Épîtres (Voltaire)/Épître 122

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Œuvres complètes de VoltaireGarniertome 10 (p. 456-457).


ÉPÎTRE CXXII.


À MONSIEUR LE PRINCE DE LIGNE,
SUR LE FAUX BRUIT DE LA MORT DE L’AUTEUR,
ANNONCÉE DANS LA GAZETTE DE BRUXELLES, AU MOIS DE FÉVRIER 1778[1].


Prince, dont le charmant esprit
Avec tant de grâce m’attire,
Si j’étais mort, comme on l’a dit,
N’auriez-vous pas eu le crédit

De m’arracher du sombre empire ?
Car je sais très-bien qu’il suffit
De quelques sons de votre lyre.
C’est ainsi qu’Orphée en usait
Dans l’antiquité révérée ;
Et c’est une chose avérée
Que plus d’un mort ressuscitait.
Croyez que dans votre gazette,
Lorsqu’on parlait de mon trépas,
Ce n’était pas chose indiscrète ;
Ces messieurs ne se trompaient pas.
En effet, qu’est-ce que la vie ?
C’est un jour : tel est son destin.
Qu’importe qu’elle soit finie
Vers le soir ou vers le matin ?



  1. Voltaire venait d’arriver à Paris.