalité elles sont arrivées d’Arabie. Quant au vent de mer, qui en Egypte souffle du nord ou du nord-ouest, il n’est un vent d’ouest qu’en Palestine où il apporte la pluie. III Reg., xviii, 44-45 ; Luc, xii, 54.

Dans son récit de la traversée de saint Paul se rendant en Italie, saint Luc mentionne plusieurs espèces de vents : Xi’iJ ; , africus, vent du sud-ouest ; y&poq, corus, vent du nord-ouest ; vôtoç, auster, vent du sud ; âvejjio ; T-jqjwvcx.ôç appelé eùpaxij}, v, ventus typhonicus, euroaquilo, vent du nord-est. Le mot sùpaxùXwv, composé du grec eîpo ; et du latin aquilo, ne se lit nulle part ailleurs. Ce devait être un mot imaginé par les marins pour leur usage. Act., xxvii, 12-14. — A Athènes, la tour octogonale des vents, construite vers le 1 er siècle avant J.-C, représente sur chacune de ses huit faces, répondant à la direction d’où soufflent les vents principaux, l’image sculptée d’un d’entre eux.

Effets du vent. « Le vent souffle où il veut et tu entends sa voix ; mais tu ne sais d’où il vient, ni où il va. » Joa., iii, 8. Suivant la vitesse dont il est animé, il produit des effets plus ou moins énergiques. Il pousse et dissipe les nuées. Jud., 12 ; Job, xxxvii, 21. II emporte les choses légères, la poussière, Ps. xviii (xvii), 43, la paille. Job, xxi, 18 ; Ps. i, 4 ; lxxxiii (lxxxii), 14 ; Is., xvii, 13 ; xli, 2 ; lxiv, 6 ; Jer., xiii, 24 ; Dan., ii, 35. Il agite les feuilles des arbres, Job, xiii, 25, secoue les roseaux, Matth., xi, 7 ; Luc, vii, 24 ; Sap., iv, 4, et même casse des branches. Apoc, vi, 13. Il renverse les palissades, Eccli., xxii, 21, et les maisons sans fondements solides. Matth., .vu, 27. Il pousse les vaisseaux sur la mer, Jacob., iii, 4, refoule la mer elle-même, Exod., xiv, 21, et y déchaîne des tempêtes. Jon., i, 4 ; Dan., vii, 2 ; Matth., xiv, 24-32 ; Marc, vi, 48-51 ; Joa., vi, 18 ; Aot., xxvii, 4-15 ; Jacob., i, 6. Voir Tempête, col. 2023. À la Pentecôte, un vent violent, symbole sensible du Saint-Esprit, remplit tout le cénacle. Act., ii, 2.

Comparaisons.

Le vent violent, qui renverse et emporte tout, est l’image de la vengeance divine qui entraîne et ruine les méchants, Job, xxvii, 21 ; Is., xxvii, 8, les ennemis d’Israël, Is., xxvii, 8 ; Jer., xviii, 17, les pasteurs d’Israël, Jer., xxii, 22, les triûus arabes, Jer., xlix, 32, Tyr. Ezech., xxvii, 26. — Il est recommandé de ne pas vanner à tout vent, Eccli., v, 11, c’est-à-dire de ne pas embrasser successivement toutes les opinions qui courent, et de ne pas se laisser emporter à tout vent de doctrine. Eph., iv, 14. — Le vent est rapide ; c’est pourquoi on lui prête des ailes, comme à l’oiseau. II Reg., xxii, 11 ; Ps. xviii (xviii), il ; civ (cm), 3 ; Ose., iv, 9. — Le vent change souvent de direction et paraît venir tantôt d’un point de l’horizon, tantôt d’un autre. Job, xxx, 22, se plaint que Dieu le fait voler au gré du vent. On est ainsi amené à désigner une contrée par le nom du vent qui en vient, I Par-, ix, 24, et les quatre vents désignent les quatre points cardinaux. Jer., xlix, 36 ; Ezech., xii, 14 ; xxxvii, 9 ; xlii, 16-20 ; Dan., viii, 8 ; xi, 4 ; Zach., ii, 6 ; Matth., xxiv, 31 ; Marc, xiii, 27. — Le vent est chose légère, insaisissable, de nulle valeur, rien en apparence. Jer., v, 13. De là des expressions diverses pour signifier ce qui est vain et inutile : tenir des discours de vent, Job, xvi, 3 ; se gonfler la poitrine de vent, Job, xv, 2 ; se repaître de vent, Prov., x, 4 (Vulgate) ; Ose., xii, 1, 2 ; enfanter le vent, Is., xxvi, 18 ; parler pour le vent, Job, vi, 26 ; retenir le vent, Prov., xxvii, 7 ; saisir le

vent, Eccli., xxxiv, 2 ; travailler pour le vent, Eccli., v, 15 ; hériter le vent. Prov., xi, 29. — Qui observe le vent, c’est-à-dire demeure oisif, ne sème point. Eccle., xi, 4. Par contre, qui sème le vent, récolte la tempête, Ose., viii, 7, c’est-à-dire qui pose une cause funeste doit s’attendre à en voir se produire les effets.

H. Lesêtre.
    1. VENTE##

VENTE (hébreu : nùmkâr, minikéréf ; Septante : Ttpâtrtç ; Vulgate : venditio), livraison d’un objet en échange d’un prix convenu.

1° Les lois. — Outre la loi morale qui devait présider à toutes les. transactions, il existait chez les Israélites certaines prescriptions relatives à des cas particuliers. L’Israélite pouvait vendre sa fille en esclavage, mais non à des étrangers. Exod., xxi, 7, 8. Devenu pauvre, il pouvait se vendre lui-même, mais seulement jusqu’à l’année jubilaire ; il devait être traité moins comme un esclave que comme un serviteur. Lev., xxv, 39, 40. S’il se vendait au gêr, à l’étranger vivant dans le pays, il pouvait toujours se racheter lui-même ou être racheté par un parent. Lev., xxv, 47-54. D’après une autre loi, l’Israélite, homme ou femme, ne pouvait se vendre que pour six ans. Deut., xv, 12 ; Jer., xxxiv, 14. II n’était plus permis de vendre une esclave prise à la guerre, si on l’avait épousée. Deut., xxi, 14. Vendre un de ses semblables élait un crime digne de mort. Exod., xxi, 16 ; Deut., xxiv, 7. — L’Israélite qui vendait une terre gardait toujours un droit de rachat et, en tous cas, rentrait dans son bien à l’année jubilaire. Lev., xxv, 23-28. Les maisons vendues ne l’étaient qu’aux mêmes conditions, sauf le cas où la maison se trouvait dans une ville entourée de murs ; car alors le droit de rachat cessait au bout d’un an. Lev., xxv, 2931. Les lévites conservaient un droit perpétuel de rachat sur les maisons qu’ils vendaient, mais ils ne pouvaient vendre leurs terres. Lev., xxv, 32-34. — Si un bœuf en tuait un autre, on le vendait, et les deux propriétaires se partageaient le bœuf tué et le prix de vente de l’autre. Exod., xxi, 35. Celui qui volait un bœuf ou une brebis, les tuait et les vendait, avait à restituer cinq bœufs ou quatre brebis. Exod., xxii, 1.

— Il était naturellement interdit de vendre le jour du sabbat. Néhémie dut prendre des mesures pour faire respecter cette prohibition. II Esd., x, 31 ; xiii, 15-20.

2° Les faits. — Ésaù vend son droit d’aînesse. Gen., xxv, 31-34 ; Hebr., xii, 16. Les fils de Jacob vendent leur frère Joseph. Gen., xx’xvii, 27, 28 ; xlv, 4, 5. Joseph vend du blé pendant la famine, Gen., xli, 56 ; xlii, 6 ; Act., vii, 9, et les Égyptiens lui vendent leurs terres. Gen., xlvii, 20. — La veuve vend l’huile qu’Élie a multipliée. IV Reg., iv, 7. La femme forte vend les vêtements qu’elle a confectionnés. Prov., xxxi, 24. Amos, viii, 6, stigmatise les spéculateurs de son temps, qui vendaient jusqu’aux déchets du froment. La malédiction est sur la tête de l’accapareur qui vend le blé à trop haut prix. Prov., xi, 26. Les ventes ne se faisaient pas toujours honnêtement : « La cheville s’enfonce entre deux pierres, le péché pénètre entre la vente et l’achat. » Eccli., xxvii, 2. — Les ventes d’hommes étaient fréquentes de la part des ennemis d’Israël. Joël, m, 3, leur reproche d’avoir vendu le jeune garçon pour le salaire d’une courtisane et la jeune fille pour du vin. Antiochus fit vendre les femmes et les enfants des Juifs, II Mach., v, 21, et Nicanor s’apprêtait à opérer des ventes analogues. II Mach., viii, 14, 34. — Les prêtres de Babylone vendaient à leur profit les victimes offertes aux idoles. Bar., vi, 27. Minélas vendit une partie des vases du Temple. II Mach., IV, 32. Lysias voulait vendre chaque année le souverain pontificat. II Mach., xi, 3. On vend ce qu’on possède pour acheter quelque chose de préférable, Matth., xiii, 44, 46, ou pour le donner aux pauvres. Matth., xix, 21 ; Marc, x, 21 ; Luc, xii, 33 ; xviii, 22. Les marchands vendaient

dans le Temple les victimes destinées aux sacrifices. Matth., xxi, 12 ; Marc., xi, 15 ; Luc, xix, 45 ; Joa., ii, 14. Les premiers chrétiens vendaient leurs biens pour en mettre le prix en commun. Act., ii, 45 ; IV, 34 ; v, 1. Pendant la persécution, on ne peut acheter ni vendre si l’on n’a pas la marque de la bête. Apoc, xiii, 17.

— Il est recommandé d’acquérir la sagesse, mais de ne pas la vendre, Prov., xxiii, 23, c’est-à-dire de la communiquer gratuitement.

3° Comparaisons. — Vendre le juste à prix d’argent, c’est le condamner injustement. Am., ii, 6. Vendre ses frères, c’est les trahir. II Mach., x, 21. — Lia et Rachel disent que leur père Laban les a vendues, parce qu’il s’est montré intéressé à l’excès à l’égard de Jacob. Gen., xxxi, 15. — Il est dit que Dieu vend son peuple quand, pour le châtier de ses fautes, il l’abandonne à ses ennemis. Deut., xxxiii, 30 ; Jud., ii, 14 ; iii, 8 ; iv, 2 ; x, 7 ; Is., l, 1 ; Judith, vii, 13 ; Ps. xliv (xlih), 13.

— Se livrer au mal, c’est se vendre soi-même. Ainsi ont fait Achab, III Reg., xxi, 20, 25, et les Israélites, IV Reg., xvii, 17. Moïse a prédit à son peuple qu’une vente effective serait le châtiment de cet abandon à

l’infidélité. Deut., xxviii, 28.
H. Lesêtre.
    1. VENTRE##

VENTRE (hébreu : bétén, heréè, mêéh, gâl.iôn, « le ventre des animaux » ; chaldéen : me’âh ; Septante : xotXfa, Yairnjp ; Vulgate : venter, pectus), partie du corps qui renferme les organes de la digestion. Le mot est quelquefois employé pour désigner des organes intérieurs. Voir Cœur, t. ii, col. 823 ; Entrailles, col. 1817 ; Sein, t. v, col. 1565.

1° L’extérieur. — Le ventre de l’Épouse est comparé à un chef-d’œuvre d’ivoire. Cant., v, 14. Les reptiles rampent sur le ventre. Gen., iii, 14 ; Lev., XI, 42. L’hippopotame a le ventre robuste. Job, XL, 10. La statue du songe de Nabuchodonosor avait le ventre d’airain. Dan., ii, 32.

2° L’intérieur. — C’est le ventre qui reçoit la nourriture, Jud., xix, 5 ; Luc, xv, 16, et en expulse les résidus. I Reg., xxiv, 4 ; Matth., xv, 17 ; Marc, vii, 19. Le ventre et les aliments sont faits l’un pour l’autre. ICor., VI, 13. — Le parasite se montre compatissant dans l’intérêt de son ventre. Eccli., xxxvil, 5. Il en est qui se font un dieu de leur ventre, c’est-à-dire ne vivent que pour manger. Rom., xvi, 18 ; Phil., iii, 19. Les Cretois étaient appelés des « ventres paresseux », parce qu’ils aimaient à la fois la bonne chère et l’oisiveté. Tit., i, 12. — L’impie s’emplit le ventre des trésors de Dieu, Ps. xvii (xvi), 14, c’est-à-dire jouit de tous les biens que la Providence accorde aux hommes. Mais ces biens seront ôtés de son ventre, Job, xx, 15, son ventre ne sera pas rassasié, Job, xx, 20, il souffrira de la disette, Prov., xiii, 25, et la colère de Dieu sera le pain qui le remplira. Job, xx, 23. On ne se remplit pas le ventre avec de l’or et de l’argent. Ezech., vii, 19. Nabuchodonosor se remplissait le ventre des meilleurs mets des Juifs, Jer., li, 34, c’est-à-dire s’emparait de leurs biens les plus précieux. — Jonas fut englouti dans le ventre du poisson. Jon., ii, 1 ; Matth., xii, 40. Aod enfonça son épée dans le ventre d’Églon. Jud., iii, 21. Dans l’épreuve de la femme soupçonnée d’adultère, on souhaitait que, si elle était coupable, l’eau sainte fit enfler son ventre et maigrir ses flancs. Num., v, 22, 27. L’enfant prodigue ne peut remplir son v*entre des siliques données aux porcs qu’il était réduit à garder. Luc, xv, 16. — La Vulgate mentionne l’estomac en trois endroits où il n’est pas question de cet organe particulier, que d’ailleurs l’hébreu ne nomme nulle part. Jud., xix, 5 ; III Reg., xxii, 34 ; Job, xv, 2. L’estomac, <jt6[i.ocx° ?, stomachus, est nommé par saint Paul, qui recommande à Timothée de soigner le sien en buvant un peu de vin. I Tim., v, 23. — Au figuré, le sage ne remplit pas son ventre avec du vent, Job, xv, 2, c’est-à-dire ne se repaît 2395

VENTRE

VERGELLONE

pas de pensées vaines. — Ézéchiel, iii, 3, reçoit l’ordre de manger le livre qui lui est présenté et d’en remplir son ventre, c’est-à-dire de se pénétrer intimement des oracles qui lui sont révélés. Saint Jean reçoit un ordre semblable. Apoc, x, 9, 10. — Notre-Seigneur promet que, si quelqu’un croit en lui, « des fleuves d’eau vive couleront de son ventre, » Joa., vii, 38, c’est-à-dire qu’il sera rempli de l’Esprit-Saint au point de pouvoir le répandre abondamment dans les autres âmes. Cf. Eccli., xxi, 16 (13) ; xxiv, 30-34 (23-27).

H. Lesêtre.

VER (hébreu : rimmâh, fôld’; Septante : <jr.û>r ? ; Vulgate : verrais, vemiiculus), animal à corps mou, saris vertèbres ni membres articulés, rampant et contractile, et comme composé d’anneaux juxtaposés. Ce nom désigne à proprement parler les annélides, voir Lombric, t. iv, fig. 110, col. 353, et les helminthes, voir Helminthiase, t. iii, fig. 123, col. 583. Mais on étend vulgairement cette appellation à d’autres animaux de forme analogue, chenilles, teignes, voir Teigne, fig. 453, col. 2017, larves, myriapodes, scolopendres, etc. Sur le iule ou spirostreptus syriacus, myriapode extraordinairement abondant à Mar-Saba et au Sinaï, voir Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 399. Les Hébreux ne distinguaient pas très nettement entre elles ces différentes sortes de petits animaux rampants, et ils. employaient comme synonymes les deux mots dont ils disposaient pour les désigner. Cf. Exod., xiv„ 20, 24 ; Job, xxv, 6 ; Is., xiv, 11. Les versions, qui n’ont pas de synonymes, rendent parfois l’un des deux mots hébreux par oajcpi’a, putredo, « pourriture ». — 1° Le ver est un tout petit animal, symbole de ce qui est faible ou méprisable. L’homme n’est qu’un vermisseau aux yeux de Dieu. Job, xxv, 6. Les Israélites, réduits à rien par l’hostilité’des nations, sont appelés « vermisseau de Jacob ». Is., xli, 14. Le Messie, souffrant et méprisé, n’est plus un homme, mais un ver, Ps. xxii (xxi), 7. — 2° Les vers pullulent dans le corps de l’homme par l’effet de certaines maladies. Ainsi furent atteints Job, vii, 5, Antiochus Épiphane, II Mach., IX, 9, et Hérode Agrippa, Act., xii, 25. — 3° Les vers, ou plus probablement les larves de certains insectes, s’attaquent aux substances nutritives, comme la manne, Exod., xvi, 20, 24, et aux végétaux, comme la vigne, Deut., xxviii, 39, voir Pyrale, fig. 205, col. 896, le ricin, Jon., iv, 7, et, d’après les versions, le bois en général. II Reg., xxiii, 8 ; Prov., xxv, 20. Voir Calandre, Charançon, t. ii, fig. 21, 201, col. 54, 580. — 4° Ils se développent dans les cadavres aux dépens desquels ils se nourrissent et dont ils hâtent la décomposition. Job, xvii, 14 ; xxi, 26 ; Eccli, X, 13 (11). Quand la vie a quitté le corps d’un homme, il s’en dégage aussitôt des odeurs qui attirent des mouches sarcophages. Celles-ci déposent leurs œufs aux endroits les plus propices. On a observé que huit escouades de mouches différentes.viennent ainsi apporter successivement leurs œufs sur les cadavres, soit avant soit après leur inhumation, et au moment de la décomposition qui convient à chaque espèce. Ces œufs donnent bientôt des larves qui pullulent dans le cadavre et s’y nourrissent des différentes parties de sa substance. Le travail commencé par les premières larves, une quinzaine de jours après la mort, est terminé par les dernières au bout de trois ans environ. Cf. Mégnin, La faune des cadavres, Paris, 1894 ; F. Meunier, Les travailleurs de la mort, dans la Revue des quest. seientif., Bruxelles, 1902, oct., p. 473-491.

— Au figuré, il est dit que les vers seront la couche de Babylone, Is., xiv, 11, qu’ils feront leur proie du méchant, Eccli., xix, 3, et que toute la gloire de l’homme s’en va àla corruption et aux vers. I Mach., ii, 62. — 5°Lefeuetlesvers sont associés dans le châtiment des impies. Eccli., vii, 19 ; Judith, xvi, 21. Isaïe, lxyi, 24, dit à propos de ces

derniers que « leur ver ne mourra point et leur feu ne s’éteindra point. » Notre-Seigneur reproduit trois fois la même formule. Marc, ix, 43, 45, 47. II ne s’agit pas ici d’une peine temporelle, mais d’un supplice sans fin dans l’autre vie. Quelques commentateurs entendent le « ver » dans le sens propre ; mais la plupart s’en tiennent au sens métaphorique pour désigner soit le remords, soit le supplice des méchants en général. Cf. S. Augustin. De civ. Dei, xxi, 9, t. xli, col. 723. Isaïe a emprunté l’image du feu et des vers à la vallée de la Géhenne, jadis profanée par les sacrifice » d’enfants à Moloch, devenue depuis le dépôt des immondices de la ville, où couvait un feu sourd et où pullulait la vermine. Voir Géhenne, t. iii, col. 155 ; Topheth, 2, t. v, col. 2286. H. Lesêire.

    1. VÉRACITÉ##

VÉRACITÉ, qualité de celui qui est digne de toute créance dans ses paroles et de toute confiance dans ses actes. Celui-là est appelé’ëmét, yâsâr, tù.rfi-ii, oXï|81voî, iuittoî, verax. — La véracité convient éminemment à Dieu. Exod., . xxxiv, 6 ; Deut., xxxii, 4 ; Ps. lxxxvi (lxxxv), 15 ; cxix (cxviii), 137 ; Joa., iii, 33 ; viii, 26 ; Rom., iii, 4 ; Apoc, xix, 11. Les docteurs juifs la reconnaissent en Jésus-Christ. Matth., xxii, 16 ; Marc, xii, 14. Le Sauveur prouve sa véracité en ne cherchant que la gloirede son Père. Joa., vii, 18. — Les serviteurs de Dieu doivent posséder cette qualité, bien que les méchants les accusent du contraire. IIEsd., vii, 2. Il Cor., vl, 8. — La véracité est la caractéristique de la parole de Dieu. Ps. xxxm (xxxii), 4.

H. Lesêtre.

1. VERBE DIVIN (grec : Aôyo ; ), seconde personne de la sainte Trinité, qui s’est incarnée en Notre-Seigneur Jésus-Christ. Joa., i, 1, 14 ; I Joa., v, 7 ; Apoc, xix, 12. Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1441 ; Incarnation, col. 863.

2. VERBE HÉBREU (grammaire hébraïque). Sur le verbe hébreu, voir Hébraïque (Langue), t. iii, col. 475-480, 483-485.

    1. VERCELLONE Carlo##

VERCELLONE Carlo, savant bibliste italien, né le 10 janvier 1814, à Biella en Piémont, mort à Rome le 19 janvier 1869. Il entra à l’âge de seize ans à Gênes dans la congrégation des barnabites. En 1847, après avoir rempli des fonctions diverses à Turin, à Alexandrie, à Pérouse, à Parme, il devint supérieur de la maison des barnabites de Rome, et, plus tard, supérieur général de sa congrégation. Son ouvrage principal a pour titre : Variée lecliones vulgatx latines editionis Bibliorum, 2 in-f », Rome, 1860, t. i ; 1864, t. n. La mort l’arrêta lorsqu’il n’était encore arrivé qu’aux livres des Rois inclusivement. Sur la proposition de la Commission biblique, Pie X vient de confier la continuation de ce grand travail critique aux bénédictins de Saint-Anselme à Rome. Vercellone avait travaillé avec Joseph Cozza à la préparation d’une édition du Codex Vaticanus. : le Nouveau Testament parut en 1868. Voir Vaticasds (Codex), col. 2379. On doit aussi à Vercellone une excellente édition de la Vulgate : Biblia sacra vulgatse editionis Sixti V et Glemenlis V11I P. P. M. jussu recognila atque édita, in-4°. Rome, 1861. Outre les prolégomènes remarquables de ses VaHse lecliones, ses Dissertazioni accademïche di vario argomento, Rome, 1864, contiennent plusieurs travaux très intéressants : Dei Correttori biblici délia Biblioteca Vaticana ; Studii fatti in Romae mezzi usatiper corregere la Bibbia volgata (con documenti) ; Suite edizioni délia Bibbia fatte in ltalianelsecoloxr ; Del antichissimo Codice Vaticano délia Bibbia Greca con un Appendice dalçav. G.-B.DeRossi, etc. Voir G. M. Sergio, Notizie intorno alla vita edagliscritti dei P. D. Carlo Vercellone, Rome, 1869.

    1. VERGE##

VERGE (hébreu : hotér, mattéh, sébét ; Septante : pâëSoç, paxT>ipea ; Vulgate : virga, verber), bâton léger, assez long et plus ou moins flexible.

1° Au sens propre. — 1. Verges de Jacob. Pour obtenir des agneaux à toison tachetée, Jacob plaçait sous les yeux des brebis des verges ou baguettes dont l'écorce était en partie enlevée. Gen., xxx, 37-42. Voir Brebis, t. i, col. 1917. « Les iniluenees visuelles ne semblent pas sans action sur la variation spontanée ; après la Bible, qui montre Jacob obtenant des brebis d’un noir mélangé de blanc par la vue d’un bâton dans l’eau au moment de l’imprégnation, on cite de nombreux faits qui corroborent l’influence visuelle sur le foetus… Les éleveurs, comme Commyns, recommandent d’isoler les volailles de couleur différente par des cloisons opaques, si l’on veut éviter les mélanges de coloris. » J. de la Perrière, Dieu et science, Paris, 1909, t, i, p. 277. — 2. Verge de Moïse. Pour accréditer la mission de Moïse, Dieu lui communiqua le pouvoir d’accomplir des prodiges au moyen d’une verge qu’il avait à la main. Pour commencer, Dieu changea lui-même la verge en serpent, que Moïse eut à saisir par la queue et qui redevint verge comme auparavant. Exod., iv, 2-4, 17, 20. Moïse, de retour au milieu de son peuple, reproduisit ce prodige sous ses yeux et obtint ainsi sa confiance. Exod., iv, 30. Il se présenta ensuite devant le pharaon avec son frère Aaron, que Dieu lui avait assigné pour auxiliaire, et là il opéra divers prodiges au moyen de la verge miraculeuse : il la changea elle-même en serpent, et elle engloutit les verges des magiciens, Exod., vii, 9-12 ; il l'étendit sur les eaux de l’Egypte qui se changèrent en sang, Exod., vu, 19-20 ; il en frappa la poussière de la terre et les moustiques apparurent, Exod., viii, 16-17 ; il l'élèva vers le ciel et la grêle tomba, Exod., IX, 23 ; il l'étendit encore et les sauterelles pullulèrent. Exod., x, 13. Dans plusieurs de ces ] » assages, Exod., vii, 9, 10, 12 ; viii, 5, 16, 17, la verge paraît être celle d’Aaron : « Prends ta verge… Aaron jeta sa verge. » On en conclut que la verge d’Aaron, associé à Moïse dans sa mission de délivrance, avait la même vertu que celle de son frère. Cf. De Hummelauer, In Exod. et Levit., Paris, 1897, p. 80. Mais, d’après Exod., iv, 17, Dieu n’attribue le pouvoir miraculeux qu'à la verge de Moïse, et saint Augustin, In Heptat., ii, 20, t. xxxiv, col. 602, dit que Moïse ne fait que mettre s, a verge aux mains d’Aaron. C’est aussi le sens le plus naturel du récit, et celui qui est généralement accepté. Moïse se sert encore de sa verge pour diviser les eaux de la mer Bouge, Exod., xrv, 16, pour frapper le rocher d’Horeb et en faire jaillir l’eau, Exod., xvii, 5, 6, pour accompagner sa prière pendant le combat contre les Amalécites, Exod., Xvii, 9, pour frapper de nouveau le rocher à Meriba. Num., xx, 8-11. Depuis lors, il n’en est plus question. Cette verge était un symbole de la puissance communiquée par Dieu à son serviteur ; elle servait à indiquer aux spectateurs le moment où s’exerçait l’intervention divine. — 3. Verge d’Aaron. Au désert, l’autorité de Moïse et d’Aaron fut l’objet d’une contestation qui dégénéra en révolte et fut sévèrement punie. Pour consacrer le pouvoir sacerdotal de son frère et de la tribu de Lévi, Moïse, sur l’ordre du Seigneur, fit déposer devant l’Arche d’alliance douze verges représentant les douze tribus, la verge de Lévi portant le nom d’Aaron. La verge qui le lendemain serait trouvée fleurie devait manifester le choix de Dieu. Celle d’Aaron fut seule à porter des boutons, des fleurs et des amandes. La verge miraculeuse fut ensuite replacée' seule devant l’Arche, Num., xvii, 1-11, et plus tard conservée à l’intérieur, avec les tables de la Loi et la mesure de manne. Hebr., IX, 4. — 4. Instrument de correction. Si un Hébreu et une esclave fiancée à un autre couchent ensemble, ils doivent subir le châti ment, biqqorét, im<rt.oirr, et d’après la Vulgate, les coups de verge, vapulabunl. Lev., xix, 20. — Dieu promet de châtier le roi infidèle de son peuple avec une « verge d’homme », c’est-à-dire d’une manière qui ne dépasse pas la correction que les hommes administrent ordinairement au moyen des verges. II Beg., vii,

14. La verge sert utilement à corriger l’enfant ou l’insensé. Prov., x, 13, 24 ; xxii, 8, 15 ; xxiii, 13, 14 ; xxvi, 3 ; xxix, 15. Le serviteur infidèle sera battu proportionnellement à sa culpabilité, ôaçtr^ira. : , sera châtié jusqu'à écorchement de la peau, vapulabit, recevra les coups de verge. Luc, xii, 47, 48. Notre-Seigneur prédit à ses Apôtres qu’ils subiront ce même traitement dans les synagogues. Marc, xiii, 9. À Philippes, Paul et Silas eurent à subir les verges, poeëSIfctv, virgis cœdi, bien que citoyens romains, ce qui causa grande frayeur aux magistrats de la ville quand ils l’apprirent. Act., xvi, 22, 38. La loi Porcia défendait en effet de battre de verges un citoyen romain. Cf. Cicéron, In Verrem, ii, 5, 53-57 ; Tite-Live, x, 9 ; Valère Maxime, IV, I, 1 ; Denys d’Halicarnasse, IX, 39. Saint Paul subit pourtant trois fois ce châtiment. II Cor., xi, 25 ; Heb., xi, 36. — On se servait aussi de la verge pour battre le cumin, ls., xxviii, 27. Elle n'était qu’un simple instrument passif aux mains de celui qui la levait. Is., x, 15. — Voir Bâton, t. i, col. 1512, et pour un autre sens donné quelquefois à virga, Sceptre, t. v, col. 1526.

2° Au sens figuré. — La verge signifie l'épreuve, de quelque nature qu’elle soit, Job, ix, 34 ; XXI, 9 ; xxxvil, 13, le châtiment divin, Ps. lxxxix (lxxxviii), 33 ; ls., x, 3 ; x, 5 ; xxx, 31-32 ; Lam., iii, 1 ; Ezech., vii, 10, 11, et l’oppression par les peuples étrangers. Is., x, 24 ; xiv, 29 ; Mich., vi, 9. La verge de la bouche de Dieu est sa parole qui appelle le châtiment. Is., xi, 4. La verge de l’orgueil dans la bouche de l’insensé est le mal qu’il fait à lui et aux autres. Prov., xiv, 3. Saint Paul demande s’il lui faut aller à Corinthe avec la verge, c’està-dire avec les reproches. I Cor., iv, 21. — Sur un autre sens figuré de virga, voir Rameau, col. 592.

H. Lesêtre.
    1. VÉRITÉ##

VÉRITÉ (hébreu : 'omén, 'ômndh, 'ëméf, qoU ; Septante : iXvfisia ; Vulgate : veritas), conformité de la pensée ou de son expression avec la réalité.

I. Dans l’Ancien Testament. — 1° En Dieu. Dieu est vérité, Ps. xxxi (xxx), 6, parce qu’en lui la pensée et la parole représentent toujours exactement la réalité. Sa loi est la vérité, II Esd., ix, 13 ; Ps. cxi (ex), 8 ; exix (cxviii), 142, 151, 160 ; Act., xxii, 3 ; Rom., ii, 20, et cette vérité demeure à jamais. Ps. cxvii (cxvi), 2. Dieu a juré la vérité à David, Ps. cxxxii (cxxxi), 11 ; luimême fait combattre pour la vérité, Ps. xlv (xliv), 4, et il la fera germer de terre. Ps. lxxxv (lxxxiv), 12. Le livre de vérité est celui dans lequel sont consignées les volontés divines. Dan., x, 21. — Il est dit très souvent que Dieu est héséd vé'éméÇ, ce que les versions traduisent par sXsoç xa à).T)8eta, misericordia et veritas, « miséricorde et vérité ». Gen., xxiv, 27 ; II Beg., ii, 6 ; xv, 20 ; IV Reg., xx, 19 ; Tob., iii, 2 ; Ps. ' xxv (xxiv), 10 ; xxxvi (xxxv), 6 ; xl (xxxix), 12 ; lxxxix (lxxxviii),

15, etc. Mais le mot 'ëmét signifie à la fois « stabilité, fidélité » et « vérité ». Il s’agit plutôt dans ces passages de la fidélité de Dieu à ses promesses, ce qui est une conséquence de la conformité absolue que Dieu maintient entre sa parole et ses actes. — 2° En l’homme. Dieu veut que la vérité soit dans le cœur de l’homme. Ps. li (l), 8. C’est par sa grâce que l’homme exprime la vérité dans sa parole et dans sa conduite. Gen., xlii, 16 ; ûeut., xxii, 20 ; Jos., vii, 20 ; Esth., v, 5 ; Ps. xv (xiv), 3 ; xxv (xxiv), 5 ; exix (cxviii), 43 ; ls., xxvi, 2 ; Dan., xi, 2. Servir Dieu en vérité, IReg., xii, 24 ; Tob-, xrv, 10, 11, suivre le chemin de la vérité, Tob., i, 2 ; Ps. xxvi (xxv), 3, c’est mettre sa conduite en harmonie avec les sentiments que l’on professe pour Dieu. — Les

écrivains sacrés proclament qu’ils disent la vérité. Prov., viii, 7 ; Eccle., xii, 10 ; Sap., vi, 24. La vérité a été mise dans la bouche de Lévi et de ses descendants. Mal., ii, 6. Chacun doit la dire à son prochain. Zach., vin, 16. Il faut acquérir la vérité, et ne pas la vendre, Prov., xxiii, 23 ; se confier à Dieu pour qu’il donne l’intelligence de la vérité, Sap., iii, 9 ; se rendre attentif à la vérité, Dan., IX, 13, parce que la vérité retourne à ceux qui la pratiquent. Eccli., xxvii, 10 (9). Jérusalem restaurée sera appelée « ville de vérité ». Zach., vm, 3. — La vérité n’est pas dans la bouche des méchants. Ps. v, 10. Voir Mensonge, t. iv, col. 974. Ils errent loin du chemin de la vérité. Sap., v, 6. Les prophètes se plaignent que la vérité trébuche sur la place publique et disparaît, Is., Lix, 14, 15, et qu’il n’y a ni vérité ni compassion dans le pays. Ose., iv, 2. Il en fut de même parmi les Syriens. I Mach., vii, 18. Daniel, vm, 12, prédit qu’une corne, Antiochus Épipbane, jettera la vérité par terre, c’est-à-dire triomphera momentanément de la religion d’Israël et de sa nationalité. — Le mot 'èmét est aussi traduit dans les versions par « vérité », en des passages où il doit avoir le sens de « fidélité ». Gen., xxiv, 49 ; xxxii, 10 ; xlvii, 29 ; III Reg., ii, 4 ; Prov., iii, 3 ; xiv, 22 ; xx, 28 ; etc. Au Psaume xii (xi), 2, en particulier, ce ne sont pas les vérités qui diminuent parmi les enfants des hommes, mais 'ëmûnîm, les « hommes fidèles » qui disparaissent. II. Dans le Nouveau Testament. — 1° En JésusChrist. — Le Sauveur vient plein de grâce et de vérité. Joa., i, 14. Il est lui-même la vérité en personne. Joa., xiv, 6 ; Eph., iv, 21 ; I Joa., v, 6. Il apporte la vérité au monde. Joa., i, 17 ; viii, 40 ; xvi, 7 ; xviii, 37.

II enseigne selon la vérité. Matth., xii, 14, 32 ; Luc, xx, 21. Jean-Baptiste lui rend témoignage comme à la vérité. Joa., v, 33. La parole du Sauveur est la parole de vérité, Joa., xvii, 17 ; II Cor., vi, 7 ; Eph., i, 13 ; Jacob., i, 18, la vérité de l'Évangile, Gai. ii, 5 ; Col. i, 5, à la connaissance de laquelle Dieu veut que tous les hommes arrivent pour qu’ils puissent êlre sauvés. I Tim., ii, 4. Le Sauveur a envoyé à ses Apôtres l’Esprit de vérité, Joa., xiv, 17 ; xv, 26, pour enseigner aux hommes toute vérité, Joa., xvi, 13 ; IJoa., iv, 6 ; il a établi son Église pour qu’elle soit « la colonne de la vérité ». I Tim., iii, 15. — 2° En l’homme. — Les envoyés de Dieu sont chargés de transmettre la vérité aux autres hommes. C’est ce que font les Évangélistes, Luc, i, 4, et les Apôtres, en particulier saint Paul. Act., xxvi, 25 ; Rom., ix, 11 ; II Cor., iv, 2 ; vii, 14 ; xi, 10 ; xii, 6 ; I Tim., ii, 7. Cf. III Joa., 8 ; II Tim., Il, 5. Ils n’ont pas de pouvoir contre la vérité, mais seulement pour la vérité. II Cor., xiii, 8. — Le devoir des chrétiens, qui ont reçu la pleine connaissance de la vérité, Hebr., x, 26, est de pratiquer la vérité, afin de ne pas craindre de paraître à la lumière, Joa., iii, 21, d’adorer le Père en esprit et en vérité, Joa., iv, 23, de se sanctifier dans la vérité, Joa., xvii, 19, d’avoir la charité qui se réjouit de la vérité, I Cor., xiii, 6, de confesser la vérité en croissant dans la charité, Eph., iv, 15, de dire la vérité aux autres. Eph., iv, 25 ; d’avoir l’amour de la vérité, par laquelle on doit être sauvé, II Thés., ii, 10, de ne pas mentir contre la vérité, Jacob., iii, 14, de s’affermir dans la vérité, II Petr., i, 12, et de marcher dans la vérité, c’est-à-dire d’agir selon les lumières qu’elle apporte. II Joa., 4 ;

III Joa., 4. La vérité délivrera ceux qui agissent ainsi, Joa., viii, 32, c’est-à-dire les soustraira au joug du péché, de l’erreur et des sujétions mauvaises. — La vérité a aussi ses adversaires, des insouciants, comme Pilate, Joa., xviii, 38, des indociles, Rom., ii, 8, de faux sages, qui retiennent la vérité captive et la tournent en mensonge, Rom., i, 18, 25, de faux docteurs, privés de la vérité, I Tim., vi, 5, apprenant toujours, sans parvenir à la connaissance de la vérité, II Tim., iii, 7,

des hommes qui ne marchent pas selon la vérité de l'Évangile, Gal., ii, 14, qui s'éloignent de la vérité, pour embrasser de fausses doctrines, II Tim., ii, 18 ; Tit., i, 14 ; Jacob., v, 19, qui résistent à la vérité, II Tim., iii, 8, qui lui ferment leurs oreilles, II Tim., iv, 4, et ne se convertissent pas à la vérité. II Tim., ii, 25. Leur vrai maître est Satan, en qui n’est pas la

vérité. Joa., viii, 44.
H. Lesêtre.
    1. VERJUS##

VERJUS, jus de raisins qui ne sont pas mûrs. — Le raisin vert, bêsér ou bosér, oftixxË, uva acerba, Job, xv, 33 ; Is., xviii, 5, donne un jus très acide qui agace les dents. Se basant sur d’anciens textes d’après lesquels le Seigneur châtie les péchés des pères jusqu'à la quatrième génération, les Israélites de la captivité rejetaient sur ceux qui les avaient précédés la responsabilité des maux dont ils souffraient. Ils répétaient en manière de proverbe : « Les pères ont mangé du raisin vert et les dents des fils en sont agacées. » Jer., xxxi, 29-30 ; Ezech., xviii, 2. Ils s’innocentaient ainsi eux-mêmes et se dispensaient de s’amender. Les prophètes leur signifient qu’ils se font illusion, que le proverbe ne s’applique pas à eux et qu’en conséquence ils ont à réformer leur propre conduite. D’ailleurs, le Seigneur va faire cesser leurs maux et ils n’auront plus désormais à s’en prendre aux fautes

de leurs pères.
H. Lesêtre.
    1. VERMILLON##

VERMILLON (hébreu : Sâsar ; Septante : (iftto ;  ; dans Ézéchiel ; êv YpacpfSi), couleur employée par les Assyriens dans la décoration de leurs palais et de leurs œuvres d’art. Jérémie, xxii, 14, parle de salles peintes en cette couleur(Vulgate : in sinopide) ; Ézéchiel, xxiii, 14, dit que des Chaldéens étaient représentés coloriés en vermillon sur la muraille (Vulgate : coloribus), et la Sagesse, xiii, 14, que des idoles de bois étaient couvertes, comme traduit la Vulgate, de rubrica (Septante : jji’Xto ; ). Chez les Latins, Virgile, Egl., x, 26, et Pline, H. N., xxxv, 45 ; cf. xxxiii, 36, nous apprennent que les Romains ornaient de la même couleur quelques-unes de leurs divinités. Voir Couleurs, t. ii, col. 1068, 1069.

    1. VERONENSIS##

VERONENSIS (CODEX). Ce manuscrit grécolatin du Psautier, du VIe siècle, appartient à la bibliothèque du chapitre de Vérone. C’est un manuscrit de format in-quarto, à une colonne par page, le grec sur la page de gauche, le latin sur la page de droite. Le grec est écrit en caractères latins. Le texte latin est préhiéronymien. Aucune ponctuation, mais le texte est, dans les deux langues, distribué en stiques. À la suite des Psaumes, les cantiques, au nombre de huit : Exod., xv, 1-21 ; Deut, xxxii, 1-44 ; I Reg., ii, 1-10 ; Is., v, 1-9 ; Jon., ii, 3-10 ; Hab., iii, 1-19 ; Dan., iii, 27-67 ; enfin le Magnificat. Ce Psautier a été publié par Bianchini, Vindiciss canonicarum scripturarum, Rome, 1740, t. i. Voyez H. B. Swete, The Old Testament in Greek, Cambridge, 1891, t. ii, p. ix-x.

P. Batiffol.

    1. VERRE##

VERRE (hébreu : zekôkif ; Septante : ûodo ;  ; Vulgate : vitrum), substance transparente et cassante, obtenue par la fusion du sable siliceux avec des sels métalliques de potassium, de sodium, de calcium ou de plomb (fig. 545). — Les anciens connaissaient le verre. On a dû être amené, en différents endroits, à le découvrir en traitant les minerais par la fusion. En se liquéfiant, les gangues de ces minerais donnent des laitiers qui sont de vérilables verres. L'étude de la composition de ces gangues a bientôt fait connaître les éléments requis pour obtenir un verre transparent. Les Assyriens fabriquaient le verre. Cf. Layard, tiineveh, t. ii, p. 42. On a trouvé dans le palais de Nimroud, à Ninive, un vase de verre portant le nom de Sargon (fig. 546), datant par conséquent du vu » siècle avant Jésus-Christ. Hérodote, iii, ^

24, mentionne des colonnes creuses et transparentes, dans lesquelles on enfermait les morts, et qui étaient faites de verre,-jodoç, tiré des mines du pays et facile à travailler. Il ne s’agit ici que d’une pierre translucide, l’albâtre probablement. Mais les Égyptiens possédaient certainement l’art de produire et de travailler le verre. Les monuments montrent leurs ouvriers occupés à souffler le verre (fig. 547). Le même art était à l’usage

545. — Quatre ampoules antiques en verre. Musée du Louvre.

des Phéniciens. Quand on part de Saint-Jean-d’Acre pour Caïpha, on rencontre bientôt le Nahr el-Na’aman, petit ruisseau large de huit à dix mètres, appelé par les anciens Bélus. C’est là que les Phéniciens auraient trouvé le procédé de la fabrication du verre. Cf. Pline, H. N., xxxvi, 65 ; Strabon, xvi, 758 ; Josèphe, Bell, jud., II, x, 2 ; Tacite, Hist., v, 7. Le ruisseau prend sa source à quelques kilomètres de là, dans des marais que Pline appelle palus cenderia, et qui, en hiver et au printemps, font déborder le cours d’eau. Le sable qui est à l’embouchure aurait été très propre à la fabrication du verre. On trouve des traces des anciennes

546. — Vase de verre portant le nom de Sargon, roi d’Assyrie. D’après Maspero, Histoire, t. iii, p. 218.

verreries phéniciennes à Zaraphtha, la Sarepta d’autrefois, et dans l’ancienne nécropole de Tyr, qui abonde en débris de verre ordinairement colorés en bleu et a conservé d’élégants spécimens de vases (fig. 548). Cf. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 113, 127, 142, 167. Hérodote, ii, 44, vit à Tyr, dans le temple d’Hercule, une colonne d’émeraude qui jetait grand éclat pendant la nuit. On soupçonne que cette colonne était en verre coloré et que des lampes l’éclairaient à l’intérieur. Comme Moïse promet à Zabulon que cette tribu jouira des « richesses cachées dans le sable, » Deut., xxxiii, 19, et que le Bélus se trouve sur son


territoire, quelques commentateurs ont supposé qu&l’allusion portait sur le sable vitrifiable. Cf. Rosen-imuller, In Deuter., Leipzig, 1798, p. 532. Mais il ne>s’agit, dans ce passage, que des richesses communes à tous les bords de mer. Tout en utilisant le verre demanières variées, les Orientaux n’ont pas su s’en servir.pour en faire des vitres ou des miroirs. — Dans unetombe philistine de Gazer, on a trouvé d’élégants petits.

547. — Egyptiens soufflant le verre.

D’après Wilkinson, The manners and custorns of the ancient

Egyptians, t. ii, p. 140.

ustensiles de verre. Cf. H. Vincent, Canaan, Paris, . 1907, p. 234. — Les Israélites ont également connu le verre et l’ont fabriqué de bonne heure, si tant est, . comme le croit Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, p. 327, . que les ateliers d’Hébron remontent jusqu’à l’époque des rois de Juda. Le sable siliceux nécessaire à ces

548. — Verres colorés de Sarepta. D’après Lortet, La Syrie, p. 127.

verreries provient de la contrée, et la soude est apportée par les Arabes des bords de la mer Morte, et des régions sablonneuses et salées qui sont à l’est du Jourdain. On y fabrique du verre soufflé pour lampes, bouteilles, fioles, etc., et des bracelets, des anneaux, des bagues, des perles, etc. « Les fourneaux sont en briques et recouverts par un dôme à réverbère. La flamme, après avoir circulé dans le four, vient passer sur les creusets qui renferment les matières vitreuses en fusion, et sort par des ouvertures pratiquées dans la région moyenne. C’est par ces orifices que les ouvriers, assis ou debout autour des fourneaux, cueillent

V. — 76

le Terre liquide au moyen de leurs cannes de fer. Ils soufflent rapidement les pièces et les réchauffent pendant quelques instants aux flammes qui sortent du four. » Lortet, ibid. Pour faire les perles et les bracelets, on teinte la pâte vitreuse au moyen d’oxydes minéraux qui fournissent de belles nuances bleu d’outremer, vert de malachite ou jaune de chrome. — Dans Job, xxviii, 17, la sagesse est déclarée supérieure à différentes substances précieuses, l’or, l’onyx, lesaphir, le verre, lecorail, le cristal, les perles et la topaze. Le verre, zekôkit, ne saurait ici être confondu avec le cristal de roche, gâbîS, nommé lui-même dans l’énumération. D’ailleurs, pour que le verre occupât une place au milieu de toutes ces matières de prix, il fallait qu’il fût employé en objets capables de servir de parures, perles artificielles, pendeloques, bracelets, etc. — Il est dit dans les Proverbes, xxiii, 31 : « Ne regarde pas le viii, … comme il donne son œil dans la coupe, » be-kôs, c’est-à-dire comme il a belle apparence dans la coupe. La Vulgate traduit in vitro, « dans le verre ». Mais il n’y a là qu’une interprétation. — Il n’est plus fait mention du verre que dans l’Apocalypse. Saint Jean voit en face du trône de Dieu « comme une merde verre semblable à du cristal. » Apoc, iv, 6. Cette mer est probablement ici le firmament qui s’étend au-dessous du trône divin. Une autre fois, il voit « comme une mer de verre, mêlée de feu, et, au bord de cette mer, les vainqueurs de la bête. » Apoc, xv, 12. Cette mer représente l’eau et le feu des épreuves au travers desquelles les serviteurs de Dieu doivent passer. Cf. Ps. lxvi (lxv), 12. Enfin, dans la Jérusalem céleste, les constructions sont en or pur et translucide comme du verre. Apoc, xxi, 18, 21. Cet or ressemble donc au verre teinté de chrome. — Sur certaines verreries sidoniennes, dont plusieurs pensent qu’il est question dans Josué, xi, 8 ; xiii, 6, voir Maséhéphoth, t. iv, col. 831.

H. Lesêtre.
    1. VERROU##

VERROU (hébreu : bad, berîah, metil ; Septante : jj.oyXà : , xXefOpov ; Vulgate : veclis, sera), barre de bois ou de fer, qui sert à assurer la fermeture d’une porte. Voir Barre, fig. 453, t. i, col. 1468 — Les portes des villes ont des verrous. Deut., iii, 5 ; Jud., xvi, 3 ; II Esd., iii, 3, 6, 13, 15, etc. Dieu brise les portes d’airain et les verrous de fer qui retiennent les captifs. Ps. cvn (cvi), 16. Il les brise devant Cyrus. Is., xlv, 3. Pour prendre une ville, on brise ses verrous. Il en est ainsi pour Babylone, Jer., li, 30, pour Damas, Âm., i, 5, pour Ninive, Nah., iii, 13, et pour Jérusalem. Lam., il, 9. On attaque plus facilement les populations qui n’ont ni portes ni verrous. Jer., xtix, 31 ; Ezech., xxxviii, 11. Voir Barre, t. i, col. 1468. — Métaphoriquement, on suppose que des verrous servent à clore la mer, Job, xxxviii, 10, le sche’ôl, Job, xvii, 16, et la surface du sol habitable. Jon., ii, 7. Les querelles des frères ennemis sont comme les verrous d’un palais ; rien ne peut les réduire. Prov., xviii, 19. Les versions ont ici un teut autre sens. — Les os de l’hippopotame sont comparés à une barre de fer, metîl barzél, lamina ferrea, probablement à un verrou. Job, xl, 18 (13). — Dans Isaïe, xxvii, 1, Léviathan est appelé nâhdS bdriah, « serpent fuyant ». Les Septante traduisent exactement par o<piv (peiiyovra, « serpent fuyant ». Mais la Vulgate rend l’hébreu par serpentent vectem, <t serpent verrou », comme s’il y avait berîah en hébreu, ce qui n’a pas de sens clair.

H. Lesêtre.

VERS HÉBREU. Voir Poésie hébraïque, col. 477480 ; Hébiuîoue ^Langue), t. iii, col. 490-491.

VERSETS DANS LA BIBLE. Le mot versus, versUttlws, vient de verto, « tourner », et comme trn’xoc, en grec, il désignait chez les Latins les lignes d’écriture en général, soit en prose soit en vers. Dans de très

anciens manuscrits, les livres poétiques de la Bible, Job, les Psaumes, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique et les chants poétiques sont divisés par vers commençant à la ligne. La division de tous les livres bibliques par versets fut introduite dans un but pratique. Pour qu’on put retrouver aisément dans l’Écriture un passage particulier, on imagina d’abord de partager chaque livre en chapitres et c’est ce que fit le cardinal Etienne Langton († 1228). Voir Chapitres de LA Bible, t. ii, col. 55 >. Afin de rendre les recherches plus rapides, lorsque, vers 1240, le cardinal tlugues de Saint-Cher compila la première concordance verbale du texte latin de laVulgate, il subdivisa les chapitres en sept parties qu’il distingua en marge par les lettres a, b, c, d, e, f, g. Cette subdivision, après avoir été en usage pendant environ trois cents ans, n’est mainlenueaujourd’hui que dans les renvois de certaines éditions du Missel et du Bréviaire ; elle a disparu lorsqu’elle est devenue inutile par l’introduction plus pratique et plus commode des versets proprement dits qui, par leur brièveté, rendent les recherches extrêmement faciles.

La numérotation actuelle des versets, qui a passé peu à peu dans toutes les éditions de la Bible, en quelque langue qu’elles soient, a pour auteur l’imprimeur Robert Eslienne. Il l’introduisit pour la première fois en 1555, dans une édition gréco-latine du Nouveau Testament, et dans une édition complète de la Bible latine. Il l’indiqua en marge. Théodore de Bèze l’introduisit dans le texte même en 1565. Robert Estienne avait eu d’ailleurs des précurseurs. En 1509 Jacques Lefebvre avait déjà numéroté les versets des Psaumes dans son Psalterium quintuplex, et Santés Pagnino avait numéroté toute la Bible en 1528. Robert Estienne adopta la numérotation de Santés Pagnino pour les livres protocanoniques de l’Ancien Testament, en en introduisant une nouvelle pour les livres deutérocanoniques et pour tout le Nouveau Testament. La division des versets par R. Estienne n’est pas toujours heureuse, car en plusieurs endroits elle n’est pas en parfait rapport avec le sens, par exemple dans le Psaume lxxxix (xc), les versets 4 et 5, 9 et 10 sont mal coupés et dans’le vers : (Quis novit) prse timoré tuo iram luam — dinumerare ? les premiers mots appartiennent au t. ii et dinumerare commence le ꝟ. 12. Le pape Sixte V réforma la division dans son édition de 1590, mais on vit tant d’inconvénients dans le changement d’une numérotation universellement répandue que l’ancienne fut maintenue par Clément VIII, malgré ses imperfections, dans l’édition officielle définitive. — Voir W. Wright, article Verse, dans Kitto, Cyclopxdia of biblical literature, 1866, t. iii, p. 1066-1070 ; Mac Clintock et Strong, Cyclopœdia of biblical literature, 1891, t. x, p. 756-762 ; Ch. Graux, Nouvelles recherches sur la stichométrie, dans Les articles originaux, publiés par Ch. Graux, édit. posthume, in-8°, Paris, 1893, p. 71-124 (stiques de tous les écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament), p. 90-103.

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VERSIONS DE LA BIBLE. Voir les articles spéciaux à chaque langue, grecque, allemande, anglaise, française, etc. ; Septante, Vulgate.

VERT. Voir Couleurs, 6°, t. ii, col. 1066.

    1. VERTIGE##

VERTIGE, aveuglement intellectuel par suite duquel on ne sait plus ce qu’on fait. Saùl, sous le coup de la défaite, est saisi de vertige, Sâbâs, uxôto ; Seivôv, angustiee, et cherche la mort. II Reg., i, 9. — Les marins, pendant la tempête, sont pris de vertige, yâhoggû, ÈTapâx6r]<rav, turbati sunl. Ps. cvh (cvi), 17. — Dieu

frappe les princes de Memphis de l’esprit de vertige, ’îv’îm, nair, aii, vertigo.ls., xix, 14.
H. Lesêtre.
    1. VERTU##

VERTU (grec : àpsrïj ; Vulgate : virtus), habitude de faire le bien. Cette habitude, parfois naturelle, est souvent acquise, développée par l’effort persévérant de la volonté, et perfectionnée à l’aide du secours divin. Ps. xvin (xvii), 33. — 1° La notion abstraite de vertu n’existe pas en hébreu. Les hommes vertueux sont appelés « justes », et la vertu s’y présente sous forme de « justice », c’est-à-dire de fidélité à toutes les obligations qu’impose la volonté divine. Voir Justice, t. iii, col. 1875. Les hommes de vertu sont 'anse f>ayîl, ôuvaTr », induslrii, potentes, Gen., xlvii, 6 ; Exod., xviii, 21, 25, et la femme vertueuse 'éséf bayîl, yuvri 8wâu.eo>ç ou àvSpEi’a, mulier virtutis, diligens, fortis. Rutli, iii, 11 ; Prov., xil, 4 ; xxxi, 10. — Les différentes vertus, représentant chacune une forme spéciale du bien, n’en sont pas moins indiquées et recommandées dans la Sainte Écriture. Voir Charité, t. ii, col. 591 ; Chasteté, col. 624 ; Espérance, col. 1965 ; Foi, col. 2296 ; Humilité, t. iii, col. 777 ; Justice, col. 1875 ; Miséricorde, t. iv, col. 1131 ; Obéissance, col. 1720 ; Patience, col. 2180 ; Pénitence, t. v, col. 39 ; Prudence, col. 803 ; Reconnaissance, col. 1006 ; Renoncement, col. 1045 ; Sagesse, col. 1349 ; Simplicité, col. 1746. — L’auteur de la Sagesse, viii, 7, met à part les quatre vertus cardinales, que Platon avait indiquées avant lui : « Quelqu’un aime-t-il la justice ? Ses labeurs sont les vertus : elle enseigne la tempérance, o-cotppo<rijvï]v, sobrieiatam, la prudence, çpovïjoiv, prudentiam, la justice, Scxacouûvïiv, justitiam, et la force, àvSpiav, virtutem. » La justice mise en premier lieu comme génératrice des vertus cardinales est la sedâqâh hébraïque, la justice totale comportant la pratique de tous les devoirs envers Dieu et envers les hommes. — 2° La notion de vertu, âpsrr, , virtus, apparaît plus clairement dans le Nouveau Testament. Les Apôtres ne dissertent pas sur la vertu, mais, en toute occasion, ils en prescrivent la pratique, qui n’est autre chose que la fidélité à la loi évangélique. Voir Loi nouvelle, t. iv, col. 347. Ainsi saint Paul recommande aux chrétiens de Rome la charité sincère, l’amour fraternel, le zèle, la ferveur, l’espérance, la patience, l’assiduité à la prière, l’aumône, l’hospitalité, l’amour des ennemis, l’humilité, la concorde, en un mot, le triomphe sur le mal par la pratique du bien. Rom., xii, 8-21. C’est le résumé de tout ce qui s’impose au chrétien vraiment vertueux. L’Apôtre fait de la charité la première des vertus, supérieure à la foi et à l’espérance. Mais il faut que la charité comporte la pratique de toutes les autres vertus, la patience, la bonté, la discrétion, le désintéressement, la douceur, la justice, le support, etc. ICor., xiii, 4-13. Dans le chrétien, la grâce agit pour aider à la fidélité et au progrès des habitudes vertueuses, et c’est le Saint-Esprit qui produit dans l'âme la charité, la joie, la paix, la patience, la mansuétude, la bonté, la fidélité, la douceur et la tempérance. Gal., v, 22. Aux Éphésiens, iv, 2, 3, saint Paul recommande de faire honneur à leur vocation par leur humilité, leur douceur, leur patience, leur charité fraternelle et leur esprit d’union et de paix. Il dit aux Philippiens : « Que tout ce qui est vrai, tout ce qui est honorable, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est de bonne renommée, s’il est quelque vertu et s’il est quelque louange, que ce soit là l’objet de vos pensées. » Phil., iv, 8. Il ne veut pas que la vertu soit superficielle ; elle doit saisir le plus intime de l'âme. « Revêtez-vous d’entrailles de miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience, …etsurtout de la charité, qui est le lien de la perfection. » Col., iii, 12-14. À ses disciples, Timothée et Tite, saint Paul indique les vertus qui sont exigées des évêques et des diacres. I Tim., iii, 2-9 ; Tit., i, 8. Lui-même félicite le premier de l’avoir suivi fidèlement dans sa conduite, sa foi, sa longanimité, sa charité et sa constance. II Tim., iii, 10. Saint Pierre exhorte les chré tiens à joindre à leur foi la vertu, le discernement, la tempérance, la patience, la piété, l’amour fraternel et la charité. « Si ces vertus sont en vous et y abondent, ajoute-t-il, elles ne vous laisseront ni oisifs ni stériles pour la connaissance deNotre-Seigneur Jésus-Christ. » II Pet., i, 5-8. Les Épitres de saint Jean parlent surtout de l’amour de Dieu et de la charité fraternelle. — Dans un très grand nombre de textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, la Vulgate emploie le mot virtus dans le sens de « puissance » et non dans celui de « vertu ». Ainsi, dans le Psaume lxxxiv (lxxxiii), 8, il est dit des pèlerins qui montent à Jérusalem : yelkâ meftayil 'él-tiayîl, « ils vont de force en force », en sentant s’accroitre leur vigueur, ly. 8uvâu.ew{ e’tç Sùv » |), iv, de virtute in virtutem, et non « de vertu en vertu ». De même, la « vertu du Très-Haut », Luc, 1, 35, « la vertu qui émanait » de Jésus, Luc, vi, 19, la « vertu du Saint-Esprit », Act., i, 8, est la 811va[/.iç, la force, la puissance divine.

H. Lesêtre.

VERTUS (grec : 8uvâu.ei ;  ; Vulgale : virtutes), nom donné à l’un des chœurs des anges. — On lit dans le cantique de Daniel, iii, 61 : « Puissances du Seigneur, bénissez toutes le Seigneur. » L’expression 7tà<xa r| 8-Jvau.iç, omnes virtutes, ne peut désigner les anges, nommés plus haut, ꝟ. 58. Ces puissances, rangées après lescieux et les eaux supérieures, et avant le soleil et la lune, sont celles de la milice céleste, les étoiles. Plus loin, la 8ûvau.i ; toi oûpavov, " virtutes cseli, désigne le hèl Semayyâ', « l’armée du ciel », les étoiles. Dan., iv, 32. C’est saint Paul qui, le premier, probablement d’après les traditions juives, donne une liste des chœurs des anges, et désigne l’un de ces chœurs par l’appellation de 8uvau.su ; , virtutes, les « vertus », distinctes des « puissances », iijoucjiai, potestates. Il assigne au Christ ressuscité une place supérieure à celle de tous ces chœurs angéliques. Eph., i, 21. Dans une autre énumération, Col., i, 16, il omet les « vertus ». Ailleurs, Rom., viii, 38, il dit qu’aucune créature angélique, ni principautés, ni vertus, ne pourra le séparer de l’amour du Christ Jésus. Il est à remarquer cependant que, dans ce passage, les & vertus » sont absentes du texte grec et ne sont mentionnées que par la^ Vulgate. Saint Pierre dit aussi que, dans le ciel, tous les anges, les principautés et les vertus, sont soumis au Christ. I Pet., iii, 22. La Sainte Écriture ne fournit aucun renseignement sur le rôle particulier de ce chœur des vertus, ni sur la raison du

nom qui lui est attribué.
H. Lesêtre.
    1. VERTUS DES CIEUX##

VERTUS DES CIEUX (Septante : Suvàfiei ; tûv

oùpavâv ; Vulgate : virtutes cœlorum), l’ensemble des étoiles. — L’expression hébraïque koUsebd' has-sâmâîm, « toute la milice des cieux », Vulgate : oninis militia cœlorum, est rendue dans les Septante par aï Suvàîietç tSv oûpavôv, « les puissances des cieux ». Is., xxxiv, 4. Le prophète décrit le jugement de Dieu ; il annonce que l’armée des cieux sera réduite en poussière et que les cieux seront roulés comme un livre. Il s’agit donc ici du firmament, et l’armée qui le peuple est celle des étoiles. Ézéchiel, xxxil, 7, 8, parle de phénomènes analogues précédant le jugement de Dieu. Les Septante traduisent ordinairement par Sûvamc, « puissance », le mot sebâ' désignant la milice du ciel, cf. IV Reg., xvii, 16 ; xxi, 3 ; xxiii, 4 ; Dan., viii, 10, ou encore par crcpa-ui. Jer., viii, 2. Dans sa description des signes avant-coureurs du jugement, Notre-Seigneur reproduit quelques-uns des traits familiers aux prophètes : « Le ciel s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, les puissances des cieux seront ébranlées. » Matth., xxiv, 29 ; Marc, xiii, 24, 25. Le parallélisme qui règne dans ce passage donne à conclure que les puissances ou vertus des cieux ne sont autres que les étoiles. Le tçxte évan

gélique suit celui des Septante, qui remplacent la « milice » du texte-hébreu que les « puissances », appelées dans certaines traductions françaises, d’après la Vulgate trop littéralement interprétée, les « vertus des cieux ». Quelques commentateurs ont vu dans les vertus des cieux les forces qui régissent les corps célestes, ou les points cardinaux du ciel. Cette interprétation s’harmonise moins bien que la précédente avec le parallélisme et le contexte. Il est encore moins probable qu’il s’agisse des anges, que de tels événements ne sauraient ébranler, et qui sont mentionnés plus loin comme faisant partie du cortège du souverain

Juge. Matth., xxiv, 31.
H. Lesêtre.

VESCE. La Vulgate rend par vicia, « vesce », le mot hébreu kussémet (pluriel : kussemîm). Is., xxviii, 25 ; Ezech., iv, 9. Quelques auteurs rapprochent ce nom du kirsenéh arabe, la vicia ervilia. Mais le mot hébreu désigne l’épeautre et, selon d’autres, le sorgho. Voir t. ii, col. 821. — Certains auteurs traduisant le qèsafy hébreu par vesce, mais à tort : ce mot signifie la nielle ou cumin noir, t. iii, col. 244. — Pour la vesce, vicia faba, voir Fève, t. ir, col. 2228.

    1. VESTIAIRE##

VESTIAIRE (hébreu : méltâhdh), endroit où l’on garde les vêtements. — Jéhu, voulant se défaire des prêtres de Baal, prétexta un sacrifice à offrir dans le temple du dieu, et, pour mieux distinguer ceux qu’il avait en vue, ordonna de tirer du vestiaire des vêtements dont ils se pareraient. IV Reg., x, 22.Il s’agitici du vestiaire du temple de Baal. Les prêtres idolâtres, aussi bien que ceux du vrai Dieu, prenaient des costumes spéciaux pour remplir leurs fonctions. Cf. Hérodien, v, 5 ; Silius Italicus, iii, 24-27 ; Lagrange, Études sur les religions sémitiques, Paris, 1905, p. 149. Dans les versions, mél(âhdh est traduit par ô km toO oXy.o-j MerfiaX, « le préposé à la maison de Mesthaal », Iris qui erant super vestes, « les préposés aux vêtements ». — Il y avait un vestiaire dans le palais de Salomon, II Par., ix, 4, et un autre dans le Temple, où les prêtres devaient laisser leurs vêtements sacrés après avoir rempli leurs fonctions. Ezech., xlii, 14 ; xliv, 19. — Job, xxvii, 16, parle de l’impie qui entasse les vêtements comme la boue, c’est-à-dire qui remplit son vestiaire. Les trésors que rongent les vers et que Notre-Seigneur recommande de ne pas amasser, Matth., vi, 19, sont les dépôts de vêtements. Saint Jacques, v, 2, y fait aussi allusion.

H. Lesêtre.
    1. VESTIBULE DU TEMPLE##

VESTIBULE DU TEMPLE, portique, pylône. Voir Temple, col. 2032.

    1. VÊTEMENT##

VÊTEMENT, étoffe disposée pour couvrir le corps de l’homme dans la vie habituelle. — Lé vêtement est une nécessité imposée par le péché des premiers parents. Gen., iii, 7, 21. L’homme s’est ensuite fait des vêtements d’abord avec la peau des animaux, voir Peau, col. 3, cf. H. Vincent, Canaan, Paris, 1907, Ç. 398, puis avec des tissus de sa fabrication. Voir Étoffes, t. ii, col. 2035.

I. Noms des vêtements. — Les vêtements sont naturellement très divers, quant à la matière et quant à la forme, suivant les temps et les pays. Les monuments anciens indiquent plus ou moins clairement la forme des vêtements portés par Tes Babyloniens, les Égyptiens, les Grecs et les Romains. Ils sont des plus rares en ce qui concerne les Hébreux. Mais le grand nombre de mots qui servaient chez eux à les désigner indique qu’ils en avaient d’assez variés. Ces mots sont les suivants : Bégéd, le vêtement que Joseph portait dans la maison de Putiphar, {( « ma, pallium, Gen., xxxix, 12, 13, 15 ; celui que le Pharaon lui donna en l’établissant chef de l’Egypte, otoXiq, stola, Gen., xli, 42, et celui que portaient les rois Achab et Josaphat sur leur trône.

III Reg., xxii, 10 ; II Par., xviii, 9. C’était donc un vêtement de dessus, destiné à des personnages d’importance. — Kelî, mot à sens divers, servant à désigner le vêtement ordinaire, (jxeùïj, <ttoàt|, vestis, Deut., xxii, 5, et les atours d’une femme, x<5<7(ioi ; , monilia. Is., lxi, 10.— Kesût, TOp ! oo).ae’ov, pallium, un vêtement de dessus. Deut., xxii, 12. — Lebûs, le vêtement commun qu’ont les plus pauvres, Ifiiriov, indumentum, veslitus, Job, xxiv, 7, 10 ; xxxi, 19, vestimentum, Job, xxxviii, 14, vestis, Dan., iii, 21. — Mad, tunique, Xstwv, tunica, Lev., vi, 10 (3), îjiittov, vestimentum, Ps. cix (cvm), 18, vêtement de dessous auquel on compare la malédiction que le méchant ne quitte pas.

— Middâh, gvSvpa, vestimentum, le vêtement du grand-prêtre, Ps. cxxxm (cxxxii), 2. — Médév, [lavo-j^i, vestis, casaque portée par des serviteurs de David, Il Reg., x, 4, tunica, IPar., xix, 4. — Mekasséh, vêtement splendide. Is., xxiii, 18. Le mot n’est pas traduit par les versions. — Malbùs, ev8uu.a, vestimentum, vêtement fourni à des serviteurs du roi. IV Reg., x, 22. — Sû(, iteptëo), ^, pallium, vêtement de dessus. Gen., xlix, 11. — Tilbo&ét, IptâTiov, vestimentum^ vêtement de dessous d’un guerrier. Is., lix, 17. — $éba’riqmdh, le vêtement de couleurs variées, pânijux ttoixiXwv, vestis diversorum colorum, comme en portaient les Hébreux du temps des Juges, et dont Sisara comptait s’emparer. Jud., v, 3. Ézéchiel, xvi, 18, mentionne aussi des vêtements multicolores en usage de son temps, bigdê riqnxâh, iv.oi.xt.aii.61 noixîXo ; , vestimenta multicoloria. — Mesi, le vêtement de soie. Ezech., xvi, 10, 13. Voir Soie, col. 1821. — Tekêlot, le vêtement de pourpre. Exod., xxvi, 4, 31 ; Num., iv, 6 ; Ezech., xxiii, 6 ; xxvii, 7, 24. Voir Pourpre, col. 586.

— Tôld’, le vêtement cramoisi. Lam., iv, 5 ; Is., l, 18. Voir Cochenille, t. ii, col. 818. — Berômîm, lx>extâ r polymita, vêtements de diverses couleurs vendus par Tyr. Ezech., xxvii, 24. — Me’îl, vêtement long des princesses, èitev81jTYi « , vestis, II Reg., XIII, 18, 8t7cXoiç r pallium, vêtement de dessus, I Reg., xv, 27 ; xxviii, 14, iftaTi’ov, vestimentum, Job, I, 20, aior„ vestis, Job, n, 12. — Mahâlâsôt, èmëïri.aT : x, nmtatoria, Is., iii, 22, rcoSïipï], Zach., iii, 4, les vêtements de rechange, ou. ceux qu’on quitte à la maison. — Saq, Gen., xxxvit, 34, le vêtement de deuil. Voir Cilice, t. ii, col. 760, . et deux Juifs revêtus d’un sac devant Sennachérib, . fig. 347, col. 1607. Cf. Lachis, t. iv, fig. 11, col. 23. — Les mois q6rhàh, Y.poY.r l, superficies, etgabbal.ia(, Sipii.<x r per totum, désignent l’endroit et l’envers du vêtement. Lev., xiii, 55. — Les belô’ê, scissa et putrida, sont des haillons. Jer., xxxviii, 12.

II. Vêtements des Hébreux. — 1° Les vêtements des Hébreux étaient de laine ou de liii, auxquels on ajouta plus tard le coton. La loi défendait de porter des tissus, mélangés de laine et de lin. Lev., xix, 19 ; Deut., xxil, . 11. « Qu’en tout temps tes vêtements soient blancs, » dit l’Ecclésiaste, ix, 8. Mais cette recommandation ne faisait pas loi. La couleur blanchâtre était naturelle à la laine et au lin. Mais elle se salissait aisément au. milieu des occupations journalières, Zach., iii, 4, et dans le peuple on usait volontiers d’étoffes teintes, que l’industrie phénicienne produisait à bon compte. Les. plus aisés se servaient d’étoffes de couleurs éclatantes, pourpre rouge et violette ou cramoisi, Prov., xxxi, . 22 ; Jer., iv, 30 ; Lam., iv, 5, et empruntaient les modes des étrangers. Soph., i, 8. Ils choisissaient de fins tissus, Luc, vii, 25, et se procuraient parfois des vêtements magnifiques. Jacob., ii, 2. Le blanc était si peu la couleur habituelle, à l’époque évangélique, qu’on note la blancheur que prirent les vêtements de Notre-Seigneur à la transfiguration, Matth., xvii, 2 ; . Marc, IX, 2, et que, pour le ridiculiser, Hérode fit mettre au Sauveur une robe éclatante, blanche d’après la Vulgate, comme à un homme épris de la folie des.

grandeurs. Luc, xxiii, 11. Les vêtements blancs comme la neige étaient habituels dans les apparitions. Dan., vii, 9 ; Matth., xxviii, 3 ; Marc., xvi, 5 ; Luc, xxiv, 4 ; Joa., xx, 12 ; Act., i, 10 ; Apoc, iii, 5, 18 ; iv, 4 ; etc. Les vêtements bigarrés ou ornés de broderies étaient aussi dans le goût des Hébreux. Jud., v, 30 ; Ezech., xvi, 18. — 2° Les principales pièces du vêtement des Hébreux étaient la tunique, voir Tunique, col. 2132, et le manteau, voir Manteau, t. iv, col. 663. Le manteau était le vêtement de dessus et la tunique celui de dessous. Cette dernière se portait sur le corps même. Mais parfois on mettait par dessous une chemise d’étoffe plus fine, sddin. Jud., xiv, 12, 13 ; Is., iii, 23 ; Prov., xxxi, 24. Voir Linceul, t. iv, col. 265. Les caleçons n’étaient obligatoires que pour les prêtres. Voir Caleçon, t. ii, col. 60. Le costume des femmes différait de celui des hommes par plus d’ampleur. Dans son large manteau, une femme pouvait mettre jusqu’à six mesures d’orge, charge qu’elle portait elle-même. Ruth, iii, 15. Les femmes avaient de plus le voile dont « lies se couvraient la tête, mais qu’elles n’étaient pas -astreintes à tenir toujours baissé. Gen., xii, 14 ; xxiv, 65 ; xxxviii, 14, 19 ; I Reg., i, 12 ; etc. Voir Voile. On mettait aux jeunes garçons et aux jeunes filles de distinction des robes longues. Gen., xxxvii, 3 ; II Reg., khi, 18. — 3° Il y avait des vêtements particuliers à certaines conditions et à certains jours, les vêtements sacrés des prêtres, voir Grand-Prètre, t. iii, col. 299, fig. 64, col. 296 ; Prêtre, t. v, col. 646, fig. 174, col. 647, les vêtements royaux, Esth., v, l ; Act., xii, 21, lesvêtements de fête, Ruth, iii, 3 ; Judith, x, 3 ; Luc, xv, 22, les vêtements de veuve, Gen., xxxviii, 14 ; Judith, x, 2 ; xvi, 9, les vêtements de rechange, Jud., xiv, 13, la robe nuptiale, Matth., xxii, 10, etc. — Sur les autres pièces du vêtement, voir Ceinture, t. ii, col. 389 ; fig. 123126, col. 389-391 ; Chaussure, col. 631 ; fig. 225-236, col. 634-640 ; Coiffure, col. 828 ; Chlamyde, col. 707, fig. 271, col. 708 ; Langes, t. iv, fig. 32-34, col. 71-72 ; Toilette, t. v, col. 2262. On faisait en sorte que les vêlements exhalassent une bonne odeur. Gen., xxvii, 27 ; Cant., iv, 11 ; Ps. xlv (xliv), 9. — 4° D’après Iken, Antiquit. hebraic, Brème, 1741, p. 543, les Juifs auraient compté dix-huit pièces d’habillement d’usage ordinaire pour les hommes : un manteau, une tunique d’étoffe souple, une ceinture large, un vêtement court et étroit, une chemise, une autre ceinture sur la chair même, un chapeau, une tiare, deux chaussures, deux .jambières, deux gants couvrant les mains et les bras jusqu’au coude, deux voiles légers servant l’un à s’essuyer après les ablutions, l’autre à se couvrir la tête et les épaules, et enfin un foulard noué autour du cou et dont les extrémités retombaient par devant. A ces différentes pièces, dont plusieurs ne sont pas mentionnées dans la Bible, s’ajoutaient les franges, voir Frange, t. ii, col. 2394, et les phylactères. Voir Phylactères, t. v, col. 319. Pour le costume des femmes juives, voir Femmes, t. ii, fig. 637-638, col. 2190. III. Prescriptions législatives. — Il était interdit à une femme de prendre des habits d’homme, et réciproquement, cette pratique étant en abomination devant Dieu. Deut., xxii, 5. Cette défense était commandée par le souci de la moralité. — Le mari devait assurer le vêtement à sa femme. Exod., xxi, 10. Voilà pourquoi, dans les temps de désolation où les hommes faisaient défaut, sept femmes pouvaient demander au même homme de porter son nom, en ajoutant : « Xous nous vêtirons de nos habits. » Is., iv, 1. La captive prise pour épouse devait quitter les vêtements d& sa captivité, pour en recevoir d’autres de son nouveau mari. Deut., xxi, 13. — Il n’était pas permis de prendre en gage le vêtement de la veuve, Deut., xxiv, 17, car le vêtement est une des choses de première nécessité. Gen., xxviii, 30 ; Eccli., xxix, 28. — Le lépreux devait

porter des vêtements déchirés, qui permissent de le reconnaître à distance. Lev., xiii, 45. — À la suite de certaines souillures, qui obligeaient les anciens à changer de vêtements, Gen., XXXV, 2, la loi prescrivait de les laver. Exod., xix, 10 ; Lev., XI, 25, 28 ; XV, 5-27 ; etc. Voir Lavage, t. iv, col. 131. — Des règles spéciales étaient imposées pour la purification de vêtements atteints de la lèpre. Lev., xiii, 47-58. Voir Lèpre, t. iv, col. 186.

IV. Usages divers. — Les pauvres couchaient dans leur vêtement pour dormir ; aussi le créancier qui l’avait pris en gage devait-il le leur rendre le soir. Deut., xxiv, 13. Cf. Marc, xiv, 51, 52. On couvrait David de vêtements pour le réchauffer pendant son sommeil. III Reg., i, 1. À l’époque d’Amos, ii, 8, des créanciers se donnaient le tort de coucher sur les vêtements pris en gage, au lieu de les rendre. — Les vêtements faisaient partie du butin qu’on prenait à la guerre et qu’on partageait ensuite. Jos., vii, 21 ; Jud., v, 30 ; . viii, 26. On les donnait en présents. I Reg., xvii, 38 ; xviii, 4 ; IV Reg., v, 5, 10, 23. — On déchirait ses vêtements en sigjie de deuil. Voir Déchirer ses vêtements, t. ii, col. 1336. — On gardait ses vêtements pour veiller la nuit sur les murs d’une ville, II Esd., iv, 24, ou dans le Temple. Voir Police, col. 503. Cf. Apoc, xvi, 15. — Les femmes d’Israël se servaient de leurs vêtements pour construire des tentes destinées aux cultes idolâtriques. Ezech., xvi, 16, 18. On les utilisait pour faire des tapis sur les montures ou sur le chemin des personnes qu’on voulait honorer. Matth., xxi, 7, 8 ; Marc, xi, 7 ; Luc, xix, 35, 36. Cet emploi était d’autant plus facile que les vêtements de dessus n’étaient pas ajustés, et qu’ils se composaient de larges pièces d’étoffe que l’on drapait sur les épaules.

— D’après la loi romaine, appliquée à Notre-Seigneur, les vêtements d’un supplicié appartenaient à ses exécuteurs. Ps. xxii (xxi), 19 ; Matth., xxvii, 35 ; Marc, xv, 24 ; Luc, xxiii, 34 ; Joa., XIX, 23. — Les travailleurs laissaient à la maison leur vêtement de dessus. Marc, xm, 16. On le quittait pour exécuter une besogne quelconque, laver les pieds de quelqu’un, Joa., xiii, 4, pêcher, Joa., xxi, 7, lapider, Act., vii, 57, etc. — Pour donner le change sur ses intentions, on prenait les vêtements d’un autre. Matth., vii, 15 ; III Reg., xiv, 2.

— Les vêtements étaient parfois rongés par la teigne, Job, xiii, 28 ; Prov., xxv, 20 ; Eccli., xlii, 13 ; Jacob., v, 2, et ils s’usaient. Ps. cil (ci), 27 ; Is., Li, 6 ; Hebr., 1, 11. Quand ils se déchiraient, Is., L, 9, il fallait les rapiécer. On avait naturellement soin de ne pas mettre à un vieux vêtement une pièce neuve, qui l’aurait fatigué et fait déchirer davantage. Matth., IX, 16 ; Marc, ii, 21 ; Luc, v, 36. — Notre-Seigneur recommande à ses disciples de ne pas se préoccuper du vêtement. Le Père, qui en donne un magnifique au lis des champs, n’en laissera pas manquer ses enfants, et, à plus forte raison, prendra soin de leur corps, qui est plus que le vêtement. Matth., vi, 25 ; Luc, xii, 23. L’un des moyens dont Dieu se sert pour accomplir sa promesse estla charité des plus fortunés. L’homme juste ne manque pas de donner un vêtement à celui qui est nu. Ezech., xviii, 7, 16 ; Tob., i, 20 ; iv, 17. Le Sauveur récompensera au jugement celui qui, dans la personne du pauvre, l’aura vêtu quand il était nu. Matth., xxv, 36-40.

V. Faits historiques. — Les Hébreux, sur l’ordre de Dieu, demandèrent aux Égyptiens des vêtements, juste rémunération de tant de durs travaux qu’ils avaient exécutés pour eux. Exod., iii, 22 ; xii, 35, 36. — Il est remarqué, comme une chose extraordinaire et providentielle, que les vêtements des Hébreux ne s’usèrent pas pendant le séjour au désert. Deut., viii, 4, xxrx, 5 ; II Esd., ix, 21. — Isaïe, iii, 6, prévoit une époque telle, qu’on dira à quelqu’un : « . Tu as un manteau, sois

notre chef. » La misère sera si grande, que le fait d’avoir un manteau mettra hors de pair. — À Joppé, Tabitha confectionnait des tuniques et des vêtements pour les veuves. Act., ix, 39. — Les Apôtres recommandent aux chrétiens d’éviter la recherche dans les vêtements. ITitn., ii, 9 ; I Pet., iii, 3. Notre-Seigneur avait conseillé à ses Apôtres, en les envoyant en mission, de n’avoir pas deux tuniques. Marc, vi, 9.

VI. Métaphores. — Les Israélites infidèles tissaient des toiles d’araignée qui ne pouvaient leur servir de vêtement, Is., lix, 6, c’est-à-dire formaient de vains projets qui n’aboutissaient à rien. — Certains biens ou certains maux qui s’attachent à l’homme sont comparés à des vêtements. C’est ainsi qu’on est revêtu de justice, Job, xxix, 14 ; Ps. cxxxii (cxxxi), 9, de salut, Ps. cxxxii (cxxxij, 16 ; Is., lxi, 10, de gloire, Eccli., vi, 32 ; xlv, 9 ; Is., Lit, 1, de force, Is., lii, 1 ; Luc, xxiv, 49, d’immortalité, I Cor., xv, 54, de malédiction, Ps. cix (cvin), 18, de honte. Ps. xxxv (xxxiv), 26 ; cix (cvm), 29 ; cxxxii (cxxxr), 18 ; I Mach., i, 29. Dieu lui-même se revêt de vengeance contre ses ennemis. Is., Lix, 17. — Il est recommandé au chrétien de revêtir le nouvel homme, Eph., iv, 24 ; Col., iii, 10, qui est Jésus-Christ lui-même. Rom., xiii, 14 ; Gal., iii, 27. — Saint Paul appelle le corps le vêtement de l’âme. II Cor., v, 3, 4. — Cf. Jahn, Archeeol. bibl., dans le Curs. compl. Scripturse Sacrée, de Migne, Paris, 1857, t. ir, col. 902-906 ; Iken, Anlxquit. hebraic, p. 541-548.

H. Lesêtre.
    1. VEUVAGE##

VEUVAGE (hébreu : ’almânïïf ; Septante : yr, pz(a, y w ï)peu(rc ;  ; Vulgate : viduilas), condition de la femme qui a perdu son mari. Chez les Hébreux, le veuvage comportait des vêtements particuliers, qui marquaient la désolation de la veuve. Gen., xxxviii, 14, 19 ; Judith, x, 2 ; xvi, 9. Anne, la prophétesse, sanctifiait son veuvage par la prière et le jeûne. Luc, ii, 37. Après la révolte d’Absalom, qui avait pris possession des concubines de son père, II Reg., xvi, 22, David condamna ces dernières à vivre dans l’état de veuvage. II Reg., xx, 3. —Au figuré, le veuvage désigne la désolation et la ruine d’une cité. Babylone sera réduite au veuvage. Is., xlvii, 9. Jérusalem sera relevée de la honte du sien. Is., liv, 4.

H. Lesêtre.
    1. VEUVE##

VEUVE (hébreu : ’almdnàh ; Septante : -/r, p « ; Vulgate : vidua), femme qui a perdu son mari.

I. Sa. condition légale. — Au point de vue des biens, la veuve ne possédait que pour transmettre à ses enfants. Voir Héritage, t. iii, col. 610. D’après le code d’Hammourabi, celle qui a des biens propres peut les donner à l’un de ses fils, mais non à l’un de ses frères. Art. 150. Celle qui a reçu de son mari un trousseau et un douaire ne peut les aliéner, mais doit les garder pour les transmettre à ses enfants ; si elle n’a pas reçu de douaire, elle a droit à une part d’enfant. Art. 171. Si elle se remarie, elle est tenue à transmettre aux enfants du premier lit ce qu’elle a emporté de sa première maison. Art. 177. Il en était à peu près de même chez les Hébreux. La femme était toujours la propriété d’un homme : jeune fille, elle appartenait à son père ; épouse, à son mari ; veuve, aux héritiers de son mari. II Reg., iii, 7 ; xvi, 22 ; III Reg., ii, 13-18. Son avoir personnel se bornait à ce qu’elle avait apporté en se mariant, spécialement ses esclaves, Gen., xvi, 2 ; xxx, 4, 9, et à ce que son mari lui donnait. Si elle se remariait, elle n’emportait pas avec elle les biens du mari défunt. Ainsi Abigaïl n’a que cinq esclaves quand elle s’unit à Davjd après la mort de Nabal. I Reg., xxv, 42. Si elle ne se remariait pas, elle pouvait retourner chez son père, Lev., xxii, 13, ou rester avec l’un de ses enfants. II Reg., xiv, 6, 7. Cf. Fr. Buhl, La société israélite d’après l’A. T., trad. de Cintré, Paris, 1904, p. 50. — La veuve recouvrait un droit que la femme mariée n’avait pas : elle pouvait faire valide ment un vœu sans l’agrément de personne. Num. xxx,

10. Un prêtre ne pouvait épouser une veuve, Lev., xxi, 14, sauf celle d’un autre prêtre. Ezech., xliv, 22. Si la veuve rentrait dans la maison de son père, elle pouvait manger les aliments sacrés comme celui-ci, s’il était prêtre. Lev., xxii, 13.

II. Sa situation morale. — 1° Le plus souvent, la veuve se trouvait, à la mort de son mari, dans la situation la plus précaire, surtout s’il lui restait des enfants en bas âge. Aussi la veuve et l’orphelin, auxquels les auteurs sacrés associent habituellement l’étranger, sont-ils des êtres qui se recommandent d’eux-mêmes à la pitié. La loi défend de leur nuire, Exod., xxii, 22, et de prendre en gage le manteau de la veuve. Deut., xxiv, 17. Elle veut qu’on abandonne à ces déshérités le droit de glaner et de grappiller, Deut., xxiv, 19-21, et qu’on les associe aux réjouissances du paiement des dîmes, Deut., xiv, 29 ; xxvi, 12, 13, et des fêtes de la Pentecôte et des Tabernacles. Deut., xvi, 11, 14. Dieu se déclare le protecteur de l’orphelin et de la veuve, Deut., x, 18 ; il veut qu’on maudisse celui qui leur fait tort. Dent., xxvii, 19. Il fait annoncer aux Israélites que, s’ils sont infidèles, leurs femmes deviendront veuves et leurs enfants orphelins. Exod., xxii, 24. —2° La veuve n’avait pas toujours de proche parent pour la défendre. Aussi était-elle à la merci des violents. On la renvoyait les mains vides, on prenait son bœuf en gage et on ne lui laissait rien. Job, xxii, 9 ; xxiv, 3, 21. Les mauvais princes et les mauvais juges la traitaient sans pitié. Ps. xcv (xciv), 6 ; Sap., ii, 10 ; Is., i, 23 ; x, 2 ; Jer., vii, 6 ; Ezech., xxii, 7, 25 ; Mal., iii, 5. Les idoles ne pouvaient naturellement rien pour elle. Bar., vi, 37. A l’époque évangélique, une veuve avait mille peines à se faire rendre justice. Luc, xviii, 3. Les pharisiens et les scribes vivaient aux dépens de celles qui étaient riches. Matth., xxiii, 10 ; Marc, xii, 40 ; Luc, xx, 47. Même chez les premiers chrétiens, certaines veuves croyaient avoir à se plaindre du sort qui leur était fait. Act., vi, 1. — 3° Par contre, l’homme charitable réjouissait le cœur de la veuve, Job, xxix, 13, ne laissait pas languir ses yeux, Job, xxxi, 16, ne maltraitait par la veuve et l’orphelin, Jer., xxii, 3 ; Zach., vii, 10, leur faisait droit, Is., i, 17, et les visitait. Jacob., i, 27. Dieu lui-même est le père des orphelins et le justicier* des veuves. Ps. lxviii (lxvii), 6 ; cxlvi (cxlv), 9 ; Prov., xv, 25 ; Eccli., xxxv, 17, 18 (13, 14) ; Jer., XLix.

11. À l’époque des Machabées, on gardait dans le trésor du Temple le bien des veuves et des orphelins, II Mach., iii, 10, et on leur donnait part au butin. II Mach., viii, 28, 30. — 4° C’est par un effet du châtiment divin que les impies ne sont pas pleures de leurs, veuves, Job, xxvii, 15 ; Ps. lxxviii (lxxvii), 64, que les veuves se multiplient chez un peuple, Ps. cix(cvm), 9 ; Jer., xv, 8 ; xviii, 21, et que Dieu n’a pas compassion d’elles. Is., ix, 16. — 5° Au figuré, les villes coupables se vantent en vain de ne pas devenir veuves. Is., xlvii, 8 ; Apoc, xviii, 7. Jérusalem, la reine des nations, est devenue veuve. Lam., i, l ; v, 3 ; Bar., iv, 12, 16.

III. Veuves en particulier. —1° L’Ancien Testament mentionne quelques veuves célèbres, Thamar, fille de Juda et veuve d’Onan, Gen., xxxviii, 11 ; la veuve de Thécué, II Reg., xiv, 5 ; la veuve de Sarepta, III Reg., xvii, 9 ; Luc, iv, 36 ; Judith, viii, 1. — 2° Dans le Nouveau Testament, sont signalées Anne la prophétesse, Luc, 11, 37 ; la veuve de Naïm, Luc, vii, 12 ; la veuve qui verse son obole, Marc, xii, 42 ; Luc, XXI, 2, 3 ; les veuves dont Tabitha prenait soin. Act., IX, 39, 41. — 3° Saint Paul conseille aux veuves de demeurerdans leur état. I Cor., vii, 8. Il prescrit les règles qui doivent être imposées aux veuves chrétiennes. Que celles qui ont des enfants s’occupent de leur famille, , et que celles qui sont seules persévèrent dans la prière. Quant à celles qui vivent dans les plaisirs, elles ne

comptent plus pour l’Église. I Tim., v, 3-8. Certaines veuves étaient inscrites sur le rôle de l’Eglise pour être assistées et aussi pour remplir certaines fonctions. Les conditions suivantes étaient requises pour l’admission de ces veuves : avoir soixante ans au moins, n’avoir eu qu’un seul mari, jouir d’une bonne réputation au double point de vue de l’éducation de ses enfants et de la pratique des bonnes œuvres. I Tim., v, 9, 10. Ces conditions montrent qu’il s’agissaitde faire de ces veuves autre chose que de simples assistées. Avec elles commençait déjà le ministère des diaconesses ou veuves, qui se maintint quelques siècles dans l’Église pour l’exercice de la charité et l’administration du baptême. Cf. Duchesne, Origines du culte chrétien, Paris, 1903, p. 342. SaintPaul veut que les jeunes veuves se remarient, et que les autres, si elles ont de la famille, soient à la charge de leurs parents et non à celle de l’Église.

I Tim., v, 11-16.
H. Lesêtre.

VIANDES. Voir Nourriture, t. iv, col. 1700 ; Animaux impurs, t. i, col. 613.

VICE (hébreu : mûm ; Septante : |ji(5(j.o{, irat^ixa ; Vulgate : macula, vitium), défectuosité d’ordre physique ou d’ordre moral.

1° Vice physique. — Certaines difformités corporelles rendaient le lévite inapte au sacerdoce. Lev., XXI, 1721. Voir Prêtre, col. 645. Absalom, II Reg., xiv, 25, et l’Épouse. Cant., iv, 7, sont signalés comme exempts de tout défaut corporel. — L’absence de tout défaut est également exigée dans les victimes destinées aux sacrifices. Lev., xxii, 20, 21, 25 ; Deut., xvii, 1. Voir Sacrifice, col. 1322. L’animal de caractère vicieux devait être mis à mort. Exod., xxi, 29, 36.

2° Vice moral. — Les Hébreux, devenant race perverse et vicieuse, ne sont plus les enfants de Dieu. Deut., xxxii, 5. Pour être sans vice, il faut diriger son cœur vers Dieu et écarter de sa vie l’iniquité et l’injustice. Job, XI, 15. Dans sa confession, Job, xxxi, 1-40, énumère les vices dont il a eu soin de se préserver : regards impudiques, mensonge et fraude, adultère, injustice envers les serviteurs, dureté impitoyable pour les pauvres, violence contre l’orphelin, avarice et cupidité, culte des astres, haine des ennemis, inhospitalité, hypocrisie, vol du bien d’autrui. Le Psaume xv (xiv), 2-5, signale les pratiques de vertu contraires aux vices les plus répandus. Les prophètes font de fréquentes énumérations des vices de leurs contemporains. Isaïe, i, 21-23, dénonce les meurtres, les vols, la cupidité, l’oppression de la veuve et de l’orphelin, l’orgueil et le luxe des femmes, Is., iii, 16-23, l’incurie, la débauche et l’idolâtrie des mauvais pasteurs, Is., lvi, 9-lvii, 5, le formalisme et la négligence dans le culte de Dieu, Is., lviii, 3-14. Jérémie, v, 1-13, stigmatise les vices qui régnent dans Jérusalem, injustice, impiété, parjure, adultère et ceux des faux prophètes, Jer., xxiii, 10-15. Ézéchiel, xxiii, 2-21, parle des vices qui souillent Samarie et Jérusalem et du châtiment qui leur est réservé. Osée, iv, 1, 2, 4, décrit ce qu’il constate dans le pays : ni fidélité, ni charité, ni connaissance de Dieu, on se parjure, on ment, on vole, on tue, on commet l’adultère, on fait violence, le sang versé s’ajoute au sang versé, « mon peuple périt, faute de connaissance. » Amos, v, 11, 12, se plaint que le juste est détesté et opprimé et que les jugements sont rendus au préjudice des pauvres. Michée, ii, 1, 2, menace les grands à cause de leurs rapines et de leurs violences contre le peuple, et les faux prophètes à cause de leurs mensonges intéressés. Mich., * iii, 1-5. Il fait la peinture des vices qui désolent la société et la famille. Mich., vii, 1-6. Habacuc, l, 1-4 ; ii, 5-15, trace un tableau non moins lamentable. Tous les prophètes s’accordent d’ailleurs à chercher dans l’abandon de

Dieu et dans la pratique de l’idolâtrie la cause qui encourage et développe tous les vices. — Les Livres sapientiaux, " principalement les Proverbes et l’Ecclésiastique, signalent par le détail un grand nombre de vices. L’auteur de la Sagesse, après avoir rendu l’idolâtrie responsable de la propagation du vice, Sap., xiv, 12, 27, fait un résumé des formes qu’il revêt parmi les impies : ignorance de Dieu, immolation des enfants, mystères clandestins, débauches dans des rites étranges, homicide et adultère, vol et tromperie, corruption et infidélité, révolte et parjure, persécution, ingratitude, souillure, crimes contre nature, rupture des mariages, impudicité, joies folles, oracles mensongers, nulle crainte du châtiment et idées perverses sur Dieu. C’est tout le procès de l’idolâtrie. — Dans le Nouveau Testament, Notre-Seigneur énumère les vices qui viennent du cœur, d’après Matth., xv, 19 : les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les paroles injurieuses, et d’après Marc, viii, 21 : les mauvaises pensées, les adultères, les fornications, les homicides, les vols, l’avarice, les méchancetés, la fraude, le libertinage, l’œil malin, la calomnie, l’orgueil, la folie.

Dans sa prière orgueilleuse au Temple, le pharisien accuse tous les autres hommes de vol, d’injustice et d’adultère ; il lui reste au moins l’orgueil. Luc., xviii, 11. — Saint Paul signale les vices qui caractérisent la vie païenne et dont doit s abstenir la vie chrétienne. Il déclare bannis du royaume de Dieu les impudiques, les idolâtres, les adultères, les efféminés, les infâmes, les voleurs, les avares, les ivrognes, les calomniateurs et les rapaces. I Cor., vi, 9-10. Il appelle œuvres de la chair l’impureté, le libertinage, l’idolâtrie, les maléfices, les inimitiés, les contentions, les jalousies, les emportements, les disputes, les dissensions, les sectes, l’envie, les meurtres, l’ivrognerie, les excès de table et autres choses semblables. Gal., v, 19-21. Parlant de la charité, l’Apôtre en trace le portrait en indiquant ses qualités et en notant les défauts qu’elle doit éviter ; elle n’est pas envieuse ni inconsidérée, elle ne s’enfle pas d’orgueil, ne fait rien d’inconvenant, ne cherche pas son intérêt, ne s’irrite pas, ne tient pas compte du mal, ne prend pas plaisir à l’injustice. I Cor., xiii, 4-6. Aux Romains, il décrit la vie des païens en signalant leurs vices coutumiers, qui tous ont leur source dans la méconnaissance de Dieu : « Comme ils ne se sont pas souciés de bien connaître Dieu, Dieu les a abandonnés à leurs sens pervers pour faire ce qui ne convient pas, étant remplis de toute espèce d’iniquité, malice, fornication, cupidité, méchanceté, coupables d’envie, de pensées homicides, de querelles, de fraude, de malveillance, semeurs de faux bruits, calomniateurs, odieux à Dieu, arrogants, hautains, fanfarons, ingénieux au mal, rebelles à leurs parents, sans intelligence, sans loyauté, sans affection, sans pitié. » Rom., i, 2831. À son disciple Timothée, saint Paul rappelle que la loi n’est pas faite pour le juste, mais « pour les méchants et les rebelles, les impies et les pécheurs, les irréligieux et les profanes, ceux qui maltraitent leur père et leur mère, les meurtriers, les impudiques, les infâmes, les voleurs d’hommes, les menteurs, les parjures et quiconque commet tout autre crime contraire à la saine doctrine. » I Tim., i, 9, 10. Des vices moins graves sont à reprocher au faux docteur : « c C’est un orgueilleux, un ignorant, un esprit malade qui s’occupe de questions et de disputes de mots, d’où naissent l’envie, les querelles, les propos injurieux, les mauvais soupçons, les discussions sans fin d’hommes qui ont l’esprit perverti et qui, privés de la vérité, ne voient dans la piété qu’un moyen de lucre. » I Tim., vi, 4, 5. L’apôtre prévoit ce que deviendront un jour les hommes opposés à la loi de l’Évangile. Ils seront « égoïstes, cupides, fanfarons, orgueilleux, blasphémateurs, re’belles-à leurs parents, ingrats, impies, sans affection, -sans loyauté, calomniateurs, intempérants, cruels, ennemis des gens de bien, traîtres, insolents, enflés d’orgueil, amis des voluptés plus que de Dieu, ayant les dehors de la piété sans en avoir la réalité. » II Tim., in, 2-5. Avant leur conversion, les chrétiens étaient <( insensés, indociles, égarés, esclaves de toutes sortes -de convoitises et de jouissances, vivant dans la malignité et l’envie, dignes de haine et se haïssant les uns les autres. » Tit., iii, 3. Saint Pierre décrit aussi cette vie d’autrefois, dans « le désordre, les convoitises, -l’ivrognerie, les orgies, les excès de boisson et le culte criminel des idoles. » IPet., iv, 2. Saint Jude, 8-16, -fait un tableau détaillé de la vie que mènent les enne--mis de la doctrine du Christ, vie de honteuses souillures, de blasphèmes, de bonne chère, d’inconstance, d’impiété et d’égoïsme. Enfin saint Jean réserve à la -seconde mort, c’est-à-dire à la mort éternelle, « les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les magiciens, les idolâtres et tous les menteurs. » Apoc, xxi, 8. — Les chrétiens ont à combattre tous ces vices, en crucifiant leur chair avec ses passions et ses convoitises. Gal., v, 24. Cf. Eph., iv, 31 ; v, 4 ; » Col., iii, 8. — On s’est demandé si ces énumérations de vices, particulièrement dans saint Paul, ne laissaient cas supposer une influence des écoles philosophiques grecques et surtout des stoïciens. L’influence est indéniable sur Phijoji, familier avec les longues énumérations de vices qu’il rattache à l’amour du plaisir. Sans doute, comme Philon, De virtut., 182, édit. Mangey, t. ii, p. 406, saint Paul fait de l’oubli de Dieu le principe de tous les vices ; mais ses énumérations n’ont rien de systématique. Les épithètes dont il se sert sont quelquefois assez vagues et toujours sans prétention philosophique. L’Apôtre, comme les autres écrivains « acres, s’inspire bien plutôt de son expérience et du spectacle qu’il a sous les yeux. Il ne nomme pas les vices dans un ordre logique, mais tels qu’ils se présentent à sa pensée ou à ses souvenirs, parfois peut-être suivant leur influence ou leur gravilé dans le milieu où il écrit. Ainsi procèdent l’auteur de la Sagesse, les autres écrivains du Nouveau Testament, la ûidachè, v, 1, le livre d’Hénoch, lxv, 6, 7 ; lxix, 3-14 ; xci, 4-8 ; xcix, 1-15, la Didascalie, 12, etc. Cf. Lagrange, Le catalogue des vices dans Vépître aux Romains, dans la Revue biblique, octobre 1911, p. 534-549. — Sur les vices en particulier, voir Avarice, t, i, col. 1285 ; Colère, t. ii, col. 833 ; Fornication, col. 2314 ; Fourberie, col. 2339 ; Fraude, col. 2398 ; Gourmandise, t. iii, col. 281 ; Haine, col. 400 ; Ignorance, col. 837 ; Impudicité, col. 855 ; Incrédulité, col. 871 ; Ingratitude, col. 877 ; Injustice, col. 878 ; Ivresse, col. 1048 ; Jalousie, col. 1112 ; Luxure, t. iv, col. 436 ; Mensonge, col. 973 ; Mépris, col. 979 ; Moquerie, col. 1258 ; Oisiveté, col. 1774 ; Orgueil, col. 1864 ; Paresse, col. 2162 ; Parjure, col. 2169 ; Prostitution, t. v, col. 765 ; Rapine, col. 987 ; Respect humain, col. 1056 ; Superstition, col. 1882 ; Témérité, col. 2019 ; Vanité, col. 2376 ; Vengeance,

col. 2390 ; Vol.
H. Lesêtre.
    1. VICTIME##

VICTIME (hébreu : zébaff, l.iag, mô’éd), être vivant qu’on immole dans un sacrifice. — L’hébreu n’a pas de mot spécial pour désigner la victime proprement dite.’Quand Isaac demande à son père où est la victime de l’holocauste, le mot que la Vulgate rend par victima est séh, 7rpd ?aTov, « agneau ». Gen., xxii, 7. Les victimes que la Sagesse immole pour les servir à ses invités portent le nom de tébafy, Bûjia, animaux tués. Prov., ix, 2. Le zébafy. est le sacrifice, 6Wa, sacrificium, et, par métonymie, la victime elle-même, Is., 1, 11 ; Ps. LI (l), 18, spécialement la victime pacifique, zébafy seldmîm, offerte dans les sacrifices eucharistiques, Lev., iii, 1 ; rv, 10, par opposition à la minffâh, sacrifice non san glant, I Reg., ii, 29 ; Ps. xl (xxxix), 7, et à l’holocauste, ’ôlàh. Voir Holocauste, t. iii, col. 729, et Oblation, t. IV, col. 1725. Le frâg, « jour de fête », est aussi parfois la victime qu’on offre ce jour-là. Même alors les versions traduisent par èoptiri, solemnilas, dies solemnis. Exod., xxiii, 18 ; Ps. cxviii (cxvii), 27 ; Mal., ii, 3. Le mô’êd a le même sens que le fydget est seniblablement traduit. II Par., xxx, 22. — Dans le Nouveau-Testament, la Ouata, victima ou hostia, désigne équivalemment le sacrifice ou la victime. Marc, ix, 48 ; Luc, ii, 24 ; Act., vii, 41 ; Heb., ix, 26 ; x, 5 ; etc. Au désert, on n’a point offert à Dieu de victimes et de sacrifices, <j ?àyta x « 8’j<r£a ; , victimas et hostias. Act., vii, 42. Sur les victimes dans les sacrifices de l’ancienne Loi, voir Sacrifice, t. v, col. 1322. — Les apôtres parlent de victimes spirituelles, offertes à Dieu par la pratique des vertus chrétiennes. Rom., xil, 1 ; Eph., v, 2 ; Phil.,

iv, 18 ; IPet., ii, 5.
H. Lesêtre.
    1. VICTOIRE##

VICTOIRE (hébreu : gebùrâh, « supériorité », yéSâ-’àh, « délivrance », milhdmâh, « succès de guerre » ), succès remporté à main armée contre les ennemis. — La victoire est la conséquence ordinaire de la guerre pour l’un des deux partis combattants. Voir Guerre, t. iii, col. 362. Aussi la Sainte Écriture enregistre-t-elle un grand nombre de victoires remportées tantôt par les Israélites, tantôt par leurs ennemis. La victoire est souvent appelée une délivrance, yesA’àh, I Reg., xiv, 45 ; II Par., xx, 17 ; Hab., iii, 8, quand elle soustrait les Israélites au joug de leurs oppresseurs. Alors Dieu délivre, hôsîya’, c’est-à-dire donne la victoire. Deut., xx, 4 ; Jos., xxii, 4 ; II Reg., viii, 6, 16. La victoire, en effet, ne dépend pas de l’effectif militaire. Ps. ixxxm (xxxii), 16, 17 ;

I Mach., iii, 19. Elle n’appartient pas toujours au plus vaillant. Eccli., îx, 11. Nul n’a droit de dire : « C’est ma main qui m’a secouru. » Jud., vii, 2 ; Job, XL, 9, 14. Dieu seul a la main assez puissante pour assurer la victoire aux autres. Ps. xliv (xliii), 4 ; xcvm (xcvn), 1, et à lui-même. Is., lix, 16 ; lxiii, 5. Voilà pourquoi il est dit que le Seigneur est avec celui auquel il veut assurer la victoire. Exod., iii, 12 ; Deut., xx, 1 ; Jos., i, 5 ; iii, 7 ; Jud., vi, 12 ; etc. — On demande à Dieu de ne pas permettre le triomphe de l’impie. Job, xvii, 4. Le Messie viendra pour faire triompher la justice. Matth., xii, 20. La vertu remporte la victoire et triomphe dans l’éternité. Sap., iv, 2. La victoire de la mort a été anéantie en droit par la résurrection du Sauveur. I Cor., xv, 54-57. Jésus-Christ a triomphé de toutes les puissances adverses par sa croix. Col., ii, 15. Dieu nous fait triompher nous-mêmes par le Christ,

II Cor., ii, 14, et, grâce à lui, notre foi est victorieuse du monde. I Joa, v, 4. — D’après la Vulgate, Prov., XXI, 28, « l’homme obéissant racontera sa victoire. » Le sens est différent dans l’hébreu : « L’homme qui écoute parlera toujours, » parce qu’il méritera toujours d’être écouté. Septante : « L’homme obéissant et réservé parlera. » L’erreur de la Vulgate, partagée par Aquila, Symmaque et Théodotion, provient de ce qu’elle fait dériver lânésab, , « pour toujours », du radical

chaldéen nesah, « vaincre ».
H. Lesêtre.

VIE (hébreu : hayim, fiayydh ; chaldéen : hay), état d’un être doué d’une activité propre et en mesure de l’exercer. La vie appartient aux végétaux, aux animaux, aux hommes et aux êtres purement spirituels ; elle se manifeste chez ces différents êtres par des phénomènes particuliers. Les auteurs sacrés envisagent la vie à divers points de vue, en Dieu d’abord, et ensuite dans l’homme,

I. En Dieu. — Dieu est vie par excellence. De toute éternité, la vie est en lui et en son Verbe. Joa., i, 4. La Sainte Écriture appelle souvent Dieu « le Dieu vivant ». par opposition avec les faux dieux qui ne sont que néant ou des êtres créés, comme les démons. Num., xiv, 28 ; Deut., v, 26 ; Jos., iii, 10 ; I Reg., xvii, 26 ; Is., xxxvii, 4, 17 ; Dan., vi, 20 ; xii, 7 ; Ose., i, 10 ; Matth., xvi, 16 ; xxvi, 63 ; Rom., ix, 26 ; II Cor., iii, 3 ; Hebr., ix, 14 ; I Pet., i, 23, etc. Dieu appuie ses affirmations par la formule « Je vis » comme s’il jurait par sa propre vie. Deut., xxxii, 40 ; Rom., xiv, 11 ; etc. Cette formule revient jusqu’à seize fois dans Ézéchiel, xiv, 16, 18, etc. La formule « Dieu vit » est une formule de serment souvent usitée ; elle équivaut au serment fait « par la vie de Dieu ». Jud., viii, 19 ; Ruth, iii, 13 ; I Reg., xix, 6 ; xxvi, 10 ; II Reg., ii, 27 ; III Reg., i, 29 ; Jer., v, 2 ; xii, 16 ; Ose., iv, 15, etc.

Il ressort nettement du premier chapitre de la Genèse que Dieu est l’auteur de toute vie, par voie de création. Il a mis la vie dans l’homme. Gen., ii, 7. Il la donne à tous, Act., xvii, 25, 28, et il est maître de la vie et de la mort. Sap., xvi, 13 ; Eccli., xi, 14 ; xxiii, 1 ; II Mach., xiv, 46.

II. Dans l’homme.

Vie physique.

Cette vie résulte de l’union de l’âme et du corps, et elle cesse par la mort. Elle est fragile et éphémère, Deut., xxviii, 66 ; Job, vii, 7 ; xxiv, 22 ; Jacob., iv, 15 ; elle est remplie d’épreuves, Job, iii, 20 ; vii, 1 ; Sap., ii, 1, 3 ; xv, 9 ; Eccli., x, 11, et les meilleurs sont amenés parfois à la prendre endégoùt. Gen., xxvii, 46 ; Exod., i, 14 ; Job, ix, 21 ; x, 1 ; Eccle., ii, 17 ; II Cor., i, 8. C’est une chose fluide, ḥéléd, ὑπόστασις, substantia, Ps. xxxix (xxxviii), 6 ; lxxxix (lxxxviii), 48 ; un souffle, chaldéen : nišǔmâ’ πνοή, flatus, Dan., v, 23 ; un bien qu’on ne peut posséder qu’une fois, yaḥîd, μονογενής, unica, l’« unique ». Ps. xxii (xxi), 21 ; xxxv (xxxiv), 17. Sa conservation s’appelle miḥyâh, ζωή, ζωοποίησις, salus, vita. Gen., xlv, 5 ; II Par., xiv, 12 ; En cours le 06/2023 I Esd., ix, 8, 9. On la demande à Dieu, Ps. xxvi (xxv), 9 ; I Esd., vi, 10, qui l’accorde, Ps. ciii (cii), 4 ; etc. Car on aime naturellement la vie et les longs jours, Ps. xxxiv (xxxiii), 13, qu’il faut cependant sacrifier au devoir. II Mach., vi, 20. En cours le 06/2023 Les années sont parfois appelées les « jours », yâmîm, ἡμέραι, dies, Gen., xxiv, 1 ; Jos., xiii, 1 ; Job, xxxii, 7 ; etc., et les vieillards meurent « rassasiés de jours ». Gen., xxxv, 5, 29 ; Job, xlii, 17 ; etc. Voir Longévité, t. iv, col. 355. Le respect de la vie humaine est prescritpar la loi divine. Voir Homicide, t. iii, col. 740. On jure par sa vie ou par la vie d’un autre. Gen., xlii, 15, 16 ; I Reg., i, 26 ; xvii, 55 ; cf. I Reg., xxv, 6.

Être à quelqu’un « à la vie et à la mort », c’est lui être irrévocablement dévoué. II Reg., xv, 21 ; II Cor., vii, 3. Le « livre des vivants » désigne l’ensemble des hommes qui vivent, Ps. lxix (lxviii), 29, et la « terre des vivants » est celle sur laquelle se meuvent les hommes qui vivent, par opposition avec ceux qui sont descendus au schéol. Is., xxxviii, 11 ; Jer., XI, 19 ; Ezech., xxvi, 20 ; etc. Sur l’arbre de vie, Gen., ii, 9 ; Apoc, ii, 7 ; xxii, 2, voir Arbres de la vie et de la science, t. i, col. 895. L’expression kâ’êf hayyàh, « au temps de la vie », que les versions traduisent par εἰς ὥρας, ὡς ἡ ὥρα ζῶσα, vita comite, si vita cornes fuerit, Gen., xviii, 10, 14 ; IV Reg., iv, 14, est expliquée par plusieurs dans ce sens : « Quand ce temps revivra, » c’est-à-dire dans un an, idée que n’implique pas le mot hayyâk. D’autres entendent ce « temps de la vie » du temps de l’enfantement, du terme de la grossesse, c’est-à-dire du temps où l’enfant vient à la vie. Cette seconde explication est plus naturelle et plus .probable. Cf. De Hummelauer, In Genesim, Paris, 1895, p. 408.

Vie morale.

L’âme a sa vie propre, par laquelle elle est immortelle ; mais cette vie n’est une vraie vie qu’autant que l’âme conforme ses actes à la volonté de Dieu. Ainsi Dieu met devant Israël « la vie et le bien, la mort et le mal, … la vie et la mort, la*hénédiction et la malédiction. » Deut., xxx, 15, 19. « La mort et la vie sont au pouvoir de la langue, » Prov., xviii, 21, parce que l’homme se montre bon ou mauvais dans ses paroles. Cf. Eccli., xv, 18 ; Jer., xxi, 8. Moïse a donné à son peuple la loi de la vie. Eccli., xlv, 6. Dieu est la source de cette vie. Ps. xxxvi (xxxv), 10. Ses préceptes sont les sentiers de la vie. Ps. xvi (xv), 11 ; Prov., ii, 19 ; v, 6 ; x, 17 ; xv, 10 ; Act., ii, 28 ; Bar., iii, » 9 ; Ezech., xxxiii, 15. Les conditions de cette vie sont la sagesse, Prov., viii, 35 ; xvi, 22 ; Eccli., iv, 12-14 ; Bar., iv, 1 ; Rom., viii, 6 ; la justice, Prov., xii, 28 ; xxi, 21 ; la crainte de Dieu, Prov., xiv, 27 ; xix, 23 ; xxii, 4. Les Livres sapientiaux rappellent les régies de la vie morale et leurs diverses applications. Il n’est donc pas vrai que la vie présente soit un pur amusement, comme le prétendent les impies. Sap., xv, 12.

Vie surnaturelle.

La vie morale de l’homme n’est possible qu’avec le secours de Dieu. Le Nouveau Testament met cette idée en pleine lumière et assigne à la vie chrétienne un caractère essentiellement suriHfturel. Jésus-Christ se présente aux hommes comme la source de cette vie. Il a la vie en lui, Joa., v, 26, il est lui-même la vie, Joa., xiv, 6 ; il a les paroles dévie, Joa., vi, 64, 69 ; Eph, , v, 26 ; il est le pain de vie, Joa., vi, 35, 48, 52, 55, et fait jaillir les eaux de la vie. Joa., iv, 10, 11 ; vii, 38. Il est venu pour communiquer la vie. Joa., x, 10, et il la donne au monde. Joa., vi, 33. La connaissance de Dieu et de son Fils, Joa., xvii, 3, et la pratique des commandements sont la condition de cette vie. Joa., xii, 50.

Les Apôtres tirent les conséquences de ces affirmations du Sauveur. La vie de Jésus est la cause du salut de l’homme. Rom., v, 10 ; II Cor., iv, 10, 11. Le chrétien vit pour Dieu dans le Christ, Rom., vi, 11 ; xiv, 8, d’une vie cachée dans le Christ, Col., iii, 3, et dans l’Esprit. I Pet., iv, 6. Le Christ est sa vie, Phil., i, 21, et le Christ vit en lui. Gal., ii, 20. C’est la vie de Dieu, Eph., iv, 18, et une vie toute nouvelle, Rom., vi, 4, que le chrétien doit vivre au milieu du monde, Tit., ii, 12, bien qu’elle attire sur lui la persécution. II Tim., iii, 13. Cette vie échappe aux sens et à la raison et « le juste vit de la foi. » Rom., i, 17 ; Gal., iii, 11 ; Hebr., x, 38. Cf. Hab., n, 4.

Vie future.

Elle est affirmée dès l’Ancien Testament. Tob., ii, 18 ; xii, 9 ; Dan., xii, 2 ; II Mach., vii, 9, 14. Jésus-Christ est lui-même la résurrection et la vie. Joa., xi, 25. Voir Ame, t. i, col. 466-472 ; Résurrection des morts, t. v, col. 1064. Dieu est le « Dieu des vivants », c’est-à-dire de tous les hommes, même quand ils sont passés dans l’autre vie. Matth., xxii, 32 ; Marc, xii, 27 ; Luc, xx, 38.

Vie glorieuse.

C’est la vie des âmes justes dans l’éternité. Les justes ressusciteront pour la vie, Joa., v, 29, et ils jouiront de la vie éternelle. Rom., ii, 7. Cette vie aura le caractère de récompense pour ceux qui y auront été prédestinés, Act., xiii, 48, qui auront s.uivi la voie étroite par laquelle on y arrive, Matth., vii, 14, qui auront tout sacrifié pour elle, Matth., xviii, 8, 9 ; Marc, ix, 42, 44, et qui auront observé fidèlement les commandements. Matth., xix, 17, 29 ; Marc, x, 17, 20 ; Luc, x, 25 ; xviii, 18, 30. Voir Récompense, t. v, col. 1004. Par Jésus-Christ seul on arrive à cette vie glorieuse. Joa., iii, 15, 16, 36 ; iv, 14 ; v, 24, 40 ; vi, 40, 47 ; x, 28 ; xvii, 2 ; Rom., vi, 23 ; Col., iii, 4 ; I Joa., v, 11. Le « livre de vie » comprend tous ceux qui ont atteint ou doivent atteindre la vie éternelle. Phil., IV, 3 ; Apoc, iii, 5 ; xiii, 8 ; xvii, 8 ; xx, 12, 15 ; xxi, 27 ; xxii, 19. Sur la nature de la vie glorieuse, voir Ciel, t. ii, col. 752.

H. Lesêtre.

VIE FUTURE. Les saints après leur mort, quand ils sont purifiés de toute souillure, jouissent du bonheur du ciel. Voir Ciel, t. ii, col. 752-756. Ceux à qui il reste quelque chose à purifier achèvent leur purification dans le purgatoire. Voir Purgatoire, col. 877-879. Ceux qui ont le malheur de mourir en état de péché mortel sont condamnés aux peines de l’enfer. Voir Enfer, t. ii, col. 1795-1796. Cf. Vie, 4°. VIEIL HOMME, état d’âme de celui qui n’est pas encore régénéré par la grâce. — Saint Paul se sert de cette expression pour caractériser la situation morale de la race d’Adam prévaricateur, par opposition avec celle de Jésus-Christ rédempteur. « Comme, par la désobéissance d’un seul homme, tous, malgré leur nombre, ont été constitués pécheurs, de même aussi par l’obéissance d’un seul, tous, malgré leur nombre, seront constitués justes. » Rom., v, 18, 19. Cf. Prat, Théologie de saint Paul, Paris, 1908, t. i, p. 299. L’héritage du premier, avec la concupiscence et le péché, constitue le vieil homme ; l’héritage du second, avec la vie de la grâce, constitue l’homme nouveau ou intérieur. Saint Paul explique que, par le baptême, le chrétien reçoit une nouvelle vie, après que le vieil homme a été crucifié et que le péché a été ainsi détruit en lui. Rom., VI, 4-6. La vieille vie disparaît alors pour faire place à un esprit nouveau. Rom., vii, 6. Le chrétien doit donc cesser de se conformer au siècle présent, pour se transformer par le renouvellement de l’esprit, Rom., xii, 2, et devenir ainsi l’homme intérieur. Rom., vii, 22. Par son sang, Jésus-Christ a créé l’homme nouveau, Eph., Il, 15, et son Esprit fortifie l’homme intérieur. Eph., m, 16. On ne comprend vraiment le Christ et son œuvre que si l’on renonce à sa vie passée, en se dépouillant du vieil homme, corrompu par des convoitises trompeuses, pour revêtir l’homme nouveau, créé selon Dieu dans une justice et une sainteté véritables. Eph., iv, 22-24. Le Christ est tout en tous, Grecs ou Juifs, s’ils dépouillent le vieil homme avec ses œuvres, pour revêtir l’homme nouveau, qui se renouvelle sans cesse à l’image de celui qui l’a créé. Col., iii, 9-11. Quiconque est ainsi en Jésus-Christ est une nouvelle créature, pour laquelle les choses anciennes, qui constituaient le vieil homme, sont passées et remplacées par quelque chose de tout nouveau, la vie de Jésus-Christ dans l’âme régénérée. II Cor., v, 17. Il importe donc fort peu d’être circoncis ou incirconcis ; « ce qui est tout, c’est d’être une nouvelle créature. » Gal., vi, 15. De ces différents textes, il résulte que le vieil homme désigne l’héritage d’Adam se perpétuant en chacun par les instincts pervers ou purement naturels et aboutissant au péché, tandis que l’homme nouveau est constitué par la vie divine qui, de Jésus-Christ, passe au chrétien et se traduit en actes surnaturellement bons.

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VIEILLARD (hébreu : zàqên, et celui qui a des cheveux blancs : yâšiš, yâšêš, ṡàb ; chaldéen : ʿaṭṭiq), celui qui est avancé en âge. — 1° Les vieillards n’ont des enfants que par miracle. Gen., xviii, 11 ; IV Reg., iv, 17 ; Luc, 1, 18 ; etc. Ils sont, comme les enfants, à l’une des extrémités de la vie, si bien que par l’expression « des enfants aux vieillards », on comprend tous les hommes. Gen., xix, 4 ; Exod., x, 9 ; Deut., xxxii, 25 ; Jos., VI, 21 ; Esth., iii, 13 ; Ps. cxlix(cxlviii), 12 ; Jer., xxxi, 13 ; Li, 22 ; Lam., ii, 21 ; Jo., ll, 16. C’est une malédiction que dans une famille il n’y ait pas de vieillards. I Reg., Il, 31 32. Isaïe, LV, 20, annonce qu’à l’époque de la restauration spirituelle, il n’y aura plus de vieillard qui n’accomplisse tout son temps. — 2° L’expérience est la couronne des vieillards. Eccli., xxv, 8. Aussi, bien qu’il y ait des vieillards insensés, Eccli., xxv, 4, et qu’un roi trop vieux ne soit pas désirable, Eccle., iv, 13, c’étaient les vieillards ou anciens qui exerçaient l’autorité chez les Hébreux dans toutes les questions qui ne ressortissaient pas au pouvoir royal. Voir Anciens, 1. 1, col. 554.

— 3° La loi ordonnait de respecter et d’honorer le vieillard. Lev., xix, 32. De fait, le chef de famille gardait l’autorité pleine et entière sur tous les siens jusqu’à sa mort. Là où il y a des vieillards, le jeune homme doit être sobre de paroles. Eccli., xxxii, 13 (9). Saint Paul ne veut pas que l’évêque reprenne le vieillard 1 avec rudesse, mais qu’il l’avertisse comme un père, I Tim., v, 1. Il doit recommander aux vieillards d’être sobres, graves, circonspects, saints dans la foi, la charité et la patience. Tit., ii, 2. Les jeunes gens doivent être soumis aux anciens. I Pet., v, 5. — 4° Les vieillards du temps de Zorobabel pleuraient en se rappelant les magnificences de l’ancien Temple. I Esd., iii, 12. — Parmi les vieillards indignes de leur âge, la Sainte Écriture signale les deux accusateurs de Suzanne, Dan., xiii, 5-50, et ceux de la femme adultère. Joa., viii, 9.

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VIEILLESSE (hébreu : zoqên, ziqnâh, ṡêb ; Septante : γῆρας, γῆρoς, πρεσϐεῖον), état de celui qui compte de nombreuses années de vie. Voir Longévité, t. iv, col. 355.

Ses caractères. — La vieillesse entraîne d’ordinaire avec elle un affaiblissement général des organes, des forces, de la santé et quelquefois des facultés. On remarque que, malgré son âge, Moïse avait gardé sa vue et ses forces. Deut., xxxiv, 7, Mais, par suite de la vieillesse, Isaac et le prophète Ahias devinrent aveugles, Gen., xxvii, 12 ; III Reg., xiv, 4, David ne pouvait plus se réchauffer, III Reg., i, 1, et le roi Asa fut podagre. III Reg., xv, 23. Le grand-prêtre Héli n’avait plus l’énergie nécessaire pour corriger ses fils, I Reg., . II, 22-26, et les Israélites, en voyant se prolonger la vieillesse de Samuel, demandèrent un roi. I Reg., viii, 1. Tobie et sa femme, devenus vieux, appellent leur fils leur « bâton de vieillesse ». Tob., v, 23 ; x, 4. La femme n’enfante plus dans la vieillesse. L’enfantement de Sara, Gen., xxi, 2, et d’Elisabeth, Luc, i, 36, sont présentés comme des faveurs divines. Si la vieillesse amène des infirmités, elle-même vient prématurément chez ceux qui ont beaucoup de soucis. Eccli., xxx, 26 (24).

— L’Ecclésiaste, xii, 2-7, a laissé une description symbolique de la vieillesse : « Avant que s’obscurcissent le soleil et la lumière, la lune et les étoiles (symbole de tristesse), et que les nuages reviennent après la pluie (peines sur peines), temps où tremblent les gardiens de la maison (les bras), où se courbent les hommes forts (les jambes), où celles qui moulent s’arrêtent parce que leur nombre est réduit (les dents), où sont obscurcis ceux qui regardent par les fenêtres (les yeux), où les deux battants de la porte se ferment sur la rue (les lèvres), tandis que s’affaiblit le bruit de la meule (la parole devenant difficile), où l’on se lève au chant de l’oiseau (le sommeil court), où disparaissent toutes les filles du chant (les sons que n’entendent plus les oreilles), où l’on redoute les lieux élevés (à cause de la difficulté de monter), où l’on a des terreurs dans le chemin (en prévision des obstacles), où l’amandier fleurit (les cheveux blancs), où la sauterelle devient pesante (les talons s’appesantissent), où la câpre n’a plus d’effet (l’impuissance de rien produire), voir Câpre, t. ii, col. 222 ; car l’homme s’en va vers la demeure éternelle et les pleureurs parcourent les rues ; avant que se rompe le cordon d’argent (le fil de la vie), que se brise l’ampoule d’or (la vie dont le fil est brisé), que le seau se détache sur la fontaine, que la poulie se casse dans la citerne (le corps, que l’âme ne soutient plus, s’abîme dans le tombeau), et que la poussière, retournant à la terre, redevienne ce qu’elle était, pendant que l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné. » Cf. Rosenmüller, Koheleth, Leipzig, 1830, p. 226-241.

Ses prérogatives. — La vieillesse a l’expérience et la sagesse, du moins chez le juste. Ps. xxvii (xxvi), 25 ; xcn (xci), 15 ; ’Eccli., xxv, 5 (4). Les cheveux blancs sont une couronne d’honneur. Prov., xvi, 31. Il ne faut donc pas mépriser la vieillesse, Eccli., viii, 7 (6), surtout dans son père, Eccli., iii, 14 (12), et dans sa mère. Prov., xxiii, 22. Toutefois, la vieillesse des impies ne mérite nul honneur. Sap., iii, 17. La vraie vieillesse, c’est celle que confère la vertu, quel que soit d’ailleurs l’âge de celui qui fait le bien. Sap., iv, 8, 9 ; Dan., xiii, 50. Le juste demande que Dieu ne le rejette pas au jour de sa vieillesse. Ps. lxxi (lxx), 9, 18.

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VIERGE (hébreu : beṭûlâh ; Septante : παρθένος), celle qui est restée étrangère à toute union corporelle. Elle est aussi appelée quelquefois naʿârâh beṭûlâh, παῖς παρθένος, puella virgo, jeune fille vierge. Deut., xxii, 23, 28 ; Jud., xxi, 12. Voir également’Almah, t. i, col. 390. — 1° La législation. — La vierge était particulièrement exposée à la séduction ou à la violence. Gen., xxxiv, 2 ; II Reg., xiii, 2. La législation prend des mesures pour la protéger. L’homme qui séduit une vierge non fiancée et abuse d’elle, doit lui payer sa dot et l’épouser. Si le père s’y refuse, le coupable doit néanmoins lui payer la dot. Exod., xxii, 16, 17. La séduction de la vierge déjà fiancée revêtait un caractère plus grave, celui de l’adultère, passible de la lapidation pour l’un et l’autre, si la vierge n’avait pas appelé au secours. Deut., xxii, 23, 24. Cf. Eccli., xlii, 10. Cette dernière était indemne si tout était arrivé contre son gré, et le séducteur seul était alors puni de mort. Deut., xxii, 25-27. Une disposition postérieure interdisait la répudiation à celui qui avait épousé la vierge violentée par lui. Deut., xxii, 28, 29. — Le prêtre avait le droit de porter le deuil de sa sœur encore vierge et vivant auprès de lui. Lev., xxi, 3. Il ne pouvait épouser qu’une vierge. Lev., xxi, 13 ; Ezech., xliv, 32. — La loi morale interdit de jeter les yeux sur une vierge, de manière à exciter la passion ou à susciter des ressentiments. Job, xxxi, 1 ; Eccli., ix, 5. — Au sujet des vierges chrétiennes, saint Paul formule, non des règles, mais un conseil. Il déclare la virginité préférable, dans l’un et l’autre sexe, parce qu’elle permet de se consacrer exclusivement aux choses de Dieu. Celui qui croit devoir marier sa fille, fait bien ; celui qui, de son plein gré, et aussi du gré de sa fille, veut la garder vierge, fait mieux. I Cor., vii, 25-38. À propos de ce texte, on a supposé en usage dans la primitive Église la vie commune entre un chrétien et une vierge faisant profession de demeurer telle. Cf. H. Achelis, Virgines subintroductæ, Leipzig, 1902. Mais le texte de saint Paul parle seulement d’un père qui marie ou ne marie pas sa fille, et nullement d’un chrétien quelconque qui peut avoir l’idée de vivre avec la vierge. Les « femmes-sœurs » qui accompagnent les Apôtres, I Cor., ix, 5, ne sont pas de jeunes vierges, mais des veuves ou au moins des personnes d’un certain âge, comme le suppose le mot γυνή. Cf. Cornely, Ia ad Cor., Paris 1890, p. 241.

— 2° Les faits. — Les Hébreux épargnèrent les vierges des Madianites, Num., xxxi, 18, et quatre cents vierges de Jabès de Galaad, pour en faire des épouses. Jud., xxi, 12. D’autres fois, les vierges étaient indignement traitées et emmenées captives par les ennemis. Judith, ix, 2 ; xvi, 6. Elles peuplaient la cour du prince, Ps. xlv (xliv), 15, et le harem du roi de Perse. Esth., ii, 2. On les sacrifiait parfois à un intérêt jugé supérieur. Jud., XI, 39 ; xix, 24. — Les vierges demeuraient ordinairement confinées dans les maisons. II Mach., 111, 19. Notre-Seigneur met en scène, dans l’une de ses paraboles, cinq vierges sages et cinq vierges inconsidérées, à l’occasion d’un festin de noces. Matth., xxv, 1-12. — Au ciel, les vierges suivront partout l’Agneau de Dieu. Apoc, xiv, 4. — 3° Les métaphores. — Les écrivains sacrés désignent sous le nom de « vierge » des villes ou des nations : « la vierge, fille de mon peuple, » Jer., xiv, 17, « la vierge d’Israël, ».1er., xviii, 13 ; xxxi, 4, 21 ; Am., v, 2, « la vierge, fille de Juda, » Lam., i, 15, « la vierge, fille de Babylone, » 1s., XL vii, 1, « la vierge,  : fille de l’Égypte. » Jer., xlvi, 16. — Saint Paul appelle son église de Corinthe « une vierge pure » qu’il a fiancée à un époux unique, le Christ. II Cor., xi, 2.

— La Sagesse est à la fois une mère et une épouse vierge, γυνή παρθένίας, muliera virginilate, en hébreu : ʾêšéṭ neʿûrîm, « l’épouse de la jeunesse ».

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VIGILANCE, soin qu’on apporte à se tenir attentif pour remplir dignement son devoir. — On veille sur des mausolées, Job, xxi, 32, sur des objets précieux, I Esd., viii, 29, sur des troupeaux, Luc, ii, 8, etc. On veille en vain sur une cité, si Dieu ne la garde. Ps. cxxvii (cxxvi), 1. — Dieu veille pour exercer soit sa miséricorde, soit sa justice. Jer., xxxi, 28 ; xliv, 27 ; Bar., ii, 9 ; Dan., ix, 14. Dans une vision, Jérémie voit maqqêl šâqêd, « une branche d’amandier », et le Seigneur, jouant sur le mot šâqêd, lui répond : šoqêd, je veille sur ma parole pour l’accomplir. Jer., i, 11, 12.

— Il y a grand avantage à veiller pour acquérir la sagesse. Prov., viii, 34 ; Sap., vi, 15. L’Épouse dort, mais son cœur veille, c’est-à-dire reste fidèle à ses pensées et à ses affections. Cant., v, 2. — Notre-Seigneur recommande instamment de veiller et de prier, pour ne pas succomber à la tentation, Matth., xxvi, 38-41 ; Marc, xiv, 34-38, pour échapper aux maux à venir, Luc, xxi, 36, pour se disposer à l’heure inconnue de la mort. Matth., xxiv, 42, 43 ; xxv, 13 ; Marc, xm, 33-37 ; Luc, xii, 37-39 ; Apoc, iii, 2, 3. Les Apôtres répètent le même avis. Eph., vi, 18 ; Col., iv, 2 ; I Pet., iv, 7. Ils veulent qu’on joigne à la vigilance la fermeté dans la foi, 1 Cor., xvi, 13 ; Act., xx, 31, et la sobriété. I Thess., v, 6 ; I Pet., v, 8. Le ministre de Dieu doit être spécialement circonspect. II Tim., iv, 5. Sur ceux qui veillent et conservent leurs vêtements, Apoc. xvi, 15, voir col. 503, 3°.

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VIGNE (hébreu : géfen ; Septante : ἄμπελος  ; Vulgate : vitis, vinea), arbrisseau qui produit le raisin.

I. Description. — La seule espèce végétale qui mérite proprement ce nom est celle qui, de temps immémorial, a fourni le vin. Elle appartient à la famille des Ampélidées, parmi les Dialypétales disciflores, formée tout entière d’arbrisseaux à entrenœuds longs et flexibles, ayant pour fruits des baies pluriloculaires. Les fleurs sans éclat, mais douées d’une odeur pénétrante, sont groupées en cymes fournies, connues vulgairement sous le nom de grappes : elles ont un calice presque nul, formé de quatre ou cinq dents peu saillantes, autant de pétales à préfloraison valvaire, avec des étamines superposées.

La vraie vigne, Vitis vinifera Linné, fig. 549, est aussi la seule espèce de l’Ancien Monde composant ce genre. Elle se distingue de ses congénères Cissus et Ampélopsis 1° par la singulière cohérence des pétales qui, au lieu d’avoir leur pointe libre, l’ont soudée en capuchon, ce qui fait que la corolle, au moment de l’anthèse, se détache d’une seule pièce en forme d’opercule convexe, puis d’une petite étoile après qu’elle s’est étalée : 2° par les vrilles oppositifoliées, véritables inflorescences stériles, à ramifications allongées, "nues et peu nombreuses, accrochantes par leur extrémité, montrant d’ailleurs tous les intermédiaires qui les rattachent aux grappes fructifères. Les premières feuilles basilaires en sont dépourvues, ainsi que plusieurs des suivantes se succédant par périodes régulières de trois en trois. Ces productions avortées sont les seules à se montrer sur les pousses issues du vieux bois, aussi la taille a-t-elle pour objet de régulariser la naissance des sarments sur les branches de l’année précédente, condition indispensable de leur fertilité.

La tige principale, recouverte par les débris fibrilleux de l’écorce qui se renouvelle tous les ans, peut atteindre une grande longueur, surtout grâce à l’appui des arbres ou d’autres soutiens artificiels, mais elle

est toujours faible et formée d’un bois mou, bon seulement pour le feu. Les feuilles distiques, larges et palminervées, présentent cinq à sept divisions de profondeur très variable, presque lancinées dans le type sauvage. Chez ce dernier les fruits petits et acerbes deviennent beaucoup plus gros par la culture et se gorgent d’une pulpe sucrée. Ils renferment les graines ou pépins, formés par un petit embryon dans un albumen corné et protégé lui-même par un testa osseux. À l’état naturel, ces baies sont saupoudrées sur leur pellicule par les germes du ferment alcoolique ou Saccharomyces dont les cellules dormantes repassant à l’état de vie active dans la cuve où l’on écrase la vendange ont pour rôle de transformer le moût en vin.

La vigne paraît spontanée dans la partie orientale de la région méditerranéenne : ailleurs, elle est seulement sortie des cultures et disséminée par les oiseaux. Du

549. — Vitis vinifera.

Teste, introduite dès la plus haute antiquité sous tous les climats où les étés sont assez chauds pour produire habituellement la maturité des raisins, elle a par suite donné naissance à d’innombrables variétés distinguées surtout par la saveur et la coloration des fruits.

F. Hy.

II. Exégèse. — 1° Noms. — La vigne se nomme ordinairement géfén (assyrien : gupnu ; arabe : iafri). Le mot èorêq (arabe : surik) est employé pour désigner une vigne de choix, Is., v, 2 ; Jer., ii, 21, ou bien il sert dans le parallélisme de synonyme à géfén ; Gen., xlix, 11 ; Is., xvi, 8. Dans Lev., xxv, 5, 11, nàzir exprime une vigne non émondée, par allusion au nâzîr (Vulgate : nazarœus ; Num., vi, 18), dont la chevelure ne devait pas être coupée. Dans certains cas, géfén désigne spécialement le cep ou tronc de la vigne, Gen., xlix, ii, en rapport avec les sàrxgim, Gen., xl, 10-12 ; Joel, l, 7, les branches ou sarments, ou bien avec les Seluhôt, « r provins ». Is., xli, 8. Cf. Joa., xv, 1-5.

— Les’askelôt sont les grappes, Is., lxv, 8 ; Mich., vii, 1 ; Cant., vii, 9. Comme ii, peut y avoir des’askelôt, « grappes », de henné ou cypre, Cant., i, 14, on trouve souvent l’expression plus précise’aHkelôf’ânâbim, « grappes de raisins », Num., iii, 23, ou’askelôt géfén, « grappes de vigne », Cant., vii, 9, ou celle-ci équivalente, « les grappes, ’askelôt, ont mûri leurs raisins. » Gen., xl, 10. Cependant le mot peut s’employer seul :

le contexte plus ou moins éloigné suffit à préciser le sens. —’Éndb (assyrien : enbu ; arabe : inab), le grain de raisin, est employé d’ordinaire au pluriel, ’ânâbim. Le bôsér est la grappe encore verie, non mûre. Job, XV, 33 ; Jer., xxxi, 29-30 ; Ezech., xviii, 2. Dans le grain de raisin, ’ëndb, on distingue zdg, la peau, et harsannîm, les pépins. Num., vi, 4. Le raisin sec se dit simmvq. I Reg., xxv, 18. Semddar est la fleur de la vigne, oivtt16>), Cant., ii, 13, 15 ; vii, 13. La traduction de la Vulgate dans ce dernier passage semble plutôt avoir vu dans ce mot la première formation du fruit, le raisin encore vert. — Une certaine quantité de pieds de vigne forme le kéréni (cf. assyrien : karanu), le vignoble. Le kéréni est originairement le lieu où l’on plante la vigne, mais comme souvent on y mêlait des figuiers, ce mot s’est entendu par dérivation d’un lieu planté de figuiers ou d’oliviers, d’un verger. Dans Jud., xv, 5, la. Vulgate a séparé les deux mots et rendu par vineta et oliveta, le kérem zait, plantation d’oliviers. Kérem se prend aussi pour la vigne elle-même : Aussi un kôrêm est un vigneron. Joël, i, 1 ; Is., lxi, 5.

— Avec le mot kérém se sont formés des noms de lieu, par exemple : ’Abël-Kerâmim, le pré des vignes, que la Vulgate rend par Abel quse est vineis consita. Jud., XI, 33, — Le jus qui est sorti du ënâb ou grain de raisin, et qui n’est pas encore fermenté est le’dsîs, Joël, i, 5 ; iv, 18, oufiroS, Deut., xxxii, 28 ; IV Reg., xviii, 32, Is., xxxvi, 17 ; lv, 31, s vin doux, moût ». Le liquide exprimé qui a fermenté forme le vin proprement dit, yain, ou poétiquement hémér.

2° Pays vignobles. — La vigne croît spontanément dans l’Asie occidentale tempérée. En Arménie, dans la région au sud du Caucase et de la mer Caspienne, et dans celle de l’Oxus, la vigne pousse des rameaux vigoureux qui s’attachent aux arbres des forêts jusqu’aux sommets les plus élevés et donne des fruits excellents sans qu’il soit nécessaire de la tailler et de la cultiver. « Dans la Margiane (portion de la Bactriane), dit Strabon, 1. II, c. i, 14, le pays abonde en vignes, et on y trouve des ceps si gros qu’il faut deux hommes pour les embrasser, ainsi que des grappes de raisins de deux coudées de longueur. » Il est intéressant de constater, que la région de l’Ararat où la Bible place Noé au sortir de l’Arche, et où il cultive la vigne, Gen., ix, 20, est regardée comme l’endroit où se touchent les trois rameaux principaux de la race caucasienne, représentés par Sem, Cham et Japhet, et comme la patrie primitive de la vigne. Ad. Pictet, Les origines indo-européennes, Paris, 2e édit., t. i, p. 299.

Dès la plus haute antiquité on trouve la vigne en Assyrie. Voir fig.552, col. 2429. Elle est représentée sur d’anciens monuments, soit sous sa forme naturelle, soit sous une forme hiératique. E. Bonavia, The flora of the Assyrian monuments, in-8°, Londres, 1894, p. 11, fig. 6 ; p. 49, fig. 21 ; p. 52, fig. 23 ; p. 61, fig. 27. Sur les bas-reliefs de l’époque des Sargonides se voient souvent des vignes, soit isolées, comme la vigne de Koyoundjik grimpant sur un pin, Rawlinson, The ftve great monarchies of the ancient eastern world, Londres, in-8°, 4e édit., 1879, t. i, p. 353, soit disposées en berceau de verdure, comme celle à l’ombre de laquelle repose Assurbanipal couché (fig. 550). Rawlinson, t. i, p. 473 ; Perrot et Chipiez, Hisl. de l’art, t. ii, p. 107, 652. Assurbanipal parle de plantations de vigne faites sur les bords du canal de Kalakh. À Delattre, Les travaux hydrauliques en Babylonie, dans la Revue des quest. scientif., 1888, t. xxiv, p. 481. Sennachérib, dans V Inscription de Bavian, H. Pognon, Paris, 1879, in-8°, p. 9, rappelle les vignes qu’il a plantées aux environs de Ninive. — La vigne était aussi cultivée en Perse, et c’est avec abondance qu’on servait à la table royale les vins des meil&

leurs crus. Esther, i, 7. La couche de Darius était ombragée d’une belle vigne d’or. Hérod., vii, 27.

S’il fallait en croire Hérodote, ii, 77, l’Egypte n’aurait pas eu de vignes. Mais s’il ne veut pas parler d’une région particulière, celle des marais, il se contredit lui-même, ii, 37, 168. La vigne était connue en Egypte dès la plus haute antiquité ; on y regardait Osiris comme l’inventeur de sa culture. Gr. Woenig, Die Pflanzen im altem Aegypten, in-8°, Leigzig, 1886, p. 259. La Bible fait allusion aux vignes de ce pays. C’est le grand échanson qui est représenté pressant des grappes de raisin dans la coupe du Pharaon, Gen., XL, 11 ; ce sont des Hébreux qui regrettent de ne point trouver dans la contrée du Sinaï des vignes comme en Egypte, Num., xx, 5 ; c’est la grêle qui dans une des plaies d’Egypte détruisit les vignes du pays. Ps. lxxvih (Vulgate, lxxvii), 47 ; Ps. cv (Vulgate, civ), 33. Les monuments prouvent la culture de la vigne en Egypte ; même dès les temps les plus reculés ils représentent la cueillette du raisin et la fabrication du vin.Lepsius,

la vigne et la fabrication du vin en Egypte dès les temps les plus reculés. Dans les inscriptions, la vigne se

nomme I ^k <= ^"J-arouri, de même le raisinl -= arouri, en copte « Aovi, aloli. Le raisin séché au soleil s’appelait aschep ou schep ; le raisin vert gangani. Voir fig. 553, col. 2431.

En traversant la presqu'île du Sinaï, les Hébreux n’avaient pas rencontré de vignes. Num., xvi, 14 ; xx, 5. Mais en se rapprochant du pays de Chanaan, ils en trouvent dans le pays d'Édom. Num., xx, 17. Déjà, 22 ou 23 siècles avant notre ère, le fugitif Égyptien Sinouhit parle des vignes qu’il avait vues en ce pays. « Le vin, dit-il, y est en plus grande quantité que l’eau. » G. Maspero, Hist. ancienne, t. i, p. 471. Les Hébreux rencontrent la vigne chez les Amorrhéens, Num., xxi, 21, et dans le pays de Moab, où les vignobles étaient entourés de clôtures. Num., xxii, 24. Plus tard, Isaïe, xvi, 8, vante les nombreux vignobles de l’ancien pays de Moab.

550. — Le roi Assurbanipal et la reine se reposant et buvant au son de la musique, sous un berceau de vigne.

British Muséum.

Denkm., ii, 13, 49, 53, 61, 96, m et 111, 11. Au tombeau d’Amten (de la III" dynastie), on énumère parmi les domaines du défunt, des vignobles qui produisent « du vin en grande quantité. » Lepsius, Denkm., Il, 7 6 ; Maspero, Journal asiatique, 1889, t. i, p. 390 ; Études égyptiennes, t. ii, p. 231. Le scribe Anna avait fait planter douze vignes dans son jardin ; l’officier d’Amen, hotep II en avait fait mettre vingt-quatre. Fréquemment, les plans de maison et de jardin de la XVIIIe ou XIXe dynastie présentent des treilles disposées en berceaux, soutenues par des colonnettes sur lesquelles des ceps de vigne étendent leurs rameaux chargés de fruits. Au Ramesséum de Thèbes on a trouvé des celliers remplis de grands vases et amphores portant sur la panse, écrites en hiératique, la date de la récolte et la mention a vin de transport ». G. Maspero, Guide du musée de Boulaq, p. 287. Des feuilles de vigne, des grains de raisin se rencontrent dans les tombes les plus anciennes et on en a recueilli des spécimens dans tous les musées, Bulletin de l’Institut égyptien, n. 5 (1884), p. 9 ; Botanische Jahrbùcher (1886), t. viii, p. 8. Les grains du musée du Louvre sont à peau épaisse et à gros pépins. Recueil de travaux, t. xvii, p. 194. A toutes les époques, les monuments montrent des rois ou des particuliers faisant aux dieux des libations de vin dans des vases spéciaux. Cf. Erman, Life in andent Egypt, Londres, 1894, in-8°, p. 271 ; Ebers, Aegypten und die Bûcher Mose’s, p. 323-330. Il ne saurait donc y avoir de doute sur la culture de

Mais c’est surtout la Palestine qui est le pays du blé et de l’orge, mais aussi de la vigne et du figuier. Deut., vin, 8. Je vous donnerai, dit Dieu aux Israélites, Jos., xxiv, 13, du fruit de vignes que vous n’avez point plantées. Cf. II Esd., ix, 25. "Les espions envoyés dans la terre de Chanaan, pour explorer le pays, trouvèrent une vallée où les vignes étaient magnifiques et ils coupèrent une branche de vigne avec sa grappe aux. dimensions si extraordinaires que pour la rapporter sans la froisser, ils la suspendirent à une perche et la portèrent à deux. Num., xiii, 24. Aussi, donnèrent-ils à cette vallée le nom de vallée d’Escol, ou vallée de la Grappe. On voit encore de nos jours en. Palestine des raisins d’une grosseur extraordinaire (fig. 551).

Au pays de Galaad, les vignobles de Sabama et de Jazer étaient particulièrement renommés. Is., xvi, 810 ; Jer., xlviii, 32-33. On vantait aussi les vignes d’Hébron et d’Engaddi, des collines de Samarie et du Carme], delà vallée du Jourdain. Num., xiii, 26 ; Jud.. ix, 27 ; III Reg., xxi, 1 ; II Par., xxvi, 10 ; Cant., i v 14 ; viii, 11 ; Jer., xxxi, 5 ; Ose., xiv, 8, etc., Par toute la Palestine, spécialement sur "les collines, sur les hauteurs, on voyait des vignobles. Is., v, 1 ;

    1. XXVIII##

XXVIII, 1.

3° Culture de la vigne. — Bien que le sol et le climat de la Palestine fussent favorables à la vigne, elle demandait cependant des soins. Soit pour la planter, soit pour l’entretenir, on remuait soigneusement le

sol à la bêche, et on enlevait les pierres. Is., v, 2. Ce n’est pas le travail auquel se livrait le paresseux qui laissait croître les ronces et les épines. Prov., xxiv, 30-31. Pour préserver des vignobles ou champs de vigne contre la tentation des passants ou contre les pillages des Bédouins, Job, xxiv, 1, ou contre les chacals, on les entourait de murs ou de haies, et dans l’intérieur on élevait une tour ou une cabane pour loger des gardiens au temps où les raisins commençaient à mûrir. Num., xxii, 24 ; Is., i, 18 ; v, 2, 11 ; Matth., xxi, 33. Ces tours ont d’ordinaire jusqu’à 4 m 50 de haut sur quatre coudées ou l m 80 de largeur. Voir Tour, fig. 517, col. 2291.

S’il faut en croire Pline, #. N., xvii, 35, du moins en ce qui regarde la Syrie, on aurait laissé la vigne ramper à terre, comme on le voit encore en certains endroits de la Palestine. On avait en même temps l’habitude de faire monter la vigne sur les arbres. Is., cv, 33 ; Jer., viii, 13 ; Hab., iv, 17 ; Is., iii, 12. Les vignes de Silo, devaient êlre assez élevées puisque les Benjamites purent s’y mettre en embuscade. Jud., XXI, 20, 21. Du moins près des habitations on faisait grimper la vigne sur des figuiers ; de là est venue l’expression proverbiale : Se reposer sous sa vigne et son figuier. III Reg., iv, 25 ; Mich., iv, 4 ; Zach., iii, 10, Luc, xiii, 6.

Une fois plantée, la vigne exigeait encore des soins.

II fallait l’émonder, couper les branches inutiles. Joa., xv, 2-6. On taillait la vigne à la serpette, mazemêrâli. Is., ii, 4 ; v, 16 ; xviii, 5 ; Joël, iv, 10. Il fallait attendre les fruits pendant trois ans après la plantation : ce n’était qu’à la quatrième année qu’on pouvait en récolter. Is., xxxvii, 30 ; Ma’aSer scheni, 5.

La vigne était une des richesses de la Terre Promise. C’était donc une source de revenus : aussi les rois de Juda ou d’Israël ne pouvaient la négliger. Samuel avait prédit aux Israélites qui désiraient un roi, que celui-ci leur prendrait la dîme de leurs vignes, I Reg., viii, 1415, et même donnerait leurs vignes à ses serviteurs. Le fils d’Isaï, dit Saiil aux Israélites qui penchaient pour David, vous donnera-t-il des champs et des vignes ? I Reg., xxii, 7. La vigne de Naboth convoitée par Achab, roi d’Israël, et acquise par Jézabel au prix du meurtre de son propriétaire, est célèbre par le châtiment qu’attira cette iniquité sur les deux coupables.

III Reg., xxi, i-24.

Pour l’administration des vignes qui lui appartenaient, David avait préposé Séméi de Rama. Zabdias l’Aphonite était chargé des provisions de vin. I Par., xxvii, 27. Dans l’Ecclésiaste, ii, 4, le sage se bâtit des maisons et plante des vignes. La femme laborieuse du livre des Proverbes, xxxi ; 16, avec les fruits de son labeur plante une vigne.

Chacun en Israël voulait se faire une vigne plus ou moins considérable, et se reposer à l’ombre de sa vigne et de son figuier. IV Reg., xviii, 31. C’est, pour qu’ils ne s’attachent pas à un coin de terre et qu’ils restent nomades, que Réchab défendit à ses fils de planter de la vigne. Jer., xxxv, 7-9. Dans la disette de blé, le peuple engagea sous Néhémie ses champs et ses vignes. II Esd., v, 3-11.

Lorsque le peuple est infidèle, il est menacé de voir périr ses vignes et le châtiment ne tarde pas à le faire réfléchir. Dès le temps de Moïse la menace lui en est faite : « Tu planteras une vigne et tu n’en jouiras pas, tu n’en boiras pas le viii, » est-il dit dans les malédictions du ch. xxviii, 30 et 39. Sophonie, i, 13, et Amos, v, 11, reprennent cette menace. « Vos vignes et vos figuiers, dit Amos, iv, 9, ont été dévorés par les sauterelles. » « Je dévasterai ses vignes et ses figuiers, » est-il annoncé à Israël dans Osée, ii, 12. » Le jus de la vigne est en deuil, le cep languit, » annonce Isaïe, xxiv, 7. s En ce jour-là, dit-il, vii, 23, tout vignoble de

mille ceps de vigne valant mille pièces d’argent sera couvert de ronces et d’épines. » Aussi le prophète, xxxii, 12, dépeint le deuil de la nalion : « On se lamente sur les belles vignes fécondes. » « Plus de raisins à la vigne, dit Jérémie, viii, 13, ni de figues au figuier. La feuille même est flétrie. » « Il n’y aura rien à récolter dans les vignes, » dit aussi Habacuc, iii, 17. Mais si Israël se repent et retourne à son Dieu, il reviendra en Palestine y planter la vigne. Ézech., xxviii, 26. La vigne ne sera plus stérile dans ses campagnes. Mal., m, 11.

Un certain nombre de lois concernent la culture, l’entretien ou la récolte de la vigne. La loi permettait d’entrer dans la vigne du prochain, d’en cueillir des grappes et d’en manger selon son désir, mais défendait d’en emporter dans un panier. Deut., xxiii, 24. Mais

551. — Raisin de Palestine.

si quelqu’un a fait du dégât dans un vignoble, il donnera en dédommagement le meilleur de son vignoble. Exod., xxii, 5 (hébreu, 4). En faisant la cueillette des raisins pour la vendange, on ne devait pas revenir sur ses pas pour ramasser les grappes oubliées dans la vigne, mais les laisser à la disposition des pauvres et des étrangers. Lev., xix, 10 ; Deut., xxiv, 21. Pour le vigneron qui donne tous ses soins à la vigne de celui qui le prend à son service, il est juste qu’il participe à son fruit. I Cor., ix, 7. Le repos de l’année sabbatique concernait aussi les vignes. Durant la septième année, on ne devait ni semer, ni tailler la vigne, ni récolter, Exod., xxiii, 11 ; la loi est reprise. Lev., xxv, 1-7. Cette septième année doit être une année de repos, de sabbat pour la terre. Lev., xxv, 4. Durant le naziréat, on ne devait manger d’aucun produit de la vigne, pas même les pépins ou la peau des raisins. Num., vi, 3-4 ; Jud., 13-14. Quant à celui qui venait de planter une vigne et n’en avait pas encore recueilli le fruit, il était dispensé d’aller faire la guerre. Deut., xx, 6. On voit une application de cette loi dans I Mach., iii, 56. 4° Vendanges. — La vendange, bàçir, commençait 2429 s

VIGNE

2430

dans la Palestine au mois de septembre et devait être achevée dans la première moitié d’octobre, époque de la fêle des Tabernacles, qui indiquait la fin de toutes les récoltes. Comme à la moisson, le temps des vendanges était une époque de réjouissances. Vignes et pressoirs retentissaient alors de chants. Ce chant, ce hourra des vendangeurs se nommait hêdâd. Jud., IX, 27 ; 1s., xvi, 10 ; Jer., xxv, 30 ; xlviii, 33. Aussi pour peindre la désolation de Moab, le prophète ne manque pas ce trait :

Plus encore que sur Jazer, je pleure sur toi, vigne de Sabama.

Tes sarments s’étendaient jusqu’à la mer (Morte) et au delà

Ils touchaient à Jazer.

Le dévastateur s’est jeté sur ta récolte et sur ta vendange.

La joie et l’allégresse ont disparu des vergers

Et de la terre de Moab ;

exprimé, on le conservait dans des outres de peau de chèvre, Jos., ix, 4 ; Job, xxx[l, 19 ; Matth., ix, 17, ou bien dans des vases ou amphores de terre. Jer., xiii, 12 ; xl viii, 11. On soutirait les vins pour les clarifier. Is., xxv, 6 ; Jer., xlviii, 11. On rangeait les vases à vin dans les celliers. I Par., xxvii, 27. Il s’agit là des celliers où David faisait garder son vin ; Ezéchias avait les siens, II Par., xxxii, 18. Quant au cella vinaria de Cant., xi, 4, ce n’est pas le cellier, mais l’endroit où l’on boit le viii, où l’on se réjouit. Voir t. ii, col. 396.

5° Produit de la vigne. — Une partie des raisins était réservée pour être mangée en nature, ou sous forme de raisins secs entrer dans la fabrication de certaines espèces de gâteaux, la debêldh, ou la’âsisâh. Voir Gâteau, t. iii, col. 115. Mais la plus grande partie de la récolte servait à faire du vin que l’on buvait avant ou

552. — Vignoble assyrien. D’après Layard, Homtments of Nineveh, t. i, pi. 81.

J’ai fait tarir le vin des cuves.

On ne le foule plus au bruit des hourras

Le hourra (hêdad) n’est plus le hourra ! Jer., xlviii, 32-33.

Dans les vignes de Sabama, dit également Isaïe, xvi, 10, plus de chants, plus de cris de joie. Le hêdad a cessé.

Les vendangeurs cueillaient les raisins dans des paniers et les jetaient dans le pressoir. Le pressoir porte les noms de gaf, yéqéb, pûrâh. Zach., iv, 13 ; Job, xxiv, et Joël, iv, 13 ; Is., xliii, 3, et Agg., ii, 16. A prendre les choses avec précision, le gaf est la grande cuve où l’on entasse le raisin, le yéqéb est la cuve placée sous l’appareil à pression, le pûrâh est l’appareil à pression. Au lieu de l’appareil à pression, on employait aussi le pressoir à torsion. Voir t. v, col. 612. Le pressoir était d’ordinaire dans le verger même : il consistait en une simple cuve en pierre où l’on jetait les grappes, qui étaient foulées aux pieds par les vendangeurs. Une ouverture dans le fond de cette cuve laissait passer le liquide dans un réservoir, souvent creusé dans la terre et maçonné. Cf. Van Lennep, Bible lands, t. i, p. 117 ; Robinson, Biblical researches, t. iii, p. 137. Quand le vin pressé était bien

après la fermentation. Voir Moût, t. iv, col. 1330 ; Vin t. v, col.

6° Comparaisons, paraboles. — Les comparaisons, les proverbes, les allégories tirées de la vigne sont en grand nombre dans la Bible.

Dans l’apologue des arbres qui se cherchent un roi, la vigne, comme l’olivier et le figuier, représente les bons Israélites, qui, chacun dans leur situation, produisent des fruits utiles et appréciés de tous, par opposition au buisson qui n’a que des épines et qui ne peut même pas fournir un ombrage commode contre l’ardeur des rayons du soleil, image d’Abimêlech, homme méchant qui ne peut que blesser et nuire. Jud., IX, 7-20.

L’importance de la vigne en Israël, les soins multiples qu’elle exigeait ont amené les auteurs sacrés à y voir une belle allégorie des soins de Dieu pour son peuple, et à la développer très fréquemment. Israël est la vigne de Jéhovah. Cette vigne a été apportée d’Egypte, Ps. lxxx (lxxix), 8-14, plantée à la place des nations qui occupaient la terre de Chanaan. Solidement enracinée, ses rameaux se sont étendus depuis la mer j usqu’au fleuve, c’est-à-dire ont couvert toute la Terre Promise. Mais cette vigne qui fut longtemps prospère a vu ses clôtures se rompre, et les bêtes sauvages l’ont dévastée ;

le feu l’a brûlée et l’on a coupé ses rameaux. Ps.lxxx, 13-20. C’est la prise et la ruine de Jérusalem et la captivité de Babylone qui sont peintes sous ces images. Les mêmes idées et les mêmes images ont souvent été reprises par les prophètes. C’est le sujet de la belle parabole d’Isaïe, v, 1-7. Dans ce chant de l’amour de Jéhovah pour sa vigne les deux premières strophes décrivent l’amour et les soins de Dieu payés par l’ingratitude de son peuple, les deux suivantes, le jugement ; puis les strophes 5 et 6, le châtiment, enfin les strophes 7 et 8, l’application à Israël. Ce petit chant décrit au complet tous les soins qu’on donnait à la vigne en Palestine.

Isaïe revient sur cette image, c. m. Les chefs du peuple ont brouté la vigne, c. xxvii, 26 : c’est la vigneau vin généreux gardée par Jéhovah. Après avoir été châtié, Israël fleurira de nouveau et donnera des rejetons. Jérémie, ri, 21, développe ce sujet à son tour : Israël planté comme une vigne excellente, tout entière d’une souche franche, s’est changée en sarments

553. — Treille égyptienne.

D’après Wilkinson, Manners and customs,

2- édit., fig. 153, p. 380.

bâtards d’une vigne étrangère. Il annonce, VI, 9, qu’on grappillera comme une vigne les restes d’Israël. De nombreux bergers détruiront la vigne. Jer., xii, 10. Pour Ezéchiel, xv, 2-6, Israël est la vigne stérile dont le bois n’est bon à rien. Au ch. xvii, il développe la même image d’Israël, la vigne plantée dans une bonne terre bien arrosée, et en la combinant avec l’image des deux aigles de Babylone et d’Egypte, il en fait une parabole sur les destinées de la maison de David. De même au ch. xix, 10-14, c’est une lamentation sur la vigne d’Israël si bien plantée et qui promettait du fruit, et qui est maintenant arrachée, et consumée par un feu sorti de l’une de ses branches, c’est-à-dire par la faute de Sédécias. Dans Joël, i, 6-12, c’est une invasion de sauterelles qui a dévasté la vigne de Jéhovah. Pour Osée, x, 1, Israël est une vigne luxuriante, chargée de fruits, qui est devenue infidèle à Dieu et idolâtre. Mais qu’Israël revienne à Dieu et il fleurira comme la vigne, xiv, 8. Samarie est aussi comparée à un plant de vigne. Wich., i, 6.

L’allégorie de la vigne représentant Israël était si bien reçue que dans le temple d’Hérode, à l’intérieur du vestibule, était suspendue une magnifique vigne d’or dont les grappes au rapport de Josèphe avaient la hauteur d’un homme. Elle était placée en cet endroit pour symboliser Israël, la vigne du Seigneur. Voir t. v, col. 2065.

Rien donc de plus familier au peuple que cette image. Les scribes et les Pharisiens n’eurent aucune peine à comprendre la parabole de Jésus-Christ se servant de cette image de la vigne, familière aux prophètes pour dépeindre ce que Dieu avait fait pour son peuple et la façon dont furent reçus les envoyés du père

de famille, maître de la vigne, et son propre fils, et lechâtiment des vignerons perfides avec la location dela vigne à d’autres vignerons, c’est-à-dire aux Gentils. Matth., xxi, 33-46 ; Marc, xii, 1-12 ; Luc, xx, 9-19.

D’autres enseignements sont tirés aussi de la comparaison de la vigne. La Sagesse est comparée à la vigne dont les pousses gracieuses sont chargées de fruits. Eccli., xxiv, 23 (grec 17). Joseph est comparé à un sarment fécond, planté près d’une fontaine et dont lesbranches couvrent la muraille. G-en., xlix, 22. Par la parabole des ouvriers qui vont à différentes heures travailler à la vigne, Jésus-Christ veut montrer aux Pharisiens que pour entrer dans le royaume messianique Dieu n’appelle pas d’après les mérites antérieurs, mais par pure grâce. Matth., xx, l-16. À la fin des temps, le Fils de l’homme préside à la vendange du monde, Apoc, ix, 18-19. Pour exprimer la vie de la grâce, la vie qu’il communique aux âmes, Notre-Seigneur emprunte une comparaison à la vigne. Tout sarment qui en moi ne porte pas de fruit, mon Père, le divin vigneron, le retranchera. Tout sarment au contraire qui portera du fruit, il l’émondera pour qu’il en porte davantage. Il faut que le sarment soit uni au cep pour que la sève circule en lui et qu’il porte du fruit ; séparé du cep, il se dessèche. Ainsi, séparés de moi, vous ne pouvez rien faire. Et les sarments inutile* seront jetés au feu. Joa., xv, 1-9.

Voir Alph. de Candolle, Origine des plantes cultivées r in-8°, Paris, 1886, p. 151-154 ; Ad. Pictet, Origines indoeuropéennes, in-8°, 2e édit., Paris, p. 295-321 ; Ch. Joret, Les plantes dans l’antiquité, in-8°, Paris, 1897, p. 138141, 387, 450 ; V. Loret, La flore pharaonique, 2 a édit., Paris, 1892, in-8°, p. 99-101 ; A. Erman, Life in ancient Egypt, transi. Tirard, in-8°, Londres, 1894, p. 196-199 ; Fr. Wœnig, Die Pflanzen im allen Aïgypten, in-8°, Leipzig, 1886, p. 254-276 ; H. B.Tristram, The natural hislory of the Bible, 8e édit., in-8 « , Londres, 1889, p. 402-413 ; D. Mallet, Les premiers établissements des Grecs en Egypte, in-4°, Paris, 1896, p. 345 ; Wilkinson, Manners and customs, 2e édit., t. ii, p. i, 379-383.

E. Levesque.

    1. VIGNE DE’SODOME##

VIGNE DE’SODOME (hébreu : géfén Sedôm ; Septante : âi.Tizaç 2086n<ov ; Vulgate : vinea Sodomorum). Elle est mentionnée seulement, Deut., xxxii, 32 r où Moïse dit en parlant des impies :

Leur vigne est du plant de Sodome

Et du terroir de Gomorrhe ;

Leurs raisins sont des raisins empoisonnés.

Leurs grappes sont amères.

Quelques auteurs, comme dom Calmet, ont cru que ces vers font allusion à la « pomme de Sodome ». Voir Jéricho, t. iii, col. 1291. Josèphe en a donné la description, Bell, jud., IV, viii, 4, et Tacite y fait probablement allusion, Hist., v, 6. « Des cendres s’y produisent dans les fruits, dit l’historien juif ; ils ressemblent par leur couleur à des fruits comestibles, mais quand la main les saisit, ils se dissolvent en farine et en cendres. » Mais cette plante (Callotropis procera) n’a rien qui puisse même de très loin rappeler la vigne et elle n’a point ses fruits en grappe. D’autres ont pensé à la coloquinte, dont les feuilles ont de la ressemblance avec celles de la vigne et dont les tiges s’étendent sur le sol, comme les rameaux de celle-ci. Voir Coloquinte, t. ii, fig. 323, col. 859. Mais si elle a dans son feuillage quelque apparence générale qui l’a fait appeler « vigne sauvage », géfén èâdéh, III Reg., iv, 39, elle n’a point son fruit en grappe. On a voulu aussi y voir quelque espèce de Solanum comme le Solanum nigrum ou leSodomeum (t. iii, col. 1290, fig. 226), etc., mais ces plantes n’ont rien de l’aspect de la vigne.

Nous croyons qu’il n’y a pas à chercher ici de plante particulière, existant sur les bords de la mer Morte.

C’est une image créée par l’auteur pour caractériser Israël infidèle. Il ressemble aux habitants de Sodome -et de Gomorrhe, comme s’il était de leur race au lieu de descendre des patriarches. La corruption morale -d’Israël est souvent comparée dans l’Ecriture aux péchés de Sodome et de Gomorrhe. La vigne et ses fruits sont ici des termes figurés représentant le peuple et ses actes : il est dégénéré et ne produit plus rien que de mauvais et d’empoisonné. C’est ainsi qu’au verset suivant on compare ses actions à un vin qui serait un venin d’aspic. La mer Morte aux eaux très amères est censée communiquer son amertume à tous les produits qui .poussent sur ses bords et spécialement à ceux des villes maudites de Sodome et de Gomorrhe.

E. Levesque. VIGNERON (hébreu : korêm), celui qui cultive la vigne. — La culture de la vigne tenait une grande place dans la vie agricole des Israélites. Mais elle était relative>ment facile. Cf.Schwalm, La vie privée du peuple juif, Paris, 1910, p. 12-14. Le roi Ozias avait des vignerons qui travaillaient pour lui sur les coteaux des montagnes. II Par., xxvi, 10. Isaïe, Lxi, 5, prédit qu'à la restauration les étrangers seront les vignerons d’Israël. Les temps de sécheresse persistante faisaient la désolation des vignerons. Joël., i, 11. Après la déportation chaldéenne, Nabuzardan choisit dans le menu peuple des laboureurs et des vignerons pour demeurer en Palestine et empêcher le sol de devenir improductif. IV Reg., xxv, 12 ; Jer., lii, 16. — Notre-Seigneur met en scène des vignerons dans deux de ses paraboles. Dans la première, il s’agit d’une vigne voisine de la ville. Le propriétaire loue sur la place publique des vignerons qui y vont travailler, moyennant un denier de salaire pour la journée. Matth., xx, 1-15. Dans l’autre parabole, il est question d’une exploitation éloignée et considérable, comme devaient être celles du roi Ozias. Le maître l’a louée à des vignerons qui, pour leur salaire, ont une part de la récolte, tandis que l’autre -doit lui revenir. C’est pourquoi, à plusieurs reprises, il envoie des serviteurs vers les vignerons pour recevoir ce qui lui revient. Mais ceux-ci brutalisent et tuent les envoyés, méritant ainsi d'être mis à mort à leur tour, « près quoi le maître affermera la vigne à d’autres vignerons. Matth., xxi, 33-39 ; Marc, xii, 1-8 ; Luc., xx,

"9-15.
H. Lesêtre.
    1. VILLA##

VILLA (grec : àyp<5ç), domaine rural. — La Vulgate emploie souvent le mot villa pour désigner le Ijtâsêr, xup.ii, le village ou hameau situé dans la campagne et -sans entourage de murs. Exod., vni, 13 ; Lev., XXV, 31 ; Num., xxxiv, 4, 9 ; Jos., xv, 32-62 ; xix, 6-38 ; Cant., vu, 11 ; Esth., ix, 19 ; II Esd., xi, 30 ; xii, 28. Dans l'Évangile, les villages ou hameaux, xwnai, dans lesquels passe Notre-Seigneur, n’excluent pas le bien de campagne, le domaine, àfpàç, villa, habité par un certain nombre de personnes, mais constituant la propriété d’un particulier. Marc, vi, 36, 56 ; Luc, viii, 34 ; ix, 12. À l'époque évangélique, en effet, les domaines ruraux n'étaient pas rares en Palestine. Si le maître n’y résidait pas, comme le père du prodigue, Luc, xv, 25, des fermiers et des serviteurs les faisaient valoir, sous la surveillance d’un intendant, quand le domaine avait de l’importance. Cf. Schwalm, La vie privée du peuple juif, Paris, 1910, p. 485-511. L’un des invités de la parabole vient de faire l’acquisition d’une villa, à distance de la ville. Il lui faut aller la visiter et il s’excuse de ne pas répondre à l’invitation au festin qui lui est faite. Matth., xxii, 5 ; Luc, xiv, 18. La villa comprenait certainement, avec des champs et des vignes, des bâtiments d’exploitation et d’habitation. Celui auquel se loua le fils prodigue possédait une villa dans laquelle on faisait de l'élevage, particulièrement celui des pourceaux. Luc, xv, 15. Simon le Cyrénéen


revenait d’un domaine rural, quand on l’arrêta à la porte de la ville pour aider le Sauveur à porter sa croix. Marc, xv, 21 ; Luc, xxui, 26. Les deux disciples se rendaient à une villa voisine d’Emmaûs, quand le Sauveur ressuscité se joignit à eux. Marc, xvi, 12. Saint Luc, xxiv, 28, suppose que le lieu où ils s’arrêtèrent ensemble se rencontrait avant qu’on arrivât dans la bourgade. Gethsémani est appelé en grec xwpi’ov, c’està-dire « emplacement, champ, domaine ou jardin », et parla Vulgate villa. Matth., xxvi, 36. Il est vraisemblable qu’il n’y avait pas de domaine rural à une si grande proximité delà ville, mais que Gethsémani était un jardin, peut-être muni encore du nécessaire pour le pressurage de l’huile. Saint Jean, xviii, 1, appelle ce

lieu un « jardin ».
H. Lesêtre.
    1. VILLALPANDO Jean-Baptiste##

VILLALPANDO Jean-Baptiste, jésuite espagnol, né à Cordoue en 1552 ou 1555, mort à Rome le 22 mai 1608. Il fut l'élève du P. Prado, son collaborateur et son continuateur : In Ezeehielem explanaliones et apparatus Urbis ac Templi Hierosolymitani, 3 in-f°, Rome, 1596-1604. Il mourut avant d’avoir achevé le travail. Voir Prado, col. 593. Cf. Ch. Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, t. viii, 1898, col. 768.

VIN, liquide extrait du raisin par pression. Voir Pressoir, col. 613.

1° Ses noms. — La Palestine était un pays vignoble, et le vin y avait une grande importance au double point de vue alimentaire et commercial. Aussi un assez grand nombre de mots sont-ils employés pour désigner le précieux liquide. 1. Yaîn, mot probablement primitif, qui se retrouve dans l’assyrien înu, l'éthiopien vâyn, le grec oTvoc, le latin vinum, etc. — 2. flémér, chaldéen : hâmar, de l}âmar, « bouillir, fermenter », oivo ; , merum. — 3. Bobè', le vin de bonne qualité, oïvo ; , vinum. — 4. Sémér, le très bon vin débarrassé de sa lie, olvo ; , vindemia defxcata. Is., xxv, 6. — 5. TiroS, le vin non fermenté ou vin doux. Voir MOUT, t. iv, col. 1330. — 6. 'Âsîs, le premier viii, le vin doux, Y>.uxac[jiô ; , dulcedo ; olvoç véoç, mustum. — 7. Mézég, mésék, mimsdk, le vin mélangé, x£pa<j|/.a, mixtum. — Métaphoriquement, le vin est aussi appelé dam 'ânâbim, at|x « (rtacpuX^ç, sanguis uvx, « le sang de la grappe ». Gen., xlix, 11 ; Deut., xxxii, 14 ; Eccli., xxxix, 26.

2° Son origine. — Le vin est considéré comme un don de Dieu. Isaac souhaite à Jacob que Dieu lui donne l’abondance du froment et du vin. Gen., xxvii, 28. La Palestine est un pays de froment et de viii, Deut., xxxin, 28, et Juda, en particulier, « lave son vêtement dans le viii, » Gen., xlix, II. Dieu donne à son peuple « le sang de la grappe, le vin généreux. » Deut., xxxii, 14 ; cf. xi, 14. Pour le juste, la cuve déborde de vin nouveau. Prov., iii, 10. Mais il n’y aura pas de vin pour Israël infidèle, Deut., xxviii, 39, 51, et le vin de ses ennemis sera comme le venin des serpents. Deut., xxxii, 33.

3° Son traitement. — Noé s'était sans doute contenté de boire le jus qu’il venait d’exprimer des raisins, comme le fait supposer son inexpérience des effets du vin. Gen., ix, 21. Plus tard, on recueillit le vin au sortir du pressoir et on le conserva dans différents récipients, cruches de terre, I Reg., x, 3 ; xvi, 20 ; Jer., xiii, 12, et outres faites de peau. Jos., ix, 13 ; I Reg., xxv, 18 ; II Reg., xvi, 1 ; Judith, x, 5. Voir Outre, t.iv, col. 1936. On gardait ces récipients dans des celliers, voir Cellier, t. ii, col. 396, et dans des magasins, pour l’usage du Temple, I Par., ix, 29, ou des agglomérations. II Par., xi, 11 ; xxxii, 28. Le vin fermente et dépose au fond des récipients la lie, composée de matières diverses qui, à la longue, peuvent nuire à la qualité du vin. C’est pourquoi l’on transvasait le vin d’un récipient dans un

V. - 77

2435

VIN

VINAIGRE

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autre, de manière à laisser la lie au fond du premier. .1er., xlviii, 11, 12. On laissait vieillir le viii, pour le rendre meilleur. « Vin nouveau, nouvel ami ; qu’il vieillisse, et tu le boiras avec plaisir. » Eccli., ix, 15 (10). Après avoir bu du vin vieux, on n’en demandait pas aussitôt du nouveau, car on disait : & Le vin vieux est meilleur. » Luc, v, 39. — Avant de boire le viii, on avait coutume de lui faire subir quelque mélange. Isaïe, I, 22, parle en mauvaise part du vin coupé d’eau. Ce mélange ne paraît pas avoir été goûté des Israélites, comme il l’était des Grecs et des Romains.’Cf. Anacréon, Od., xxxvi, 10 ; Odys., iii, 40. L’auteur du second livre des Machabées parle selon la coutume de ces derniers, quand il écrit : « Il ne vaut rien de boire seulement du vin ou seulement de l’eau, tandis que le vin mêléà l’eau est bon et produitune agréable jouissance. » II Mach., xv, 40. Mais ce qui plaisait beaucoup aux Israélites, c’était le mélange avec le vin de certains aromates qui lui donnaient un goût particulier et surtout plus de force. Il est souvent question du vin aromatisé comme d’un breuvage de choix. Ps. lxxv (lxxiv), 9 ; Cant., vii, 3 ; viii, 2 ; Prov., xxiii, 30, 31 ; Is., lxv, 11. Pour soutenir Notre-Seigneur avant son crucifiement, on lui présenta du vin mêlé de myrrhe, Marc, xv, 23, que saint Matthieu, xxvvii, 34, dit mêlé de fiel, en prenant sans doute ce dernier mot dans un sens large, pour marquer le goût un peu amer que la myrrhe communiquait au vin. Pline, H. N., xiv, 15, témoigne que la myrrhe donnait au vin un goût fort apprécié des anciens. On connaissait le vin àp(o|j.aTiTY)ç, aromatique, cf. Dioscoride, v, 64, le vin nuppivî-tTiç, préparé avec des baies de myrte, cf. Élien, Var. Hist., xii, 31 ; etc. « Mêler le vin », c’était le préparer en vue du repas. Prov., ix, 2, 5.

4° Ses usages. — 1. Noé, après le déluge planta une vigne et fut enivré par le vin dont il ignorait sans doute la force. Gen., ix, 20-21.— Le vin était une boisson commune chez les Hébreux. Isaac en boit. Gen., xxvii, 25. Des échansons le versaient aux grands personnages. Gen., xl, 5. Voir Échanson, t. ii, col. 1558. Il figurait dans les festins et dans les simples repas, Deut., xiv, 26 ; Job, i, 18 ; Prov., ix, 2, 5 ; II Par., ii, 10 ; IIEsd., v, 18 ; Dan., v, 1, 2, 4, 23 ; .Iudith, xii, 12 ; Esth., i, 7 ; Eccli., ix, 13 (9) ; Is., v, 12 ; xxii, 13 ; lvi, 12, etc., et même dans les repas funèbres. Tob., iv, 18. L’Ecclésiastique, xxxix, 31 (26), énumère le « sang de la grappe » parmi les choses qui sont de première nécessité pour la vie des hommes. NotreSeigneur fit son premier miracle pour procurer du vin aux époux de Gana. Joa., ii, 3. C’était une désolation générale quand le vin venait à faire défaut. Is., xxiv, 11 ; Jer., xlviii, 23 ; Jo., 1, 10 ; Agg., i, 11. Aussi les faux prophètes se faisaient écouter quand ils promettaient l’abondance du vin. Mich., Il, 11. — 2. L’Ecclésiaste, IX, 7, recommande de boire son vin gaiment. C’est ce qui se pratiquait, surtout quand le vin était de qualité supérieure. Il en venait de tel du Liban, Ose., xiv, 7 ; celui de Helbon faisait l’objet d’un commerce avec Tyr. Ezech., xxvii, 18. Le récit du miracle de Cana nous apprend que, dans le repas, on servait d’abord le meilleur vin, tandis qu’on réservait le moins bon pour la fin, quand le goût des convives était émoussé. Joa., ii, 10. Ce trait ne préjudicie pas à la remarque de Luc, v, 39 ; car l’amphitryon qui servait du vin inférieur aux convives déjà désaltérés ne leur demandait pas leur avis et profitait plutôt de leur demi-inconscience. Cf. Sap., ii, 7. Le goût des Israélites pour le vin est accusé par ces comparaisons du Cantique des cantiques, i, 1, 4 ; iv, 10 ; vii, 9, qui déclare que l’amour de l’Époux est préférable au viii, et que la bouche de l’Épouse est comme un vin exquis. — 3. L’usage du vin n’était pas toujours suffisamment modéré. Les auteurs sacrés en signalent les abus. Voir Ivresse, t. iii,

col. 1048. Les ennemis vendaient des jeunes filles israélites pour avoir du vin. Joël, iii, 3. Les Israélites eux-mêmes buvaient dans leurs sanctuaires idolâtriques le vin de ceux qu’ils condamnaient à l’amende, Am., ii, 8. Après la captivité, les Juifs exigaient de leurs débiteurs un intérêt d’un centième sur le vin. II Esd., v, 11, 15. — 4. L’abstention du vin était prescrite à Aaron et à ses fils, quand ils avaient à entrer dans le sanctuaire, Lev., x, 9 ; Ezech., xliv, 21, et à ceux qui se vouaient au nazaréat. Num., vi, 3. Elle le fut à Samson, Jud., xiii, 4, 7, 14, et à Jean-Baptiste. Luc, i, 15. Les Rechabites s’abstenaient volontairement de vin. Jer., xxxv, 2. Notre-Seigneur, qui en faisait usage, était appelé par ses ennemis « buveur de vin ». Matth., xi, 19. — 5. Le vin servait encore au Temple pour les libations sacrées. Exod., xxix, 40 ; Num., xv, 5, 7, 10 ; xxviii, 7, 14 ; Ose., ix, 4. Voir Libation, t. iv, col. 234. On faisait aussi des libations de vin aux faux dieux. Deut., xxxii, 38 ; Esth., xiv, 17. Cyrus et Artaxerxès ordonnèrent de fournir du vin pour le Temple de Jérusalem. I Esd., vi, 9 ; vii, 22. Le vin était soumis à la loi des prémices, Num., xviii, 12 ; Deut., xviii, 4 ; I Par., xxxi, 5 ; II Esd., x, 39 ; xiii, 5, 12, et de la dtme. Deut., xii, 17 ; xiv, 23. — À la dernière Cène, le Sauveur consacra le vin pour le changer en son sang. Matth., xxvi, 27 ; Marc, xiv, 23 ; Luc, xxii, 20 ; I Cor., xi, 25. Il en fit ainsi, avec le pain, la matière de l’eucharistie.

5° Ses effets. — 1. Le vin réjouit Dieu et les hommes. Jud., ix, 13. Il réjouit le cœur de l’homme, Ps. civ (cm), 15, et rend la vie joyeuse. Eccle., x, 19. C’est pourquoi il est recommandé d’en donner aux affligés. Prov., xxxi, 6. Cf. Zach., x, 7. — 2. Il est un réconfortant. Melchisédech offre le pain et le vin à Abraham et à ses serviteurs qui reviennent de poursuivre les ennemis. Gen., xiv, 18. On en apporte à David et à ses fidèles partisans pendant leur fuite. II Reg., XVI, 2 ; I Par., xii, 40. Le vin fortifie les vierges. Zach., ix, 17 ; Cant., ii, 4. Saint Paul conseille à Timothée d’en boire un peu à cause de son estomac. I Tim., v, 23. — 2. Le vin a aussi ses inconvénients. Il est moqueur, c’est-à-dire porte à ne pas prendre le devoir au sérieux, Prov., xx, 1 ; il est perfide, Hab., ii, 5, et égare lessages. Eccli., xix, 2 ; Ose., iv, 11. — 3. L’Ecclésiastique, xxxi, 30-41 (25-30), résume les effets du viii, avec lequel il ne faut pas faire le brave, parce qu’il en a fait périr-un grand nombre. Il est comme la vie pour l’homme, et « quelle vie a celui qui manque de vin ? » Il réjouit quand il est pris à propos et avec mesure. Mais, bu à l’excès, il excite au mal et diminue les forces. Cf. Prov., xxi r 17. — 4. Le vin était quelquefois employé comme remède. Le bon Samaritain pansa avec du vin et de l’huile les plaies du blessé. Luc, x, 34.

6° Métaphores. — 1. La sagesse offre aux hommes levin, c’est-à-dire ses bienfaits spirituels. Prov., IX, 5. A l’époque de la restauration messianique, on aura le vin pour rien, c’est-à-dire que les dons divins seront départis gratuitement. Is., LV, 1. — 2. Le vin de vertige est l’aveuglement spirituel, Ps. lx (lix), 5 ; le vin de la violence est l’esprit mauvais qui anime les méchants. Prov., IV, 17. Le vin dont Babylone abreuve lesnations est l’impiété et l’impudicité auxquelles elle invite et entraîne les autres. Jer., li, 7 ; Apoc, xvii, 2 ; xviii, 3. Le vin de la colère divine que boit le méchant désigne le châtiment qui lui est infligé. Ps. lxxv (lxxiv), 9 ; Jer., xxv, 15 ; Apoc, xiv, 8, 10 ;

xvi, 19 ; xix, 15.
H. Lesêtre.
    1. VINAIGRE##

VINAIGRE (hébreu : homes), liquide acide qui résulte de la transformation du vin exposé à l’oxygène de l’air, sous l’action d’un ferment naturelle mycoderma aceti. — Il était défendu à ceux qui faisaient le vœu de nazaréat de boire du vin ou même du vinaigre provenant [Image à insérer]

CODEX VIENNENSIS GENESEOS

du vin. Xum., vi, 3, — Les moissonneurs trempaient leur

! >ain dans du vinaigre, c’est-à-dire probablement dans

une boisson acidulée et rafraîchissante. Ruth, ii, 14, — Le vinaigre agace les dents, comme la fumée pique les yeux, l’rov., x, 26. Les Septante remplacentici le vinaigre par le raisin vert, ôjif « Ç. Verser du vinaigre sur du nitre figure uneætion faite mal à propos. Prov., xxv, 20. VoîrNATRON, t, iv, col. 1488. — Le juste persécuté se plaint qu’on lui donne à boire du vinaigre. Ps. i.xix (lxviii), 22. Le même traitement a été iniligê à Noire-Seigneur en croix. Malth., xxvii, 48 ; Slarc., xv, 36 ; Lue., xxîH, 36 ; Joa., xix, 29, 30. On ne s’expliquerait pas que les exécuteurs aient eu à leur disposition sur le Calvaire du vinaigre proprement dit. Mais les soldats romains portaient avec eux leur provision de posca, breuvage acide composé de vinaigre, d’eau et d'œufs. Cf. Plaute, Mil. glor., III, ii, 23 ; 7Vi » c, II, vii, 48 ; Pline, H. N., XXVII, iv, 12 ; XX VIII, v, 14 ; Suétone, VîtelL, 12 ; etc. Hs présentèrent une éponge remplie de ce liquide aux lèvres du Sauveur, qui se contenta d’y goûter, mais n’en voulut pas boire. Les circonstances supposent que l’offre avait été faite avec une bonne intention, mais que le Sauveur

tint à se refuser tout soulagement.
H. Lesêtre.
    1. VINOOBONENSIS##

VINOOBONENSIS (CODEX). Ce manuscrit est constitué par vingt-quatre feuillets détachés, appartenant au texte grec de la Genèse. L'écriture est d’encre d’argent, d’onciale assez épaisse, irrégulière, que l’on attribue à la lin du vi « siècle. Chaque page est décorée dans sa partie inférieure d’une peinture : au total, quarante-huit peintures. Toutes ces peintures ne sont pas de la même main : le dessin est plus correct dans quelques-unes, le coloris meilleur aussi. Le sujet représenté dans la page reproduite (fig. 554) est divisé en deux scènes, où figurent les mêmes personnages : la femme de Putiphar dénonçant Joseph à son mari, en haut ; la même exhibant au même le manteau de Joseph. La femme de Putiphar a près d’elle sa servante, le mari est accompagné de trou serviteurs ou officiers, une servante se tient à la porte. Le manuscrit appartient à la Hofbibliothek de Vienne, où il est coté Cod. theol. grxc. 11. Voyez Palseographical Society, Fænmilé », vol. i, planche 178. Les miniatures de la Genèse de Vienne, très importantes pour l’histoire de Fart, ont été publiées par Hartel et Wickhoff, Die Wiener Genesis, dans le » Jahrb. der Kunstsammlung des ailerh. Kaise>'/ious, vol.xv-xvi, supplément, 1894-1895, et étudiées par W. Lûdtke, Untersuch. zu den Miniaturen der Wiener Genesis, Greifswald, 1897. P. Bàtiffol.

    1. VIPÈRE##

VIPÈRE (hébreu : 'êféh ; grec : £x t6v « ; Vulgate : vipera), reptile venimeux de l’ordre des ophidiens et de la famille des vipéridés, reconnaissable à sa tête plus triangulaire et plus détachée du tronc que celle des couleuvres, et à sa queue arrondie en cône au lieu d'être aplatie en rame (flg. 555). On rencontre en Palestine plusieurs espèces de vipères. Les plus communes sont la vipera ammodytes et la vipera euphratica, de couleur claire, à tête large et plate et à queue subitement contractile. La grande vipère jaune, daboia xanthina, est la plHS grosse vipère de Palestine. Ses mœurs nocturnes la rendent particulièrement dangereuse. Elle est de taille à engloutir dans son estomac un levraut, une caille, ou quelque autre animal semblable. Le serpent que l’hébreu désigne par le mot 'e/V/net que les versions appellent o'ïk, « hks, pao-tXidxo ; , vipera, regulus, ne diffère probablement pas de Vel-ephah arabe, serpent venimeux du Sahara, Vechis arenicoht ou vipère de sable, commune dans le nord de l’Afrique, en Arabie et en Syrie. Elle est longue d’une trentaine de centimètres et a des mouvements très rapides. Sa morsure est fréquemment mortelle, bien que moins redoutable que celle du cobra ou du céraste. On

la rencontre très souvent en hiver dans les pierres des bords de la mer Morte, et dans les broussailles des rivages du Jourdain. « Ces fourrés recèlent plusieurs animaux peu agréables à rencontrer, surtout la vipère echis arenicola, fort redoutable… Ces serpents, qui dans d’autres contrées s’enterrent ordinairement dais les sables arides, étant ici sans cesse exposés à être noyés par les crues subites du Jourdain, ont pris la singulière habitude de s’enrouler aux brandies, à une grande hauteur, et de se cacher dans les troncs des arbres. » Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 448, 455. — La vipère est nommée trois fois dans l’Ancien Testament. Dans Job, xx, 16, il est dit que la langue de la vipère tuera le méchant. La langue de la vipère est inoflensive ; l’animal porte des crochets creusés en forme de tubes par lesquels s'écoule le venin produit par des glandes spéciales et introduit dans la chair de la victime au moyen de la morsure. L’auteur sacré parle donc de la langue de la vipère selon les apparences. Aujourd’hui encore nous appelons « langue de vipère » celle qui calomnie. Isaïe, xxx, 6, parle de la vipère comme infestant le désert qui sépare la Palestine de l’Egypte. Ailleurs, il compare la

555. — Vipère.

conduite des méchants à un œuf qu’on écrase et dont il sort une vipère. Is., ux, 5, Sur ce texte, voir Œuf, t. tv, col, 1755. Sur les autres serpents analogues, voir Aspic, Basilic, t. i, col. 1124, 1495 ; Céraste, t. ri, col. 432. — Dans le Nouveau Testament, la vipère devient l’image des pharisiens et des saddueéens. S*r les bords du Jourdain, infestés de vipères, saint JeanBaptiste interpelle les sectaires en les appelant a mode vipères » et en constatant qu’ils savent fuir la colère qui vient, sans doute comme les vipères fuient l’inondation. Jfatth., iii, 7 ; Luc, iii, 7. Notre-Seigfceor applique le même nom aux scribes et aux pharisiens, pour dénoncer leur influence perfide et leurs allures cauteleuses. Matth., xii, 34 ; xxiii, 33. — La vipère qui mordit saint Paul à la main, dans l'île de Malte, Act, , xxviii, 3, devait être la vipère méditerranéenne, vipera aspis, qu’on trouve en Sicile et dans toutes les Mes do la Méditerranée. La blessure était mortelle, car les insulaires, habitués au* suites de pareils accidents, s’attendaient à voir saint Paul enfler et tomber mort subitement. Act., xxviii, 6. La vipère n’existe plus à Malte, pas plus d’ailleurs que dans d’autres Iles où sa présence était signalée par Pline, H. A'., iv, 12. L’Ile 1 était autrefois très boisée, de sorte que saint Paul put y ramasser facilement des fogots ; les reptiles pouvaient par conséquent s’y abriter à l’aise. Aujourd’hui, par suite des défrichements successifs, on n’y rencontre plus que quelques arbres. » Breusing, Die Ntmtik der Alten, Brème, 1886, p. 191 ; Vigoureux, Le N. T. et les découvertes archéologiques, Paris, 1896, p. 344 ; Tristram, The natural history of the Bible, Londres,

1889, p. 275-277.
H. Lesêtre.
    1. VIRGINITÉ##

VIRGINITÉ (hébreu : bef&lim), état de celle qui est restée vierge. — La fille de Jephté pleure pendant deux mois sa virginité, Jud., ii, 37, non qu’elle soit perdue, mais parce qu’elle ne doit pas aboutir au mariage. L’idée de la virginité volontaire n’apparaît qu’avec l’Évangile, en la personne de Marie, Luc, i, 34, qu’imiteront ensuite les vierges chrétiennes. — Ézéchiel, xxm, 3, accuse les deux sœurs, Samarie et Jérusalem, d’avoir prostitué leur virginité. — La loi supposait qu’un mari pouvait contester la virginité de sa jeune épouse. Les parents de celle-ci produisaient alors, devant les anciens, les signes de la virginité de leur fille, appelés aussi befûlîm. La présentation de ces preuves, qui étaient déployées, entraînait pour le mari une amende de cent sicles d’argent à verser au père et à la mère, et la perte du droit de répudiation. Dans le cas où les preuves en sa faveur faisaient défaut, la jeune femme était lapidée. Deut., xxii, 13-21. Chez les Hébreux, comme chez d’autres peuples anciens, existait donc l’obligation, pour le jeune marié, la nuit même des noces, de transmettre aux parents de l’épouse, qui attendaientau dehors, un linge ensanglanté qui constituait une preuve de la virginité et que ceuxci pouvaient plus tard produire en témoignage. C’était une sûreté qu’aimaient à se donner les Orientaux et dont leurs mœurs s’accommodaient. Chez les Arabes, le nouveau marié, après avoir reçu sa femme dans sa tente, « sort avec un mouchoir ensanglanté à la main, qu’il va montrer aux parents et aux amis assemblés. » De la Roque, Voyage dans la Palestine, Amsterdam, 1718, p. 226. Cf. de Hummelauer, In Deuteron., Paris, 1901, p. 400 ; Piérotti, La Palestine actuelle, Paris,

1865, p. 252.
H. Lesêtre.

VISAGE. Voir Face, t. ii, col. 2165.

    1. VISION##

VISION (hébreu : fyâzôn, lyâzât, Ifizâyôn, hîdâh, mahâzéh, mar’éh, mar’âh ; chaldéen : fypzév ; Septante : 8p « [ia, ôxcauta ; Vulgate : visio, visus), phénomène surnaturel au moyen duquel Dieu montre ce qu’il veut faire savoir ou faire dire.

I. Sa nature. — 1° Dieu communique de trois manières dillérentes, mais non exclusives l’une de l’autre, ce qu’il veut faire entendre. La vision peut être corporelle, quand un objet extérieur frappe les sens, comme quand Moïse voit le buisson ardent, Exod., iii, 3 ; imaginative, quand la représentation surnaturelle saisit l’imagination sans le secours des sens, comme quand Ézéchiel, I, 4-28, a la vision des quatre êtres à face d’homme, de lion, de taureau et d’aigle ; intellectuelle, quand la communication divine ne s’adresse qu’à l’intelligence, comme dans la prophétie des semaines. Dan., ix, 20-27. La vision intellectuelle peut subsister seule, mais les deux autres la supposent toujours ; autrement, elles seraient inintelligibles. Les trois formes peuvent d’ailleurs être liées ensemble. Ainsi, dans le mystère de l’annonciation, Marie a la vision sensible de l’ange, la vision imaginative de l’ombre du Saint-Esprit la couvrant pour la rendre mère, et la vision intellectuelle de la volonté divine qui attend son consentement. Luc, i, 28-38. Les mages ont la vision sensible de l’étoile et la vision intellectuelle de sa signification. Matth., ii, 2. Saint Pierre a la vision imaginative de la nappe pleine d’aliments divers et la vision intellectuelle de la volonté de Dieu par rapport à Corneille. Act., x, 11, 19, 20. — 2° La vision surnaturelle est essentiellement objective, c’est-à-dire ayant une cause réelle indépendante de l’esprit de l’homme. Elle produit en celui qui la reçoit la conviction que Dieu même est intervenu. Elle se distingue ainsi des visions que s’attribuent les faux prophètes, et qui ne sont que ténèbres et Snensonge, Mich., iii, 6 ; Jer., xxiii, 16 ; Zach’., jkiji, 4, des songes ordinaires, qui n’ont qu’une cause subjective, et de ces représentations fugitives et inconsistantes qui saisissent l’esprit pendant la nuit sans laisser ; de traces. Job, xx, 28 ;

Is., xxix, 7. — Elle se distingue aussi de la parole que Dieu adresse directement à quelqu’un, pour lui révéler ses pensées et ses ordres. Cette distinction est expressément notée au sujet de Moïse. « Si vous avez quelque prophète, c’est en vision que je me révèle à lui, c’est en songe que je lui parle. Tel n’est pas mon serviteur Moïse… Je lui parle bouche à bouche, en me faisant voir, et non par énigmes. » Num., xii, 6-8. — 3° Les visions se produisent habituellement la nuit, alors que l’attention de l’âme n’est pas distraite par le spectacle des objets extérieurs. Gen., xl vi, 2 ; Job, iv, 13 ; vii, 14 ; xxxiii, 15 ; Dan., vii, 7, 13 ; Act., xvi, 9 ; xviii, 9. Elles peuvent se présenter sous forme de songes d’origine surnaturelle, comme ceux du pharaon d’Egypte, Gen., xli, 1-7, et de Nabuchodonosor. Dan., ii, 3, 27, 28 ; iv, 7-15. D’autres fois, les visions sont précédées de l’extase. Act., x, 17 ; II Cor., xii, 1-4. La vision surnaturelle peut aussi apparaître à quelqu’un en plein jour. Luc, i, 22 ; Matth., xvii, 9 ; Luc, xxiv, 23 ; Act., xxvi, 19. Mais, pour l’ordinaire, il est parlé des visions sans qu’aucun renseignement soit donné sur l’état du sujet qui les reçoit. Dieu les accorde donc sans s’assujettir à aucune condition particulière. — 4° Les visions surnaturelles ne sont pas l’apanage exclusif des saints personnages. D’autres en peuvent recevoir, comme Balaam, Num., xxiv, 4, 16 ; Baltasar, Dan., v, 5, 6 ; Héliodore, II Mach., iii, 25, 26 ; la femme de Pilate. Matth., xxvii, 19 ; etc. — 5° Il peut se faire que la vision soit, pour celui qui la reçoit, purement corporelle ou imaginative, et que l’explication intellectuelle en soit donnée par un autre, comme il arriva pour les songes du pharaon et de Nabuchodonosor. Parfois, la vision demeure comme un « livre scellé », dont l’intelligence est impossible à cause de l’indignité de ceux qui devraient comprendre. Is., xxix, 11-12. Le prophète ne donne pas non plus toujours l’explication de la vision dont il a été favorisé. Tels Ézéchiel, i, 4-28 ; Daniel, x, 4-xi, 45 ; saint Jean, dans l’Apocalypse, etc.

II. Les visions bibliques. — 1° La Sainte Écriture raconte d’une manière anthropomorphique comment Dieu parle à Adam, Gen., ii, 16, 22, 23 ; iii, 9 ; àCaïn, iv, 6, 10, 15 ; à Noé, vi, 13. Il parla à Abraham en vision. Gen., xv, 1. — Abraham et Lot ont la vision corporelle des anges qui leur parlent au nom de Jéhovah. Gen., xviii, 1-xix, 3. Jacob a une vision à, Béthel pendant son sommeil, et voit l’échelle sur laquelle les anges montent et descendent. L’explication de ce symbole n’est pas donnée. Gen., xxviii, 12-15. Il rencontre ensuite des anges. Gen., xxxii, 1, 2. Il a plus tard une vision de nuit, dans laquelle il est encouragé à descendre en Egypte. Gen., xlvi, 2. — Moïse reçoit sa vocation dans la vision du buisson ardent. Exod., m, 3. Balaam contemple la « vision du Tout-Puissant », qui lui révèle les destinées d’Israël. Num., xxiv, 4, 16. Gédéon a la vision de l’ange. Jud., VI, 12. La mère de Samson a une vision semblable. Jud., xiii, 3. À l’époque d’Héli, la vision n’était pas fréquente. I Reg., iii, 1. C’est alors que Samuel a sa vision de nuit dans le sanctuaire et que le Seigneur lui indique le châtiment qui va fondre sur Israël. I Reg., iii, 4-14. À partir de ce moment, « Jéhovah continuait d’apparaître à Silo, et se manifestait à Samuel en lui faisant connaître sa parole. » I Reg., iii, 21 ; Ps. lxxxix (lxxxviii), 20. Nathan a une vision de nuit, qu’il est chargé de rapporter à David. II Reg., vii, 4-17. David a la vision de l’ange qui déchaîne le fléau sur son peuple. II Reg., xxiv, 17. Dans une vision à Gabaon, Jéhovah accorde le don de la sagesse à Salomon. III Reg., iii, 4-15. Dans une seconde vision, il lui promet la stabilité de son trône, s’il est fidèle. III Reg., viii, 2-9. — 2° Dieu multiplie ses visions aux prophètes. Ose., xii, 1. Il y a ainsi les visions d’Addo le voyant

II Par., ix, 29, d’Isaïe, i, 1 ; II Par., xxxii, 32, d’Abdias, 1, de Nahum, I, 1, d’Habacuc, ii, 2. Beaucoup de visions sont consignées dans les livres d’Ézéchiel, i-in, vin-xi, xxxvii, 1-10, xl, 14 ; de Daniel, II, vii, 1-8, viii, 1, 2, ix, 21-27 ; d’Araos, vii, 1-9, ix, 1 ; de Zacharie, i. 7- vi, 8. Ces visions doivent se réaliser. Ezech., xii, 23, Dieu communique sa sagesse à ceux auxquels il se montre. Eccli., i, 15 (12). Mais vient le temps où l’on cherche en vain les visions des prophètes, Ezech., vii, 21, car les prophètes ne reçoivent plus de visions. Lam., n, 9. Plus tard, à l’époque du Messie, les jeunes gens d’Israël doivent avoir de nouveau des visions, Joël, II, 28, ce dont saint Pierre signale l’accomplissement à la Pentecôte. Act., ii, 27. L’Écriture ne note plus d’ici là que la vision réelle de Judas Machabée, auquel apparaissent Onias et Jérémie, II Mach., xv, 11-16, et la vision des anges dans le Temple à l’impie Héliodore. II Mach., iii, 25-30. — 3° Dans le Nouveau Testament sont mentionnées plusieurs visions : celles de l’ange Gabriel à Zacharie, Luc, i, II, et à Marie, Luc, I, 28 ; celles des anges aux bergers, Luc, ii, 913, et de l’étoile aux mages, Matth., ii, 2 ; les visions en songe à saint Joseph, Matth., i, 21 ; ii, 13, 19, et aux mages, Matth., il, 12 ; la vision de la transfiguration, Matth., xvii, 9 ; la vision qui trouble la femme de Pilate au sujet de Jésus, Matth., xxvii, 19 ; les visions angéliques au tombeau du Sauveur, Mallh., xxviii, 2-7 ; Marc, xvi, 5 ; Luc, xxiv, 4, 23 ; Joa., xx, 12, et à l’ascension, Act., i, 10 ; les visions de saint Paul sur le chemin de Damas, Act., ix, 3-7, d’Ananie, chargé d’aller chercher saint Paul, Act., ix, 10, de saint Pierre, auquel ordre est donné de baptiser les gentils, Act., x, 9-16, de Corneille, auquel il est dit d’aller trouver saint Pierre, Act., x, 3-8, de saint Pierre, tiré de la prison par un ange, Act., xii, 7-9, de saint Paul appelé à l’aide par un Macédonien, Act., xvi, 10, rassuré sur le sort du vaisseau qui le porte, Act., xxvii, 23, et en plusieurs autres circonstances. II Cor., xii, 1. Enfin, l’Apocalypse se compose d’une suite de visions décrites par saint Jean : celles de la cour céleste, iv, 2-v, 14, des sept trompettes, viii, 2-6, des sept signes, xii, 1-xv. 4, des sept coupes, xv, 5-8, de la grande Babylone, xvii, Ixix, 10, et du Roi vainqueur, xix, 11-xui, 5. — Cf. S. Augustin, De Gen. ad litt., xii, 7, 16 ; 11, 22, 24 ; 24, 51, t. xxxiv, col. 459, 462, 463, 474 ; Ribet, La mystique divine, Paris, 1879, t. i, p. 437-501.

H. Lesêtre.

VISITATION DE LA SAINTE VIERGE. Voir Marie, t. iv, col. 785.

1. VISITE, démarche que l’on fait auprès de quelqu’un pour le voir, le saluer, prendre de ses nouvelles, etc. Cette démarche est indiquée par le verbe pâqad, iTiimomïv, iicivxéicTEo6ai, visitare, invisere. — La Sainte Bible mentionne la visite de Joseph à ses frères, Gen., xxxvii, 14 ; de Samson à sa femme philistine, Jud-, xv, 1 ; de David à ses frères, I Reg., xvii, 18 ; de Thamar à Amnon, II Reg., xiii, 15 ; de la reine de Saba à Salomon, IIIReg., x, 1-13 ; II Par., ix, 1-9 ; d’Ochozias, roi de Juda, à Joram, roi d’Israël, IV Reg., viii, 29 ; ix, 16 ; II Par., xxii, 6 ; des envoyés de Mérodach Baladan à Ézéchias, IV Reg., xx, 12-19 ; des trois amis à Job, u, 11 ; de Marie à Elisabeth, Luc, i, 39-56 ; de Moïse à ses compatriotes persécutés, Act., vii, 23 ; cf. Exod., ii, 11-15 ; de Paul et Barnabe aux chrétientés qu’ils ont fondées, Act., xv, 36 ; etc. — Sur le cérémonial des visites, voir Politesse, Salut, col. 505, 1397. — Les visites sont recommandées envers les malades, Eccli., vu, 39 (35) ; Matth., xxv, 36, 43, les reclus, Matth., xxv, 36, 43, les orphelins et les veuves pour en prendre soin. Jacob., i, 27. —Être visité par le malheur, Prov., xix, 23, c’est avoir à souffrir physiquement ou moralement.

H. Lesêtre.

2. VISITE DE DIEU (hébreu r pequdUâh’; Septante : â71 ! ffx£i]/i ; , èmffxomfj, ex6c’xr|<Ti ; ), intervention 1 de Dieu pour exercer sa miséricorde ou sa justice.

1° Visites de miséricorde. — Dieu visite Sara, Gen., xxi, 1, et Anne, I Reg., ii, 21, c’est-à-dire leur accorde la faveur d’avoir un enfant. Dieu visite l’hommechaque matin, pour lui assurer son secoursprovidentie-1, Job, vii, 18, et chaque nuit, par l’intermédiaire de la conscience, pour juger sa conduite. Ps-, xvh(xvi), 3. Il visite par des songes, pour faire connaître sa volonté. Eccli., xxxiv, 6. Il visite, pour mettre enmouvement les instruments dont il se sert. Ezech., xxxviii, 8. — On demande à Dieu sa visite, c’est-à-dire son secours. Ps. cvi (cv), 4 ; Judith, iv, 17 ; Jer., xv> 15. Josephpromet aux Hébreux qu’un jour Dieu les visitera sur la terre d’Egypte, c’est-à-dire les en ferasortir. Gen., l, 24 ; Exod., xiii, 19. Dieu les y visitæn effet pour les délivrer de leurs épreuves. Exod., iii, 16 ; iv, 31. Après soixante-dix ans, Dieu visitera son peuple captif à Babylone, Jer., xxix, 10, et le résultat de sa visite sera le rétablissement de Juda, Soph., ii, 7, et sa mise à la tête des peuples. Zach., x, 3. Sédécias eût été visité favorablement à Babylone, s’il avait su se soumettre aux Chaldéens. Jer., xxxii, 5. — La visite de Dieu par excellence a été la venue du Messie par l’incarnation. Luc, i, 68, 78. À la vue des miracles du Sauveur, ses contemporains reconnaissaient que Dieu a visité son peuple. Luc, vii, 16. Malheureusement, les Juifs ne surent pas reconnaître cette visite et en profiter. Luc, xix, 44. — Dieu visite la terre quand il y fait naître l’abondance. Ps. lxv (lxiv), 10. — Il visite les hommes au jour de leur jugement ; saint Pierre exhorte les fidèles à se mettre en mesure de glorifier Dieu par leurs œuvres ce jour-là. I Pet., ii, 12.

2° Visites de justice. — Il y a un temps où Dieu visite les hommes pour exercer contre eux sa justice, à cause de leurs péchés. Ps. lix (lviii), 6 ; lxxxix (lxxxvib), 33 ; Is., x, 3 ; xiii, 11 ; Jer. ; ix, 25. — Il visitera le pays de son peuple, si le mariage y est profané. Lev., xviii, 25. — Sa visite châtie l’iniquité des pères jusqu’à la quatrième génération. Exod., xx, 5 ; xxxiv, 7 ; Num., xiv, 18. — Elle aura raison des ennemis d’Israël, Judith, xvi, 20, spécialement de l’Egypte, Jer., xlvi, 21, 25 ; du roi d’Assyrie, Is., x, 12 ; de Moab, Jer., xlviii, 44 ; de l’Idumée, Jer., xlix, 8 ; Lam., iv, 22 ; de Babylone et de ses idoles. Jer., xxvii, 22 ; l, 18, 27, 31 ; Ll, 18, 44, 52. — Dieu, dans sa justice, visitera également son peuple coupable, Exod., xxxii, 34 ; la maison de Jéhu, Ose., i, 4 ; Séméïe, Jer., xxlx, 32, et les faux prophètes, Jer., xxiii, 12 ; Juda, Ose., xii, 3, ses rois, ses prêtres et son peuple, Ose., iv, 9 ; Jer., xxiii, 2, 34 ; Jérusalem et ses coupables habitants ; Is., xxix, 6 ; Jer., vi, 15 ; vm, 12 ; xi, 23 ; les Juifs réfugiés en Egypte. Jer., xuu,

13, 29. H". Lesêtre.

VIVRES. Voir Nourriture, t. iv, col. 1700.

    1. VOCATION##

VOCATION (grec : -/.}.-ri<Ti ; ), appel par lequel Dieu destine quelqu’un à une fonctionou àunétatdéterminés.

1° Vocations particulières. — La Sainte Écriture mentionne expressément les vocations d’Abraham, Gen., xii, 1, de Moïse, Exod., iii, 4, d’Aaron, Exod., xxix, 4, de Josué, Deut., xxxi, 7, de Gédéon, Jud., VI,

14, de Samson, Jud., xiii, 5, de Samuel, I Reg., iii, 3, de Saùl, I Reg., x, 1, de David, I Reg., xvi, 12, d’Isaïe. Is., vi, 9, de Jérémie, Jer., 1, 5-10, d’Ézéchiel, Ezech., u, 3, de Jonas, Jon., i, 1, 2, de Jean-Baptiste, Luc, i, 13-17, de Marie, Luc, i, 31-33, des douze Apôtres, Matth., iv, 18-21 ; ix, 9 ; Marc, i, 20 ; Luc, vi, 13-16 ; Joa., i, 35-42, des soixante-douze disciples, Luc, x, 3-7, de Saul, Act., ix, 6, de Saul et de Barnabe. Act., xm, 2, etc. Ces vocations sont notifiées aux intéressés tantôt directement, comme à Abraham, à Moïse, à

Samuel, aux prophètes et aux Apôtres, tantôt par intermédiaire angélique ou humain. Beaucoup d’autres vocations, dont la Bible ne parle pas, comme celles de la plupart des prophètes, ont été au moins intérieures. Les ministres du Seigneur ont une vocation spécialement sainte. II Tim., 1, 9. Cette vocation est indispensable. Heb., v, 4. Mais Jésus-Christ appelle qui il veut. Marc, iii, 13 ; Joa., xv, 16. Saint Paul se plaît à rappeler la vocation qu’il a reçue et qui autorise son ministère. Rom., i, 1 ; I Cor., i, 1 ; Gal., i, 15. Quelquesuns sont infidèles à leur vocation, comme Judas. Joa., Tl, 70.

2° Vocations générales. — 1. Le peuple hébreu a été, par vocation, le peuple de Dieu. Deut., xxvi, 18, 19 ; xxxii, 9 ; Is., li, 16 ; lxiii, 8 ; Jer., vii, 23 ; Ezech., xxxvi, 20, 28 ; Ose., ii, 1, etc. Dieu le choisit pour en faire le dépositaire de la révélation et des promesses messianiques et la figure du peuple racheté. Sa vocation prit fin à la mort du Rédempteur. — 2. Le peuple chrétien a pris la place du peuple juif pour devenir « une race choisie, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple que Dieu s’est acquis pour annoncer les perfections de celui qui l’a appelé des ténèbres à son admirable lumière, » I Pet., ii, 9, et à la liberté. Gal., v, 13. Ce peuple est l’objet d’une vocation divine. Rom., i, 6 ; vin. 28, HÛ ; ix, 24 ; I Cor., i, 2, 9 ; Gal., i, 6 ; II Thés., n, 13 ; II Tim., i, 9 ; I Pet., i, 15. Il se recrute aussi bien chez les Grecs que chez les Juifs. I Cor., i, 24. Il est appelé à la fois au royaume de Dieu sur la terre, IThes., 11, 12, età lagloiredela vieéternelle.Phil., iii, 14 ; ITim., vi, 12 ; Hebr., iii, l ; ix, 15 ; I Pet., v, 10 ; Jud., 1 ; Apoc, xix, 9. Dans deux paraboles, les sujets du royaume de Dieu sont divisés en xXtjto i, vocati, ceux qui ont reçu la vocation et sont en grand nombre, et en èxXsxtoi, electi, ceux qui sont choisis ou dignes de l'être, et sont en petit nombre. Matth., xx, 16 ; xxii, 14. Voir Él.rs, t. ii, col. 1708. Saint Paul remarque que, de son temps, la vocation s’adressait surtout à ceux dont la condition sociale était plus humble. I Cor., i, 26. Il ne voulait pas que cette vocation les portât à se soustraire à leur situation naturelle dans la société ou la famille. ICor., vii, 15-24. De la part de Dieu, la vocation est sans repentance, Rom., xi, 29. Il ne revient ni sur son appel, ni sur son choix. Mais, delà part de l’homme, la vocation réclame des efforts personnels. Il faut être fidèle à sa vocation, Eph., IV, 1, c’est-à-dire y répondre avec docilité et persévérance. Il faut mener une conduite digne de sa vocation. Eph., iv, 4 ; II Thés., i, 11. Il faut s’efforcer d’assurer par des actes de vertu sa vocation, xX-qatç, vocatio, et son élection, ÈxXoyir ; , eleclio. II Pet., i, 10. Larécompense viendra en son temps, et un jour partageront la victoire de l’Agneau xXuiTot, vocati, les appelés, èxXExroi, electi, les choisis, et msTof, fidèles, les croyants. Apoc, xvii, 14.

H. Lesêtre.

VŒU (hébreu : 'ësâr, 'issâr, nédér ; Septante tsOy.vî), engagement que l’on s’impose de consacrer à Dieu un bien présent ou futur.

1° La législation. — 1. La pratique des vœux était dans les coutumes des ancêtres d’Israël, comme le montre l’exemple de Jacob, s’engageanl à fonder un lieu de culte et à payer une dlme, si Dieu veille sur lui pendant son voyage en Mésopotamie. Gen., xxviii, 2022 ; xxxi, 13. — 2. La législation mosaïque s’occupe d’abord des vœux au point de vue de leur objet. Les personnes pouvaient se vouer à Jéhovah, soit en faisant elles-mêmes leur vœu, soit en ratifiant celui qu’on avait fait pour elles. Comme, en principe, le service litnrgiqne de Jéhovah était assuré exclusivement par les léi’i tes, ceux qui avaient été voués devaient se racheter, comme on le faisait pour les premiers-nés. La loi suppose quatre catégories de personnes, hommes ou femmes, vouées à Jéhovah : celles de vingt à soixante

ans, celles de cinq à vingt ans, celles d’un mois à cinq ans etcelles qui dépassaient soixanteans. Le prix du rachat variait suivant le sexe et l'âge, et, pour les pauvres, était laissée l’estimation du prêtre. Lev., xxvii, 2-8. Voir Rachat, col. 923. — On pouvait vouer des animaux, à condition qu’ils fussent bons et convenables. On les immolait à Jéhovah, et ceux qui les avaient offerts pouvaient en manger leur part, mais seulement le jour et le lendemain. On rachetait les animaux qui n'étaient pas acceptés pour les sacrifices. Lev., vii, 16 ; xxii, 18, 21, 23 ; xxvii, 915 ; Num., xv, 3-8. — On vouait aussi des maisons ou des champs, qui ensuite étaient rachetés. Lev., xxvii, 14-25. — Ce qui était voué sous forme d’anathème appartenait, sans retour possible, à Jéhovah, et tout ce qui avait vie, même les personnes, devait être mis à mort. Lev., xxvii, 28, 29. On ne vouait par anathème que les ennemis. — 3. La loi s’occupe ensuite des personnes qui font des vœux. Le vœu fait par un homme doit toujours être accompli. Le vœu fait par une jeune fille n’est valable que si son père ne la désavoue pas. Le vœu fait par une femme mariée n’est valable que si le mari, en l’apprenant, l’approuve au moins par son silence. Si, après avoir appris les vœux faits par sa femme, il acquiesce parson silence et ne les désapprouve pas de suite, une désapprobation ultérieure le rend responsable de leur inexécution. Le vœu d’une femme veuve ou répudiée est valable, sans autre formalité. Num., xxx, 3-16. Ces dispositions avaient pour but de ne pas laisser la fille ou la femme engager définitivement le chef de la famille à son insu ou contre son gré. D’autre part, pour assurer la tranquillité de la femme, le père de famille ne pouvait plus revenir sur son approbation, celle-ci une fois acquise. — Sur le vœu du nazaréat, voir Nazaréat, t. iv, col. 1515.

2° Les conseils. — Moïse remarque que rien n’oblige à faire des vœux, mais que, si l’on en a fait, on doit les exécuter sans tarder. Deut., xxiii, 21-23. C’est une duperie dont on est soi-même victime, que de vouer une chose à la légère et de ne réfléchir qu’après coup. Prov., xx, 25. Mieux vaux donc ne faire aucun vœu que de ne pas accomplir ceux que l’on a faits. Eccle., v, 4. Aussi les auteurs sacrés reviennent-ils souvent sur la question des vœux pour recommander d’exécuter les vœux ou pour promettre eux-mêmes de le faire. Job, xxii, 27 ; Ps. lxv (lxiv), 2 ; cxvi (cxv), 14-18 ; Nah., i, 15 ; Jon., ii, 10 ; Is., xix, 21.

3° La pratique. — Les Israélites font vœu de livrer à l’anathème le peuple d’Arad, si Dieu le livre entre leurs mains. Num., xxi, 2, 3. Jephté, en exécution d’un vœu inconsidéré, sacrifie sa fille, alors que, d’après la loi, il aurait dû la racheter. Jud., xi, 30. Anne fait vœu que, si elle obtient un fils, elle le consacrera au Seigneur. I Reg., i, 11, 21. Absalom fait vœu d’offrir un sacrifice à Hébron, si Dieu le ramène à Jérusalem. II Reg., xv, 7, 8. David fait vœu de n’avoir pas de repos tant qu’il n’aura pas trouvé un endroit favorable pour bâtir un temple à Jéhovah. Ps. cxxxii (cxxxi), 2. La femme impudique prétexte l’accomplissement d’un vœu pour rencontrer celui qu’elle veut séduire. Prov., vu, 14. Malachie, i, 14, maudit celui qui, à la suite d’un vœu, offre une bête chétive au lieu d’une victime sérieuse. Des paroles de Marie à l’ange Gabriel, Luc, i, 34, on conclut qu’elle avait voué à Dieu sa virginité, Saint Paul avait fait un vœu, en vertu duquel il fit raser sa chevelure à Cenchrées. Act., xviii, 18.Il trouva à Jérusalem quatre hommes qui avaient fait un vœu, et paya les frais des sacrifices qu’ils avaient à offrir. Act., xxi, 23. — On faisait aussi des vœux d’un caractère plus ou moins idolâtrique. Ainsi la mère deMichas consacre une somme d’argent à Jéhovah, mais pour qu’on en fasse une image taillée et un objet en fonte, ce qui était défendu par la loi. Jud., xvll, 3, 4. Les Israélites faisaient des vœux à la reine du ciel, As

tarthé. Jer., xiiv, 25. Plus corrects sont les vœux que des matelots phéniciens font à Jéhovah, après avoir jeté Jonas à la mer. Jon., i, 16. Les idoles sont indifférentes aux vœux que l’on fait en leur honneur. Bar., vi, 34. — La casuistique rabbinique s'était exercée sur les vœux pour tirer des conclusions vraiment abusives. Voir Corban, t. ii, col. 958. Par la formule : « Qônam (corban) ! si tu tires quelque utilité de moi, » Nedarim, viii, 7, ils s’interdisaient de faire quoi que ce fût pour quelqu’un, même pour un père ou une mère, sous prétexte de tout consacrer à Dieu. Cette consécration n'était d’ailleurs qu’hypothétique ; elle n’engageait nullement. Josèphe, Cont. Apion., 1, 22, cite Théophraste disant que les lois tyriennes prohibaient les serments étrangers, entre autres le corban. L’expérience avait sans doute appris aux Tyriens qu’on ne pouvait pas se fier à cette forme de serment juif. Voir Temple, col. 2068. De même, par la formule : « Qônam ! si ma femme tire de moi quelque plaisir, » on s’obligeait à répudier sa femme. On pouvait même s’interdire par vœu d’accomplir un acte prescrit par la Loi, comme la construction des huttes pour la fête des Tabernacles, le port des thephillin, etc. Nedarim, ii, 2. Hors les cas de légèreté de la part de celui qui avait fait le vœu, d’erreur ou de contrainte, le vœu obligeait. Nedarim, m ; ix, 1. En cas de nécessité, on en était quitte pour faire accomplir par un autre la chose qu’on s'était interdite. Nedarim, v, 6. C’est contre ces abus que Notre-Seigneur protesta, en déclarant que la loi de Dieu devait avoir le pas sur les traditions humaines. Marc, vii, 11-13. Cf. Lagrange, Évangile selon S. Marc, Paris, 1911, p 176. H. Lesêtre

VOIE (hébreu : dérék, 'orah, mesillâh, Sebîl ; Septante : éSd ; , Tpî60ç), route, chemin, sentier pour aller d’un endroit à un autre. Voir Routes, col. 1229. Ces mots sont pris par les auteurs sacrés, non seulement dans leur sens propre, mais encore dans plusieurs sens métaphoriques importants.

1° La voie matérielle. — Il y en a de différentes sortes : la voie publique et entretenue avec un certain soin, mesillâh, ôôô ; , semita, Jud., XX, 31, 32 ; I Reg., vi, 12 ; Is, xl, 3 ; la voie droite, Ps. cvii (cvi), 7 ; Prov., xii, 15 ; xxi, 2 ; Eccli., xlix, 11 ; la belle route, Prov., m, 17 ; la voie aplanie, Eccli., xxi, 11 ; Is., xl, 4 ; Luc, m, 5 ; la voie déserte, Eccli., xlix, 8 ; Lam., i, 4 ; Soph., ni, 6 ; la voie difficile, Eccli., xxxii, 25 ; Ps. xvii (xvi), 4 ; la voie non tracée, Ps. cvn (cvi), 40 ; la voie spacieuse, et la voie étroite, miS'ôl, aïXal, angustia, Num., xxii, 24 ; Matth., vii, 13 ; la voie tortueuse, ma'âqasSïm, <rxoXtâ, prava, Is., xlii, 16 ; la voie ténébreuse et glissante, Ps. xxxv (xxxiv), 6 ; Prov., ii, 13 ; iv, 19 ; Jer., xxiii, 12 ; la voie boueuse et souillée, Ps. x, 5 ; Eccli., ix, 10 ; Zach., x, 5 ; la voie semée d’obstacles. Is., lvii, 14 ; Jer., l, 26 ; Lam., iii, 9. — La tête de route, r’oS dérék, ou mère de route, 'êm dérék, Ezech., xxi, 26, est le carrefour d’où partent une ou plusieurs routes. Prov., viii, 2 ; Is., ii, 20 ; Ezech., xvi, 25, 31 ; Nah., iii, 10 ; Matth, xxii, 9 : 81e£ô801 t&v 68&v, exitus viarum, le point de départ ou d’arrivée des routes. Il importait alors de montrer le chemin, yâlêr, Prov., xii, 26, aux passants qui l’ignoraient. — Chaque année, à partir du 15 adar, c’est-à-dire un mois avant la Pàque, on mettait en état les voies de communication, à l’usage des pèlerins qui se rendaient à Jérusalem. Cf. Reland, Antiquilates sacrx, Utrecht, 1741, p. 228. — On réparait également les routes quand un roi devait y passer. Is., xl, 3 ; Matth., iii, 3, etc. Cet usage subsiste encore en Orient.

2° La vie humaine. — Vivre, c’est être sur la voie, in via. Matth., v, 25. On s’en va ainsi par le « chemin de toute la terre », par celui qui mène tous les hommes à la mort. Jos., xxiii, 14. Malgré toute son industrie,

l’homme est incapable d’allonger ce chemin d’une coudée. Matth., vi, 27. Sur ce chemin, les patriarches se considéraient comme des voyageurs. Hebr., xi, 13. Cf. Job, iii, 22 ; viii, 19 ; Am., ii, 7.

3° La condition de chacun. — Rachel suit la voie des femmes, c’est-à-dire subit ce qui leur est ordinaire. Gen., xxxi, 35. Les voies de l’impie sont souvent prospères. Ps. x (xi), 4. Il faut remettre à Dieu sa voie, c’est-à-dire son sort. Ps. xxxvii (xxxvi), 5. La * voie de l’Egypte » est le sort que Dieu a jadis infligé à ce pays. Is., x, 24. Cf. Job, iii, 23 ; xxiv, 4 ; Agg., i, 5.

4° La conduite de l’homme. — Il y a la voie des bons, Prov., ii, 20, qui est celle de la sagesse et de la justice, Prov., ix, 6 ; xvi, 31, et la voie des méchants, Ps. I, 1 ; Prov., iv, 14 ; xii, 15 ; Is., lv, 7, qui est la voie du mal. Ps. cxxxix (cxxxviii), 24. Les « fruits de la voie » sont les conséquences de la conduite. Prov„, i, 31. « Garder sa voie », c’est veiller sur sa conduite,

III Reg., ii, 4 ; viii, 25 : Ps. xxxix (xxxviii), 2. Marcher dans la voie ou dans les voies de quelqu’un, c’est imiter ses exemples. III Reg., xv, 26, 34 ; xvi, 2, 19 ; xxii, 23 ;

IV Reg., viii, 18, 27 ; xvi, 3 ; II Par., xi, 17 ; Eccli., xl viii, 25 ; etc. Toutes les voies de l’homme sont familières à Dieu. Ps. cxxxix (cxxxviii), 3. Il a laissé les nations suivre leurs voies. Act., xiv, 15.

5° Les entreprises particulières. — David était habile dans toutes ses voies. I Reg., xviii, 14. La femme forte veillait sur la voie, c’est-à-dire sur la marche, hâlikâh, Starptëri, semitse, de sa maison. Prov., xxxi, 27.

6° La conduite de Dieu. — La voie de Dieu est parfaite, Ps. xviii (xvii), 31, droite, Ezech., xviii, 25, et juste. Deut., xxxii, 4 ; Job, xxi, 31 ; xxxvi, 23 ; Ps.cxlv (cxliv), 17 ; Ose., xiv, 10 ; Apoc, xv, 3. Les voies de Dieu ne sont pas celles des hommes. Is., lv, 8,

7° L'œuvre de Dieu. — Dieu a créé la sagesse au commencement de ses voies, c’est-à-dire de son action créatrice. Prov., viii, 22. Les voies de Dieu sont ses œuvres. Job, xxvi, 14 ; xl, 19.

8° La volonté de Dieu. — La voie de Dieu est la conduite vertueuse qu’il prescrit aux hommes. Gen., xviii, 19 ; Ps. v, 9 ; xxv (xxiv), 4 ; xxvii (xxvi), 11 ; Jer., v, 4 ; etc. On demande à Dieu qu’il fasse connaître et aide à suivre cette voie. Ps. xxv (xxiv), 9 ; lxxxvi (lxxxv), 11 ; Is., ii, 3 ; Mich., iv, 2. Suivre les voies de Dieu, c’est mener une vie conforme à la volonté divine. Deut., viii, 6 ; x, 12 ; xi, 22 ; xix, 9 ; xxvi, 17 ; xxviii, 9 ; xxx, 16 ; Jos., xxii, 5 ; III Reg., iii, 14 ; viii, 58 ; xi, 33 ; Ps. lxxxi (lxxx), 14 ; Is., xxii, 24 ; Zach., iii, 7 ; etc. Les pharisiens reconnaissent que Jésus-Christ enseigne vraiment la « voie de Dieu ». Matth., xxii, 16 ; Marc, xii, 14 ; Luc, xx, 21. Cf. Act., xiii, 10.. Marcher dans deux voies, Eccli., ii, 14 (12), Vulgate, iii, 28, c’est tantôt suivre et tantôt transgresser la volonté divine.

9° La religion. — Le Psalmiste demande à Dieu de voir s’il n’est pas dans la voie des idoles, dérék 'oséb, 686 ; àvo ; ua< ; , via iniquitatis, et de le mener dans la voie d’autrefois, celle des ancêtres, dérék 'ôlâm, ôôé ; aiwvsa, via seterna'. Ps. cxxxix (cxxxviii), 24. Ces sentiers d’autrefois sont la « voie du salut ». Jer., vi, 16 ; xviii, 15. La « voie de Bersabée » est le culte idolâtrique rendu au veau d’orde Bersabée. Am., viii, 14.— Dans la loi nouvelle, Jésus-Christ est lui même la voie, Joa., xiv, 6, qu’il faut suivre pour aller au Père. L’idée d’un chemin à suivre se retrouve dans les appels du Sauveur à embrasser son genre de vie. Matth., ix, 9 ; x, 38 ; xvi, 24 ; Marc, ii, 14 ; viii, 34 ; Luc, ix, 23 ; xviii, 22 ; Joa., I, 43 ; etc. À le suivre, on ne marche pas dans les ténèbres. Joa., viii, 12. Celui qui ne suit pas le Sauveur et ses disciples n’appartient pas à sa religion. Marc, ix, 37 ; Luc, IX, 49. Les Apôtres désignent par le nom de « voie » la religion nouvelle. Act., ix, 2 ; xviii, 26 ; xix, 9, 23 ; xxii, 4 ; xxiv, 22. Saint Pierre l’appelle ô5ôç tt, c  »

àlrfidut ; , via verilatis, voie de la vérité. II Pet., Il, 2. — Dans tous ces passages, le sens de la métaphore est très clair. Elle rappelle que l’hoinmeici-basest dans un état provisoire. Il marche vers un but, qui parfois est purement temporel ou même mauvais, mais qui normalement doit être conforme à la volonté de Dieu. Finalement la « voie » doit conduire à lui.

H. Lesêtre.
    1. VOILE##

VOILE, pièce d’étoffe pour couvrir le visage ou la tête ; rideau ; toile qu’on attache aux vergues d’un bateau pour recevoir le vent.

I. Voile de tête. — Le voile, voir fig. 556-559, est désigné par diilérents mots. Moïse se voile le visage pour ne pas voir Dieu. Exod., iii, 6. Plus tard, après son séjour sur le Sinaï, il couvre sa face d’un voile, masvéh, y.àXvy.j.a., velamen, pour parler aux enfants d’Israël, mais il l’ote quand il retourne auprès du Seigneur. Exod., xxxiv, 33-35. — Le sd’iꝟ. 6épicrTpov, palliuni, est le voile dont se couvre Rébecca à l’approche d’Isaac. Gen., xxiv, 65. Thamar prend le même voile, tkeristrum, pour aller se prostituer. Gen., xxxviii, 14.

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couvrait le visage, dit que les Juifs l’ont gardé pour ne pas reconnaître le Christ dans les Écritures. If Cor., iii, 13-16.

II. Voile de navire. — Isaïe, xxxiii, 23, comparant l’Assyrie à un navire désemparé, lui dit : « Tes cordages* sont relâchés, … ils ne tiennent plus la voile déployée. » Le mot nés désigne ici la voile qui prend le vent et fait avancer le navire quand elle est tendue par les cordages, et non le pavillon, <7yj|jis ?ov, signum, comme traduisent les versions, celui-ci n’ayant pas d’action sur la marche. D’ailleurs les Septante ajoutent que le mât « n’abaissera pas les voiles, » x « to-Tca. — Dans Ézéchiel, xxvir, 7, les voiles des navires de Tyr, en lin lin d’Egypte et brodées de couleurs variées, sont appelées mifràf, o-TpwjivY), « couverture », vélum. Voir Broderie, t. i, fig. 622, col. 1943. Cf. Navire, t. iv r fig. 414, col. 1515.

III. Voile du Temple. — Dans le Tabernacle, il y avait un premier voile, mdsdk, qui fermait l’entrée du-Saint, Exod., xxvi, 36 ; xxxix, 38 ; XL, 5, et un second, parokét, qui cachait le Saint des saints. Exod., xxvi, .

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ii ;

556. — Dames égyptiennes 557. — Egyptiennes

voilées pour monter à cheval etenfants des basses classes.

ou pour la marche.

. ; - j *.

558. — Egyptienne voilée pour la promenade.

559. — Égyptienne voyageant à âne.

D’après Lane, Manners, t. ï, p. 66, 69, 72, 263.

— La samnidh est un voile transparent au travers duquel on aperçoit les yeux et les joues de l’Épouse. Cant., iv, 1 ; vi, 7. Les versions ne rendent pas ce mot. Il désigne aussi le voile qu’on ôte à Babylone pour découvrir sa honte. Is., xlvii, 2. — Les re’dlôf, mitrse, sont des voiles faisant partie de la toilette des femmes. Is., iii, 19. — Le lot, non rendu par les versions, est un voile de deuil qui couvrait les nations avant la rédemption. Is., xxv, 7. Dans le deuil et l’affliction, on avait coutume de se voiler la tête, II Reg., xv, 30 ; Esth., vi, 12 ; vii, 8 ; Jer., xiv, 4. Saint Paul dit que la longue chevelure convient à la femme pour lui servir de voile. I Cor., xi, 15. — Le mâsàk, operimenlum, est le voile épais qui empêche de voir. Is., xxil, 8. On dit que Dieu cache sa face quand il ne semble pas voir les épreuves de ses serviteurs. Ps. x, 11 ; xxx (xxix), 8 ; lxxxviii (lxxxvii), 15 ; en (ci), 3 ; civ (cm), 29 ; Is., liv, 8. — Le sêtér, sijioxpucpyj, latibulum, est le voile qui cache Dieu, la nuée, Job, xxii, 14, ou encore la nuée orageuse, qui est le voile du tonnerre. Ps. lxxxi(lxxx), 8. C’est aussi le voile, ov.ôtoç, caligo, dont se couvre l’adultère. Job, xxiv, 15. — Le ma’atéh, aXtip-na, pallium, est un voile de fêle. Is., lxj, 3. — Le liékyôn, abscondita est, est un voile lumineux qui cache la majesté de Dieu, Hab., iii, 4, probablement le nuage. — Le kesûf, sic T ! [nijv, in velamen, est métaphoriquement le voile dont on recouvre un acte équivoque. Abimélech appelle de ce nom l’argent qu’il donne à Sara pour excuser sa conduite envers elle. Gen., xx, 16. — Saint Paul, rappelant le voile, « àX-jusue, velamen, dont Moïse se

31 ; xxxiii, 35 ; Lev., iv, 6, 17 ; xvi, 2 ; Num., iv, 5, II Par., iii, 14 ; etc. Ce dernier est parfois appelé pârokét hammâsâk. Exod., xxxv, 12 ; xxxix, 34 ; XL, 21. Dans les Septante, mâsdk est traduit par xâXuu, p.a, mais les deux mots hébreux sont indifféremment rendus par xaTa7tÉTa(Tu. « , le voile abaissé d’en haut. Dansle Tabernacle, le voile ; du Saint des saints était fait de pourpre violette, de pourpre écarlate, de cramoisi et de lin. Des chérubins y étaient représentés. Il était suspendu à quatre colonnes revêtues d’or et posées sur despieds d’argent. Il dérobait la vue de l’Arche d’alliance, . xaTa7téra<j[ta tô ffuffXKxÇov, « le voile qui cache », vélum quod pendet ante fores, Num., iv, 5, rappelant ainsi l’inaccessibilité de la majesté divine. Sur les autres voiles du Tabernacle, voir Rideau, col. 1099. D’après Josèphe, . Bell, jud., V, v, 4, les quatre couleurs qui composaient le voile étaient symboliques, le cramoisi du feu, le lin de la terre, le violet de l’air et la pourpre dé la mer. Pour S. Thomas, Summ. theol., l* II*, q. cil, a. 4, ad 4 um, le voile figurait l’occultation des sacrifices spirituels dansles sacrifices anciens. Le lin représentait la pureté ; la pourpre, les souffrances endurées par les saints pour Dieu ; le cramoisi, la charité, et le violet, la méditation des choses célestes. Il faut remarquer encore que levoile maintenait une mystérieuse obscurité dans le-Saints des saints, parce que Dieu est la lumière incréée, qui n’a besoin d’aucune lumière étrangère à lui-même. Cf. Bâhr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1837, t. ï, p. 397-399. — Salomon fit exécuter pour le-Temple un voile conforme aux prescriptions mosaïques. a

II Par., iii, 14. Cf. Josèphe, Anl. jud., VIII, iii, 3. Dans le second Temple, un premier rideau fermait l’entrée extérieure du Saint. C’était un tapis de Babylone, dans la confection duquel entraient les quatre couleurs liturgiques. Cf. Josèphe, Bell, jud., V, v, 4 ; Middoth, rv, 7. Un autre voile fermait le Saint des saints, bien que ce lieu ne contînt plus l’Arche d’alliance. Antiochus Epiphane s’empara de ce voile. I Mach., i, 22. D’après le Talmud, ce voile était double et composé en réalité de deux voiles distincts, espacés l’un de l’autre d’une coudée. Au jour de l’Expiation, le grand-prêtre pénétrait entre les deux par le côté sud et entrait par le côté nord dans le Saint des saints. Cf. Reland, Anliquitates sacres, Utrecht, 1741, p. 63. « — Au moment de la mort de Notre-Seigneur, le voile du Temple, xocraTO-Ta 7|ia toO vaoû, vélum templi, se déchira par le milieu, depuis le haut jusqu’en bas. Matth., xxvii, 51 ; Marc, xv, 38 ; Luc, xxiii, 45. Mais de quel voile s’agit-il ? On pense communément que le voile qui se déchira fut celui du Saint des saints, celui qui est appelé « le second voile » dans l’Épître aux Hébreux, ix, 3, et to é(i(ûT « Tov xaTocTtsra<7[ia, « le voile intérieur », dans Philon, De gigant., 12, édit. Mangey, t. i, p. 270. Cf. Knabenbauer, Ev. sec. Matth., Paris, 1893, t. ii, p. 536." Cependant, les textes évangéliques disent simplement io xataitSTa(7|Jia toO vaov, expression qui semble se rapporter plus naturellement au voile qui fermait le Temple proprement dit ou naos, c’est-à-dire le Saint. Ce voile était le seul visible du parvis des prêtres et du parvis d’Israël, tandis que celui du Saint des saints ne pouvait être vu que des quelques prêtres qui pénétraient dans le Saint pour le service du culte ; or les Évangélistes font certainement allusion à une manifestation extérieure et facilement constatable de la puissance de Dieu. Aussi saint Jérôme dit-il formellement qu’il s’agit du voile extérieur, de celui qu’on voyait du dehors. Epist. cxx, 8, 2, t. xxii, col. 992. C’est aussi l’avis de saint Thomas, Summ. theol., Ia H 58, q. cil, a. 4, ad4 um ; etc. La signification symbolique de cet événement est importante, de quelque voile qu’il soit question. Le Christ rédempteur est entré, par la vertu de son sang, dans le véritable Saint des saints et nous en a ouvert l’entrée, rendant ainsi le voile inutile. Hebr., ix, 9. On peut dire aussi que, par l’établissement de la religion nouvelle, il a abrogé le culte ancien, spécialement les cérémonies qui se pratiquaient dans le Saint, supprimant pour tous l’interdiction de contempler des rites qui cessaient d’être sacrés. C’est à quoi fait probablement allusion l’Épitre aux Hébreux, x, 19-21 : « Nous avons par le sang de Jésus libre accès dans le sanctuaire, ta àyi’a, par la voie nouvelle et vivante qu’il a inaugurée pour nous à travers le voile, xaxaité-TacTjia, velamen, c’est-à-dire à travers sa chair. » D’ailleurs, le second voile ne fermait qu’un emplacement vide, tandis que le premier empêchait de voir des objets permanents et des cérémonies quotidiennes ; c’est donc celui-ci, semble-t-il, qui perdait le plus sa raison d’être à la mort de Jésus-Christ. Cf. Lagrange, Évang. sel. S. Marc, Paris, 1911, p. 408. — Saint Jérôme, Epist. cxx, 8, 2, t. xxii, col. 992 ; In Matth., iv, 27, t. xxvi, col. 213, rapporte, d’après l’Evangile selon les Hébreux, qu’à la mort du Christ le linteau du Temple, dont les dimensions étaient considérables, se brisa et tomba. Il est possible que cette rupture et cette chute aient été l’effet du tremblement de terre et aient naturellement entraîné la déchirure du rideau du haut en bas. Bien qu’accompli avec l’intervention de causes secondes, le miracle n’en eût pas été moins significatif.

H. Lesêtre.

VOIX (hébreu : qôl ; Septante : çmviq), son émis par le larynx des êtres animés. — Dans la Sainte Écriture, une voix est attribuée non seulement aux hommes et

aux animaux, mais anthropomorphiquement à Dieu, et métaphoriquement aux êtres inanimés.

1° Voix de Dieu. — La voix de Dieu, appelée aussi voix du ciel, s’est fait entendre à Adam, Gen., iii, 8, à Abraham, Gen., xxvi, 5, à Moise. Act., vii, 31. Elle » retenti au baptême de Notre-Seigneur, Matth., iii, 17 ; . Marc, i. Il ; Luc, iii, 22, à sa transfiguration, Matth., xvii, 5 ; Marc, ix, 6 ; Luc, ix, 35 ; II Pet., i, 17, et unefois dans le Temple. Joa., zii, 28. —Mais ordinairement, , la voix de Dieu désigne ses ordres, auxquels il ne faut pas faire la sourde oreille. Exod., IV, 1 ; Deut., iv, 30 ; v, 23 ; viii, 20 ; I Reg., xv, 2 ; Ps. xcv (xciv), 8 ; Hebr., m, 7 ; etc.

2° Voix’de l’homme. — La voix de l’homme a un timbre particulier à chacun, qui permet de le reconnaître. Ainsi en fut-il pour Jacob, Gen., xxvii, 22, pour le lévite de Michas, Jud., xviii, 3, pour David, I Reg. r xxvi, 17, pour l’Époux, Cant., v, 2, pour saint Pierre, . Act., XII, 14 ; etc. — L’homme fait entendre sa vois, dans la prière, Jos., x, 14 ; III Reg., xviii, 27 ; . Ps. xxviii (xxvii), 2 ; etc. ; dans le chant, Exod., xxxii, 18, xxxvi, 6 ; Ezech., xxxiii, 32 ; dansla joie, Ps. xlii (xu), 5 ; cxviii (cxvii), 15 ; Jer., vii, 34 ; xvi, 9, et surtout dans la douleur qui, en Orient, est particulièrement démonstrative et bruyante* Gen., xlv, 2 ; Jud., ii, 4 ; xxi, 2 ; Ruth, i, 9 ; 1 Reg., xi, 4 ; xxiv, 17 ; xxx, 4 ; II Reg., ii, 32 ; xiii, 36 ; xv, 23 ; xix, 4 ; Ps. vi, 9 ;

I Esd., iii, 12 ; Judith, xiv, 14 ; Jer., iii, 21 ; ix, 19 ; Dan., vi, 20 ; etc. — Il y a la voix de la femme qui accouche, Jer., iv, 31 ; la voix du nouveau-né, Sap., vu, 3 ; la voix des sentinelles, Is., lii, 8 ; la voix des exacteurs, Job, iii, 18 ; Is., xvi, 9, 10 ; la voix du ventriloque, Is., xxix, 4, 6 ; la voix des multitudes. I Reg. r iv, 6 ; III Reg., i, 41 ; Dan., x, 6 ; I Mach., vi, 41 ; Luc., . xxiii, 23 ; Act., xiv, 10 ; xxii, 22 ; etc. — On n’entendra pas au dehors la voix du Messie, Is., xlii, 2 ; Matth., xii, 19, ce qui sera la marque de son humilité et de sa simplicité. Mais on a entendu la voix qui criait dans le désert, Is., xl, 3 ; Matth., iii, 3 ; Marc, i, 3 ; Luc, iii, 4 ; Joa., i, 23 ; la voix des prophètes, Act., xiii, 27 ; la voix du Fils de Dieu appelant Lazare du tombeau, Joa., xr r 43, mourant sur la croix, Matth., xxvii, 46, 50 ; Marc, xv, 34, 37 ; Luc, xxiii, 46, apparaissant à Saul sur lechemin de Damas. Act., ix, 4. Les morts l’entendront au moment du dernier jugement. Joa., v, 25. — Une voix est attribuée aux anges, I Thés., iv, 15 ; Apoc, v,

2, 11, 12, et les démons se font entendre par l’organe des possédés. Act., viii, 7 ; etc. — Quelquefois, la voix est mentionnée pour la langue que l’on parle. Eccle., v, 2 ; II Mach., xv, 29, 37 ; I Cor., xiv, 10 ; Gal., iv, 20 ;

II Pet., ii, 16 ; etc. Les flatteurs s’écrient, après la harangue d’Hérode Agrippa : « C’est la voix d’un dieu, non d’un homme. » Act., xii, 22.

3° Voix des animaux. — Il y a la voix des quadrupèdes domestiques, IReg », xv, 14 ; Tob., ii, 21 ; Sap., xvii, 18 ; Jer., viii, 16 ; ix, 10, la voix des lions, Job, iv, 10 ; Jer., ii, 15 ; Ezech., xix, 7 ; Am., iii, 4 ; Zach., xi,

3, et la voix des oiseaux. Eccle., x, 20 ; xii, 4 ; Cant., ii, 12 ; Soph., ii, 14 ; Nah., ii, 8 ; Marc, xiv, 30.

4° Voix des choses inanimées. — Les auteurs sacrés donnent le nom de voix au bruit que font certains agents naturels. Ils mentionnent ainsi la voix du vent, Joa., iii, 8 ; Act., ii, 6 ; la voix du tonnerre, Job, xxxvii,

4, 5 ; Ps. xxix (xxviii), 3-9 ; lxxvii (lxxvi), 19 ; Apoc, vi, l ; x, 3, qui est aussi appelée la voix de Dieu, Ps. xxix (xxviii), 3-9 ; la voix delà mer, Jer., vi, 23 ; L, 42 ; Hab., iii, 10 ; la voix des grandes eaux, Ezech., i, 24 ; xliii, 2 ; Apoc, i, 15 ; xiv, 2 ; la voix de la pluie, III Reg., xvik, 41 ; la voix des ailes qui battent, Ezech., i, 24 ; iii, 13 ; la voix des épines qui brûlent, Eccle., vii, 6 ; la voix d’une feuille agitée. Lev., xxvi, 36. — D’autres bruits artificiels prennent aussi le nom de voix. On prête ainsi une Voix à la meule, Jer., xxv, 10 ; au marteau, Eccli., xxxviii,

30, et surtout à la trompette, Jos., vi, 5 ; III Reg., i, 41 ; i Ps. xcvm (xcvil), 6 ; Jer., iv, 19, etaux instruments de I musique. I Cor., xiv, 7 ; Apoc, xviii, 22. On note également la voix des pas, II Reg., v, 24 ; III Reg., xiv, 6 ; IV Reg., vi, 32 ; la voix des chars et des armées envahissantes, IV Reg., vii, 6 ; Jer., iv, 29 ; Joël., ii, 5 ; Nah., iii, 2, et la voix de la ba taille. Jer., l, 22. — La voix du sang est l’appel de la justice contre le meurtrier. Gen., iv, 10. La souffrance est comme une voix qui crie vers Dieu. Gen., xxi, 17. Il y aune voix de la sagesse, Prov., i, 20 ; vni, l, et une voix-du mensonge. Exod., xxiii, 1. L’Esprit de Dieu connaît toute voix qui s’élève dans l’univers. Sap., i, 7. — La création tout entière a une voix qui célèbre la

gloire de Dieu. Ps. xix (xviii), 4.
H. Lesêtre.

1. VOL (Septante : xtaitri ; Vulgate : furtum), prise de possession illégitime du bien d’autrui. Voir Rapine, col. 987. — Le vol est défendu par la loi naturelle et le Décalogue. Exod., xx, 15 ; Lev. ; xix, 11 ; Deut., v, 19 ; Matth., xix, 18 ; Luc, xviii, 20. Il est inspiré par les désirs pervers du cœur. Matth., xv, 19 ; Marc, vii, 22. II est coutumier chez les adorateurs d’idoles, Sap., xiv, 25, et les méchants ne s’en repentent pas. Apoc, ix, 29. Pour la nature mauvaise, le vol a l’attrait du fruit défendu et l’on trouve pius douces les eaux dérobées, genûbim, /./.oirô ; , furlivse. Prov., ix, 17. Joseph se plaint d’avoir été emmené de son pays par vol. Gen., XL, 5. Tobie était si scrupuleux, qu’il refusait de manger un chevreau avant d’être sur qu’il ne provenait

pas d’un vol. Tob., ii, 21.
H. Lesêtre.

2. VOL (Vulgate : volatus), moyen de locomotion des oiseaux, qui sont pourvus d’ailes. — 1° Au sens propre, le vol est attribué aux oiseaux en général, Deut.. iv, 17 ; Job, xxxix, 13 ; Apoc, xix, 17, et particulièrement à l’aigle, Deut., xxvjii, 49 ; xxxii, 11 ; Job, ix, 26 ; Jer., xlviii, 40 ; xux, 22 ; Apoc, iv, 7 ; viii, 13, à l’hirondelle, Prov., xxvi, 2, et au hibou. Rar., vi, 21. L’homme est né pour la peine comme les fils de la foudre, yagbihû’  « /’, « élèvent l’aile », ià yJ/ïiXà 7tiiovTat, « volent vers les hauteurs », ad volatum, « pour voler ». Job, v, 7. Sur les-dragons volants, Is., xxx, 6, voir Serpent, col. 1673. — 2° Au figuré, les auteurs sacrés font voler Dieu sur les ailes du vent, Ps. xviii (xvii), 11 ; II Reg., xxii, 11, les séraphins, Is., vi, 2, 6, les anges, Dan., ix, 21 ; Apoc, xiv, 6, Juda et Éphraïm qui s’envolent sur l’épaule du Philistin pour le dompter, Is., xi, 14, le cavalier qui vole sur sa proie, Hab., i, S, l’homme qui désire s’envoler comme la colombe pour gagner le lieu de. son repos, Ps. lv (liv), 7, la femme qui s’envole au désert pour échapper au dragon, Apoc, xii, 14, les âmes qui s’envolent du piège qu’on leur a tendu, Ezech., xiii, 20, l’homme qui s’envole de ce monde par la mort. Ps. xc (lxxxix), 10. Ils prêtent également des ailes pour voler au vent, Ps. xviii, 11, aux nuées, Is., lx, 8, à la flèche, Ps. xci (xc), 5, au songe, Job, xx, 8, aux richesses, Prov., xxiii, 5, et à un

rouleau d’écriture. Zach., v, 1.

H. Lesêtre.
    1. VOLCAN##

VOLCAN, montagne projetant à son sommet des matériaux brûlants qui détruisent tout autour d’elle.

— Les terrains d’origine volcanique ne manquent pas en Palestine ou dans les environs. Dans le Haurân, en particulier, les cônes et les cratères se rencontrent très fréquemment. Voir Palestine, t. iv, col. 2015. Mais, depuis de longues périodes, ces volcans n’étaient plus en activité. Les allusions que les auteurs sacrés font aux volcans leur sont donc inspirées par les descriptions des voyageurs, spécialement des navigateurs phéniciens, qui connaissaient bien les volcans de l’archipel et de l’Italie, et des caravanes qui avaient pu approcher ceux du Caucase et de l’Arménie. L’allusion la plus probable aux volcans se lit dans

Jérémie, li, 25, 26, qui appelle Babylone « montagne de dévastation, qui dévaste toute la terre, » que Dieu roulera du haut des rochers et dont il fera une « montagne embrasée, » de telle sorte qu’on n’en puisse plus tirer ni pierre d’angle, ni pierre de fondation. Tels furent successivement l’action néfaste et le sort dernier de Babylone. Comme la montagne volcanique, la cité célèbre s’écroula peu à peu sans rien laisser d’elle qu’on pût utiliser. — Au Psaume cxliv (cxliii), 5, il est dit : « Touche les montagnes, et qu’elles s’embrasent ; fais briller les éclairs, et disperse les ennemis. » L’allusion est ici moins claire. Il peut n’être question que d’une théophanie, comme celle du Sinaï. — Dans l’Apocalypse, viy, 8, saint Jean parle d’une sorte de « grande montagne toute en feu, » qui est jetée dans la mer. L’allusion à un volcan n’est pas non plus incontestable.

H. Lesêtre.
    1. VOLEUR##

VOLEUR (hébreu : gannâb, gedûd, b.éféf, sôdêd ; Septante : xïiirrr, ; , av)<tt7J{), celui qui, par ruse ou par violence, s’empare du bien d’autrui.

1° Le brigandage en Palestine. — En Orient, les populations nomades ont toujours considéré le brigandage comme un moyen normal de se procurer les moyens de vivre. On y attaque et on y pille les tribus voisines à l’improviste. La Sainte Écriture en fournit de nombreuses preuves. Les tribus qui environnaient le pays de Chanaan ne perdaient jamais l’occasion de fondre sur les riches récoltes des Israélites et de s’emparer de tout ce qui était à leur convenance. De leur côté, certains Israélites occupés à la garde des troupeaux, incapables de s’assujettir au labeur de la culture, habitués d’ailleurs à se tenir en alerte et en défense contre les irruptions des brigands, n’hésitaient pas à mener la vie aventureuse et facile de ces derniers, quand les autres moyens d’existence semblaient leur faire défaut. On voit ainsi Jephté, repoussé par sa famille, rassembler autour de lui des gens de rien et faire avec eux des excursions. Jud., xi, 3 ; cf. ix, 25. David mena la même vie pendant que Saül le persécutait. Le recrutement de ses bandes est indiqué par le texte sacré : « Tous les opprimés, tous ceux qui avaient des créanciers ou étaient mécontents, se rassemblèrent auprès de lui, et il devint leur chef. Il eut ainsi avec lui environ quatre cents hommes, » IReg., xxii, 2, qui s’élevèrent plus tard à six cents. IReg., xxv, 13. Nabal appelait cette troupe un ramassis de gens venus on ne sait d’où et d’esclaves échappés de chez leurs maîtres. I Reg., xxv, 10, 11. Avec eux, David opérait contre les ennemis d’Israël, les Gessuriens, les Gerziens, les Amalécites, « ne laissant en vie ni homme ni femme, enlevant les brebis, les bœufs, les ânes, les chameaux, les vêtements. » I Reg., xxvii, 8, 9. Le fils de Saûl, Isboseth, avait aussi à son service deux chefs de bandes, Baana etRéchab. II Reg., iv, 2. Salomoneutà compter avec un autre chef de bande, Razon. III Reg., xi, 24. Des bandes de Sabéens et de Chaldéens enlevèrent les troupeaux de Job et massacrèrent ses serviteurs. Job., i, 15, 17. Des pillards philistins et arabes prirent les biens de Joram, roi de Juda, et emmenèrent ses fils et ses femmes. II Par., xxi, 17 ; xxii, 1. Les Arabes se postaient dans le désert pour rançonner les caravanes. Jer., iii, 2. Des bandes de Syriens, de Moabites et de toutes sortes de pillards infestaient les frontières d’Israël. IV Reg., v, 2 ; xiii, 20 ; xxiv, 2.

Outre ces pillages par bandes, en Israël même, le vol et le brigandage se pratiquaient, Ose., iv, 2 ; vii, 1, parfois avec la connivence des princes âpres au gain. Is., i, 23. Voir Rapine, col. 987. — À l’époque évangélique, Notre-Seigneur pouvait accuser les autorités religieuses d’avoir fait du Temple une s caverne de voleurs », Matth., xxi, 13 ; Marc, xi, 17 ; Luc, xix, 46, comme au temps de Jérémie, vii, 11. Il parle assez

souvent de voleurs dans ses paraboles et ses instructions, Luc, xvi, 1-8 ; Matth., vi, 19 ; etc., et, dans l’histoire du bon Samaritain, il met en scène, aux portes mêmes de Jérusalem, les brigands qui pillent et tuent les passants. Luc, x, 30. Lui-même se plaint, au moment de son arrestation, qu’on le traite comme l’un de ces voleurs sur lesquels les autorités réussissaient de temps en temps à mettre la main. Matth., xxvi, 55 ; Marc, xiv, 48 ; Luc, xxii, 52. La passion du vol avait saisi l’un de ses Apôtres, Judas, Joa., XII, 6 ; on le mit lui-même en parallèle avec un voleur, Barabbas, Joa., XVIH, 40, et l’on eut soin de le crucifier entre deux voleurs. Matth., xxvii, 38 ; Marc, xv, 27 ; Luc, xxiii, 33. Voir Larron, t. iv, col. 94. Josèphe, Ant. jud., XIV, ix, 2 ; XV, x, 1 ; XX, viii, 5, 10 ; Bell, jud., i, x, 5 ; II, xii, 2, parle des brigandages qui s’exerçaient à main année en Galilée, en Pérée et en Thrachonitide, au détriment des villes et des campagnes, des caravanes et de tous ceux qui étaient incapables d’une résistance efficace. Cf. Schwalm, La vie privée du peuple juif, Paris, 1910, p. 568-583. Dans ses courses apostoliques, saint Paul avait à redouter les voleurs. II Cor., xi, 26.

2° Les procédés des voleurs. — Les brigands courent de ville en ville, à la recherche de quelque coup à faire. Eccli., xxxvi, 28 (26). Ils rôdent la nuit, pour ne pas être vus, Job, xxiv, 14, et tombent à l’improviste sur ceux qui ne les attendent pas. Matth., xxiv, 43 ; Luc, xil, 39. Ils emportent alors tout ce qui leur plaît. Jer., xliv, 9 ; Abd., 5. Ils se tiennent en embuscade pour fondre sur les passants. Ose., vi, 9. Ils pénètrent dans les maisons par les fenêtres, Joël, ii, 9. ou percent les murs en torchis pour s’introduire et dérober les trésors. Matth., vi, 19 ; Luc, xii, 23. Us envahissent les bergeries, non pas par la porte, qui pourrait être surveillée, mais en escaladant par ailleurs ; puis ils dérobent, égorgent et détruisent. Joa., x, 1, 10. Cf. Gen., xxxi, 39. Si le propriétaire est assez fort pour résister et se tient sur ses gardes, ils s’arrangent pour le surprendre, le ligotent et ensuite pillent à leur aise ses meubles et sa maison. Matth., xii, 29. On a beau être fort ; si le voleur est plus fort et mieux armé, il abat sa victime et emporte ses dépouilles. Luc, xi, 21. 22. La soudaineté de ces attaques fait que les Apôtres disent que le « jour du Seigneur » se produira dans les mêmes conditions. I Thés., v, 2, 4 ; II Pet., iii, 10 ; Apoc, iii, 3 ; xvi, 15. Les voleurs, qui opéraient dans le Temple même de Jérusalem, Matth., xxi, 13, ne respectaient pas davantage les temples des faux dieux. Bar., vi, 14, 17, 56. D’ailleurs, les voleurs trouvaient des complices, Ps. l (xlix), 18, avec lesquels ils partageaient leur butin. Prov., xxix, 24.

3° Les sanctions. — 1. La loi réglait ainsi la peine à infliger aux voleurs. Celui qui dérobait un bœuf ou une brebis, les égorgeait et les vendait, devait restituer cinq bœufs ou quatre brebis. Si l’animal était encore vivant entre ses mains, il en rendait le double. Si lui-même était insolvable, on le vendait pour assurer la restitution. Si le dépositaire d’argent ou de meubles était volé et que le voleur fût pris, ce dernier rendait le double. Si le voleur n’était pas pris, le dépositaire attestait devant Dieu son innocence. En général, le voleur avait à restituer le double de ce qu’il avait pris. La loi ne laissait pas l’Israélite désarmé contre les attaques. Si, la nuit, le voleur procédait par effraction et était mortellement frappé, il n’y avait rien à dire ; mais, le soleil levé, on était responsable de la mort du voleur, qu’on aurait pu paralyser sans recourir à une pareille extrémité. Exod., xxii, 1-8. Voir Restitution, col. 1062. Ces sanctions n’étaient que la conséquence du précepte : « Tu ne déroberas point. » Exod., xx, 15. Chez les Arabes, celui qui a volé une brebis, une chèvre, un bœuf ou un âne, est condamné à rendre l’animal, et en plus’trois autres semblables. La jument

volée doit être rendue et en plus son prix en argent ou en nature, l’Arabe ne possédant pas ordinairement plusieurs juments. Cf. A. Jaussen, Coutumes arabes, dans la Revue biblique, 1901, p. 599. —2. Job, xxii, 6, se plaint que souvent « la paix règne sous la tente des brigands. » Mais il est certain que les voleurs seront châtiés par la justice divine. Zach., v, 3, 4. Ils ne seront pas admis au royame des cieux. I Cor., vi, 10. En attendant, on hoche la tête en parlant d’eux. Jer., xlyiii, 27. Quand ils sont pris sur le fait, ils sont couverts de honte. Jer., ii, 26 ; Eccli., v, 17 (14). Aussi saint Pierre veut-il que, quand des chrétiens sont pris et condamnés, ce ne soit jamais comme voleurs. I Pet.,

iv, 15.
H. Lesêtre.
    1. VOLONTÉ##

VOLONTÉ (hébreu : rê’a, quelquefois néfés, Gen., xxm, 8 ; IV Reg., ix, 15 ; I Par., xxviii, 9 ; chaldéen : re’ôt, sebû), faculté par laquelle un être intelligent se détermine à l’action.

1° Volonté de Dieu. — Il y a en Dieu une volonté qui participe à l’infinité de tous les attributs divins. Cette volonté a créé tout ce qui existe, Apoc, iv, 11, et elle régit toutes les forces de la nature. Eccli., xliii, 17 (16). Rien ne peut lui résister. Gen., L, 19 ; Esth., xin, 9 ; Ps. cxxxv (cxxxiv), 6 ; Eccle., viii, 3 ; Sap., xii, 18 ; Is., xl vi, 10 ; Rom., ix, 19. Les anges lui obéissent fidèlement. Ps. cm (cn), 21 ; Tob., xii, 18. Tout ce qui arrive est permis ou décrété par cette volonté. Gen., xxvii, 20 ; IV Reg., xviii, 25 ; II Par., xxii, 7 ; I Esd., vu, 18 ; Rom., i, 10 ; xv, 32 ; etc. L’homme propose et Dieu dispose, Prov., xix, 21, surtout quand il s’agit des grands événements de l’histoire. Is., xuv, 28 ; xlviii, 14 ; etc. La volonté divine commande par la loi. Rom., il, 18 ; Eph., v, 17. Elle, intervient dans la vocation des ministres sacrés. I Cor., i, 1 ; II Cor., i, 1 ; Gal., i, 4 ; Eph., i, 1 ; Col., i, 1 ; II Tim., i, 1. Elle agit avec bienveillance. Ps. v, 3 ; Luc, ii, 14. Il faut donc désirer son accomplissement, I Mach., iii, 60, lui obéir, Ps. xl (xxxix), 9 ; Sap., vi, 5 ; II Mach., i, 3 ; Hebr., x, 7, 9, et s’en remettre à elle. Tob., iii, 6. Il est dit parfois que Dieu veut une chose et ne veut pas l’autre, pour indiquer seulement qu’il préfère la première à la seconde. I Reg., xv, 22 ; Matth., ix, 13 ; xii, 7. —L’obéissance à la volonté de Dieu tient une place essentielle dans la religion de Jésus-Christ. Le Sauveur apprend aux hommes à prier pour que cette volonté soit faite. Matth., vi, 10 ; Act., xxi, 14. Lui-même en accepte humblement les arrêts. Matth., xxvi, 39, 42 ; Marc, xiv, 36 ; Luc, xxii, 42. Il fait avec amour la volonté de son Père. Joa., iv, 34 ; v, 30 ; Vi, 38. Il veut que ses disciples l’imitent très fidèlement sur ce point. Matth., xii, 50 ; Marc, iii, 35 ; Joa., vii, - 17 ; ix, 31 ; Eph., vi, 6 ; Col., iv, 12 ; I Pet., ii, 15 ; iv, 2. C’est la condition de l’entrée dans le royaume des cieux, Matth., vii, 21, et dans la vie éternelle. I Joa., ii, 17/ Il faut donc tout d’abord connaître cette volonté. Col., i, 9. Le Sauveur révèle quelques-unes des volontés divines, concernant le salut des petits, Matth., xviii, 14, celui du peuple juif, Matth., xxiii, 37, l’embrasement de la terre par le feu de l’amour divin, Luc, xii, 49, le sàlut de tous les croyants, Joa., vi, 39-40, la réunion de ses ministres avec lui dans le ciel, Joa., xvii, 24, la longue survivance de saint Jean. Joa., xxi, 22. Dieu veut encore la sanctification des fidèles, I Thés., iv, 3, leurs joyeuses actions de grâces, I Thés., v, 18, la répartition des dons de l’Esprit, Hebr., ii, 4, qui d’ailleurs souffle où il veut, Joa., iii, 8 ; 1 Cor., xii, 11, et le salut des hommes par le sacrifice de la croix. Hebr., x, 10. Jésus-Christ fait acte de volonté pour guérir les malades. Matth., viii, 2, 3 ; Marc, I, 41 ; Luc, v, 13. Les Apôtres recommandent de ne rien projeter qu’avec la clause : Si Dieu le veut. Act., xviii, 21 ; I Cor., iv, 19 ; I Pet., iii, 17 ; Jacob.i iv, 15. Volonté de l’homme. — Elle est continuellement supposée en exercice dans tous les actes humains auxquels la Bible fait allusion. Il est parlé en particulier de la volonté de la fiancée, Gen., xxiv, 57, du roi, I Esd., v, 17, du père de famille, Malth., xx, 14, de la fille d’Hérodiade, Marc, vi, 25, des fils de Zébédée. Marc, x, 35, etc. La volonté de la chair et de l’homme, Joa., i, 13 ; Eph., ii, 3, est celle que guident les instincts purement terrestres. La prophétie ne dépend pas d’une pareille volonté. II Pet., i, 21. Le salut ne résulte pas de la volonté de l’homme, mais de celle de Dieu. Rom., ix, 16. La volonté de l’homme est impuissante à accomplir tout le bien qu’elle voudrait. Rom., vii, 15-21. Dieu seul opère en nous le vouloir et le faire d’une manière surnaturelle. Phil., ii, 13 ; II Thés., i, 11. Saint Paul parle de la bonne volonté des Corinthiens et de la sienne. II Cor., viii, 12, 19. Notre-Seigneur prescrit de faire pour les autres ce que nous voulons qu’ils fassent pour nous. Luc, vi, 31.

Volonté du démon. — Satan se vante de donner les royaumes de ce monde à qui il veut. Luc, iv, 6. Ses volontés ne tendent qu’à asservir les âmes. II Tim., il, 26.

VOLUME, de volvo, « rouler ». Les anciens manuscrits hébreux avaient la forme de rouleaux, volumina. Voir Livre, III, i, t. iv, col. 305-307, fig. 107, col. 309.


VOLUPTÉ, voir Plaisir, col. 456.


VOMISSANT (hébreu : Yaqêh), traduction du nom du père d’Agur, dans la Vulgate (Vomens). Prov., xxx, 1. Voir Jakéh, t. iii, col. 1111 ; Ukal, col. 2368.


VOMISSEMENT (hébreu : qê’, qî’), expulsion par la bouche de ce qui gêne l’estomac, et matière de cette expulsion. — 1° Celui qui a trouvé du miel ne doit pas en manger à l’excès, de peur qu’il ne le vomisse. Prov., xxv, 18 (16). De pénibles vomissements sont la conséquence de l’intempérance. Eccli., xxxi, 25 (20), Un homme ivre erre dans son vomissement. Is., xix, 14. À la suite des orgies, les tables sont couvertes d’immondes vomissements. Is., xxviii, 8. — Le chien qui retourne à son vomissement est l’image du pécheur qui recommence à mal faire. Prov., xxvi, 11 ; II Pet., il, 22. — Le monstre marin vomit Jonas sur le rivage. Jon., ii, 11. — 2° Au figuré, un pays vomit ses habitants corrompus. Lev., xviii, 15, 28 ; xx, 22. Celui qui mange le pain de l’envieux vomira le morceau qu’il, aura mangé, c’est-à-dire qu’il n’y aura rien à gagner en fréquentant un pareil homme. Prov., xxiii, 8. L’impie vomira les richesses qu’il aura englouties, elles ne lui profiteront pas. Job, xx, 15. Dieu dit aux nations ennemies de son peuple : « Buvez, enivrez-vous, vomissez et tombez pour ne plus vous relever, devant l’épée que j’envoie au milieu de vous, » c’est-à-dire commettez le mal à satiété, le châtiment viendra. Jer., xxv, 27. En particulier, « que Moab se vautre dans son vomissement, » que son orgueil et ses crimes fassent de lui la risée de tous. Jer., xlviii, 26. — Dieu vomira de sa bouche celui qui est tiède, comme on vomit de l’eau tiède. Apoc. iii, 16.


VOYAGEUR (hébreu : ʾorêaḥ, ʿôbêr), celui qui parcourt un chemin pour se rendre à un endroit assez éloigné. En hébreu, le chemin lui-même est quelquefois nommé pour ceux qui le parcourent : ʾoraḥ, ὁδός , semita ; hëlék, hǎlikâh, ἀτραπός , iter. Job, vi, 19 ; II Reg., xii, 4. — Sur le voyage en commun ou ʾorḥâh, voir Caravane, t. ii, col. 245, et Pèlerinages, t. v, col. 24. — Sur les droits du voyageur et les devoirs envers lui, voir Étranger, l.n, col. 2039, et Hospitalité, t. iii, col. 760.

— Sur son gîte, voir Caravansérail, t. ii, col. 250. — Le voyageur remarque l’état des pays qu’il traverse. Deut., xxix, 22 ; Ezech., xxxvi, 34. Il cherche un abri dans le désert, Jer., ix, 2, ou y dresse sa tente pour la nuit. Jer., xiv, 8. Il compte sur l’eau des torrents, qui souvent lui fait défaut, Job, vi, 19 ; il en est alors réduit à boire toute eau qu’il rencontre. Eccli., xxvi, 15 (12). Il arrive à l’improviste chez son hôte, Prov., vi, 11 ; ou lui ouvre la porte, Job, xxxi, 32, et on lui fait réception. II Reg., xii, 4. On l’interroge, Job, xxi, 29, et on s’entretient avec lui, Eccli., xlii, 3, pour apprendre du nouveau. Ézéchiel, xxxix, ll, mentionne, à l’orient de la mer Morte, une « vallée des Voyageurs » dans laquelle Gog sera inhumé. Cette vallée est symbolique. — Les patriarches se considéraient comme des voyageurs sur la terre, où ils ne faisaient que passer. Hebr., xi, 13.


VOYANT (hébreu : rô’êh ; ḥôzéh ; Vulgate : videns), prophète. Voir Prophète, I, 1°, 2°, col. 706-707.

VOYELLES HÉBRAÏQUES. Voir Hébraïque (Langue), t. iii, col. 467, 504.


VULGATE, version latine usitée depuis quatorze siècles dans l’Église latine et déclarée authentique, c’est-à-dire officielle, par le concile de Trente.

I. Nom et définition. — 1° Nom.— L’adjectif féminin vulgata, qualifiant d’abord divers substantifs du même genre : editio, interpretatio, Biblia, a été ensuite isolé et pris substantivement pour désigner le texte courant, répandu universellement et accepté généralement, des Livres Saints. On a d’abord nommé ainsi la version des Septante et l’editio vulgata des Latins était la traduction de la ϰοινὴ ἔϰδοσις des Grecs. S. Jérôme, Comm. in Is., lxv, 20, t. xxiv, col. 647 ; xxx, 22, col. 346 ; xlix, 6, col. 466 ; Comm. in Ose., vii, 13, t. xxv, col. 880 ; S. Augustin, De civitate Dei, xvi, 10, t. xli, col. 489. Ce nom distingue parfois l’ancienne édition des Septante de celle qu’en fit Origène dans les Hexaples. S. Jérôme, Epist., cvi, n. 2. t. xxii, col. 838. Elle est dite alors vetus antiqua editio. Id., Comm. in Ose., xiii, 4, t. xxv, col. 953 ; Epist., xlix, n. 4, t. xxii, col. 512 ; Comm. in Is., liv, t. xxiv, col. 513 ; Præfatio in l. Josue, t. xxviii, col. 464. Cependant, quoique ce docteur désigne le plus souvent les versions latines : in latino, latinus interpres, apud latinos, nos, nostra interpretatio, il nomme parfois vulgata editio les versions latines qui ont précédé la sienne qui, pour l’Ancien Testament, ont été faites sur les Septante, Comm. in Is., xiv, 29, t. xxiv, col. 165, ou, pour le Nouveau, ont précédé sa révision. Comm. in Matth., xiii, 35, t. xxvi, col. 92 ; Comm. in Epist. ad Gal., v, 24, ibid., col. 421. Cf. Orose, Apologia de arbitrii libertate, n. 9, t. xxxi, col. 1180. La version latine de saint Jérôme ayant peu à peu supplanté les anciennes, qui étaient dérivées des Septante, en prit le nom. Ce ne fut donc qu’à partir du VIe siècle et la substitution du nom ne se produisit que graduellement. Durant le haut moyen âge, la vulgata editio est encore la version des Septante ; la version de saint Jérôme est dite : translatio emendatior, recens, nova, posterior, hebraica, ou translatio quam tenet ou recipit romana Ecclesia, etc. Le Vénérable Bède la désigne par ces mots : editio nostra, codices nostri. Roger Bacon, tout en appliquant fréquemment encore le nom de Vulgata à la version des Septante, est le premier qui l’emploie résolument au sens moderne pour désigner la traduction de saint Jérôme : Hæc quæ vulgatur apud Latinos, illa quam Ecclesia recipit his temporibus. Le concile de Trente a consacré ce nom, en appelant vetus vulgata latina l’édition des Livres Saints, quæ longo tot sæculorum usu in ipsa Ecclesia probata est. Décret. de canonicis Scripturis, de editione et usu sacrorum librorum, sess. IV.

Définition. — La Vulgate latine est composée d’éléments d’origine et de nature différentes. Il y en a de trois sortes : 1. les uns proviennent des anciennes versions latines, probablement de l’Italique, non révisée par saint Jérôme : ce sont les livres deutérocanoniques de l’Ancien Testament, à l’exception de Tobie et de Judith qui rentrent dans la troisième catégorie ; 2. les autres font partie de la révision que le saint docteur a faite des versions antérieures, notamment de l’Italique : ce sont tous les livres du Nouveau Testament et le Psautier dit gallican ; 3. les derniers enfin appartiennent à la version nouvelle que le même docteur a faite sur les textes originaux, hébreu ou chaldéen : ce sont tous les livres protocanoniques de l’Ancien Testament, sauf le Psautier, les livres de Tobie et de Judith et les parties deutérocanoniques de Daniel et d’Esther. La Vulgate latine est donc, dans sa majeure partie, l’œuvre de saint Jérôme.

II. Origine et caractères de ces divers éléments. — 1° Livres provenant des anciennes versions latines. — Saint Jérôme n’a retouché ni la Sagesse ni l’Ecclésiastique, ni Baruch, qu’il a laissé de côté à dessein, ni probablement les deux livres des Machabées. Voir t. iv, col. 99. La version antérieure de ces livres a donc continué à être lue et employée dans l’Église latine et elle est demeurée dans la Vulgate. Sur les caractères de cette ancienne version, voir t. iv, col. 97 sq., et sur les manuscrits et éditions de ces livres non révisés, voir ibid., col. 105-106.

Livres des anciennes versions revisés par saint Jérôme. — Pour la biographie de saint Jérôme, voir t. iii, col. 1305-1306. Durant son séjour à Rome auprès du pape saint Damase, dont il était le secrétaire, Jérôme fut chargé par ce pape de reviser la version latine qui était alors en usage à Rome. L’Église romaine n’avait pas de texte officiel et le plus grand désaccord existait dans les manuscrits au point que le saint docteur pouvait écrire : Tót sunt exemplaria pene quot codices, et il indiquait trois sources de divergences : 1. la multiplicité des versions dont quelques-unes étaient mauvaises ; 2. les corrections qu’y introduisaient des correcteurs présomptueux et malhabiles et qui les rendaient plus mauvaises encore ; 3. des additions ou omissions, faites par des copistes négligents. In Evangelia ad Damasum prœfatio, t. xxix, col. 525-527. La revision des Évangiles fut faite en 383 ; celle du reste du Nouveau Testament de 384 à 385. Epist. lxxi, ad Lucinium, 5, t. xxii, col. 671-672 ; De viris, 135, t. xxiii, col. 717-719. Saint Jérôme a pris pour base le texte italique du Nouveau Testament, voir t. ii, col. 115-118, dans la forme même (ou au moins dans une forme très semblable) du Codex Brixianus, f, et du Codex Monacensis, q, pour les Évangiles. Voir t. iv, col. 107, 109. Il l’a corrigé, non pas d’après des manuscrits latins, mais d’après des manuscrits grecs anciens. Or, Wordsworth et White ont déterminé, par la comparaison des passages corrigés, que saint Jérôme avait à sa disposition, pour les Évangiles, des manuscrits grecs de deux sortes : les uns semblables à N, B, L et partiellement à D, et les autres d’une famille différente, dont il ne nous est parvenu aucun représentant, et pour les Actes des Apôtres, non des manuscrits de la recension occidentale, mais des témoins de la recension orientale, semblables à ii, A, B, C. Novum Testamentum D. N. J. C. latine, t. i, fasc. 5, Oxford, 1898, p. 653-672 ; t. ii, fasc. 1, Oxford, 1905, p. x-xiii. Cf. E. Mangenot, Les manuscrits grecs des Évangiles employés par saint Jérôme (extrait de la Revue des sciences ecclésiastiques, janvier 1900). Saint Jérôme remplace des leçons italiennes par de meilleures leçons grecques, en empruntant peut-être parfois les termes latins aux autres versions latines qui avaient ces leçons. Toutefois il n’a pas appliqué partout sa méthode avec la même rigueur et la même perfection. Sa correction de l’Italique est complète dans les deux premiers Évangiles et dans la première partie du troisième. Dans la seconde partie de saint Luc et dans les premiers chapitres de saint Jean, il s’est borné à corriger le style et il a gardé les leçons du Brixianus. Dans le reste du quatrième Évangile, il a suivi une voie moyenne. L’Amiatinus et le Fuldensis sont les meilleurs représentants de sa version des Actes. Pour les Épîtres, l’auteur a adopté peu de leçons grecques et il s’est contenté de polir le texte latin et de le rendre plus élégant. Voir t. iii, col. 1306-1307.

M. H. von Soden est arrivé aux mêmes conclusions que les critiques anglais. Il les a complétées et mises en rapport avec ses vues personnelles sur le texte grec du Nouveau Testament. Voir col. 2122. Dans les Évangiles, saint Jérôme a amélioré l’Itala pour le style, quand cela lui a paru nécessaire, et pour le fond, quand, comparaison faite avec le texte grec, l’écart de la version latine lui apparaissait trop fort. Il a donc gardé des leçons de l’Itala. Il ne semble pas avoir pris en considération les textes latins africains. Le texte grec, suivi par lui, est celui de I H K. et non pas celui des recensions I, H, K. Saint Jérôme méprisait H et K et il ne voyait en elles que des perversions du texte grec. Præfatio ad Damasum, t. xxix, col. 527. On ne trouve dans son texte aucune des leçons propres à I. Si le saint docteur a connu le Diatessaron de Tatien, il lui a reconnu peu d’autorité. Le texte grec qu’il suivait était donc le meilleur texte qui ait eu cours alors. Quant au style, il choisissait de nouveaux, mots latins pour rendre les leçons grecques. Quelques traductions libres ont été rapprochées par lui du texte original. Enfin, l’orthographe a été modifiée. Le récit de la femme adultère, qui manquait dans les textes africains et italiens, aurait été introduit par saint Jérôme dans la version latine d’après les manuscrits grecs. Die Schriften des Neuen Testaments, § 350, 351, Berlin, 1906, t. i, p. 1524-1534. Pour les Actes des apôtres, le texte grec, suivi par saint Jérôme, est encore celui de IHK. Quand on trouve des leçons propres de K ou plus rarement de I, elles ne viennent pas de ces recensions, mais des anciennes versions latines. Ces dernières ont fourni encore des leçons qui portent des traces de l’influence des passages parallèles. Cependant quelques leçons particulières viennent de documents grecs. Ibid., § 442, p. 1798-1802. Dans les Épîtres de saint Paul, saint Jérôme a suivi principalement l’ancien texte latin, et quand il s’en éloigne, il est d’accord encore avec IHK. Il n’a pas eu ici un texte grec différent de celui qui nous est connu, et ce texte était parfois accidentellement d’accord avec K. Ibid., § 512, p. 2010-2011. Quant à l’Apocalypse, le texte de l’Itala est demeuré dans la Vulgate, et saint Jérôme a fait peu d’emprunts aux manuscrits grecs. Les leçons étrangères à IHK n’étaient pas dans l’œuvre du saint docteur ; elles ont pénétré dans les manuscrits de la Vulgate. Le texte de la Vulgate est donc, pour l’Apocalypse, un très bon témoin du texte grec répandu avant la formation des recensions de ce livre. Ibid., § 546, p. 2087-2088.

Vers le même temps, en 383-384, saint Jérôme revisa à Rome le Psautier sur le texte grec des Septante. Il le fit rapidement (cursim). Præfatio, t. xxix, col. 117-119. Ce texte fut adopté en Italie et dans la liturgie romaine jusqu’au pontificat de saint Pie V, et c’est pourquoi il a été nommé Psautier romain. Ses leçons se lisent aujourd’hui encore dans les anciennes Messes du missel, dans l’invitatoire, les antiennes et les répons du Bréviaire. On le récite encore à la basilique Saint-Pierre de Rome. Il n’est pas entré dans l’édition officielle de la Vulgate.

Plus tard, à partir de 387, saint Jérôme revisa à Bethléhem plusieurs livres de l’Ancien Testament sur le texte grec des Septante : d’abord, semble-t-il, le Psautier sur les Hexaples d’Origène ; aussi y introduisit-il les astérisques et les obèles. Præfatio, t. xxix, col. 119-120. Ce psautier, employé dans la liturgie des Églises des Gaules, fut appelé, pour cette raison, Psautier gallican. Saint Pie V l’introduisit dans la liturgie romaine, Sixte V et Clément VIII dans l’édition officielle de la Vulgate. Voir t. iii, col. 1307-1308.

À la même époque ou peu après, saint Jérôme revisa encore sur les Septante Job, Præfatio, t. xxix, col. 59 ; voir t. iii, col. 1308, puis les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique et les Chroniques. Voir les préfaces, t. xxviii, col. 1241-1244, 1323-1328. Mais cette revision n’avait pas été trop profonde. La plus grande partie de ce travail était perdu déjà même du temps de saint Jérôme, et seul le livre de Job nous est parvenu dans cet état. Il a été édité pour la première fois par Martianay en 1693, puis par Vallarsi, en 1740 (dans Pal. lat., t. xxix, col. 61-114), puis par Sabatier en 1743. P. de Lagarde l'a réédité, Mittheilungen, 1887, t. ii, p. 193-237 ; Caspari a publié une partie d’un manuscrit de Saint-Gall, Christiania, 1893. Voir t. iii, col. 1564.

Livres directement traduits sur le texte original. — Saint Jérôme, qui avait commencé à apprendre l’hébreu avec l’aide d’un rabbin converti durant sa retraite au désert de Chalcis (373-378), Epist. cxxv, ad Rusticum, n. 12, t. xxii, col. 1079, reprit cette étude, lors de son séjour à Bethléhem. Il eut pour maître le juif Bar Anina, qui se faisait payer très cher les leçons qu’il donnait de nuit. Epist. LXXXIV, ad Pammachium et Oceanum, n. 3, col. 745. Rufin eut le mauvais goût de le nommer Barabbas et de dire que saint Jérôme le préférait à Jésus. Apologia ad Hieronymum, 1. II, n. 12, t. xxi, col. 595. Cf. S. Jérôme, Apologia adversus libros Rufini, t. xxiii, col. 407. Pour traduire le livre de Job, Jérôme eut recours à un autre juif de Lydda, très célèbre, mais dont les leçons étaient payées chèrement. Præfatio in Job, t. xxviii, col. 1081. Il éprouva de grandes difficultés à cette étude. Prsefatio in Daniel., t. xxviii, col. 1292 ; Epist. cviii, ad Eustochium et Paulum, n. 26, t. xxii, col. 902. Il y avait perdu son latin, car, depuis plus de quinze ans, écrivait-il en 386 ou 387, il n’avait pas ouvert Cicéron, Virgile et tout autre auteur profane. Comment, in Epist. ad Gal., l. III, prol., t. xxvi, col. 399. Son but en traduisant les Livres saints sur le texte hébreu, était de rendre plus claire pour tous la « vérité hébraïque » et surtout de fournir aux apologistes chrétiens un texte biblique sûr, qui leur servirait dans la polémique avec les Juifs ; ils ne seraient plus ainsi exposés à s’entendre dire : Ce passage n’est pas dans l’hébreu. Præfatio in translat. Isaiæ, t. xxviii, col. 774. Il y fut occupé de 390 à 405, avec une interruption, causée par la maladie, de 396 à 398. Epist. xltx, 4, t. xxii, col. 512. Sur l’ordre dans lequel il traduisit les livres de l’Ancien Testament, voir t. iii, col. 1308. Son Psalterium hebraieum n’est pas entré dans la Vulgate. Ses préfaces et ses lettres témoignent de l’opposition que souleva son projet : on lui reprochait de vouloir supplanter les Septante. Saint Augustin, qui avait fait bon accueil à sa revision du Nouveau Testament, ne comprenait pas son but et lui conseillait de se borner à revoir l’Ancien Testament sur les Septante. Epist. cxii, 20, t. xxii, col. 928.

Saint Jérôme avait pu se procurer le manuscrit hébreu dont on se servait à la synagogue de Bethléhem et il l’avait copié lui-même. Epist. xxxyi, ad Damasum, n. 1, t. xxii, col. 452. Il n’en avait pas d’autres à qui il put le comparer, et il lui était impossible de faire le travail de comparaison qu’il avait exécuté pour le Nouveau Testament. Les critiques modernes ont constaté que le texte dont il disposait ressemblait au texte établi par les massorètes, sans lui être absolument identique. Les différences sont peu nombreuses et ont peu d’importance. L’identité existe jusque dans certaines fautes de copistes, II Par., xxi, 5, 20 ; xxii, 1, 2 ; Is., xxxix, 1 (Mérodach-Baladan) ; IV Reg., xx, 12 (Bérodach-Baladan) ; dans des coupes défectueuses de mots, I Reg., 1, 24 ; Ezech, , xlviii, 11 ; Os., vi, 5 ; xi, 2 ; Zach., xi, 7 ; Ps. xvi, 3 ; lxxi, 3 ; lxxv, 2 ; lxxvi, 7 ; cvi, 7 ; dans l’omission des mêmes mots, III Reg., vin, 16 ; Jos., ii, 1 ; I Reg., xiv, 24-26 ; xxix, 10, etc. ; dans des doubles leçons, gloses ou altérations diverses. II Reg., VI, 3, 4 ; Jon., i, 8 ; I Reg., iii, 3-5 ; I Par., vi, 13 ; II Reg., iii, 3. La conformité avec l’hébreu et l’opposition avec les Septante existent non seulement par la suppression des longues additions de la version grecque dans les livres des Rois, dans Jérémie et dans les Proverbes, mais encore en beaucoup de détails : par exemple, pour les nombres, I Reg., ix, 22 ; xi, 8 (deux fois) ; xiii, 5 ; xxiii, 13 ; xxvii, 2 ; xxx, 9 ; II Reg., xv, 7 ; III Reg., ix, 28 ; x, 16 (deux fois), 26 ; xii, 21 ; pour des lettres confondues. Driver, Notes on the hebrew text of the books of Samuel, Oxford, 1890, p. lxvi-lxvii, a cité vingt exemples tirés des Psaumes où les Septante ont lu ו lorsque le texte massorétique a י. Or, dix-sept fois, saint Jérôme est d’accord avec les massorètes. Voir encore Zach., v, 6. De même, ו et ז ont été confondus. Num., xxvi, 32, 36, 40, 57. Selon Wellhausen, Einleitung in das A. T., de Bleek, 6e édit., Berlin, 1893, P- 557, saint Jérôme différerait des massorétes surtout dans la lecture des matres lectionis. Cependant, même sur ce point, il est parfois d’accord avec eux au sujet de l’écriture pleine. Ainsi Gen., xxiii, 16 : Ephron, Ephran, Qusest.in Gen., t. xxiii, col. 973. Cf. W.Nowack, Die Bedeutung des Hieronymus für die alttestamentliche Textkritik, Gœttingue, 1875 ; H. P. Smith, The value of the Vulgate Old Testament for textual criticism, dans Presbyterian and reformed Review, avril 1891.

Saint Jérôme mettait parfois un soin particulier à lire son manuscrit. Ainsi pour le livre des Paralipomènes, dont les noms propres sont si défectueux dans les manuscrits grecs et latins, il en a collationné le texte d’un bout à l’autre avec un docteur de la loi de Tibériade, très renommé. Præfatio ad Domninum et Rogatianum, t. xxix, col. 401-402. D’autres fois, il était plus pressé et c’est ainsi qu’il traduisit en un jour le livre de Tobie. Præfatio in librum Tobiæ, t. xxix, col. 26. Il visita aussi toute la Palestine avec des juifs très instruits, afin d’être à même de traduire plus exactement les passages bibliques, qui ont trait à la géographie de cette contrée. Præfatio in libr. Paralipom., t. xxix, col. 401. Du reste, il se faisait aider par ses maîtres hébreux pour la traduction des passages difficiles. Il recourait enfin, quand il le jugeait nécessaire, aux versions grecques faites par les Juifs Aquila, Symmaque et Théodotion, qu’il connaissait par les Hexaples d’Origène. Comment. in Eccle., prol., t. xxiii, col. 1011-1012 ; Epist. xxxii, ad Marcellam, t. xxii, col. 446.

C’est à ces anciennes versions juives ou à la tradition des rabbins qui furent ses maîtres qu’il a emprunté certaines interprétations singulières ou même erronées, qui s’écartent du texte hébraïque. Ainsi il doit à Symmaque la fausse traduction d’Eccle., vi, 5. Voici un certain nombre d’exemples, pris dans la Genèse seulement, où il a suivi la tradition rabbinique : a principio, ii, 8 ; usque ad convallem illustrem, xii, 6 ; in terram visionis, xxii, 2 ; abundantiam, xxvi, 33 ; verno tempore, xxxV. 6 ; vemum tempus, xlviii, 7 ; quo nato, parere ultra cessavit, xxxviii, 5 ; in bivio, xxxviii, 14. Cependant, il rejette certaines traditions rabbiniques, qu’il cite dans son Liber quæstionum hebraicarum in Genesim. Ainsi il traduit Ur Chaldæorum, Gen., xi, 28„ quoiqu’il ait écrit in igne Chaldæorum, II Esd., ix, 7. Cf. J. Lagrange, Saint Jérôme et la tradition juive dans la Genèse, dans la Revue biblique, 1908, p. 563566. La plus célèbre dépendance de cette tradition est, en dehors de la Genèse, la traduction de Josué, xiv, 10.

Il a exposé maintes fois les principes qu’il a appliqués dans sa traduction de l’Ancien Testament. Epist. cvi, ad Suniam et Fretellam, t. xxii, col. 837-867. Ce sont ceux, d’ailleurs, qu’il avait indiqués pour la traduction des livres profanes, dans son opuscule De optimo génere interpretandi, Epist. LVII, ad Pammachium, t. xxii, col. 568-579. Il évita avec soin de faire une traduction littérale et servile, rendant le texte mot à mot ; il s’attacha plutôt à rendre exactement le sens de l’original. Cependant pour traduire l’Écriture, où l’ordre des mots n’est pas parfois sans un dessein mystérieux, il tint davantage compte de la littéralité. Præfatio in Job, t. xxviii, 1081 ; Præfatio in Judith, t. xxix, col. 39. Il cherchait donc avant tout à comprendre le texte et il a pu se rendre le témoignage de n’avoir rien changé à la vérité hébraïque. Prologus galeatus, t. xxviii, col. 557-558. Nous avons constaté plus haut sa fidélité au texte massorétique. Ayant compris le texte, il s’efforçait de l’exprimer en latin correct et aussi élégant que possible. Epist. cvi, n. 54, t. xxii, col. 856. Il tenait compte des propriétés de la langue latine et il a adopté des locutions reçues, par exemple, ces termes de la mythologie ou des croyances populaires, acervus Mercurii Prov., xxvi, 8 ; aruspices, IV Reg., xxi, 6 ; sirenes, Is., xiii, 22 ; lamia, onocentauri, Is., xxxiv, 14 ; fauni, Jer., L, 39 ; mulieres plangentes Adonidem, Ezech., viii, 14, etc., pour rendre des termes analogues de l’hébreu, qui n’auraient pas été compris des lecteurs latins, s’ils avaient été traduits littéralement, et qu’il était impossible même de rendre autrement que par des termes équivalents plus ou moins rapprochés. C’est encore pour se conformer au génie de la langue latine que le saint docteur a remplacé les phrases désarticulées de l’hébreu par des périodes. Ainsi Gen., xxviii, 11 ; xxxi, 39 ; XL, 4. Un ablatif absolu traduit une phrase directe. Gen., xiii, 10 ; xix, 16. Voir d’autres modifications de cette nature, Gen., xxxi, 32, 47 ; xxxii, 13 ; xxxix, 19 ; xl, 5 ; xli, 14, etc.

Par amour de la clarté, le traducteur latin ajoute parfois quelques mots d’explication, ou, par contre, pour éviter les répétitions, il abrège et résume, quand le texte hébreu est pléonastique. Un exemple d’abréviation se trouve, Eccle., vi, 2 ; des additions se rencontrent, Gen., xx, 16 ; xxxi, 31, 32, qui sont de la main du traducteur. Il y a des passages assez librement traduits, par exemple, Gen., xxxix, 10-19 ; XL, 21-23 ; Lev., VI, 2-5 ; Num., xv, 11-16. Comme l’a remarqué le P. de Hummelauer, Commentarius in libros Judicum et Ruth, Paris, 1888, p. 20-22, les explications ajoutées pour éclaircir le texte sont assez fréquentes dans le livre des Juges. Voir quelques spécimens, ii, 19 ; viii, 1, 11 ; ix, 25, 36 ; xi, 39 ; xv, 9, 16, 19 ; xvii, 9 ; leur nombre augmente à partir du c. XIX. Le saint docteur traduisait alors currente calamo. Ses libertés de traduction se rencontrent dans le Pentateuque et les Juges, livres qu’il a traduits les derniers. Quelques menus changements, qui ne modifient pas le sens, semblent dus encore à l’amour de l’élégance et de la clarté, par exemple, I Sam., xxviii, 6 ; II Reg., iv, 19, 23. Quand le texte hébreu présente un récit peu cohérent, saint Jérôme, par une tournure plus claire, par un mot d’explication, rend la suite des idées plus logique. Exemples : Gen., ii 19 ; xv, 3 ; xix, 29 ; xxxv, 9 ; xxxvii, 21, 22, 28 ; Exod., xix, 25 ; xviii, xxii, 22 ; Deut., i, 37, 38 ; Jud., xx, 9, 10 ; xxi, 9. Cf. F. Kaulen, Geschichte der Vulgata, Mayence, 1868, p. 176-179 ; A. Condamin, Les caractères de la traduction de la Bible de saint Jérôme, dans les Recherches de science religieuse, 1912, t. iii, p. 105-138.

Le souci de saint Jérôme pour l’élégance apparaît surtout dans le soin qu’il mit à varier la traduction des mêmes expressions, souvent répétées dans le texte hébreu. Ainsi, au ch. Ier de la Genèse, les mots : vayômér ʾĔlôhîm, qui reviennent neuf fois, sont rendus de cinq manières différentes : le vav est diversement traduit ou le verbe est exprimé par différents verbes latins. Au même endroit, leminô est traduit juxta (secundum, in) genus (ou speciem). Cf. Gen., vi, 20 ; vii, 14 ; Lev., xi, 14, 15, 16. Non seulement le même terme est traduit par différents mots latins en des passages très éloignés l’un de l’autre, parfois même il est rendu de deux façons dans le même verset. Gen., iii, 2, 3, 6, 18, 19 ; xxiv, 1 ; Exod., vi, 14-19 ; III Reg., i, 1 ; Jos., xiii, 1 ; xxiii, 1, 2 ; I Reg., IX, 4 ; Gen., xlix, 3 ; I Reg., x, 5, 10 ; I Par., xxvii, 25, 27, 38 ; Job, i, 16-18 ; Dan., iii, 20, 21, 23, 25 ; v, 24, 25 ; ii, 4, 6, 7, 9, 16, 24 ; v, 7, 12, 15. Ces variations nuisent parfois au sens : c’est le cas pour genus et species dans le ch. i « de la Genèse. Belial est tantôt un nom propre, Deut., xiii, 12 ; Jud., xix, 22 ; I Reg., i, 16 ; ii, 12 ; x, 27 ; xxv, 17 ; II Reg., xvi, 7 ; xx, l ; xxii, 5 ; III Reg., xxi, 10 ; Nah., i, 13 ; Ps. ci, 3 ; II Par., xiii, 1 ; tantôt il devient un substantif commun ou un adjectif : impius, Deut., xv, 9 ; Prov., xvi, 27 ; iniguus, I Reg., xxv, 25 ; xxx, 22 ; Prov., XIX, 28 ; apostata, Prov., VI, 12 ; Job, xxxiv, 18 ; prævaricator, prævaricatio, II Reg., xxiii, 6 ; Nah., i, 11 ; diabolus, diabolicus, III Reg., xxl, 13 ; Ps. xviii, 5 ; xli, 9. Naharah devient coluber, Exod., IV, 3, draco, vii, 15 ; thanain, coluber, Exod., vii, 9, 10 ; draco ; 12. Il en est ainsi pour les verbes : gûʿ est rendu par consumi, Gen., vi, 17 ; vii, 21 ; xxxv, 29 ; Num., xvii, 12 ; par deficere, Gen., xxv, 8, 17 ; par obire, Gen., xlix, 32 ; par ad internecionem, Num., xvii, 23 ; par perire, i Num., xx, 3 ; Jos., xxii, 20 ; par occumbere, Num., xx, 30 ; ṭûr, employé douze fois, Num., xiii et xiv, est traduit considerare, explorare, inspicere, lustrare, circuire, contemplari. Azâh qui, au ch. xvi des Nombres, désigne ou bien l’assemblée d’Israël ou bien la troupe de Coré, est traduit : synagoga, multitudo, concilium, populus, frequentia populi, globus, congregatio, universus populus. Une prescription faite pour toujours l’est ritu perpetuo, jure perpetua, lege perpetua, religione perpetua, cultu sempiterno, legitimum, sempiternum erit, præceptum sempiternum. Pour éviter des synonymes, des mots sont supprimés ou sous-entendus ou remplacés par des pronoms. Exemples : Laban, frère de sa mère, Gen., xxix, 10, 11 ; et suburbana ejus, Jos., xxv, 13-16 ; I Par., vi, 67, 81. Voir encore Gen., viii, 21 ; xii, 8 ; xix, 29 ; xx, 17 ; xxvi, 3, 34 ; Jos., x, 12 ; III Reg., xii, 27. Quelquefois cependant le terme propre est conservé, malgré ses répétitions. Ainsi le verbe maḥah est rendu delere, Gen., vi, 7 ; vii, 4, 23 ; dans le récit de plaies d’Égypte, Exod., vii-x, ḥàzaq est traduit par indurare, sauf Exod., x, I, et kâbad par ingravare. Dans les passages poétiques, la répétition qui est volontaire dans l’original et qui produit un effet poétique, disparaît dans la traduction. Exemple : Jer., iv, 23-26. Cependant, saint Jérôme, dans Osée, II, 19, 20, a employé trois fois sponsabo pour garder l’image, explique-t-il dans son commentaire. Comment. in Ose., t. xxv, col. 840. D’autres répétitions, qui, dans la même strophe ou des strophes différentes, sont symétriques ou parallèles dans l’original, disparaissent dans la traduction. Voir Prov., ix, 3, 14, 4, 16. Voir A. Condamin, Les caractères de la traduction de la Bible par saint Jérôme, dans les Recherches de science religieuse, 1911, t. ii, p. 425-440. Cependant le souci de l’élégance cède parfois la place à celui de la clarté, et saint Jérôme, malgré ses goûts classiques, emploie des mots et des tournures populaires, qu’il estimait plus aptes à rendre le sens de l’original. Comment. in Ezech., xl, 5, t. xxv, col. 378. Ainsi il dit au masculin cubitus, cubiti, Ezech., xl, 7, 9, 12, 14, 15, 19, etc. De même, il a adopté les mots capitium, Job, xxx, 18 ; grossitudo, III Reg., vii, 26 ; capilellum, ibid., 41 ; clusor, IV Reg., xxiv, 14 ; odientes, II Reg., xxii, 11 ; sinceriter, Tob., iii, 5 ; uno pour uni au datif, Exod., xxvii, 14 ; Num., xxix, 14 ; numquid pour nonne, Gen., xviii, 23 ; adorare Domino, Deut., xxvi, 10 ; benedixit eum, Gen., xxviii, 1. Cf. Kaulen, op. cit., p. 181-182.

Du reste, quelques-unes de ces expressions ou de ces constructions populaires étaient conservées de l’ancienne version latine. Saint Jérôme, en effet, nous apprend qu’en traduisant l’hébreu il a adapté son texte à la traduction des Septante, quand elle ne s’éloignait pas trop de l’original. Comment. in Eccle., prol., t. xxiii, col. 1011, Les lecteurs latins étaient habitués aux formules anciennes, et on reprochait vivement à saint Jérôme de s’en écarter. Præfatio in Job, t. xxix, col. 61. C’est pour ne pas heurter de front cet attachement à l’ancienne version que le nouveau traducteur conserva des hébraïsmes, qui avaient passé des Septante en elle. Ainsi sermo est mis pour res, II Reg., xii, 21 ; verbum est de même employé souvent pour res ; cum consummasset comedere, Amos, vii, 2 ; et adjecit Dominus rursum vocare Samuelem, I Reg., iii, 6 ; addidit furor Domini irasci contra Israël, II Reg., xxiv, 1 ; juravit dicens : Si videbunt, Num., xxxii, 10 ; plorans ploravit, Lam., i, 2 ; in odorem suavitatis, Ezech., xx, 41, etc. Le traducteur latin imitait ainsi, parfois peut-être inconsciemment, l’ancienne traduction latine, et il employait les expressions du latin populaire. Il dépend aussi de la version grecque dans des passages difficiles, qu’il ne comprenait pas très bien et qu’il traduisait littéralement, si même il ne transcrivait pas les termes grecs eux-mêmes. Kaulen a recueilli un certain nombre d’exemples de cette nature. Geschichte der Vulgata, p. 138-139. C’est par fidélité à l’ancienne version, faite sur les Septante, que saint Jérôme adopte le sens messianique que le texte original ne comporte pas. Ainsi Is., xi, 10 ; xvi, 1 ; Hab., iii, 18 ; Jer., xi, 19 ; xxxi ; 22. L’idée messianique est accentuée ou développée en certains autres passages : Is., xii, 3 ; xlv, 8 ; li, 5, Jer., xxiii, 6 ; Dan., ix, 24-26..

Bref, malgré ses mérites de fidélité et d’élégance, la version de saint Jérôme, qui est la meilleure de toutes les versions anciennes de la Bible, n’est pas absolument parfaite. Un mot hébreu incompris a été simplement transcrit. II Reg., xvi, 18. On a relevé quelques contresens, rares il est vrai, par exemple, Gen., xiv, 5 ; xxvii, 39 ; Exod., ii, 21 ; Deut., xxix, 10. Kaulen, op. cit., p. 175-176, lui reproche encore la traduction étymologique des noms propres, Gen., ii, 8 ; Num., xxxiv, 7 ; I Reg., vii, 12, parfois différente, Gen., xii, 8 ; Deut., xi, 30 ; Jud., x, 1. Voir encore Is., v, 2 ; ix, 13 ; xiii, 22. Du reste, le mérite de la traduction varie selon les livres, parce que l’auteur y a mis plus ou moins de soin. Les livres historiques sont les mieux traduits : le sens en est exactement rendu et le style en -est coulant. La traduction de Job est aussi très bonne. Dans les petits prophètes, la couleur hébraïque est souvent gardée ainsi que dans les grands prophètes. Les livres de Salomon sont soignés et bien rendus, malgré le peu de temps que saint Jérôme mit à les traduire. Le texte hébreu des Psaumes est fidèlement traduit, mais les beautés poétiques du style ont souvent disparu. Les livres de Judith et de Tobie se ressentent delà hâte mise à leur traduction ; aussi ressemblent-ils beaucoup au texte de l’Itala. F. Kaulen, op. cit., p. 179-180. Voir t. ii, col. 1308-1309. Ce qui fait la supériorité de la version de saint Jérôme sur les autres traductions anciennes de la Bible, c’est qu’elle est une œuvre scientifique, le travail d’un lettré, tandis que les précédentes avaient plutôt les caractères d’oeuvres d’utilité pratique. Son auteur avait appris de son mieux une langue étrangère ; il s’était entouré de tous les secours qui étaient à sa disposition ; il combina heureusement les traditions juives et chrétiennes et, pour le style, il tint compte des exigences du bon goût.

Sur les caractères de sa traduction, voir W. Novvack, Die Bedeutung des Hieronymus fur die alttestamentliche Texlkritik, Gœttingue, 1875 ; G. Hoberg, De sancti Hieronymi ratione interpretandi, Fribourg-en-Brisgau, 1886.

Sur la langue et la grammaire de la Vulgate, voir J. Weitenauer, Lexicon biblicum, in quo explicantur Vulgatæ vocabula et phrases, 2e édit., Augsbourg, 1780 ; H. Rönsch, Itala und Vulgata, 2e édit., Marbourg, 1875 ; F. Kaulen, Handbuch zur Vulgata, Mayence, 1870 ; J.A. Hagen, Sprachliche Erörterungen zur Vulgata, Fribourg-en-Brisgau, 1863 ; J. B. Heiss, Beitrag zur Grammatik der Vulgata Formenlehre, Munich, 1864 ; V. Loch, Materialien zu einer latein. Grammatik der Vulgata, Bamberg, 1870 ; L. Hake, Sprachliche Bemerkungen zu dem Psalmentexte der Vulgata, Arnsberg, 1872 ; H. Gœlzer, Étude lexicographigue et grammaticale de la latinité de saint Jérôme, Paris, 1884 ; G. A. Salfeld, De Bibliorum Sacrorum Vulgatæ editionis græcitate, Quedlinbourg, 1891 ; A. Hartld, Sprachliche Eigenthümlichkeiten der Vulgata, Ried, 1894 ; W. M. C. Wibroy, The participa in the Vulgate New Testament, Baltimore, 1892 ; L. B. Andergassen, Ueber den Gebrauch des Infinitivs in der Vulgata, Bozen, 1891.

Conclusion. — De l’aveu unanime de tous les critiques modernes, l’œuvre de saint Jérôme est la meilleure des anciennes versions de l’Écriture. Cf. Brunati, Del nome, dell’autore, de’correctori e dell’ autorité della versione Volgata, dans Dissertazioni bibliche, Milan, 1838, p. 69-75 ; Glaire, Sainte Bible selon la Vulgate, 3 S édit., 1889, 1. 1, p. xi-xii. Son mérite propre provient des efforts consciencieux de l’auteur pour réaliser sérieusement son entreprise. Les traductions précédentes étaient ou bien des essais destinés à mettre les livres sacrés des Juifs et des chrétiens à la portée de nombreux fidèles qui ignoraient les langues originales, ou bien des versions de versions. Leurs auteurs ne se proposaient qu’un but d’utilité pratique et n’avaient pas l’intention de faire des œuvres scientifiques. En recourant directement aux textes originaux, soit pour corriger l’Itala du Nouveau Testament, soit pour faire connaître aux chrétiens la veritas hebraica, saint Jérôme visait plus haut que l’utilité pratique ; il voulait donner à l’Église un travail scientifique. Il a réussi, dans une bonne mesure, à atteindre ses fins. Sa version « combine très heureusement les recherches personnelles avec le respect de la tradition juive et chrétienne, tient compte des justes exigences du bon goût et remplit ainsi toutes les conditions nécessaires pour faire un travail excellent. » F. Vigouroux, Manuel biblique, 12e édit., Paris, 1906, t. i, p. 222.

Ainsi supplanta-t-elle peu à peu les autres versions latines et devint-elle la seule en usage dans l’Église latine, ainsi que nous le montrerons en racontant son histoire. Elle a fini par être approuvée solennellement par le concile de Trente, et elle continue à être employée dans la pratique quotidienne et la liturgie officielle de l’Église latine. Son texte a été étudié par les théologiens, expliqué et commenté par les exégètes, prêché aux fidèles, lu par tous les chrétiens tant en lui-même que dans les nombreuses traductions en langue vulgaire qui en dérivent. Il a donc servi pendant des siècles et il servira longtemps encore à l’édification de la foi, de la théologie et de la piété chrétienne dans la plus grande partie du monde chrétien. La Vulgate a donc exercé et elle exercera encore une influence, incomparable à aucune autre, parmi les fidèles de l’Église latine et romaine. C’est par excellence la version ecclésiastique de l’Écriture, l’instrument providentiel de la diffusion de la révélation divine au sein de l’humanité, et le véhicule de la pensée du Saint-Esprit à travers le monde entier.

III. Manuscrits. — Voir t. iv, col : 692, 695-698, et la liste supplémentaire de Gregory, Textkritik des N. T., Leipzig, 1909, t. iii, p. 1335-1343, qui arrive au total de 2472. Quelques-uns ont des articles spéciaux dans ce Dictionnaire : l’Amiatinus, t. i, col. 480-483 (avec fac-similé) ; le Bigotianus, ibid., col. 1794 ; le Bodleianus, ibid., col. 1825 ; le Cavensis, t. ii, col. 353 ; le Forojuliensis, ibid., col. 231 7-2318 ; le Fuldensis, ibid., col. 2413 ; le Gigas librorum, t. iii, col. 238-239 ; le Kenanensis, col. 1886-1887 ; le Legionensis I, II et III), t. iv, col. 159-160 ; le Lindisfarnensis, ibid., col. 267 ; le Paulinus, ibid., col. 2232 ; le Toletanus, i. v, col. 22642265 ; le Vindobonensis, col. 2437 ; l’Urbinas, col. 2358.

IV. Histoire. — Cette histoire n’est pas encore parfaitement tirée au clair pour toutes les époques, quoiqu’elle soit de jour en jour mieux connue. Ses premiers temps sont les moins explorés et nous ne pouvons les caractériser que par leurs traits généraux.

Au Ve et au VIe siècle. — La nouvelle version de saint Jérôme fut discutée du vivant même de son auteur, qui nous l’apprend lui-même en plusieurs de ses préfaces, notamment dans ses deux préfaces au livre de Job, t. xxviii, col. 1079 ; t. xxix, col. 61. Rufin, devenu son adversaire, le traita d’hérétique et de faussaire, dans ses Invectives. Cf. S. Jérôme, Apologia adversus libros Rufini, II, 24-35, t. xxiii, col. 447-456. Saint Augustin n’approuva pas d’abord le dessein de saint Jérôme de faire une version nouvelle sur l’hébreu et il conseillait au saint docteur de se borner à reviser l’ancienne traduction latine sur les Septante. Epist. lvi, cir, t. xxii, col. 566, 832-834. Saint Jérôme justifia son entreprise et exposa à l’évêque d’Hippone les raisons qui l’y avaient engagé. Epist. cv, exil, col. 834-837, 928-931. Vers la fin de sa vie toutefois, l’évêque d’Hippone, satisfait par les explications de saint Jérôme, Epist. cxvi, a. 34, t. xxii, col. 952, reconnut le mérite de l’œuvre du solitaire de Bethléhem et il la cita pour prouver l’éloquence des prophètes d’Israël. De doctrina christiana, iv, 15, t. xxxiv, col. 95. Quant au Nouveau Testament, saint Augustin suivait soit la revision de saint Jérôme, soit l’ancienne version. Nous en avons deux exemples curieux dans son traité De consensu evangelistarum, en 400, où il se sert des deux versions des Évangiles, et dans sa controverse avec le manichéen Félix, en 404 : il y cite Luc, xxiv, 36-49, d’après le texte revu et Actes, i, i-ii, 12, selon le texte africain. De actis cum Felice manichæo, 1. I, c. m-v, t. xlii, col. 520-522 ; Corpus de Vienne, 1892, t. xxv, fasc. 2, p. 802-807. On retrouve aussi des leçons africaines des mêmes chapitres des Actes dans Contra epistolam quam vocant Fundamenti, c. ix, t. xlii, col. 179-180 ; Corpus de Vienne, 1891, t. xxv, fasc. 1, p. 203-205 ; Ad catholicos epistola, de unitate Ecclesiæ, c. xi, n. 27, t. xlii, col. 409-410. Cf. F. C. Burkitt, The Old latinand the Itala, dans Texts and studies, Cambridge, 1896, t. lv, n. 3, p. 57-58, 68-78. Du vivant de saint Jérôme, Sophrone, patriarche de Constantinople, traduisit en grec la version latine des Psaumes et des Prophètes. De viris, 134, t. xxiii, col. 715. £n 398, un évêque d’Andalousie, nommé Lucinius, avait envoyé des scribes à Rome et à Bethléhem pour prendre copie de la Bible sous les yeux de saint’Jérôme ; ils rapportèrent un exemplaire presque complet, auquel il ne manquait que le Pentateuque. S. Jérôme, Epist. LXXI, ad Lucinium, 4, t. xxil, col. 671, cf. col. 683. Mais nous ne savons pas quel était le texte de cette Bible.

Malgré sa supériorité sur les anciennes versions latines, la traduction de saint Jérôme ne passa pas vite dans l’usage public et universel, tant était grand l’attachement aux vieux textes, et ce ne fut que progressivement qu’on en reconnut le mérite. Peu à peu on en vint à la préférer aux anciennes traductions. C’est en Gaule qu’elle se répandit d’abord insensiblement, sans qu’on puisse fixer la date de son introduction en ce pays. Cassien, Collat., xxiii, 8, t. xlix, col. 1259, l’appelle emendatior translatio. Prosper d’Aquitaine approuve l’œuvre de saint Jérôme à Bethléhem. Chronic. ann. 386, t. li, col. 586. Saint Eucher de Lyon en fait usage et cite une fois au moins le psautier hébraïque. Voir Libellus de formulis spiritualis intelligentiæ, édit. F. Pauly, Graz, 1884. Dom Chapman, Notes on the early history of the Vulgata Gospels, Oxford, 1908, p. 173-177. Saint Vincent de Lérins, saint Mamert, Fauste de Riez, Salvien se servent de la version de saint Jérôme. Dom Chapman, op. cit., p. 164-173. Saint Césaire d’Arles remplace les citations des Psaumes, faites par saint Augustin d’après l’ancien Psautier, par les leçons du Psautier romain. G. Morin, dans la Revue bénédictine, juillet 1899, p. 293. Le texte de ses sermons est si mal assuré qu’on ne pourra déterminer quel texte latin des Écritures il suivait que quand aura paru l’édition critique de ses œuvres que prépare dom Morin. Saint Avit de Vienne cite partiellement la version de l’Ancien Testament par saint Jérôme, ainsi que saint Grégoire de Tours, mais le texte est déjà un texte mêlé de leçons de l’ancienne version. Cf. Sam. Berger, Histoire de la Vulgate pendant les premiers siècles du moyen âge, Paris, 1893, p. 1-5 ; M. Bonnet, Le latin de Grégoire de Tours, Paris, 1890, p. 54. Les poètes latins du Ve siècle, Hilaire, Dracontius, Cl. Victor, saint Avit et l’auteur du De Sodoma se sont inspirés surtout de la Vulgate et les emprunts qu’ils ont faits à l’Italique sont assez rares. S. Gamber, Le livre de la Genèse dans la poésie latine au Ve siècle, 1899.

En Afrique, on garde les anciens textes. On croyait qu’il en avait été de même dans la Grande-Bretagne et que saint Patrice avait cité la vieille version. Dom Chapman, op. cit., p. 162-164, a montré que ce saint citait la Vulgate. Au commencement du Ve siècle, la version de saint Jérôme était citée dans les écrits du Breton Fastidius. À Rome, le pape saint Léon cite encore la vieille traduction des Évangiles. Sédulius Marius Mercator, Victor de Vite et le pape Vigile ont adopté la version de saint Jérôme. Dans ses Morales sur Job, saint Grégoire le Grand explique la nouvelle traduction, tout en recourant, à l’occasion, à l’ancienne et il déclare que le siège apostolique se sert de ces deux versions. Epist. miss., c. v, t. lxxv, col. 516. Ce pape cite aussi la Vulgate dans ses Homélies sur les Évangiles et ses leçons ont exercé une grande influence sur les manuscrits de la Vulgate. Dom Chapman, op. cit., p. 203-210. Au sud de l’Italie, Cassiodore possédait dans son monastère de Vivarium un manuscrit de l’ancienne version latine, et un autre de la traduction de saint Jérôme, Dans son commentaire du Psautier, il interprète le Psautier romain. Soucieux d’offrir à ses moines un texte pur, il fit transcrire la version hiéronymienne en neuf manuscrits, et pour faciliter la lecture, il avait divisé le texte en cola et en commata. Instit. div., c. XII, t. LXX, col. 1124. Il a apporté un soin spécial à l’édition du Psautier, des Prophètes et des Épîtres apostoliques ; malgré son grand âge, il a lu lui-même les neuf codices en entier, en les collationnant avec d’anciens manuscrits que ses amis lisaient en sa présence. Ibid., præf., col. 1109. En tête de chacun des livres, il avait mis des sommaires analytiques, réunis à part dans son Liber titulorum. Il conseille à ses moines de recopier attentivement son texte et d’éviter les fautes de transcription. Il donne les règles à suivre pour corriger les fautes des copistes, ibid., c. xiv, xv, col. 1126-1131, et il annonce qu’il publiera un traité De orthographia, reproduit par Migne, ibid., col. 12391270. Cf. Institue, xxx, col. 1144-1146. On ignore quelle influence a exercée sur la transmission du texte hiéronymien l’édition de Cassiodore. Voir t. ii, col. 338-340. Si VAmialinus reproduit un prologue cassiodorien, le texte biblique de ce manuscrit n’est pas, selon le sentiment commun des critiques, celui de Cassiodore. Voir t. i, col. 482. Voir plus loin le sentiment de dom Chapman.

Deux cents ans environ après la mort de saint Jérôme, sa version était reçue universellement dans l’Église latine, au témoignage de saint Isidore de Séville. De officiis ecclesiasticis, I, xii, 8, t. lxxxiii, col. 748. Aussi, un siècle plus tard, Bède l’appelle-t-il simplement « notre édition » et ne connaît-il plus l’édition précédente que sous le nom d’antiqua translatio. Hexæmeron, 1. I ; Super parabolas Salomonis allegorica expositio, 1. II, t. xci, col. 52, 57, 1010. Cependant, des parties des anciennes versions latines furent encore recopiées jusqu’au XIIIe siècle, et parfois au milieu des manuscrits du texte hiéronymien. Voir t. lv, col. 693-694. La nouvelle œuvre avait donc mis du temps à prédominer et à supplanter les anciens textes. Son triomphe toutefois n’était pas complet, car, durant les deux siècles qui l’avaient précédé, le texte de saint Jérôme ne s’était pas transmis pur de tout alliage. Les leçons des versions antérieures, que le saint docteur avait voulu éliminer, en revisant les anciens textes ou en donnant aux latins la vérité hébraïque, étaient rentrées dans son propre travail. Écrites d’abord aux marges des manuscrits du nouveau texte par des lecteurs qui avaient constaté leur disparition, elles étaient réintroduites dans le texte même par de nouveaux copistes. Elles’sont nombreuses surtout dans les livres de Samuel, voir col. 1144, et dans les Proverbes, voir col. 794. Les écrivains gaulois du ve et du VIe siècle, qui se servaient simultanément des deux versions, avaient déjà en mains des textes mêlés, et leurs citations de saint Jérôme étaient contaminées par des leçons « européennes » ou « italiennes ». La version hiéronymienne aurait donc eu dès lors besoin d’être corrigée et ramenée à sa pureté première. Mais personne ne semble l’avoir remarqué à cette époque, et il faudra attendre jusqu’au viiie siècle pour que ce travail de revision fût entrepris.

Nous ne pouvons, en effet, nous rallier à l’hypothèse, plusieurs fois émise, sans succès du reste, par M. A. Dufourcq, d’une correction ou expurgation des textes bibliques, du Nouveau Testament surtout, faite par les catholiques en Italie ou en Gaule, d’une façon plus précise, à Lérins, à Vivarium et à Rome, au Ve ou vie siècle, à rencontre des néo-manichéens de l’époque qui avaient altéré les textes sacrés. De manichæismo apud Latinos quinto sextoque sæculo alque de latinis apocryphis libris (thèse), Paris, 1900, p. 71-79 ; Étude sur les Gesta martyrum romains, Paris, 1910, t, IV, p. 240-260 ; Histoire de l’Église du IIIe au XIe siècle. Le christianisme et les barbares, 3e édit., Paris, 1911, t. v, de L’avenir du christianisme, p. 88. Cf. E. Mangenot, Une recension de la Vulgate en Italie au Ve ou VIe siècle (extrait de la Revue du clergé français, du 1er décembre 1901), Paris, 1901. Les indices que M. Dufourcq fournit de cette revision, à savoir, le prologue Primum quæritur, de l’Épître aux Romains, le prologue Non idem est ordo, placé en tête des Épitres catholiques, la préface Tres libros Salomonis, qui précède le livre des Proverbes, l’édition de Cassiodore et le décret pseudo-damasien De libris recipiendis, prouvent bien que les catholiques ont discuté avec les priscillianistes et les néo-manichéens de cette époque sur le terrain biblique, qu’ils ont tenu, comme Cassiodore, à joindre des préfaces aux livres bibliques, que quelques-unes d’elles ont été fabriquées et placées sous l’autorité de saint Jérôme. Ces documents peuvent prouver encore que l’ordre des Livres Saints a été modifié diversement dans les manuscrits copiés alors ; mais ils ne gardent pas la moindre trace, sinon au sujet du fameux verset des trois témoins célestes (ce qui est un cas tout particulier), d’une recension de la version hiéronymienne, entreprise en vue de faire disparaître les falsifications manichéennes du texte sacré. Les manuscrits altérés par les manichéens ont été brûlés par ordre de saint Léon le Grand et personne parmi les catholiques n’a eu besoin de les corriger. En tout cas, s’il y a eu à cette époque une véritable recension du texte, il n’y a aucun indice qu’elle a exercé une influence réelle sur le texte de la Vulgate latine. C’est par un autre moyen, par l’étude des manuscrits du VIIe et du VIIIe siècle, que nous pouvons nous faire quelque idée - de l’état du texte de la Vulgate au vie siècle.

Les manuscrits latins du texte qui avait cours avant le milieu du VIIIe siècle. — Samuel Berger, op. cit., p. 8-111, en a distingué deux catégories très homogènes, ayant chacune leur couleur propre et locale, les Bibles espagnoles et irlandaises, qui ont envahi la France à l’époque mérovingienne et lui ont fourni des textes mêlés et sans caractère propre. D’autres textes ont existé à Saint-Gall et au nord de l’Italie.

1. Les Bibles espagnoles. — Elles nous ont conservé le texte entier de l’Écriture. Dès leur première apparition, elles se présentent avec un caractère absolument à part et une originalité exclusive. Elles constituent une recension unique par ses sommaires, par les nombreuses leçons de l’ancienne Vulgate qu’elles contiennent, notamment quelques-unes du texte « italien » qu’on a retrouvées dans les œuvres de l’évêque d’Avila, Priscillien, et par ses interpolations propres. Vercellone avait établi que leur texte est celui du bréviaire et du missel mozarabes, ce qui suffit à déterminer leur patrie. Cette recension est reproduite avec assez peu de variantes dans tous les manuscrits visigoths de la Bible. On la reconnaît dans les débris de la plus ancienne Bible espagnole (palimpseste de la cathédrale de Léon, dont le texte biblique est du viie siècle environ), et dans les beaux manuscrits espagnols de l’occupation arabe, dont le Toletanus, du vme siècle, est le type. Le Cavensis (VIIIe-IXe siècle) est aussi un texte visîgoth pur. L’éditeur de cette recension est l’écrivain qui s’est caché sous le nom de Peregrinus et qui avait corrigé les canons de Priscillien sur saint Paul. S. Berger avait cru reconnaître sous ce pseudonyme le moine espagnol Bachiarius, qui avait pris le surnom de peregrinus, t. xx, col. 1024. Mais Bachiarius est resté simple moine et n’a jamais été évêque ; il ne peut donc pas être l’éditeur de la recension espagnole. Wordsworth et White, Novum Testamentum D. N. J. C. latine, Oxford, 1898, t. i, fasc. 5, p. 708.

Les autres Bibles espagnoles, tout en reproduisant foncièrement cette recension, forment deux groupes, qui paraissent dériver l’un et l’autre du texte du Toletanus. Le groupe le plus nombreux, qui est aussi bien délimité géographiquement que constant dans son texte, très rapproché de celui du Toletanus, se concentre dans le royaume de Léon et étend son influence sur la haute vallée de l’Èbre. On peut le nommer « léonais ». Il est représenté par la deuxième bible de Ximénès (n.32 de l’université de Madrid), rxe-xe siècle, la Bible de San-Millan, xe, celle de la cathédrale de Léon, datée de 920, le Codex gothicus Legionensis (collégiale de San-Isidro), de 960, le manuscrit 3, 2 de la cathédrale de Tolède, XIe, le manuscrit A, 2 de la Bibliothèque nationale de Madrid, xie, la Bible du Museo arqueologico de Madrid, xiie, la troisième Bible d’Alcala (n. 33 et 34 de l’université de Madrid), xiie-xiiie, le manuscrit de San Isidro de Léon (n. 1-3), copie du Legionensis, prise en 1162. Le second groupe, dit « castillan », comprend deux manuscrits espagnols, la première bible d’Àlcala (n. 31 de l’université de Madrid), IXe siècle, et celle du maréchal de Noailles (Bibliothèque nationale de Paris, latin 6), Xe, qui diffèrent beaucoup des manuscrits visigoths et sont remplis du souvenir de saint Isidore de Séville. Cette recension a été établie au IXe siècle en Castille et au Xe en Catalogne. "Voir encore dom Andrés, El codex visigotico de la Bibla de San Pedro de Cardena (xe siècle), dans Boletin de la Real Academia de la Historia, 1912, t. ix, p. 101.

2. Les Bibles irlandaises et anglo-saxonnes. — L’usage de la version de saint Jérôme en Grande-Bretagne et en Irlande n’est guère attesté avant le viiie siècle que par les citations bibliques des écrivains irlandais ou bretons. M. Haddan, dans Haddan et Stubbs, Councils and eccl. documents relat. to Gr. Britain and Ireland, Oxford, 1869, t. i, p. 192, l’a constaté dans les œuvres de saint Gildas, au vie siècle, et il a conclu que le texte cité ressemblait à celui du Codex Amiatinus, sans lui être pourtant identique. Aux viie et viiie siècles, la nouvelle version a pénétré en Écosse et en Irlande et se retrouve dans les écrits de Cummian et d’Adaman et dans les documents du droit canon irlandais. L’ancien texte biblique, qui était usité en Irlande et dont on rencontre des traces dans les citations irlandaises de la Vulgate hiéronymienne, était un texte « européen », dont nous avons un témoin excellent dans le Codex Usserianus, pour les Évangiles. Les manuscrits irlandais et anglo-saxons de la Vulgate sont très nombreux, mais, sauf de rares exceptions, ils ne « ont pas beaucoup plus anciens que le viiie siècle et dis ne reproduisent pas une Bible complète. Ils sont étroitement groupés entre eux et leur témoignage est unanime. Leur texte est formé de la fusion des manuscrits romains, apportés par les apôtres de la Grande-Bretagne, et des manuscrits irlandais antérieurs. Cette fusion a commencé dans le Kent et les manuscrits qui portent le nom de saint Augustin de Cantorbéry (deux Évangiles du VIIe siècle : n. 286 à Corpus Christi Collège de Cantorbéry et Bodley 857, et un Psautier du xve siècle, ms. Cotton. Vespar. A. 1), ont déjà un texte un peu mêlé, ayant la saveur du terroir irlandais. Dom Chapman a soutenu toutefois que les manuscrits de saint Augustin de Cantorbéry n’avaient pas de leçons irlandaises et étaient des textes romains purs. Notes on the early history of the Vulgate Gospels, Oxford, 1908, p. 181-202. Il a rapproché leur texte des Évangiles des citations des Homélies de saint Grégoire le Grand, p. 210-216. Les meilleurs manuscrits du type irlandais proviennent de Murcie ou de Northumbrie : ils reproduisent la version hiéronymienne avec les interpolations irlandaises caractéristiques. L’introduction de ce texte en Angleterre est due à Théodore de Tarse, archevêque de Cantorbéry (668-690), et à Wilfrid, évêque d’York (667-709). Les abbés de Wearmouth et de Jarrow dans le Northumberland, Benoît Biscop et Ceolfrid, rapportent de Rome, à chacun de leurs pèlerinages, des copies de la Vulgate, desquelles dérivent les manuscrits northumbriens. Le meilleur est le célèbre Codex Amiatinus, écrit en 716. Voir t. i, col. 480-483. Le texte des Évangiles a dû être copié -sur le manuscrit napolitain du moine Adrien. Voir dom Morin, La liturgie de Naples au temps de S. Grégoire, dans la Revue bénédictine, 1891, t. viii, p. 481-483. Le fragment d’Utrecht et le fragment de Durham (A. ii, 17) sont deux frères et peut-être deux frères jumeaux de l’Amiatinus. Il faut rapprocher du même codex le Stonyhurst St. John et le manuscrit de Durham (A. ii, 16), écrit de la main de saint Bède. Le plus beau de tous les manuscrits northumbriens est le Lindisfarnensis, Book of Lindisfarne, au British Muséum (Nero D. IV). Il est signé d’Ædfrith, qui occupa le siège de l’île sainte (698-721) et il reproduit un calendrier liturgique de l’Église de Naples. Voir dom Morin, loc. cit. ; dom Chapman, op. cit., p. 43-77. D’autres manuscrits en grand nombre reproduisent le texte irlandais, mais plus mêlé de leçons étrangères. S. Berger a étudié surtout les manuscrits de Dublin : le Codex Durmachensis, Book of Durrow (Trinity Collège, A. 4, 5), le Codex Kenanensis, Book of Kells (Trinity Collège, A. l, 6), e deuxième manuscrit d’Ussher (Trinity Collège, A. 4, 6), le Stowe St. John (bibliothèque de Royal Irish Academy) et il se borne à citer 23 autres manuscrits irlandais. Op. cit., p. 43-44. Il avait parlé auparavant, p. 31-34, du Book of Armagh et du Book of Mulling, les deux plus importants manuscrits nationaux de l’Irlande, qui sont du IXe siècle seulement, et qui reproduisent des textes de transition entre les anciens textes irlandais et le texte northumbrien proprement dit.

Les Irlandais ont transporté leur texte biblique en dehors des Iles britanniques. La Neustrie, l’Austrasie, l’Alémanie, la Rhétie et l’Italie ont connu des manuscrits du type irlandais. La première de ces contrées nous offre d’abord trois manuscrits de Tours, aujourd’hui dispersés : le manuscrit de Saint-Gatien (Bibliothèque nationale de Paris, nouvelles acquisitions, 1587), du viiie siècle, que J. M. Heer vient d’éditer, Evangelium Gatianum, Fribourg-en-Brisgau, 1910 ; le manuscrit de Marmoutiers (British Muséum, Egerton 609), du IXe ; le n. 22 de la bibliothèque publique de Tours, aussi du IXe. Deux autres manuscrits s’en rapprochent par la géographie et le texte : le n » 13 169 de la Bibliothèque nationale de Paris, du Xe siècle, et le n° 20 de la bibliothèque d’Angers. Il faut mettre à côté d’eux le manuscrit dit d’Æthelstan (British Museum, I.A.XV111), du ixe-xe siècle, dont l’origine est inconnue, et enfin le Codex Bigotianus (Bibliothèque nationale de Paris, lat. 281 et 298), du viiie siècle, en écriture onciale. Tous ces manuscrits ne contiennent que les Évangiles. Les Épîtres et l’Apocalypse sont reproduites dans un manuscrit (Harléien, 1772), du viiie-ixe siècle, dont l’ornementation est irlandaise, sinon le texte lui-même. Pour l’Ancien Testament, il n’y a à signaler sur le continent que le Psautier double de Saint-Ouen (bibliothèque de Rouen, 24), du Xe siècle, et le manuscrit des prophètes (Bibliothèque nationale, 9382), du IXe. En Austrasie, il y avait à l’abbaye de Saint-Arnoul de Metz un manuscrit anglo-saxon des Évangiles, qui est du VIIIe siècle et qui appartient aujourd’hui à la bibliothèque princière d’Œttingen-Wallerstein. L’abbaye d’Echternach possédait un autre manuscrit des Évangiles, écrit en une belle semi-onciale saxonne du viiie siècle. Il est maintenant à la Bibliothèque nationale de Paris, 9389. Son texte est nettement irlandais. Une note de première main, copiée sur quelque vieil exemplaire, porte la date 558 et déclare que le texte a été corrigé, au temps de Cassiodore, avant d’être transcrit, sur le manuscrit d’Eugippius, l’auteur de la vie de saint Séverin et l’abréviateur de saint Augustin. Cette note rattache le texte irlandais à un manuscrit napolitain du VIe siècle. Des manuscrits de Wurzbourg, le manuscrit dit de saint Kilian (M p. th. g. i a) ne semble avoir rien d’irlandais, mais trois autres proviennent véritablement des Iles britanniques : pour les Évangiles, le ms. Mp. th. f. 61, écrit au viiie siècle, et pour saint Paul, les deux mss. Mp. th. f. 12, du IXe, et Mp. th. f. 69, qu’on dit être du viiie. Le Laudianus latin 102 de la Bodléienne vient de Wurzbourg et il est écrit en une minuscule saxonne qui paraît être du début du Xe siècle. Il contient les Évangiles et son texte, qui est composite, a des leçons irlandaises. En Alémanie, nous trouvons le ms. 10 de Saint-Gall, écrit au Xe siècle par l’irlandais Fælan, le ms. 51 des Évangiles, qui paraît être du viiie siècle, et le n° 60 de la-bibliothèque conventuelle, du viiie-ixe siècle, qui ne contient que le quatrième Évangile. Des manuscrits de Reichenau, on conserve à Karlsruhe, à la bibliothèque du grand-duc, l’Augiensis 211, qui semble être de la fin du IXe siècle et dont le texte a des leçons irlandaises caractéristiques. La Suisse possède beaucoup de manuscrits irlandais : à la bibliothèque de l’université de Berne, le n° 671 est un joli petit manuscrit des Évangiles, écrit entre le ixe et le xie siècle ; à Genève, un manuscrit des Évangiles, n° 6, écrit entre le viiie et le ixe siècle. De la Rhétie provient le Livre des confraternités de l’abbaye de Pfäffers, du commencement du ixe siècle, conservé aujourd’hui aux archives conventuelles de Saint-Gall ; il contient des extraits des Évangiles, dont le texte est absolument irlandais. Enfin, un manuscrit de Bobbio (1. 61 superior de la bibliothèque ambrosienne de Milan), d’une écriture semi-onciale irlandaise du viiie siècle, présente des leçons et des corrections irlandaises. Tous les textes irlandais avaient été exécutés sur le continent par des moines irlandais.

L’étude des manuscrits irlandais de la Bible nous a déjà fourni trois indices de rapports entre le texte irlandais et le sud de l’Italie. Avec l’Amiatinus est venue à Jarrow la copie d’un prologue de Cassiodore ; Lindisfarne a reçu un livre d’Évangiles venant de Naples ; un manuscrit anglo-saxon, écrit probablement à York, reproduit un texte corrigé sur l’original d’Eugippius. Ces renseignements ont amené dom Chapman à rattacher le texte northumbrien des Évangiles de la Vulgate au sud de l’Italie par Cassiodore et Eugippius. Selon lui, l’Amiatinus est en relation étroite avec Cassiodore, non seulement par le prologue du feuillet pourpré, mais encore par son texte, qui est cassiodorien. L’archétype de ce manuscrit avait en marge des leçons liturgiques de l’Église de Naples. Le manuscrit d’Echternach nous ramène à Cassiodore et à Eugippius. La note qu’il reproduit vient d’un ancêtre northumbrien. Or, on peut supposer qu’elle est de la main même de Cassiodore. La correction du texte vient donc de Lucullanum, où furent écrites aussi les notes liturgiques du Lindisfarnensis. Or, d’Eugippius à saint Jérôme il n’y a pas loin, et son manuscrit a pu être un manuscrit de saint Jérôme lui-même, provenant de la bibliothèque de la gens Anicia. En 382, cette famille comptait une femme, nommée Proba, qui était l’amie de saint Jérôme, et un siècle plus tard, une autre Proba, qui était l’amie d’Eugippius. Notes on the early history of the Vulgate Gospels, p. 1-44. Les rapports de la correction du texte par Cassiodore sur le manuscrit d’Eugippius ayant été discutés par J. M. Heer, Evangelium gatianum, p. xliii-xlviii, dom Chapman a répondu en maintenant son interprétation. Cassiodorus and the Echternach Gospels, dans la Revue bénédictine, 1911, p. 283-295. L’hypothèse du docte bénédictin anglais est très ingénieuse.

Quant au texte irlandais, représenté surtout par le Book of Armagh, il proviendrait de Lérins, et il aurait été apporté en Irlande par saint Patrice. Les citations bibliques de Vincent de Lérins, de Fauste de Riez et de saint Eucher de Lyon représenteraient un texte de la Vulgate, apparenté au texte irlandais, . Notes, etc., p. 177-180. Les ressemblances ne sont pas très frappantes, et l’origine lérinienne du texte irlandais est loin d’être prouvée.

3. Les Bibles françaises. — Elles ne représentent pas une recension particulière, faite sur le territoire franc, mais des textes étrangers, naturalisés français. Ce sont des textes de pénétration et des rejetons des Bibles espagnoles ou irlandaises. Les premières sont venues de la Septimanie et par la vallée du Rhône ont monté jusqu’à la Loire ; les secondes ont passé la Manche et se sont arrêtées aux bords de la Loire ; puis les deux courants se sont réunis et confondus au cœur du pays.

a) Des Pyrénées à la Loire. — Les Bibles espagnoles ont pénétré en France de la côte orientale de l’Espagne par la vallée du Rhône. Aussi en trouvons-nous d’abord à Lyon et à Vienne en Dauphiné. Le manuscrit de Lyon, n° 356, du ixe siècle, représente un texte espagnol analogue à celui du Complutensis. Un autre, qui provient de Vienne et qui se trouve à la bibliothèque de l’université de Berne, A, 9, est du xie siècle, mais il reproduit un texte ancien, dérivé en plusieurs parties des Bibles espagnoles. Le manuscrit 15 de Saint-Germain (Bibliothèque nationale de Paris, 1153), du ixe siècle, a de première main un très bon texte espagnol, corrigé de seconde main sur un mauvais texte du même pays. Ce texte a donc passé d’Espagne par la Catalogne et le Languedoc et il a été transcrit peut-être dans les environs de Lyon. Aux textes visigoths se rattache le texte languedocien, qui remonte à cette époque, quoique nous n’en ayons plus de témoins anciens, et qui a été usité en Languedoc, durant tout le moyen âge. Ses leçons caractéristiques ont passé dans les versions provençales, voir col. 774-776 (et par elles, en partie, dans les versions vaudoises, voir col. 2381), et dans la Bible allemande de Tepl. Catalan d’origine, il se distingue des textes espagnols par ses nombreuses interpolations, venues des anciennes versions latines, et par des doublets ; il est le résultat d’une compilation. Ses principaux témoins sont, comme textes méridionaux : le Codex Aniciensis des bénédictins (Bibliothèque nationale de Paris, 4 et 4 2), écrit entre le ixe et le xe siècle ; la Bible de Mazarin (B. N., 7), du xie ; le Codex Colbertinus (B. N., 254), de la seconde moitié du xiie ; la grande Bible de la bibliothèque harléienne (4772, 4773), du commencement du xiiie ; le ms. 321 de la Bibliothèque nationale, de la même date. Les témoins proprement languedociens sont tous du xiiie siècle et ne contiennent presque tous que le Nouveau Testament, à savoir, les ms. 342, 343 et 341 de la Bibliothèque nationale, les deux Bibles du même dépôt, 11932 et 16262, le Codex Demidovianus ; enfin, du XVe siècle, le Nouveau Testament, conservé au château de Wernigerode, en Bohême, et provenant de Saint-André d’Avignon. Le texte espagnol de la Bible a passé ensuite dans le Limousin et la Touraine et on le retrouve dans les manuscrits de Saint-Martial de Limoges : Bibles (B. N., 5 et 5^1, du ixe siècle ; 8 et 8², du xie, copie de la précédente), le Codex Lemovicensis des Épîtres catholiques (B. N., 2328), du viii-ixe siècle, et le ms. (B. N., 315), contenant les mêmes Épîtres, les Actes et l’Apocalypse, du xiie-xiiie ; dans ceux de Tours : B. N., 112 et 113, Au xe, et dans ceux de Fleury-sur-Loire : le ms. 16 de la bibliothèque d’Orléans, formé des débris de cinq manuscrits, peut-être le ms. 9 de la reine Christine de Suède contenant les Épîtres de saint Paul, du viie-viiie siècle, et le ms. 18 de la bibliothèque de Tours, du xie siècle, reproduisant le livre de Job.

b) Les Bibles du nord de la France. — Leur texte est un mélange de leçons espagnoles et de leçons irlandaises. Le manuscrit de la cathédrale de Chartres (B. N., 10439), du viiie siècle, ’qui, pour les six premiers chapitres de l’Évangile de saint Jean, reproduit une version ancienne, européenne ou italienne, représente, à partir du c. viie, une Vulgate assez bonne. Le ms. 3 du grand séminaire d’Autun est le manuscrit type du viiie siècle : son texte est la Vulgate, mêlée de beaucoup de leçons irlandaises ou espagnoles. La même fusion existe dans une famille de textes, échelonnés entre le viie et le ixe siècle et auxquels l’Église de Paris paraît avoir servi de centre : ms. de Notre-Dame (B. N., 17226), ms. de Colbert, venant de Saint-Denis (B. N., 256), ms. de Saint-Victor (B. N., 14407)Le ms. du British Museum (addition. 5463), du commencement du ixe siècle, a un texte fort rapproché de celui du groupe parisien, sans lui être identique. Une autre famille de manuscrits des Évangiles (B. N., 9886, 264, 268), du ixe et du xe siècle, dont le texte est apparenté à une bible provenant de Saint-Germain (B. N., 11505), contient des interpolations irlandaises et des particularités anglo-saxonnes. Une main récente a introduit des leçons irlandaises dans un manuscrit de Richelieu (B. N., 46273), qui paraît être du Xe siècle. Les Bibles de Saint-Riquier (B. N., 11504 et 11505), et le Codex regius (B. N., latin 45 et 93), qui ont été copiés et corrigés sur le même modèle, sont apparentés au texte catalan, étroitement uni au texte languedocien, mais ils ont aussi une relation étroite avec celui des manuscrits français (B. N., 303 et 305), du xie siècle. Le pagus de la Moselle se servit d’un texte plus mélangé encore que celui de Paris, ainsi qu’en témoigne la demi-Bible qui porte le n° 7 à la bibliothèque de Metz et qui est du commencement du ixe siècle. À Corbie, entre la fin du viiie siècle et le commencement du ixe, la Vulgate présentait un texte mêlé de leçons anciennes, témoin la Bible de Mordramne du viiie siècle, qui est à la bibliothèque d’Amiens en quatre volumes, n° 5 6, 7, 11 et 12. Plusieurs autres manuscrits plus récents : Psautier (Amiens, n » 18), les quatre livres d’Esdras (Amiens, n° 10), les Actes, les Épîtres catholiques et l’Apocalypse (B. N., 13174), la Bible en deux volumes (B. N., 11533 et 11533), ont un texte mêlé, dont les leçons espagnoles sont adventices. Le ms. 1190 de la bibliothèque impériale de Vienne a été copié au commencement du ixe siècle, à Saint-Vaast d’Arras ; il reproduit la recension française d’origine espagnole.

4. Les Bibles de Saint-Gall et de l’Italie du nord. — a) Saint-Gall. — Outre les textes irlandais, qui ont pénétré à Saint-Gall et dont il a déjà été parlé voir plus haut, outre les manuscrits bilingues, monuments de calligraphie et de luxe, transcrits à Saint-Gall par des mains irlandaises (le Sangallensis, n° 48, le Bœrnerianus, voir t. i, col. 1826, l’Augiensis, col. 1233-1234, et les psautiers bilingues Saint-Gall n°17 ; bibliothèque de Bâle, A. VII, 3, etc.), la célèbre abbaye a connu un texte biblique, ayant un caractère propre et formant une tradition strictement locale. Les documents qui le contiennent sont l’œuvre des savants calligraphies du VIIIe et du IXe siècle, Winitharius et Hartmut, et de leur école. Le ms. 70, contenant les Épîtres de saint Paul, est signé par Winitharius. L’identité d’écriture permet de lui attribuer les manuscrits 2 (Actes et Apocalypse) et 907 (Épîtres catholiques et Apocalypse). Quelques extraits de la Vulgate des divers livres de la Bible se trouvent dans le ms. 11. Le texte est assez mauvais et quelques-unes de ses leçons sont apparentées aux leçons espagnoles ou languedociennes. D’autres manuscrits de la même époque, 1398a- et 282 (fragments du Ier livre des Rois), 43 et 44 (Ézéchiel, petits prophètes et Daniel), 28 (livres sapientiaux), 6 (Chroniques, Esdras et Néhémie, Tobie, Judith et Esther), 14 (Job) et 12 (Machabées), sont à la base du texte traditionnel de Saint-Gall, établi par Hartmut. Ce calligraphe, qui fut abbé de Saint-Gall (872-883), avait copié lui-même ou fait copier neuf manuscrits bibliques pour son monastère et une bible complète en neuf volumes pour son propre usage. De ces 18 volumes, S. Berger en a reconnu une dizaine en 13 codices, conservés jusqu’aujourd’hui : 19 (Psautier hébraïque), 7 (livres sapientiaux et Chroniques), 81 (livres sapientiaux, Job et Tobie), 46 (Ézéchiel, petits prophètes et Daniel), 45 (Ézéchiel, Daniel, petits prophètes) à Saint-Gall, British Museum, addit. 11851 (Nouveau Testament sans les Évangiles), 77, 78, 82, 79, 83, 75 de Saint-Gall, qui semblent avoir fait partie d’une Bible complète.

Mais Hartmut était plutôt un éditeur qu’un copiste : il corrigeait de sa main les livres qu’il n’avait pas copiés. Son texte biblique était le texte, précédemment copié à Saint-Gall, mais retouché, un texte mêlé par conséquent, d’origine méridionale, qui, dans la grande Bible, n° 75 s’est croisé avec le texte de Tours. La transcription des textes bibliques a persévéré à Saint-Gall. Notker Balbulus fait transcrire III Esd., iii et iv, dans le ms. 14, et ajouter Baruch à la fin du ms. 39. Salomon III a établi, en 909, une édition du Psalterium quadruplex (bibliothèque royale’de Bamberg, A. 1. 14).

b) Reichenau et Einsiedeln. — Ces deux abbayes furent tributaires de Saint-Gall pour le texte de la Bible. La Glose ordinaire, attribuée à Walafrid Strabon, abbé de Reichenau en 842, est faite sur le texte biblique de Saint-Gall, et elle a fourni des leçons au texte parisien du xiiie siècle. Le ms. 1 d’Einsiedeln a été copié, au commencement du xe siècle, sur un manuscrit de Saint-Gall et aussitôt après corrigé sur un autre. Un autre ms., 5-7, de la même époque, présente les mêmes caractères. Un des modèles est le n° 17 de Saint-Gall, contenant les Évangiles.

c) Bobbio et Milan. — Les leçons espagnoles qu’on remarque dans les bibles de Saint-Gall viennent probablement de la province ecclésiastique de Milan, qui avait été elle-même en relation, pour son texte biblique, avec le midi de la France et la côte orientale de l’Espagne. En effet, de Bobbio provient le ms. E. 26 inferior de la bibliothèque ambrosienne de Milan ; il est du ix-xe siècle et contient la moitié d’une bible, commençant aux Chroniques et finissant aux Épîtres de saint Paul. Son texte, qui est étrangement mêlé et qui est local, ressemble en divers livres aux manuscrits espagnols ou catalans. Les archives de la collégiale de Monza, n° 1 ²9, conservent les débris d’un manuscrit, d’une écriture lombarde du Xe siècle. Il semble être la copie d’un manuscrit assez ancien et son texte des Épîtres de saint Paul ressemble à celui du codex de Bobbio. Le texte milanais s’est conservé dans un bon nombre de manuscrits italiens du xe siècle, qui représentent une véritable édition et dont le texte était en usage au xve siècle dans l’Église de Milan, comme l’a démontré le P. Vercellone. On la trouve dans la Bible d’Avellana et dans les manuscrits apparentés, groupés par le savant barnabite. Voir Variæ lectiones Vulgatæ latinæ Bibliorum, Rome, 1860, t. i, p. lxxxvii, xci. C’est le texte qu’employait saint Pierre Damien († 1072) et qu’il avait fait copier pour ses moines d’Avellana, ainsi qu’il le rapporte dans son Opusculum, XIV De ordine eremitarum et facultatibus eremi, fontis Avellani, Pat. lat., t. cxlv, col. 334. Cf. Analecta juris pontificii, 28e livraison, p. 1016. S. Berger a joint à cette liste cinq manuscrits italiens et deux manuscrits, copiés au xiiie siècle en Espagne, qui reproduisent ce texte italien.

Les manuscrits de l’époque carolingienne. — L’unité, qui manquait dans les anciens manuscrits de la Vulgate copiés jusqu’au milieu du ixe siècle et plus tard encore dans les lieux reculés, apparaît dans une nouvelle série de codices, qui forment des groupes compacts et se rattachent aux noms de personnages connus dans l’histoire. Elle fut provoquée par Charlemagne, qui voulut pour son royaume un texte de la Bible, correct au point de vue de la langue, conforme aux règles de la grammaire et de la ponctuation et aussi pur de toute altération. Si le puissant monarque n’y a pas mis lui-même la main, comme on pouvait le conclure de son capitulaire, qui sert d’introduction à l’Homiliaire de Paul Diacre, t. xcv, col. 1159-1160, et de l’affirmation de son biographe, Thégan, t. cvi, col. 409, c’est au moins par son ordre et avec ses encouragements que les clercs de sa cour et de son royaume s’efforcèrent d’établir un bon texte biblique. Voir ses Capitulaires, dans Pertz, Monumenta Germaniæ. Leges, t. i, p. 44, 65. Deux hommes, Théodulfe, évêque d’Orléans, et Alcuin, abbé de Saint-Martin de Tours, ont cherché à réaliser les volontés de Charlemagne, mais ils ont suivi des règles différentes et abouti à des résultats divergents.

1. Bibles de Théodulfe. — Léopold Delisle a révélé au public savant l’existence et l’importance de l’œuvre de l’évêque d’Orléans. Les Bibles de Théodulfe, dans la Bibliothèque de l’École des chartes, 1879, t. XL, p. 73-137. Il en a signalé six témoins. Deux, qui sont les chefs-d’œuvre de la calligraphie au début du IXe siècle, ont été exécutés presque en même temps et peut-être par le même copiste et ils se ressemblent presque autant que deux épreuves tirées de la même planche typographique. Ce sont la Bible de Mesmes (B. N., 9380) et la Bible conservée au trésor de la cathédrale du Puy. Elles reproduisent le travail de Théodulfe lui-même. Elles ressemblent extérieurement aux Bibles espagnoles : la décoration, l’ordre des livres sacrés, une partie des sommaires paraissent empruntés à des manuscrits espagnols. Le texte de la première main est une Bible mêlée, copiée vraisemblablement sur des originaux différents, espagnols ou languedociens, pour les Rois, les Épîtres de saint Paul, les Actes et les Épîtres catholiques, irlandais ou anglo-saxons pour les Évangiles ; celui des autres livres n’est pas toujours très bon. Entre les lignes et dans les marges se lisent des corrections et des variantes d’une autre main, qui représentent le travail de Théodulfe. Toutefois elles sont moins nombreuses sur la Bible du Puy que sur la Bible de Mesmes, dont la précédente est une copie. L’évêque d’Orléans a exponctué les interpolations et a cherché à se rapprocher d’un texte plus pur. Son travail est inégal selon les livres, et ses sources ont été différentes, à savoir, pour l’Ancien Testament, un texte presque semblable à celui du Vallicellanus, et pour la Bible entière, des textes espagnols ou plutôt méridionaux, - qui lui ont fourni beaucoup de variantes. Sa Bible est un retour à la vieille érudition espagnole, et ce résultat n’est pas surprenant, puisque Théodulfe était visigoth d’origine.

L’œuvre de l’évêque d’Orléans était tout individuelle ; elle ne pouvait donc pas être comprise et elle ne survécut pas à son auteur. On en remarque cependant l’influence sur deux manuscrits de Fleury-sur-Loire, qui reproduisent le texte des prophètes : l’un est du IXe siècle (bibliothèque d’Orléans, n. 14), l’autre en est une copie, plus jeune d’un siècle (même bibliothèque, n°11 et 13). Deux autres Bibles sont des copies plus exactes, quoique indirectes, de l’œuvre de Théodulfe : le ms. 9 de Saint-Germain-des-Prés (B. N., 11937), et la Bible de Saint-Hubert (British Museum, addition, 24142), tous deux du ixe-xe siècle. Un fragment assez étendu, conservé à la bibliothèque royale de Copenhague (nouveau fonds royal, 1), a été signalé par Léopold Delisle, Bibliothèque de l’École des chartes, t. xlvi, p. 321. Il est de la même époque que les deux Bibles précédentes, mais il présente quelques particularités. Les copies que dom Martianay a vues au XVIIe siècle dans le trésor des cathédrales de Carcassonne et de Narbonne, Pat. lat., t. xxviii, col. 136-137, n’ont pas été retrouvées. L’œuvre de Théodulfe a donc eu peu d’influence sur la transmission du texte de la "Vulgate, sauf peut-être pour quelques-uns de ses sommaires et notamment la recension des Épîtres de saint Paul, faite par Peregrinus, ou au moins son édition catholique des canons de Priscillien. Celle-ci, introduite en France par l’évêque d’Orléans, s’est perpétuée dans les manuscrits de France et d’Angleterre, jusqu’après le milieu du xiie siècle. Voir col. 2172-2173.

2. Bibles d’Alcuin et de l’école de Tours. — Alcuin exerça son activité sur la Bible latine à différentes époques de sa carrière, soit comme maître de l’école du palais royal, soit comme abbé de Saint-Martin de Tours.

a) L’école chrysographique et palatine. — Les premiers travaux d’Alcuin sur la Vulgate consistent dans la transcription des manuscrits en lettres d’or qui forment un groupe important et remontent pour la plupart au règne de Charlemagne, sinon même à la première partie de ce règne. Ce sont : les Évangiles Hamilton 251, acquis en 1890 par M. Irwin d’Oswego (État de New-York), l’évangéliaire de Godescalc (B. N., nouv. acquisitions françaises, 1993), le Psautier d’Adrien Ier (bibliothèque impériale de Vienne, n° 652), le Codex Adæ ou Codex Aureus de Trêves, le manuscrit de Saint-Riquier (bibliothèque d’Abbeville, n° 1), le ms. n° 599 de la bibliothèque de l’Arsenal, le ms. Harléien 2788, les Évangiles de Saint-Médard (B, N., 8850), le ms. Palatin 50 et les ms. 8849, 11955 et 9383 de la Bibliothèque nationale. Leur texte est un texte carolingien ancien, antérieur à la version de la Vulgate, donc un texte mélangé, qui contient des leçons espagnoles, mais surtout des leçons irlandaises et anglo-saxonnes. M. Corssen a fait une étude spéciale du texte du Codex Adæ. Die Trierer Ada-Handschrift, in-fol., Leipzig, 1889, p. 29-61. Le texte de la première main ressemble surtout à celui des plus anciennes bibles de Tours, dont il sera question plus loin, et celui de la seconde main reproduit le texte courant du IXe siècle dans les manuscrits franco-saxons. Ces beaux manuscrits viennent de l’école palatine, qu’Alcuin dirigea dès 782.

6) La recension faite par Alcuin à Saint-Martin de Tours. — Pour répondre aux désirs de Charlemagne, Alcuin, devenu abbé de Saint-Martin de Tours, fit, entre 799 et 801, une revision de la Vulgate, à l’aide de manuscrits northumbriens qu’il avait fait venir d’York. Voir t. i, col. 341-342. Il en fit remettre, à Aix-la-Chapelle, un exemplaire à Charlemagne par son disciple Frédégise pour la fête de Noël 800. Il en avait fait exécuter d’autres copies pour des particuliers, comme le prouvent des dédicaces en vers, composées par lui et parfois transcrites en d’autres manuscrits. Malheureusement, ces manuscrits autographes ne sont pas venus jusqu’à nous, et nous ne connaissons le texte de la recension d’Alcuin que par des copies postérieures, faites à Tours. Les critiques modernes sont d’accord pour reconnaître que le Vallicellanus est, de toutes ces copies, celle qui reproduit le plus fidèlement la recension d’Alcuin, quoique son texte ait déjà été retouché. Ils en concluent que le texte alcuinien de la Vulgate était un assez bon texte, de caractère anglo-saxon relativement pur. Alcuin en avait exclu les leçons des anciennes versions latines et avait presque rendu à la traduction de saint Jérôme sa saveur première. Ses disciples ne surent pas lui conserver cette pureté reconquise, et ils altérèrent successivement l’œuvre de leur maître, en y faisant rentrer les leçons étrangères qu’il en avait exclues.

c) Les Évangéliaires d’Adalbald. — Sous le gouvernement de Frédégise (807-834), le moine Adalbald inventa ou, au moins, amena à sa perfection, la semi-onciale carolingienne qui constitue la caractéristique paléographique de l’école de Tours, au jugement de Léopold Delisle, Mémoire sur l’école calligraphique de Tours au IXe siècle, dans les Mémoires de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1885, t. xxxii, 1re partie. Il nous reste plusieurs manuscrits signés de son nom. L’Évangéliaire (B. N. 17727) représente sa plus ancienne manière d’écrire. Son texte se rapproche de celui des plus anciennes grandes Bibles de Tours, dont il sera bientôt question. Onze autres évangéliaires sont des monuments du style le plus parfait de l’école d’Adalbald ou reproduisent partiellement le même texte. Ce sont les Évangiles de saint Gauzelin, évêque de Toul (conservés au trésor de la cathédrale de Nancy), voir L. Bigot, Les Évangiles du comte Arnold, Nancy, 1910, de Saint-Corneille (British Muséum, additionnel 11848), de Lothaire (B. N., latin, 366), de Du Fay (B. N., 9385), les mss. 287, 267, S63 de la même bibliothèque, l’Hamilton 248 (à la bibliothèque royale de Berlin), le ms. B. ii, 11, de la bibliothèque de l’université de Bâle, le Harléien 2790, provenant de Nevers, enfin le ms. 324 de la Bibliothèque nationale. La plus grande variété règne entre eux. Pour le texte, ils se rangent en deux groupes. Le premier (ms. Harléien 2790, B. N., 17227, Nancy, additionnel 11848, B. N., 267 et 9285) a un texte apparenté aux Bibles de Monza, de Bamberg et de Zurich, qui viennent de Tours. Le second (B. N., 274 et 266) contient un texte parent de celui de la première Bible de Charles le Chauve, par conséquent, un autre état du texte des Évangiles à Tours. Il faut probablement en rapprocher le ms. Hamilton248 et celui de Bâle. Le n° 263 de la Bibliothèque nationale, quoique interpolé, rentre dans un de ces deux groupes.

d) Les grandes Bibles de Tours. — Sous le règne de Charles le Chauve, entre 840 et 850, furent exécutées, dans la semi-onciale carolingienne, les belles Bibles entières de l'école de Tours. Les unes reproduisent fidèlement le style traditionnel : les Bibles de Bamberg (bibliothèque royale, A. 1. 5), de Zurich (bibliothèque cantonale, 6, 1), de Grandval (British Muséum, addit. 10546), de Cologne (bibliothèque du chapitre, n° 1), de la Bibliothèque nationale (latin, 47 et 68), lems. Harléien 2805, la Bible du comte Rorigon (B. N., latin, n° 3), la première Bible de Charles le Chauve (B. N., latin, n° 1). Les autres s’en écartent et forment des manuscrits dissidents : la première Bible de Saint-Aubin d’Angers (bibliothèque de la ville d’Angers, n° 1), une autre Bible (même bibliothèque, n° 2), celle de Monza (archives de la collégiale, G. 1), celle de Bâle (bibliothèque de l’université, A. N. 1. 3), enfin le ms. 9397 de la Bibliothèque nationale de Paris. Il faut y joindre un Nouveau Testament, venant de Saint-Denis (B. N., latin, 250), qui se place au même rang que la Bible de Grandval. Leur texte est assez divergent dans les détails. Comparé à celui de Vallicellanus, il suit cette progression descendante au point de vue de la ressemblance : Monza, Angers, Bamberg, Zurich, Berne, B. N., 47, Grandval, Cologne, B. N., 3 et 1. Les modifications se font progressivement, et ce sont des altérations. À l’origine, le texte diffère peu de celui du Vallicellanus et il en arrive à ne lui ressembler en rien. En 50 ans, surtout de 840 à 850, la recension d’Alcuin est devenue un texte vulgaire et abâtardi ; elle a été successivement déformée par la réintégration des leçons étrangères dont l’exclusion avait constitué sa pureté relative.

3. Les écoles du nord de la France. — Après la dispersion des moines de Saint-Martin de Tours, l’art calligraphique se développa au nord de la France. On y transcrivit un texte différent de celui de Tours. On le trouve dans trois Évangiles (B. N., 261), l’additionnel 11849 au British Muséum et le ms. 1171 de la bibliothèque de l’Arsenal à Paris. À Reims, l’archevêque Ebbon (816-835) fait transcrire les Évangiles (bibliothèque de la ville d'Épernay, n° 1), duquel il faut rapprocher un ms. provenant de Notre-Dame et signé d’Antoine Loisel (B. N., 17968), mais copié pour l'Église de Beauvais. Hincmar, successeur d’Ebbon, dotait sa cathédrale d’une Bible, conservée aujourd’hui à la bibliothèque de la ville de Reims, n » s 1 et 2, et qui reproduit le texte alcuinien du Vallicellanus. La calligraphie franco-saxonne, dont Léopold Delisle a décrit les caractères et catalogué les monuments, Mémoire sur d’anciens sacramentaires, dans les Mémoires de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1886, t. xxxii, 1re partie ; L'évangéliaire de Saint-Vaast d’Arras et la calligraphie franco-saxonne, in-f°, Paris, 1888, a produit un certain nombre de manuscrits bibliques : la seconde Bible de Charles le Chauve (B. N., latin, n° 2), qui provient de Saint-Denis, les Évangiles de la bibliothèque royale de La Haye, n° 22, ceux d’Utrecht, le manuscrit inachevé de la bibliothèque publique de Boulogne, n° 12, l'évangéliaire n° 1045 de la bibliothèque d’Arras. S. Berger y a joint quatre manuscrits des Évangiles : Bibliothèque de la ville de Lyon, n° 357, B. N., 257, bibliothèque de Leyde, n » 48, bibliothèque de la ville de Tours, n° 23, Des manuscrits plus récents, du ixe au xiie siècle, reproduisent le même texte : bibliothèque de Cambrai, n° 309, bibliothèque royale de Berlin (ms. Hamilton 253), bibliothèque de l’Arsenal, n° 592, bibliothèque de Lille, n° 15, et le Psautier n » 774 de la bibliothèque de l’université de Leipzig. Leur texte, notamment celui des Évangiles, se rapproche beaucoup de celui des plus récents manuscrits en lettres d’or et plus encore des manuscrits du groupe de Reims. On rattache avec beaucoup de vraisemblance l'école franco-saxonne à Saint-Vaast d’Arras. Une dernière série de manuscrits de grand luxe est de la même contrée et du même temps. Elle comprend le Codex Paulinus (Rome, Saint-Paul-hors-les-Murs), les Évangiles de Saint-Emmeran (bibliothèque royale de Munich, lat., 14000) et le Psautier de Charles le Chauve (B. N., 1152). Leur texte est un texte de compilation, diversement formé et pris de divers côtés. M. Janitschek croit, non sans raison, que ces trois manuscrits ont été copiés à Corbie ; ils viennent au moins de la Picardie.

Du Xe au XIIe siècle. — Cette époque est beaucoup moins étudiée et beaucoup moins connue que les précédentes. « C’est l'époque des textes copiés sans ensemble et sans règle, mais en même temps des textes médiocres et de seconde main, » a écrit S. Berger, Histoire de la Vulgate, p. 329. Différents personnages se préoccupaient toutefois de corriger les manuscrits fautifs ou de donner des copies correctes ; mais nous sommes peu renseignés sur leur travail. L’auteur de la Vie de saint Dunstan, n° 34, nous apprend que cet archevêque deCantorbéry († 998), à ses heures de loisir, lisait la Sainte Écriture et en corrigeait les manuscrits, Pat. lat., t. cxxxvii, col. 443. Or, une partie du ms. Bodléien, auct. F. 4. 32 à Oxford, comprenant des fragments grecs-latins de la Bible, est signée par saint Dunstan. Haddan et Stubs, Councils and eccles. documents relat. to Gr. Britain and Ireland, Oxford, 1869, 1. 1, p. 192 ; H. Bradshaw, Collected papers, 1889, p. 455, 483. Au témoignage de Guibert de Nogent, auteur de sa Vie, c. XV, un autre archevêque de Cantorbéry, le B. Lanfranc(† 1089), corrigea lui-même et fit corriger par ses disciples secundum orthodoxam fidem tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, comme ceux des Pères, qui étaient corrompus par de trop nombreuses fautes de copiste. Toute l'Église occidentale, au moins celle de la France et de l’Angleterre, se servait de cette correction. Pat. lat., t. cl, col. 55. Robert du Mont répète la même chose dans sa Chronique, ainsi que Florigenus, ibid., col. 94-95, et que Mathieu Paris, Historia Anglorum, ann. 1089. Nous ignorons au juste quel fut ce travail de Lanfranc, si ce fut une recension proprement dite ou une simple correction des fautes de copie et où on le retrouverait. Un autre moine du Bec, Gandolphe, qui fut abbé de Saint-Alban, puis évêque de Rochester, corrigea, lui aussi, les fautes de copie des Livres Saints. On conservait à Rochester le premier volume d’une Bible, perdu depuis, qui était signé de sa main. Cf. Histoire littéraire de la France, t. vii, p. 118 ; t. ix, p. 373-374 ; note de Fabricius, Pat. lat., t. clix, col. 813-814. Sigebert de Gembloux, De scriptoribus ecclesiasticis, c. clxiv, Pat. lat., t. clx, col. 585, dit que Franco (1060), également instruit dans la littérature sacrée et profane, divinæ Scripturæ invigilavit. Or, dans le ms. &5176 de la Bibliothèque nationale de Paris, qui est du XIe siècle, un poème d’Alcuin sur les Évangiles a les noms d’Odilo abba et de ΦΡΑΝΚΩ, substitués aux noms de Carolus rex et d’Alcuin, qui ont été raturés. Franco est certainement le copiste du manuscrit et l’abbé Odilon a commandé l’exécution de cette copie. Avant 1090, deux bénédictins, Théoger, de Saint-Georges, et Heimon, moine d’Hirschau, sur l’ordre de Guillaume d’Hirschau, s’occupèrent à corriger les fautes de copies des livres des deux Testaments, pour l’usage de leur congrégation. Voir Mabillon, Annales ordinis S. Benedicti, Paris, 1717, t. v, p. 277 ; Monumenta Germaniæ, t. xii, p. 451. Cf. E. Nestlé, Die Hirschauer Vulgata-Revision, dans Theologische Studien aus Württemberg, 1889, p. 305-310.

Nous connaissons mieux l’essai de correction de la Vulgate exécuté par saint Etienne Harding, le troisième abbé de Cîteaux (1109-1134). Mabillon avait révélé son existence, en publiant une note de l’auteur sous le titre : Censura de aliquot locis Bibliorum, dans Opéra S. Bernardi, t. iii, p. xi, rééditée par Migne, Pat. lat., t. CLXVi, col. 1373-1376, et auparavant par Martianay, Prolegomena ad divinam Bibliothecam S. Hieronymi, Pat. lat., t. xxviii, col. 67-69. Or, la « Bible de saint Etienne » a été conservée et à l’époque de la Révolution française a passé de la bibliothèque de Cîteaux à la bibliothèque municipale de Dijon, n° 9 bis. Elle comprend 4 volumes, écrits par deux mains différentes, et contient l’Ancien et le Nouveau Testament. Elle a été terminée en 1109, ainsi que l’indique une note, t. ii, fol. 150v, qui est peut-être de la main de l’abbé. Cette note, publiée par Mabillon, nous renseigne aussi sur l’occasion, le but et la méthode de la correction. L’abbé se proposait de fournir au monastère, récemment fondé, un exemplaire type du texte sacré pour les usages liturgiques et autres de la communauté. Dans ce dessein, on rassembla des bibles et on s’adressa même à diverses églises afin d’adopter le texte le plus sûr. Or, l’une des bibles ainsi recueillies différait notablement de toutes les autres : elle avait un texte plus complet et contenait de nombreux passages qui lui étaient exclusivement propres. Quelle était la valeur de ces additions ? Faisaient-elles partie du texte sacré? L’abbé de Cîteaux la fit copier et fit servir la copie pour les lectures publiques. Cependant les gloses qu’elle renfermait troublèrent les religieux : l’œuvre de saint Jérôme leur parut altérée. Pour en juger, l’abbé alla trouver des juifs, versés dans la connaissance des Écritures, et il les interrogea en latin sur les passages du texte plus complet, qui ne se lisaient pas dans les autres Bibles latines. Ceux-ci, consultant leurs livres hébreux et chaldaïques, n’y trouvèrent pas les additions qui étaient en cause. Suivant donc « la vérité hébraïque et chaldaïque » et beaucoup d’exemplaires latins, l’abbé de Cîteaux gratta sur son exemplaire tous les passages superflus, qui étaient spécialement très nombreux dans les livres des Rois. Les grattages indiquent suffisamment les leçons raturées. Etienne Harding interdit de les réintroduire dans le texte ou dans les marges et d’ajouter des notes à l’exemplaire corrigé ainsi au prix d’un si grand travail. Le Nouveau Testament, dont il n’est pas question dans cette note, a été revisé aussi bien que l’Ancien. Des notes marginales sur les Évangiles, il résulte que les corrections ont été faites d’après le texte grec et de très anciens manuscrits latins. Toutefois, le travail critique de saint Etienne n’a pas consisté exclusivement à supprimer les additions, qui n’avaient pas de texte correspondant dans l’original ; il a aussi fait quelques additions ou, pour mieux dire, des modifications au texte gratté, dont l’existence est manifestée par une seconde écriture plus serrée. Les suppressions sont plus fréquentes dans l’Ancien Testament, et les additions dans le Nouveau. Quelques notes marginales, en petit nombre et pour certains livres seulement, indiquent les motifs des corrections opérées. D’un examen partiel du manuscrit de Dijon, l’abbé Paulin Martin a conclu que les omissions, notamment dans les livres des Rois, portaient sur des passages des anciennes versions latines, faites sur la traduction des Septante, qui avaient été réintroduits dans l’œuvre de saint Jérôme. Saint Etienne Harding et les premiers recenseurs de la Vulgate latine, Théodulfe et Alcuin (extrait de la Revue des sciences ecclésiastiques), Amiens, 1887. La Bible cæteris plenior, que l’abbé de Cîteaux avait fait copier et qu’il corrigea, était donc une Vulgate altérée, telle qu’elle était répandue au XIe siècle ; les Livres Saints y étaient disposés dans le même ordre que dans les manuscrits espagnols et méridionaux ; les manuscrits latins plus courts, qui ressemblaient au texte hébreu, étaient des Vulgates non interpolées. L’abbé de Cîteaux donna donc à son monastère une Bible plus pure ; mais sa tentative, mal entreprise, n’eut peut-être aucun effet en dehors de l’ordre cistercien, où elle a servi pour l’usage liturgique. Ph. Guignard, Les monuments primitifs de la règle cistercienne, Dijon, 1878. Cf. H. Denifle, dans Archiv für Literatur und Kirchengeschichte des Mittelalters, Fribourg-en-Brisgau, 1888, t. iv, p. 266270 ; S. Berger, Quam notitiam linguæ hebraicæ habuerint christiani medii ævi temporibus in Gallia, Paris, 1893, p. 9-11. À la même époque à Cluny, l’abbé Pontius (1109-1125) corrigeait une bible sur le texte d’un autre manuscrit. Bibliotheca cluniacensis, p. 1645. À la fin du xiie siècle, un diacre de l’église de Saint-Damase à Rome, Nicolas Maniacoria ou Maniacocia, qui ne fut jamais cardinal ni bibliothécaire de l’Église romaine, comme on l’a prétendu longtemps, fit aussi, avec l’aide d’un juif qui le renseignait sur le texte hébreu et les traditions hébraïques, une correction du texte latin de la Vulgate. Il savait d’ailleurs les langues hébraïque, grecque et latine, au témoignage d’Odon de Châteauroux, évêque de Frascati (1244-1273), Pitra, Analecta novissima, Frascati, 1888, t. ii, p. 298, et il est l’auteur d’une version latine du Psautier, faite sur l’hébreu. Son Suffraganeus bibliothecæ, ou introduction à ses remarques critiques, n’a été longtemps connu que par un extrait qu’en avait fait le cardinal Bessarion dans une dissertation inédite et que Lindanus avait publié, De optimo Scripturas interpretandi genere, 1. I, c. v ; 1. III, c. iii, 1558, p. 28, 101-102. L’abbé Paulin Martin, le premier, l’a publié en entier, Introduction générale à la critique de l’Ancien Testament. De l’origine du Pentateuque (lithog.), Paris, 1887, t. i, p. ci-cvm, d’après le manuscrit de Venise (Bibliothèque de Saint-Marc, lat. class.X, n°478, fol. 141, ayant appartenu à Bessarion), du xve siècle, que le cardinal Pitra lui avait signalé et qu’il avait fait venir à Paris par la voie diplomatique. De son côté, le P. Denifle le publiait comme inédit, dans son Archiv für Literatur und Kirchengeschichte des Mittelalters, 1888, t. iv, p. 270-276, ainsi qu’un extrait sur la Genèse, ibid., p. 475-476 ; S. Berger reproduisait l’édition de Denifle, Quam notitiam, etc., p. 12-14 ; Mgr Mercati, qui avait découvert à Parme un manuscrit de la version latine du Psautier, Alcune note di letteratura patristica (extrait des Rendiconti del R. Ist. Lombardo di sc. e lett., IIe série, 1898, t. xxxi), p. 43-51, réunissait tous les renseignements connus jusqu’alors sur Nicolas Maniacoria. Specimen d’un Dizionario bio-bibliografico degli scrittori italiani, série 1re, n° 4. Enfin, le P. Van den Gheyn signalait un second manuscrit du Suffraganeus et d’une partie de la version latine du Psautier hébraïque à la bibliothèque royale de Bruxelles, n° 5 4031-4033, fol. 1-32. Nicolas Maniacoria, correcteur de la Bible, dans la Revue biblique, 1899, t. viii, p. 289-295. Sur les instances et aux frais de Constance, la fille de Roger II, roi de Sicile, et l’épouse de l’empereur Henri VI, devenue religieuse, le diacre romain composa sa Bibliothèque. Ayant constaté la diversité des manuscrits latins, il rechercha quels étaient ceux qui étaient d’accord avec le texte hébreu et il n’en trouva aucun. Comparant donc les exemplaires latins avec les manuscrits hébreux, il en retrancha les additions superflues, réforma les transformations apportées au texte et réintégra les passages omis. Il donne ensuite des exemples de trois sortes de fautes qui corrompent les manuscrits apponendo, commutando et subtrahendo. Ses observations critiques s’étendent de la Genèse aux Psaumes, mais la fin de son traité manque. Il s’est servi des Quæstiones hebraicæ in Genesim de saint Jérôme et des Quæstiones hebraicæ in libros Begum, attribuées à saint Jérôme, mais dont l’auteur était un contemporain de Raban Maur. Le juif, que Nicolas avait consulté, connaissait bien la Bible hébraïque et les traditions juives, telles que nous les révèle Raschi († 1105). Nous ignorons l’influence qu’a pu exercer le correctoire de Nicolas Maniacoria. Les correctoires du XIIIe siècle nous sont mieux connus depuis les travaux du P. Denifle.

Les correctoires du XIIIe siècle. — Nous avons déjà parlé ici, voir t. ii, col. 1022-1026, du « texte parisien », qui s’est constitué à Paris au début du xin’siècle, que Roger Bacon a jugé si sévèrement et qui a été l’occasion des correctoires entrepris un peu plus tard par les dominicains et les franciscains. Cf. A. Gasquet, English biblical criticism in the thirteenth century, dans Dublin review, janvier 1898, t. cxxii, p. 1-21. Ajoutons seulement que le texte de Paris s’est fusionné avec le texte languedocien du xiiie siècle, dont il a été question précédemment, en un certain nombre de manuscrits signalés par S. Berger, Histoire de la Vulgate, p. 81. Ajoutons encore que le même savant croyait avoir retrouvé un manuscrit (le seul connu) de la Correctio Senonensis de 1236 dans la bible de l’évêque de Strasbourg, Jean de Dürbheim. Sur la part de travail de Thibaut de Saxe, voir t. ii, col. 1464. Le manuscrit unique qui porte la préface de Hugues de Saint-Cher est conservé à Vienne en Autriche, n° 1211. Les correctoires ont réagi sur les manuscrits du texte parisien. Les grattages, les chapitres nouveaux marqués en marge par une seconde main, les préfaces nouvelles ajoutées à la fin du volume en font foi. La réforme du xiiie siècle fut définitivement et universellement acceptée au moins dans les accessoires de la Bible. S. Berger, Les préfaces jointes aux livres de la Bible dans les manuscrits de la Vulgate (mémoire posthume), Paris, 1902, p. 27-31. D’après les notes manuscrites de l’abbé Paulin Martin, conservées à la bibliothèque de l’Institut catholique de Paris, nous pouvons signaler quelques Bibles, reproduisant les notes critiques des Correctoria, à savoir, les mss. latins 20, 22, 28, 31, 10420 de la Bibliothèque nationale de Paris et les Bibles latines, 13 de la bibliothèque Mazarine et A.L.3, de la bibliothèque Sainte-Geneviève de la même ville.

Du XIVe au XVIe siècle. — Cette période de l’histoire de la Vulgate a peu d’importance. Elle se divise en deux époques distinctes, séparées par l’invention de l’imprimerie.

1. Avant l’invention de l’imprimerie. — a) On continua à transcrire le texte latin de la Vulgate, et les manuscrits de cette époque contiennent un texte mêlé de leçons anciennes. On ne connaît qu’un seul essai de correction, qui fut entrepris, dans la première moitié du XVe siècle, au couvent de Windesem (Hollande) de la congrégation de Windesheim, de l’ordre des augustins. Le Chronicon Windeshemense, de l’augustin J. Busch, c. xxvi, édité par Grube, (Geschichtsquellen der Provinz Sachsen, Halle, 1886, p. 3Il sq., nous apprend que les Pères de ce couvent corrigèrent l’Ancien et le Nouveau Testament d’après les anciens manuscrits réunis de diverses bibliothèques, de façon à ramener la traduction de saint Jérôme à sa pureté première. Ils mirent plusieurs années à faire un correctoire, qui indiquait tous les passages à corriger, et le chapitre général de la congrégation ordonna que tous les exemplaires des couvents seraient corrigés d’après le correctoire de Windesem, ainsi que tous les livres qui servaient pour la récitation de l’office ecclésiastique. Grube ne connaissait aucun exemplaire de la Bible, corrigé d’après ce correctoire. Die literarische Tätigkeit der Windesheimer Congregation, dans Der Katholik, 1881, t. i, p. 48-59. La bibliothèque ducale de Darmstadt possède un manuscrit en cinq volumes in-folio, transcrit de 1428 à 1439 par le célèbre Thomas a Kempis et qu’on suppose conforme au correctoire de Windesem. A. Schmidt, dans Zentralblatt für Bibliothekswesen, 1896, t. xiii, p. 379. Cet exemplaire a servi à la lecture publique de la Bible. Cf. F. Falk, Die Bibel am Ausgange des Mittelalters, ihre Kenntnis und ihre Verbreitung, Cologne, 1905, p. 7-10.

b) Si on ne multipliait pas alors les correctoires, on savait, du moins, que la Vulgate n’était pas parfaite, et ceux qui connaissaient l’hébreu recouraient au texte original pour corriger les fautes du texte latin. Tel, le franciscain Nicolas de Lyre. Voir le second prologue de sa Postilla. Il publia, du reste, un Tractatus de differentia nostræ translationis ab hebraica littera in Vetere Testamento. Voir t. iv, col. 455. Pierre d’Ailly, étant encore simple bachelier en théologie du collège de Navarre, mais déjà professeur, écrivit, probablement en 1378, une Epistola ad novos Hebræos, adressée à Philippe de Maizières. Il y attaquait les vues de Roger Bacon et il y soutenait que la version de saint Jérôme était absolument parfaite, en s’appuyant sur l’autorité de l’Église, qui l’a approuvée. Devenu docteur, il composa une nouvelle apologie de la Vulgate, Apologeticus Hieronymianæ versionis, contre le docteur anglais, mais il reconnut avec Roger Bacon la nécessité d’en corriger les exemplaires et il exprima le désir que l’université de Paris entreprît cette correction. Ces deux traités ont été publiés pour la première fois par M. L. Salembier, Une page inédite de l’histoire de la Vulgate (extrait de la Revue des sciences ecclésiastiques, 1887, 1889, 1890), Amiens, 1890. Plus tard, l’humaniste Laurent Valla († 1457) rédigea, en 1440, une série de notes sur le Nouveau Testament dans lesquelles il proposait des corrections à faire à la Vulgate surtout au point de vue de la latinité. Annotationes in latinam N. T.interpretationem ex collatione græcorum exemplarium. Érasme les édita, Paris, 1505. Elles se retrouvent dans ses Opera, Bâle, 1540, p. 803 b -895 b. Jacques Revius réédita ce traité : De collatione Novi Testamenti libri duo, Amsterdam, 1638.

La Vulgate perdait ainsi peu à peu de la grande autorité dont elle avait joui durant plusieurs siècles. Les théologiens et les commentateurs recouraient de plus en plus aux textes originaux, hébraïque ou grec. On lui préférait des versions nouvelles, faites directement sur les originaux. Le cardinal anglais Adam Easton († 1397) traduisit l’Ancien Testament, sauf les Psaumes, sur l’hébreu ; sa version, qui eut une grande diffusion, est perdue. Par ordre du pape Nicolas V, l’Italien Manetti († 1459) commença une version latine de toute la Bible ; il ne traduisit que le Nouveau Testament et une partie des Psaumes. Son œuvre est inconnue. Le Psautier seul fut traduit par le carme Jean Creston de Pavie, en 1480, et par l’humaniste Rodolphe Agricola de Groningue (1485).

2. Après l’invention de l’imprimerie. — a) Les Bibles imprimées. — On sait que l’art de l’imprimerie fut inventé en vue de multiplier les exemplaires de la Sainte Écriture. La première Bible imprimée fut celle de Gutenberg, Fust et Schoffer à Mayence, sans indication de lieu ni de date. La seconde parut à Bamberg chez Pfister en 1460. La première qui soit datée est sortie des presses de Fust et de Schôlfer à Mayence en 1462, sans parler du Psautier daté de 1459. On évalue à près d’une centaine les éditions de la Vulgate qui sont antérieures à 1500. W. A. Copinger en a dressé la liste. Incunabula biblica or the first half century of the latin Bible being a bibliographical account of the various editions of the latin Bible between 1450 and 1500 with an Appendix containing a chronological list of the editions of the sixteenth century, in-f°, Londres, 1892. Elle contient 124 éditions, dont 13 sont douteuses. Léopold Delisle en a retranché 12. Journal des savants, 1893, p. 202-218. Il n’en resterait donc plus que 99. De 1501 à 1520, on en compte 57 de certaines. Voir encore G. Vicaire, Les Incunabula biblica de W.A. Copinger et la Bibliographical Society, Paris, 1893 ; H. F. Moule, Historical catalogue of the printed éditions of Holy Scripture in the library of the british and foreign Bible society, Londres, 1909, t. ii. Mlle Marie Pellechet a dressé la liste de toutes les Bibles imprimées en France avant 1500, qu’elle a vues elle-même. Catalogue général des incunables des bibliothèques de France, 1897, t. i, n. 2263-2386. Cf. F. Falk, Die Bibel am Ausgange des Miltelalters, p. 23-24, 91-97. La plupart de ces éditions n’ont aucune valeur critique. Les imprimeurs ne recouraient pas aux anciens manuscrits antérieurs à Alcuin ni même aux Bibles d’Alcuin, mais à des manuscrits récents, vulgaires, écrits au XIIIe et au XIVe siècle, dont le maniement était facile en raison de leur petit format, et qu’ils publiaient tels quels. J. Wordsworth et White, Novum Testamentum D. N. J. C. latine, Oxford, 1898, t. i, fasc. 5, p. 721. Les premières éditions qui aient donné réellement un texte corrigé d’après les manuscrits sont, en dehors de la Polyglotte de Complute, voir t. v, col. 517-518. celles d’Adrien Gumelli, Paris, 1504, d’Albert Castellani, Venise, 1511, d’Hittorp, Cologne, 1520, de Robert Estienne, de 1528, 1532, 1534, 1540, 1545, 1546, à Paris, de 1555, 1557, à Genève, voir t. ii, col. 1982 ; la meilleure est celle de 1540. R. Gregory, Textkritik des Neuen Testaments, Leipzig, 1902, t. ii, p. 619. Sur les manuscrits dont s’est servi Robert Estienne, voir J. Wordsworth, OUI latin biblical texts, Oxford, 1883, 1. 1, p. 4754 ; G. Jacob, Zur Geschichte des Psalmentextes der Vulgata in 16. Jahrhundert, dans Zeitschrift fur aittestamentliche Wissenschaft, 1900, p. 49-80. Nommons encore l’édition de Jean Benoît, qui parut à Paris en 1541 et qui eut onze autres éditions jusqu’en 1569. Sur l’édition de Castellani, voir t. ii, col. 1475. Cf. F. Kaulen, Geschichte der Vulgata, p. 356-378.

b) Les corrections de la Vulgate. — Protestants et catholiques se mirent aussi à corriger la Vulgate sur les textes originaux. And. Osiander publia une édition ainsi corrigée en 1522 à Nuremberg. Un libraire de Nuremberg, Jean Petrejus, imprima en 1527 et 1529 deux éditions qui étaient corrigées plus complètement et qui furent plusieurs fois réimprimées par d’autres. La Bible de Wittemberg, de 1529, contenait des corrections plus arbitraires encore, et elle fut l’objet de discussions de la part des protestants eux-mêmes. Conrad Pellican mit à la base de ses commentaires une édition de la Vulgate, corrigée d’après le texte hébreu, 7 in-f°, Zurich, 1532-1640. Les catholiques imitèrent les protestants et entrèrent dans cette voie nouvelle de corriger à leur gré la Vulgate. Sur le correctoire du dominicain Jacques de Gouda, voir t. ii, col. 1475. En 1527, J. Rudel publia à Cologne une revision de la Vulgate d’après les textes originaux, qui eut plusieurs éditions. En Italie, le chanoine régulier Augustin

Steuchus, plus tard évêque de Gubbio, revisa l’Ancien Testament sur le texte hébreu, et son œuvre parut à Venise en 1529. Un peu plus tard, en 1542, le bénédictin Isidore Clarius éditait à Venise une Bible entière corrigée sur les textes originaux. Comme il suivait fréquemment le texte de Sébastien Munster, la Congrégation de l’Index interdit son œuvre qui n’était plus le texte de la Vulgate. F. Kaulen, op. cit., p. 322-336.

c) Nouvelles versions de la Bible. — Au début du XVIe siècle, on multiplia les versions de la Bible, directement faites sur les textes originaux. Félix Pratensis, juif converti, traduisit les Psaumes sur le texte hébraïque, en 1515, et Érasme, le Nouveau Testament sur le grec, 1516. Voir t. ii, col. 1903-1905 ; A. Bludau, Die beiden ersten Erasmus-Ausgaben des Neuen Testaments, und ihre Gegner, dans Biblische Studien, Fribourg-en-Brisgau, 1902, t. vii, fasc. 5, p. 33-48. L’opposition d’Érasme contre la Vulgate se manifestait dans ses notes. Aussi le capucin Richard du Mans et le futur cardinal Sirlet en entreprirent-ils plus tard une réfutation directe. Voir H. Höpfl, Kardinal Wilhelm Sirlet Annotationen zum Neuen Testament, ibid., 1908, t. xiii, fasc. 2, p. 68-81. Santé Pagnino et le cardinal Cajetan traduisirent la Bible entière. Augustin Giustiniani traduisit seulement le Psautier et Job. Voir t. ii, col. 1476-1477. Les protestants firent aussi des versions latines nouvelles. Il suffit de rappeler celles de Bucer, de Sébastien Munster, de Castelion et de Léon de Juda. Voir F. Kaulen, op. cit., p. 336-356.

Tous ces efforts, faits en des sens divers, eurent pour résultat de discréditer de plus en plus la Vulgate et de jeter la confusion la plus grande dans le monde chrétien au sujet du texte sacré des Écritures. Il fallait apporter un remède à cette situation troublée. Seule l’autorité de l’Église catholique pouvait rétablir l’unité que les travaux des particuliers avaient rompue. L’Église le fit au concile de Trente.

V. Authenticité déclarée par le concile de Trente. — 1° Rédaction et promulgation du décret. — La question de la Vulgate fut mise en délibération dans les congrégations particulières des théologiens, le 1er mars 1546, à propos des « abus concernant les Livres Saints ». Il s’agissait notamment de décider quelle version on adopterait, et d’avoir une édition correcte. Le cardinal de Sainte-Croix, résumant les avis, dit qu’on choisissait la Vulgate, parce que, parmi tant d’éditions, elle est verior et potior. Massarelli, Diarium III, dans S. Merkle, Concilivm Tridentinum, Fribourg-en-Brisgau, 1901, t. i, p. 500, 504, 506, 507 ; S. Ehses, ibid., 1911, t. v, p. 22, 27. Cf. A. Theiner, Acta genuina ss. cecum. Concilii Tridentini, Agram, 1874, t. i, p. 60-63 ; Le Plat, Monument, ad historiam concilii Tridentini, Louvain, 1783, t. iii, p. 393. Les délégués furent nommés, le 5 mars, pour rédiger un projet de décret sur les abus en question ; ils se réunirent, le 13 mars. Merkle, ibid., p. 508, 509, 512 ; S. Ehses, t. v, p. 27. Leur projet fut lu à la congrégation générale du 17 mars. « Le premier abus, y est-il dit, est d’avoir des éditions diverses de la Sainte Écriture et de les vouloir employer comme authentiques, dans les leçons publiques, les discussions et les prédications. Le remède est d’avoir une seule édition, à savoir, l’ancienne et vulgaire, que tous emploient comme authentique dans les leçons publiques, les discussions, les commentaires et les prédications et que personne n’ose rejeter ou contredire, sans rien enlever toutefois à l’autorité de la pure et véritable traduction des Septante, dont les Apôtres se sont servis quelquefois, et sans rejeter les autres éditions, autant qu’elles aident à comprendre cette Vulgate authentique. » Le second abus était l’altération des exemplaires de la Vulgate qui étaient en circulation. Le remède était de faire une édition correcte de cette version, qu’on demanderait au pape en même temps qu’une édition correcte des textes hébreu et grec. A. Theiner, op. cit., t. i, p. 64 ; S. Ehses, t. v, p. 29. Cf. Merkle, op. cit., t. i, p. 36. En congrégation particulière, le 23 mars, deux membres demandèrent que l’approbation de la Vulgate entraînât le rejet des autres éditions. L’êvêque de Fano répondit qu’on recevait la Vulgate, parce qu’elle a toujours été reçue par l’Église et parce qu’elle est ancienne, mais que les autres éditions n’étaient pas rejetées. Quelques-unes sont bonnes ; la Vulgate est meilleure et il convient qu’elle seule soit tenue pour authentique dans l’Église. S. Merkle, op. cit., t. i, p. 527 ; S. Ehses, t. v, p. 37. Cf. A. Theiner, op. cit., t. i, p. 70. Ces objections furent reprises à la congrégation générale du 1er avril, et l’évêque de Fano les résolut de nouveau. L’abus, dit-il, ne consiste pas à avoir plusieurs versions de la Bible, puisque dès l’antiquité il y en a eu plusieurs ; il consiste à en avoir plusieurs qui soient tenues pour authentiques. On n’en veut qu’une seule authentique, et c’est la Vulgate, parce qu’elle est ancienne, et pour que les adversaires de l’Église n’aient pas l’occasion de dire que l’Église n’a pas eu jusqu’ici de bons textes. Les autres versions, même celles des hérétiques, ne sont pas rejetées pour ne pas restreindre la liberté chrétienne. Merkle, op. cit., t. i, p. 42 ; S. Ehses, t. v, p. 50 ; Theiner, op. cit., t. i, p. 79. La discussion continua en congrégation générale, le 3 avril. Le cardinal de Trente accepterait une édition authentique en quelque langue que ce soit. Le cardinal de Jæn aurait voulu qu’on rejetât toutes les autres versions, sauf celle des Septante, et qu’on ne reçût la Vulgate qu’après sa correction. Son avis fut adopté par d’autres Pères. Les votes furent, d’ailleurs, assez divergents. Le président, le cardinal del Monte, les résuma ainsi : La majorité semble admettre que la Vulgate soit reçue, mais que le décret soit rédigé de telle sorte que les autres versions ne soient pas tacitement rejetées. Le cardinal Poole était d’avis qu’on eût plusieurs éditions de la Bible et qu’il allait approuver, en même temps que la Vulgate, les Septante et les textes hébreu et grec. Celui qui a un vase d’or et un vase d’argent, dit-il, ne brise pas le second pour ne se servir que du premier. La question mise aux voix, tous les membres acceptèrent que la Vulgate seule serait reçue, qu’on ne mentionnerait pas dans le décret les autres éditions et qu’on ne rejetterait pas expressément les éditions des hérétiques. La majorité repoussa le projet d’avoir une édition authentique en hébreu, en grec et en latin ; elle ne voulait que la Vulgate pour authentique. Theiner, op. cit., t. i, p. 79-83 ; Merkle, op. cit., t. i, p. 42-44 ; S. Ehses, t. v, p. 59-66. Le décret fut rédigé en ce sens, lu et unanimement approuvé le 5 avril, enfin solennellement promulgué le 8.

En voici la teneur : « Considérant qu’il pourrait résulter pour l’Église de Dieu une assez grande utilité de connaître l’édition qu’il faut tenir pour authentique parmi toutes les éditions latines des Livres Saints qui ont cours, le même saint concile statue et déclare que c’est l’édition ancienne et vulgate, approuvée par le long usage de l’Église elle-même pendant tant de siècles, qui doit elle-même être regardée comme authentique dans les leçons, discussions, prédications et expositions publiques, et que personne ne doit avoir l’audace ou la présomption de la rejeter sous aucun prétexte. » Enfin, le concile ordonnait que la Sainte Écriture, surtout la vieille édition vulgate, fût imprimée le plus correctement possible. Decretum de editione et usu sacrorum Librorum, sess. IV.

Cependant ce décret, quand il fut connu à Rome, souleva de grosses difficultés. Les théologiens du pape trouvaient qu’on avait donné à la Vulgate trop d’auto rité et ils refusaient d’approuver le décret en raison des fautes qui existaient dans la version latine, seule déclarée authentique. Ils délibérèrent s’il ne fallait pas retarder l’impression du décret ou en modifier la teneur. Les légats pontificaux durent expliquer par lettres les raisons et le sens du décret. Ils rappelaient en particulier que les traductions et les éditions de la Bible, faites depuis vingt ans en si grand nombre et si divergentes en des points très importants, rendaient nécessaire l’adoption d’une seule version comme authentique ; qu’aucune version n’aurait pu être préférée à l’ancienne Vulgate, si estimable en elle-même, et qui n’avait jamais été suspecte d’hérésie. Leur correspondance publiée partiellement par le P. Vercellone, Dissertazioni accademiche da vario argomento, Rome, 1864, p. 79, et plus complètement par Druffel-Brandi, Monumenta Tridentina, fasc. 4, Munich, 1897, donna satisfaction à tous les esprits et décida Paul III à approuver le décret de Trente.

Sens du décret. — Il a été diversement interprété par les théologiens, les uns entendant l’authenticité de la Vulgate dans le sens de sa conformité avec le texte primitif des Livres Saints, et les autres reconnaissant seulement dans cette authenticité une autorité officielle qui rendait l’usage de la Vulgate obligatoire dans l’enseignement public et plaçait ainsi cette version au-dessus des traductions privées qui avaient cours à l’époque du concile.

1. Des débats précédemment résumés il résulte que les Pères de Trente, dans leurs délibérations, n’ont pas examiné la conformité de la Vulgate avec les textes originaux, qu’ils n’en ont parlé qu’indirectement et que cette conformité n’a pas été la raison pour laquelle ils ont déclaré la Vulgate authentique. Ils voulaient donner à l’Église un texte officiel des Livres Saints, qui fit autorité dans les écoles, la prédication et la liturgie, à l’exclusion implicite des versions récentes. S’ils ont choisi la Vulgate latine pour en faire ce texte officiel, c’est à cause de son usage ancien et universel dans l’Église, qui garantissait suffisamment sa fidélité essentielle aux originaux et son autorité ecclésiastique. L’usage de cette antique traduction était rendu obligatoire dans l’enseignement public, de telle sorte que personne n’était en droit d’en rejeter l’autorité sous aucun prétexte. Le concile ne mettait pas cette version au-dessus ni des textes originaux, hébreu et grec, ni des anciennes traductions qui avaient été en usage dans l’Église et l’étaient encore dans les Églises orientales. Il reconnaissait implicitement le droit de recourir aux originaux et aux anciennes traductions. Il imposait seulement pour l’enseignement public un seul texte, celui qui avait eu cours dans l’Église depuis tant de siècles et que cet emploi séculaire avait approuvé et consacré. Il n’approuvait pas l’œuvre de saint Jérôme, mais la version reçue à laquelle il conférait un caractère officiel pour les leçons et les prédications publiques. S’il avait eu en vue l’exactitude de la traduction, il aurait dû l’imposer même pour l’usage privé. Puisqu’il en fait un document public et officiel, il ajoute que personne n’a le droit de le récuser, quand il sera invoqué. Il employait donc le mot authentique dans le sens que lui donnaient alors les théologiens, les canonistes et les juristes.

Tel est le sens qu’ont donné à ce décret les théologiens du xv(e siècle, qui assistèrent au concile de Trente, et les théologiens récents qui ont étudié les Actes officiels de cette assemblée. Au nombre de ces théologiens, nous pouvons citer A. Salmeron, Comment. in evangelicam historiam, prolegom. III, Cologne, 1612, p. 24-25 ; A. Véga, qui rapporte le témoignage du cardinal Cervino, De justificatione, 1. XV, c. ix, Cologne, 1572, p. 692 ; J. Lainez, dont le témoignage est invoqué par Mariana, Pro editione Vulgata, 21, dans Cursus completus Scripturæ Sacræ de Migne, t. 1, col. 669 ; le P. Sirlet, qui était le correspondant du cardinal Cervino, voir H. Höpfl, Kardinal Wilhelm Sirlets Annotationen zum N. T., dans Biblische Studien, t. xiii, fasc. 8, p. 4-8 ; cf. P. Batiffol, La Vaticane de Paul III à Paul V, Paris, 1890, p. 76-80 ; D. Payva de Andrada, Defensio Tridentinæ fidei, 1. IV. Lisbonne, 1578, p. 257 ; J. Ravesteyn, de Tielt (Tiletanus), Apologiæ seu defensionis decretorum sac. concilii Tridentini, Louvain, 1568, p. 99 ; M. Zangerus, Simplicis atque adeo prudentis catholicorum orthodoxiæ cum novatorum sectariorumque nostri exulcerati seculi idolomania collatio catholica, c. ii, Cologne, 1580 (qui cite et approuve Tiletanus) ; Bellarmin, De verbo Dei, 1. II, c. x- xi ; De editione latina Vulgata, édit. Widenhofer, Wurzbourg, 1749 (où il cite la plupart des théologiens précédents) ; cf. J. de la Servière, La théologie de. Bellarmin, Paris, 1908, p. 18 ; X. Le Bachelet, Bellarmin et la Bible Sixto-Clémentine, Paris, 1911, p. 5-11, 15, 110-117 ; Pallavicini, Histoire du concile de Trente, 1. VI, c. xv, trad. franc., édit. Migne, t. ii, col. 90-91 ; E. Du Pin, Dissertation préliminaire ou prolégomènes sur la Bible, Amsterdam, 1701, t. i, p. 204 ; Du Hamel, Institutiones biblicæ, c. ix, Louvain, 1740 ; Jahn, Introductio in libros sacros V. F., 2= édit., Vienne, 1839, p. 64-65 ; Berti, De theologicis disciplinis, Bamberg et Wurzbourg, 1773, t. v, p. 41 ; Haneberg, Histoire de la révélation biblique, trad. franc., Paris, 1856, t. ii, p. 446-448 ; J. Danko, De Sacra Scriptura, Vienne, 1867, p. 230 ; F. Kaulen, Geschichte der Vulgata, Mayence, 1868, p. 394-419 ; Einleitung in die Heilige Schrift, 3e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1890, p. 147-148 ; art. Vulgate, dans Kirchenlexikon, 2e édit., 1901, t. xii, col. 1140 ; A. Loiay, Histoire du canon de l’A. T., Paris, 1890, p. 210-211 ; J. Didiot, Logique surnaturelle subjective, 2e édit., Paris, 1894, p. 114-124 ; J. Corluy, dans la Science catholique, 1894, t. viii, p. 438-445 ; Lingens, dans Zeitschrift fur katholische Theologie, Inspruck, 1894, p. 759-769 ; trad. dans la Revue des sciences ecclésiastiques, 1894, t. lxxi, p. 147-151 ; A. Vacant, Études théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, Paris, 1895, t. i, p. 428-429 ; J. Thomas, Mélanges d’histoire et de littérature religieuse, Paris, 1899, p. 314-321. Léon XIII, dans l’encyclique Providentissimus Deus, du 18 novembre 1893, en recommandant la Vulgate, déclare qu’elle a reçu son authenticité, pour l’enseignement public, du concile de Trente. Cette authenticité consiste donc proprement dans le caractère officiel qui lui a été ainsi accordé et non dans la conformité de la version avec les originaux.

Du reste, les exégètes catholiques du xvie siècle savaient que la Vulgate n’était pas parfaite et recouraient aux textes originaux pour expliquer ses obscurités, ses ambiguïtés et ses inexactitudes. Dans son opuscule De editione latina Vulgata, Bellarmin cite G. von Linden (Lindanvs), De optimo genere Scripturas interpretandi, 1. III, c. i, Cologne, 1558 ; Sixte de Sienne, Bibliotheca sancta, 1. VIII, Venise, 1566 ; F. Foreiro, Comment. in Isaiam, præf., Venise, 1563 ; J. Oleaster, Comment. in Pentateuchum, præf., Lisbonne, 1556 ;

G. Genébrard, In Psalmos, præf., Paris, 1577. Voir aussi la réponse de Bellarmin à une consultation, dans Le Bachelet, op. cit., p. 71-72, 178-179.

2. Cependant, dès le xvie siècle, le décret de Trente a été interprété dans un autre sens par les théologiens qui n’avaient pas assisté au concile, et on en arriva au point que des esprits indépendants, tels que Bannez et Mariana, n’osaient pas se prononcer ouvertement sur la signification de l’authenticité de la Vulgate. Le fondement principal de la nouvelle explication se trouve dans la mention de cette version dans le décret dogmatique du concile De canonicis Scripturis. Il y est dit que les Livres Saints, cum omnibus suis partibus, doivent être reçus pour canoniques prout in veteri Vulgata editione habentur. Il en résulte seulement que la Vulgate contient les Livres sacrés et canoniques dans leur entier et avec toutes leurs parties. Néanmoins, ce décret a donné lieu à deux opinions différentes sur l’autorité de la Vulgate.

a) Une université, dirigée par des jésuites, doutait du sens à donner à ce décret et elle demanda à la S. G. du Concile, instituée par Pie IV en 1564, si, en vertu de ce décret, on devrait imputer une erreur dans la foi à ceux qui avanceraient quelque chose de contraire à la moindre période et au moindre membre de phrase des livres canoniques, en y comprenant même les passages qui sont omis par la Vulgate, mais qui se trouvent dans les textes hébreu et grec ; ou s’il fallait imputer une erreur contre la foi seulement à ceux qui rejetteraient soit un de ces livres tout entier soit une des parties dont la canonicité et l’inspiration ont été autrefois discutées. La S. C. répondit, le 17 janvier 1576, qu’on ne pourrait rien avancer qui fût contraire à l’édition latine de la Vulgate, quand ce ne serait qu’une période, une assertion, un membre de phrase, une parole, un mot ou un iota, et elle reprit sévèrement A. Véga, qui, dans son traité rappelé plus haut, avait tenu un langage audacieux. Cette décision fut publiée par Allatius, qui la croyait inédite, dans Animadversiones in Antiquitatum Etruscarum fragmenta ab Inghiramis édita, Paris, 1640, n. 101, p. 179. Elle avait pourtant été éditée, en partie du moins, dans divers recueils des Déclarations de la S. C. du Concile, dont l’un parut à Francfort en 1608 et d’autres furent publiés par Vincent de Marcylla, 1609, et par Jean Gallemart, Cologne, 1619. Suarez, De fide, disp. V, sect. iii, n° 10, et Serarius, Prolegomena bibliaca, c. xix, q. xi, Paris, 1704, p. 169, la connaissaient en manuscrit. Cependant les théologiens ont douté longtemps de son authenticité, ou ont prétendu au moins que son texte avait été altéré. Mais M. Batiffol découvrit à la bibliothèque Vaticane, lat. 0326, un commentaire du concile de Trente, fait par le cardinal Carafa, qui en 1576 était président de la Congrégation du Concile. Or, au sujet des décrets de la IV session, le cardinal analyse la décision de la S. C. P. Batiffol, La Vaticane de Paul III à Paul V d’après des documents nouveaux, Paris, 1890, p. 72-76. L’authenticité de la décision est donc certaine. J. Thomas, Mélanges d’histoire et de littérature religieuse, Paris, 1899, p. 308, note 1.

Mais quel en est le sens ? Elle ne signifie pas, comme on l’a cru, que la Vulgate était absolument parfaite, parce qu’elle interdisait d’en mettre en question le moindre mot et la plus petite syllabe. Elle n’adopte pas, en effet, le premier sentiment exprimé dans la consultation, d’après laquelle il aurait été de foi que tous les membres de phrase et tous les mots de la Vulgate, du grec et de l’hébreu seraient la reproduction exacte du texte original, inspiré et canonique, et que ce texte n’aurait subi soit dans la Vulgate, soit dans les textes hébreu et grec aucune altération de l’étendue d’une phrase, d’un mot, d’une syllabe ou d’un iota. Pour l’hébreu et le grec, la S. C. renvoie à la troisième règle de l’Index, qui déclare toutes les versions de la Bible non authentiques inférieures à la Vulgate authentique. Quant à la Vulgate, elle dit qu’on ne peut rien avancer contre elle, pas même une phrase ni un iota, parce qu’elle contient l’Écriture inspirée et canonique, les Livres Saints que le concile a reconnus pour sacrés et canoniques et dont il a dressé la liste. Cf. A. Vacant, Études théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, Paris, 1895, t. i, p. 435-456.

Bien que la Congrégation du Concile n’ait pas admis l’absolue perfection de la Vulgate, des théologiens, surtout des Espagnols, l’admirent, en se fondant sur la teneur même du décret de Trente, qui déclarait cette version authentique. Bellarmin, jeune professeur à Louvain, en parlait déjà dans une lettre qu’il adressait au cardinal Sirlet, le 1er avril 1575. Le Bachelet, Bellarmin et la Bible sixto-clémentine, p. 5, 104. L. de Tefia, Isagoge in totam sac. Scripturam, Barcelone, 1620, p. 30 b ; B. Ponce († 1626), Quæstiones expositivæ, id est, de Sac. Scriptura exponenda, q. iii, dans Cursus completus Sac. Scripturæ de Migne, t. i, col. 878 (qui dit que c’est l’opinion commune de son temps) ; Jean de Saint-Thomas, In iiam, IIæ, disp. III, a. 3 ; C. Frassen, Disquisitiones biblicæ, Paris, 1682, t. i. Cf. Mariana, Pro editione Vulgata, dans le Cursus, l. 1, col. 590 ; Bannez, Scholastica commentaria in Iam partem Sum. theol. S. Thomæ, Salamanque, 1584, q. i, a. 8. Ce sentiment était encore soutenu en 1753 par le P. Frévier, La Vulgate authentique dans tout son texte ; plus authentique que le texte hébreu, que le texte grec qui nous restent, Rome (Rouen). Voir Le Bachelet, op. cit., p. 17-19. Cette opinion est évidemment en opposition avec la pensée des Pères du concile de Trente, et elle n’est plus depuis longtemps soutenue par aucun théologien.

b) Dès le XVIe siècle cependant, la plupart des théologiens soutinrent que la Vulgate, en raison de son long usage dans l’Église et de son adoption officielle par le concile de Trente, ne contenait aucune erreur concernant la foi et les mœurs. Mais ils ne l’estimaient pas si parfaite qu’on n’y remarquât non seulement des fautes de copiste, mais même des erreurs de traduction dans des détails qui ne sont pas du domaine de la foi et des mœurs, et qu’elle n’empêchât pas de recourir aux textes originaux pour rectifier ses erreurs et expliquer ses obscurités et ses ambiguïtés. Dans une copie du procès-verbal de la congrégation générale du 3 avril 1546, le cardinal de Jæn aurait émis l’avis que la Vulgate devait être reçue quoad mores et dogmata. Mais le procès-verbal officiel ne contient pas ces mots. S. Ehses, Concilium Tridentinum, t. v, p. 59. J. Driedo, De ecclesiasticis Scripturis et dogmatïbus, Louvain, 1550, 1. II, c. i, prop. 2°, l’affirmait expressément. M. Cano, De locis theologicis, Salamanque, 1563, 1. II, c. xiii, et le cardinal Carafa, dans son commentaire cité du concile de Trente, voir P. Batiffol, op. cit., p. 74, n’obligeaient à suivre la Vulgate que dans les passages doctrinaux et moraux. Bellarmin, dès 1575, dans sa lettre à Sirlet, dans ses Controverses professées à Rome dès 1576, De verbo Dei, 1. II, c. x-xi, dans sa dissertation De editione latina Vulgata, dont la seconde rédaction est de 1591, expose et soutient très expressément ce sentiment ; il relève les erreurs de traduction de la Vulgate. Cf. J. de la Servière, La théologie de Bellarmin, p. 17-24 ; Le Bachelet, Bellarmin et la Bible sixto-clémentine, p. 5, 10-16, 104, 107125, 178-179. Ce fut l’opinion de Bonfrére, Præloquia in Sac. Script., c. xv, sect. iii, dans la Cursus completus Scripturæ Sacræ de Migne, 1. 1, col. 196, de Grégoire de Valence, De objecta fidei, q. viii, §43, de Suarez, De fide, disp. V, sect. x, n. 3. On peut dire que c’est le sentiment commun des théologiens catholiques. Les plus récents interprètent même dans ce sens l’authenticité de la Vulgate, qu’ils entendent comme supposant et entraînant la conformité substantielle de la Vulgate avec les textes originaux, conformité affirmée publiquement par l’autorité officielle de l’Église au concile de Trente. Noël Alexandre, Hist. eccl., sæc. iv, diss. XXXIX, a. 5, Paris, 1699, t. iv, p. 406-410 ; P. Chrismann, Regula fidei, § 64, dans Cursus completus theologiæ de Migne, t. vi, col. 917 ; H. Reusch, Lehrbuch der Einleitung in das Alte Testament, 4e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1870, p. 210 ; Id., Erklärung der Decrete des Trienter Concils über die Vulgata, dans Der Katholik, 1860, t. i, p. 641 ; Franzelin, Tractatus de divina traditione et Scriptura, 3e édit., Rome, 1882, p. 512-514 ; Mazzella, De virtutibus infusis, Rome, 1879, p. 554-555 ; Hurter, Theologiæ dogmaticæ compendium, 3e édit., Inspruck, 1880, t. i, p. 165-166 ; Vigouroux, Manuel biblique, 12e édit., Paris, 1906, t. i, p. 230-237 ; Gilly, Précis d’introduction générale et particulière à l’Écriture sainte, Nîmes, 1867, t. i, p. 195-198 ; R. Cornely, Introduclio generalis, 2e édit., Paris, 1894, p. 468-481 ; C. Chauvin, Leçons d’introduction générale, Paris, 1898, p. 372375 ; J.-V. Bainvel, De Scriptura Sacra, Paris, 1910, p. 180-192, etc. Toutefois, ces théologiens ne sont pas d’accord au sujet de l’étendue de la conformité de la Vulgate avec les textes originaux, et il y a en ces matières une part d’appréciation qui tient plus ou moins compte des faits et de la critique du texte.

Voir encore Branca, De authentia Vulgatæ Bibliorum editionis, Milan, 1816 ; L. von Ess, Pragmatica doctorum catholicorum Tridentini circa Vulgatam decreti sensum, nec non licitum textus originalis usum testantium historia, Vienne, 1816 ; Pagmatisch-kritische Geschichte der Vulgata, Tubingue, 1824 ; J. Brunati, De nomine, auctore, emendatoribus et authentia Vulgatæ dissertatio, trad. lat. d’un écrit italien, Vienne, 1827 ; C. Vercellone, Sulla autenticità délie singole parti délia Bibbia volgata secondo il decreto tridentino, Rome, 1866 ; trad. franc., dans la Revue catholique de Louvain, 1866, p. 641, 687 ; 1867, p. 5 ; Ghiringello, dans la Rivista universate de Gênes, février 1867 ; J. Corluy, dans les Études religieuses, novembre 1876, p. 627-631 ; dans la Controverse, 15 mai 1885, p. 55-63 ; 15 mars 1886, p. 379-382 ; dans la Science catholique, 15 avril 1894, p. 438445 ; S. di Bartolo, Les critères théologiques, trad. franc., Paris, 1889, p. 238-243 ; J. Didiot, Commentaire de la IVe session du concile de Trente théologique ; dans la Revue des sciences ecclésiastiques, mai 1889, p. 390-419 ; historique, juin 1889, p. 481518 ; traditionnel, septembre et novembre 1890, p. 193226, 385-400 ; A. Durand, dans les Études, 1898, t. lxxv, p. 216-229 ; Vindex, Zur Frage von der Autenticität der Vulgata, dans Historisch-pblitische Blätter, Munich, 1899, t. cxxiv, p. 102-114 ; Bonaccorsi, Questione bibliche, Bologne, 1904 ; E. Mangenot, art. Authenticité, dans le Dictionnaire de théologie catholique, t. i, col. 2587-2590.

VI. La Bible sixto-clémentine. — 1° La revision de la Vulgate confiée au pape par le concile de Trente. — Les Pères du concile savaient que le texte de la Vulgate était fautif dans les éditions courantes, et en même temps qu’ils déclaraient cette version authentique, ils résolurent de demander au pape d’en faire une édition aussi correcte que possible. Voir les procès-verbaux des délibérations, du 17 mars au 3 avril 1546, dans Theiner, op. cit., t. i, p. 65, 79, 85 ; . S. Ehses, op. cit., t. v, p. 29, 37, 50, 59-66. Mais le décret, publié le 8 avril, ne mentionnait pas ce détail et ordonnait seulement d’éditer la Vulgate le plus correctement possible. Les théologiens romains remarquèrent cette lacune, et le 17 avril, le cardinal Farnèse écrivit aux légats pontificaux pour leur demander quelle avait été l’intention-du concile à ce sujet. Les légats répondirent, le 26, que le concile les avait chargés de supplier le Saint-Père de faire corriger le plus tôt possible la Bible latine et, s’il se pouvait, la Bible grecque et la Bible hébraïque. Les théologiens romains voyaient bien les difficultés de l’entreprise ; ils promirent toutefois de chercher les moyens d’en triompher. Les légats remercièrent le souverain pontife de sa sollicitude et promirent le concours des théologiens du concile. Voir Vercellone, Dissertazioni academiche, p. 79-84. Cf. Pallavicini, Histoire du concile de Trente, 1. VII, c. xii, édit. Migne, t. ii, col. 192-194. Sur les travaux entrepris à Trente, voir dom Höpfl, Kardinal Wilhelm Sirlets Annotationen zum N. T., p. 9-13, 40 ; Mercati, dans Theologische Revue, 1909, p. 60-62 ; Le Plat, Monument., t. iv, p. 104-110.

Éditions privées. — Comme les premiers travaux furent vite interrompus, des particuliers entreprirent de corriger le texte de la Vulgate. — 1. Éditions de Louvain. — Les théologiens de Louvain y travaillèrent les premiers. Sur l’œuvre du dominicain Jean Henten, voir t. ii, col. 1475. Après la mort de Henten (1566), son édition fut perfectionnée, sous la direction de Luc de Bruges. Elle eut, sous cette nouvelle forme, neuf éditions (1573-1594) et celle de 1583 servit aux correcteurs romains. — 2. Le Nouveau Testament de Zeger. — Un franciscain flamand, Tacite-Nicolas Zeger, publia, de son côté, en 1553, des Scholia et des Castigationes sur le Nouveau Testament, et il se proposait de corriger la Vulgate d’après les leçons des Pères et des manuscrits. Voir Critici sacri, 3e édit., Amsterdam, 1698, t. vii. Dans une lettre du 15 août 1553, ibid., p. xii-xvi, il demandait au pape Jules III d’approuver sa correction et de déclarer authentique son édition. Cf. R. Simon, Histoire critique des commentaires du N. T., Rotterdam, 1693, c. xxxix, p. 573-575 ; Dissertation critique sur les principaux actes manuscrits du N. T. (à la suite de l’ouvrage précédent), p. 78-79.

La Bible sixtine. — 1. Sa préparation. — Les travaux de correction, entrepris à Rome dès 1546, marchèrent lentement jusqu’en 1554 ; Sirlet s’occupait du Nouveau Testament et Nicolas Majoranus de l’Ancien. H. Höpfl, op. cit., p. 24-25, 37 ; Mercati, loc. cit. Pie IV qui, avant son élévation au siège pontifical, avait favorisé Majoranus, institua une congrégation de cardinaux et de consulleurs. Quelques manuscrits, notamment le Paulinus, furent collationnés, mais la mort de Færnus en 1561 interrompit les recherches, et le concile de Trente fut clos en 1563, avant que la correction officielle de la Vulgate ne fût terminée. Saint Pie V confirma la congrégation établie par son prédécesseur et nomma de nouveaux membres. On reprit tout ce qui avait déjà été exécuté, afin de profiter des leçons de manuscrits anciens, récemment apportés à Rome. On avançait si lentement que, du 28 avril au 7 décembre 1569, au cours de 26 sessions générales, on n’avait relevé les variantes que de deux seuls livres, la Genèse et l’Exode. Sous Grégoire XIII, à l’instigation du cardinal Perretti et sous sa direction, on édita la version des Septante. Voir col. 1639-1641. Devenu pape sous le nom de Sixte V, le cardinal Perretti, dès la seconde année de son pontificat (1586), fit reprendre activement la correction de la Vulgate. On avait fait venir d’excellents manuscrits latins de différentes bibliothèques de l’Italie, de l’Espagne et de la Flandre. Sixte V stimulait le zèle des correcteurs. Après plus de deux années d’étude, l’œuvre était achevée ; elle fut présentée au pape au commencement de 1589. Sixte V revit lui-même le texte entier ; il maintint la plupart des corrections faites, mais il en rejeta un certain nombre, malgré l’opposition du cardinal Carafa, et détermina lui-même les leçons qu’il fallait admettre à leur place, comme il s’en était réservé le droit, dès le 22 janvier 1588. Bullarium romanum, Naples, t. viii, p. 996. Il surveilla de très près l’impression, qui fut faite au Vatican, non pas par Paul Manuce, mais par Dominique Basa, de Venise. Voir Mgr Baumgarten, Die Vulgata Sixtina von 1590 und ihre Einführungsbulle, Munster, 1911, p. 1-19, 135. L’impression avait commencé avant que le pape n’eût achevé la revision de l’œuvre des correcteurs. Ainsi, le 3 juin, Sixte V disait à l’ambassadeur de Venise qu’il en était arrivé à l’Apocalypse et que le livre de la Sagesse était sous presse. Ibid., p. 136. Les Avvisi di Roma annonçaient, le 1er novembre, que l’Ancien Testament allait paraître, et le 25, qu’il était entre les mains des cardinaux de la Congrégation de l’Index. Ibid., p. 22. L’impression était terminée le 10 avril 1590. Les Avvisi di Roma annonçaient, le 2 mai, que des exemplaires avaient été distribués aux cardinaux et aux principaux officiers de la cour pontificale, et que la vente était confiée au seul imprimeur du palais, Dominique Basa. Ibid., p. 23. Le 31 mai, Sixte V fit expédier aux princes 25 exemplaires de la nouvelle Bible, avec des brefs, datés du 29. Ibid., p. 24.

2. Sa description. — La Biblia sacra Vulgatæ editionis ad concilii Tridentini prsescriptum emendata a Sixto V P. M. recognita et approbata forme un volume in-f° en trois parties de 1140 pages à deux colonnes. Le texte est imprimé en grands caractères, sans séparation des versets, dont les chiffres sont indiqués à la marge et qui sont différents de ceux de Robert Estienne. L’impression est fort belle et on n’y a compté qu’une quarantaine de fautes typographiques. Le texte est précédé de la bulle Æternus ille, qui promulguait la nouvelle édition. On n’en connaît qu’un petit nombre d’exemplaires : 15 en Italie, 8 en Allemagne, 4 en Autriche, 8 en Angleterre, 3 à la Bibliothèque nationale de Paris (cotés À 216, 216 bis et 216 ter, réserve), 1 à Saint-Pétersbourg, 1 à Madrid et 1 à New-York. Ibid., p. 66-82. On ignore quels sont les détenteurs actuels d’autres exemplaires, dont on a gardé la trace. Ibid., p. 82-85. Leur prix est très élevé. Leurs dimensions ne sont pas les mêmes et le papier est différent. Il y a des exemplaires de luxe. Des fautes d’impression ont été corrigées par des moyens différents et en nombre plus ou moins grand. Le pape lui-même mettait la main à cette correction. Ibid., p. 24, 95 ; Le Bachelet, op. cit., p. 193-194.

3. Sa publication. — On a prétendu que Sixte V n’avait pas attribué à sa Bible une autorité définitive et qu’il ne la considérait que comme un essai. Cette opinion n’est plus soutenable. En effet, l’original de la bulle Æternus ille, qui promulgue l’édition sixtine et déclare qu’elle représente la Vulgate reconnue authentique par le concile de Trente-, a été retrouvé aux archives du Vatican (registre des Epislolæ ad principes, t. xxii), avec deux épreuves successivement corrigées, et deux exemplaires d’une édition spéciale, tirée le 22 août 1590. L’original contient l’attestation des cursores, qui avaient affiché la bulle le 10 avril 1590 aux lieux fixés par le droit. La bulle est datée du 1er mars 1589, mais aussi de la cinquième année du pontificat de Sixte V, qui avait commencé le 24 avril 1585, par conséquent du 1er mars 1590, selon notre manière actuelle de compter les années à partir du 1er janvier, tandis que, à cette époque, la cour romaine faisait débuter l’année ecclésiastique au 25 mars. Cf. Mgr Baumgarten, Biblische Zeitschrift, 1907, t- v, p. 189-191 ; Die Vulgata Sixtina von 1590, p. 28-39. Dans les brefs aux princes, dont Mgr Baumgarten connaît douze exemplaires, le pape affirme qu’il a décidé par une constitution perpétuelle, déjà éditée, que sa Bible corrigée doit être reçue par tous. Les témoignages opposés, recueillis par le P. Le Bachelet, op. cit., p. 81-88, perdent ainsi toute valeur, et l’hypothèse d’une anticipation de la promulgation de la bulle, hypothèse imaginée par le P. Azor, entraînerait la falsification d’un acte apostolique, soumise dès lors aux peines tes plus graves. Mgr Baumgarten, Die Vulgata Sixtina von 1590, p. 96-134. Pour une édition diplomatique et critique de la bulle, voir Biblische Zeitschrift, 1907, t. v, p. 337-354 ; Die Vulgata Sixtina von 1590, p. 40-65. Dans les derniers jours de sa vie, Sixte V avait l’intention de faire imprimer une sorte

de correctoire, qui contiendrait toutes les modifications, les omissions et les additions de sa Bible et à l’aide duquel chacun pourrait corriger son propre exemplaire de la Vulgate. Mgr Baumgarten, op. cit., p. 25-26.

4. Son sort. — Sixte V mourut le 27 août 1590. Les critiques, que les membres de la congrégation, dont il n’avait pas admis toutes les corrections, avaient soulevées, de son vivant, contre sa Bible, redoublèrent après sa mort. Le 5 septembre, les Avvisi di Roma annonçaient que les cardinaux, chargés de l’administration de l’Église pendant la vacance du Saint-Siège, avaient suspendu la vente de la nouvelle Bible et de l’édition séparée de la bulle de Sixte V. Ibid., p. 96. Le 26 septembre, ils rapportaient l’interdiction absolue de vendre la Bible sixtine. Ibid., p. 97. Cette interdiction entraînait, de fait, la suppression de l’édition corrigée. À cette date, les dispositions de la bulle JSternus ille n’étaient pas encore obligatoires dans l’Église universelle, puisque Sixte V avait fixé un délai de quatre mois, expiré le 10 août, pour l’Italie, et de huit mois, non encore expiré, pour les pays transalpins. En effet, du vivant du pontife, l’inquisiteur de Venise avait voulu appliquer aux libraires de cette ville les dispositions de cette bulle. Le doge fit présenter par son ambassadeur Badoer des observations au pape, qui déclara que l’inquisiteur faisait du zèle et n’avait pas alors le droit d’interdire la vente des anciennes Bibles. Ce fait prouve nettement, ainsi que d’autres dépêches du même ambassadeur qui se trouvent aux archives d’État de Venise, que Sixte V avait fait une œuvre définitive et qu’il n’avait pas l’intention de la corriger. Voir F. Amanu, Die Bibel Sixtus V, dans Théologie und Glaube, Paderborn, 1912, p. 401-402. En outre, dès le mois de février 1591, Grégoire XIV confia à la Congrégation de l’Index le soin de réformer la Bible sixtine. Ce pape, ne voulant pas condamner l’œuvre de son prédécesseur, employa l’expédient que lui avait suggéré Bellarmin. Le Bachelet, op. cit., p. 37-38.

Sur la demande de Bellarmin, Clément VIII ordonna, le 15 février 1592, de racheter tous les exemplaires de la Bible sixtine, qu’on pourrait retrouver. Le nonce de Venise en rapporta plusieurs, le 24 août. Au mois de février 1593, on s’occupait de ceux que les jésuites avaient rachetés. Il était encore question de nouveaux rachats, au mois de janvier et d’avril 1594. Le Bachelet, op. cit., p. 54-56, 150-152, 198-199 ; Mgr Baumgarten, op. cit., p. 99-10-1.

5. Sa valeur. — La Bible sixtine était loin d’être dépourvue de valeur critique. Les changements, que Sixte V avait faits de sa propre autorité, n’étaient pas regrettables comme le prétendaient les adversaires de sa Bible. Ceux qu’a relevés Bellarmin, Loca prsecipua in Bibliis Sixti V mutata, dans Le Bachelet, op. cit., p. 130-134, cf. p. 44-45, sont peu importants. Voir d’autres reproches d’un censeur anonyme, ibid., p. 6162. Sixte V avait appliqué des principes critiques un peu différents de ceux qu’avait suivis la congrégation présidée par le cardinal Carafa ; il n’avait pas fait de modifications arbitraires dans le texte sacré. Si parfois il a choisi une leçon moins bonne, il a édité néanmoins un bon texte de la Vulgate, et sa Bible est le fruit d’un travail réellement scientifique. E. Nestlé, Ein Jubilâum den Lateinischen Bibel zum 9 november 1892, Tubingue, 1892, p. 17, et J. Wordsworth, Novum Testamentum D. N. J. C. latine, Oxford, 1898, t. i, p. 724, ont expressément reconnu les mérites critiques de la Bible sixtine.

4° La Bible clémentine. — 1. Sa préparation. — D’après les Avvisi di Roma, Baumgarten, op. cit., p. 98, Grégoire XIV chargea la Congrégation de l’Index de ramener la Bible sixtine à son ancienne forme, en

y introduisant les leçons qu’avait adoptées la congrégation présidée par le cardinal Carafa et que Sixte V avait rejetées. Dans la première réunion, tenue le 7 février 1591, on traita de la méthode à suivre, et on fixa cinq règles dans les séances suivantes. On en fit ensuite l’application, mais la revision avançait lentement, faute d’entente entre les consulteurs : on mit 40 jours à corriger la Genèse seule, et on commença l’examen de l’Exode, le 18 mars. Bellarmin écrivit probablement vers cette époque un mémoire De ratione servanda in Bibliis corrigendis, édité par le P. Le Bachelet, op. cit., p. 126-129. Il proposait de confier la revision de la Bible latine à un petit nombre de savants, qui l’exécuteraient rapidement. Le pape institua une congrégation spéciale de deux cardinaux et de huit consulteurs, qui se retira à Zagarolo dans la maison de campagne du cardinal Marc-Antoine Colonna, son président, et qui paracheva le travail en 19 jours. Le 23 juin, les Avvisi di Roma annonçaient ce rapide achèvement. Baumgarten, op. cit., p. 98. Cf. Le Bachelet, op. cit., p. 40-44. "

2. Sa publication. — On s’occupa aussitôt à Rome de décider si l’on publierait la nouvelle correction et comment. Sur la demande du pape, Bellarmin rédigea son avis, que le P. Le Bachelet a édité, p. 137-141. Cf. p. 45-48. Conformément à cet avis, la correction fut publiée, mais sous le nom de Sixte V : Biblia sacra Vulgatse editionis Sixti Quinti Pont. Max. jussu recognita atque édita. Ce ne fut qu’en 1604 que le nom de Clément VIII fut ajouté dans le titre à celui de Sixte V. Baumgarten, op. cit., p. vii-vih. La nouvelleédition ne devait pas d’abord être déclarée obligatoire et les anciennes éditions latines devaient continuer à être vendues. Bellarmin avait fait un second mémoire à ce sujet. Voir le texte dans Le Bachelet, p. 142-144. Le 26 juin, les Avvisi di Roma annonçaient cette décision, en ajoutant que la congrégation ne tiendrait plus de séance ordinaire avant l’apparition de la nouvelle Bible. Baumgarten, p. 98-99. Toutefois, rien ne fut entrepris avant le pontificat de Clément VIII. Peu après son élection (30 janvier 1592), il chargea les cardinaux Frédéric Borromée et Auguste Valieravec le P. Tolet de préparer le texte pour l’impression. Le P. Tolet fit seul le travail. Baumgarten, p. 136-137. Il avait fini le tout, le 28 août. Les cardinaux désignés donnèrent leur approbation. Le 18 novembre, les Avvisi di Roma annonçaient la prochaine apparition de la nouvelle Bible, mais, le 25, ils expliquaient le retard, en disant que le pape avait voulu la revoir par lui-même et l’amender encore. Ibid., p. 101. L’impression était surveillée par le P. Tolet, ibid., p. 104, note ; elle fut exécutée rapidement, et la nouvelle Bible parut avant la fin de l’année 1592.

3. Sa description. — Cette Bible est un beau volume in-folio, imprimé avec les mêmes caractères que la sixtine et par le même imprimeur, Dominique Basa. La préface, qui est de la main de Bellarmin, expose que cette nouvelle édition réalise un projet de Sixte V, qui avait voulu retoucher sa première œuvre dont il n’était pas satisfait. Voir Le Bachelet, p. 53, 146-149 ; Baumgarten, p. 108-110. Une bulle de Clément VIII, datée du 9 novembre 1592, pourvoyait à la conservation du nouveau texte corrigé. Sans condamner les anciennes Bibles, il réservait à l’imprimerie vaticane pendant dix ans le monopole de la nouvelle édition. Ce laps de temps écoulé, tout imprimeur avait le droit de la reproduire, purement et simplement. On avait, repris la division ordinaire des versets et on avait reproduit, en dehors de la série des livres canoniques, le III* et le IVe livre d’Esdras et la Prière de Manassé, que Sixte V avait omis. Les fautes de typographie sont nombreuses, tant l’impression avait été précipitée. Voir Vercellone, Biblia sacra, in-4°, Rome, 1861, p. v-vil. 4. Sa valeur. — Bellarmin, dans la préface, reconnaît que la nouvelle Bible n’est pas parfaite, et qu’on y avait laissé à dessein des choses qui semblaient devoir être corrigées. Du reste, le travail des correcteurs n’a pas toujours été exactement reproduit, par l’incurie de l’imprimeur. Les protestants ont violemment attaqué à diverses reprises la revision pontificale de la Vulgate. En 1600, Thomas James a publié à Londres un pamphlet intitulé : Bellum papale sive concordia discors Sixti V et Clementis VIII circa hieronymianam editionem, dans lequel il relevait environ 2000 différences entre les deux Bibles. Une seconde édition parut en 1606, et Cox a réimprimé encore ce livre en 1840 et en 1855. L’argument est sans valeur, puisque les divergences signalées étaient volontaires, et le P. Henri de Bukentop en comptait 2134. Lux de luce l. III, Bruxelles, 1706. Le P. Vercellone en a remarqué 50 autres, de minime importance, il est vrai, rien que dans le Pentateuque. En 1906, le P. Hetzenauer reprenait la comparaison des deux textes et aboutissait au chiffre total de 4900 divergences, p. 367. Les protestants prétendaient aussi que les éditeurs des Bibles sixtine et clémentine n’avaient fait que choisir des leçons différentes parmi les variantes des Bibles de Louvain. Ce reproche n’est pas fondé. Bien qu’ils aient utilisé les Bibles de Louvain, les correcteurs romains ont recouru directement aux manuscrits, aux textes originaux et aux citations bibliques des Pères, et des leçons qu’ils ont adoptées la dixième partie seulement se trouvait dans les éditions louvaniennes. Pour les Évangiles, la Bible sixtine est le plus souvent d’accord avec l’édition de Robert Estienne de 1538, tandis que la Bible clémentine se rapproche surtout de l’édition de Henten, imprimée en 1548. Cf. J. Wordsworth, op. cit., t. I, p. 721-723. Les critiques actuels sont unanimes à reconnaître que la Bible clémentine est le fruit d’un travail sérieux, aussi parfait qu’on pouvait le faire alors avec les ressources critiques dont on disposait. Quoique son texte ne soit pas absolument pur et qu’il ait conservé des leçons qui n’appartenaient pas à l’œuvre primitive de saint Jérôme, il est meilleur que celui des éditions qui l’ont précédé au XVIe siècle. Il est aussi en progrès sur celui de la Bible sixtine. C’est donc une édition, qui est bonne en elle-même, très bonne pour l’époque, sans être parfaite. Cf. C. R. Gregory, Textkritik des Neuen Testaments, Leipzig, 1902, t. ii, p. 621.

5. Ses éditions. — a) Éditions romaines. — En vertu du décret de Clément VIII, l’imprimerie vaticane devait publier seule, pendant dix ans, la Bible nouvelle. On en lit, en 1593, une seconde édition, dans laquelle on corrigea un certain nombre des erreurs typographiques de la première ; mais celles qui furent reproduites et les nouvelles qui furent commises dépassèrent le chiffre de la première. Une troisième édition sortit des mêmes presses en 1598 ; elle ne corrigea qu’une partie des fautes précédentes et surpassa les deux premières éditions en négligence. Pour porter remède à un mal qui empirait, on imprima en appendice une triple liste d’errata des trois éditions de 1592, 1593 et 1598, dont devaient tenir compte les imprimeurs postérieurs. Mais cette triple liste n’était pas complète de sorte que, pendant longtemps, des fautes de cette nature se sont perpétuées dans les Bibles subséquentes. En 1603, Luc de Bruges releva sur les éditions romaines les principales divergences pour faciliter aux imprimeurs, et notamment à Plantin d’Anvers, l’impression, correcte de la nouvelle édition : Romanæ correctionis in latinis Bibliis editionis vulgatæ jussu Sixti V Pont. max. recognitis loca insigniora, Anvers, 1603 ; 2e édit., 1618. En 1906, le P. Hetzenauer a compté 270 différences entre l’édition de 1592 et celles de 1593 et de 1598, 140 entre la seconde et la première et la troisième, 830 entre cette dernière et les deux précédentes. Le Nouveau Testament, imprimé à Rome, en 1607, n’est qu’une reproduction partielle de l’édition de 1598. Le P. Vercellone y a remarqué les mêmes fautes caractéristiques. Une table d’errata, qui y est ajoutée, contient des fautes qui n’ont jamais été corrigées dans les éditions romaines antérieures et postérieures. Celles de 1618 et de 1624 diffèrent à peine de la troisième. Des éditions plus correctes ont paru à Rome en 1671, 1765, 1768 et 1784. Elles ont donné occasion à cette assertion fausse que les souverains pontifes auraient introduit de nouvelles corrections dans la Bible clémentine.

6) Autres éditions. — Celles qui ont paru au xviie et au xviiie siècle sont trop nombreuses pour être mentionnées. Voir Le Long, Bibliothèque sacrée, Paris, 1723, t. i, p. 234, qui en avait dressé une liste, complétée par Copinger. Elles ne présentent pas d’intérêt, parce qu’elles dérivent toutes plus ou moins directement des éditions romaines, surtout de celle de 1598 avec sa triple liste d’errata. Toutefois, les fautes signalées n’ont pas toujours été exactement corrigées, et quelques erreurs se sont perpétuées d’édition en édition. On peut dire qu’aucune n’est absolument pure sous ce rapport. Au cours du XIXe et du XXe siècle, quelques éditeurs ont eu à cœur de viser à une correction plus parfaite. L’édition de Francfort en 1826, quoique louée par Léon XII, est remplie d’un grand nombre de fautes. Trois éditions constituent un progrès sérieux, dans cette voie de correction typographique : celle de Léonard van Ess, Tubingue, 1824, de Valentin Loch, Ratisbonne, 1849, l’édition de Marietti, Turin, 1851 ; cette dernière a été louée par la S. C. de l’Index pour sa fidélité. Voir Analecta juris pontificii, 1857, col. 2712. Deux autres, extrêmement soignées, sont l’œuvre du P. Vercellone, Rome, 1861 (reproduite par beaucoup d’éditeurs) et du P. Hetzenauer, 2 in-4°. Inspruck, 1906. Voir la préface de l’édition du P. Vercellone.

Travaux particuliers pour l’amélioration de la Vulgate. — Si Clément VIII avait interdit aux catholiques de publier des éditions de la Vulgate, différentes de la correction romaine, et d’ajouter des variantes aux marges de cette édition, il n’avait pas défendu de relever dans les manuscrits les leçons nouvelles, qui pourraient y être découvertes et qui pourraient servir à améliorer le texte officiel de la Vulgate. En 1605, Luc de Bruges publiait les variantes qu’il avait recueillies dans les manuscrits de l’ancienne Vulgate et du texte grec sur les Évangiles : Notarum ad varias lectiones in quatuor Evangeliis occurrentes libellus duplex, quorum uno græcæ, altero latinæ varietates explicantur, Anvers. Cet ouvrage était dédié à Bellarmin. Le cardinal, après avoir promis de le lire, ajoutait : « S’il me paraît certain que le texte sacré puisse être avantageusement modifié quelque part, j’en parlerai au souverain pontife et aux cardinaux intéressés dans la question. Mais vous vous rendez bien compte vous-même qu’il n’est pas facile de faire dans un texte sacré des changements de cette sorte ; il n’en est pas moins fort utile que les gens doctes soient informés de diverses leçons et de l’avis d’hommes experts comme vous et vos semblables. » Lettre du 1er novembre 1606. Cf. Le Bachelet, op. cit., p. 69-70, 170-173. En 1618, Luc de Bruges ajouta à la seconde édition de ses Romanæ correctionis… loca insigniora, un autre petit livre continens alias lectionum varietates in iisdem Bibliis latinis, ex vetustis manuscriptis exemplaribus collectæ, quibus possit perfectior reddi, feliciter cœpta correctio, si accedat summi Pontificis auctoritas, Anvers. Ibid., p. 70, 174-185.

Au xixe siècle, un barnabite, le P. Charles Vercellone, encouragé par Pie IX, recueillit dans les documents manuscrits des correcteurs romains, dans les Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome V.djvu/1279 H. J. White, The latin versions, dans Scrivener-Miller, Introduction to the criticism of the New Testament, 4e édit., Londres, 1894, t. ii, p. 56-90 ; C. R. Gregory, Novum Testamentum græce. Prolegomena, Leipzig, 1894, t. ii, p. 971-1108 ; Id., Textkritik des Neuen Testaments, Leipzig, 1902, t. ii, p. 613-729 ; 1909, t. iii, -p. 1332-1343 ; F. G. Kenyon, Handbook to the textual criticism of the New Testament, Londres, 1901, p. 184-203 ; F. Vigouroux, Manuel biblique, 12e édit., Paris, 1906, t. i, p. 217-251 ; F. Kaulen, Einleitung in die Heilige Schrift, 3e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1890, p. 135-153 ; C. Trochon, Introduction générale, Paris, 1886, t. 1, p. 429-448 ; R. Cornely, Introductio generalis, 2e édit., Paris, 1894, p. 438-501 ; C. Chauvin, Leçons d’introduction générale théologique, historique et critique aux divines Écritures, Paris, s. d. (1897), p. 335-377.

Encyclopédies et dictionnaires. — B. F. Westcott, art. Vulgate, dans Dictionary of the Bible de Smith, Londres, 1863, t. iii, p. 1696-1718 ; O. F. Fritzsche, art. Lateinische Bibelübersetzungen, dans Realencyclopädie de Herzog, Leipzig, 1881, t. viii ; E. Nestlé, ibid., 3e édit., 1897, t. iii, p. 36-49 ; à part sous le titre : Urtext und Uebersetzungen der Bibel in übersichtlicher Darstellung, Leipzig, 1897, p. 96-109 ; F. Kaulen, art. Vulgata, dans Kirchenlexikon, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1901, t. xii, col. 1127-1142 ; H. J. White, art. Vulgate, dans Dictionary of the Bible de Hastings, Édimbourg, 1902, t. iv, p. 873-890.

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