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Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 7901

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Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 92-93).
7901. — À MADAME LA DUCHESSE DE CHOISEUL.
Ferney, 1er juin.

Madame, je crois que vous avez fait une gageure d’exercer votre patience, et moi, de pousser à bout vos bontés. J’ai eu l’honneur de vous parler, dans une de mes lettres[1], de sept frères, tous au service du roi, dont les jésuites avaient usurpé l’héritage, pour la plus grande gloire de Dieu. Voici, je pense, l’aîné de ces sept Machabées. Il prétend qu’ayant été auprès de vous, madame, le secrétaire des capucins, je dois, à plus forte raison, être celui des officiers qui ont été blessés au service. Je ne sais pas ce qu’il demande. Pour moi, je ne demanderais, à Versailles, que l’honneur et la consolation de vous entendre. Tout le monde croit, dans mon pays de neiges, que j’ai un grand crédit auprès de vous, depuis l’aventure des capucins, et surtout depuis celle des montres. Moi, qui suis excessivement vain, je ne les détrompe pas ; ils viennent tous me dire : Allons, notre secrétaire, vite une lettre pour madame la duchesse, qui fait du bien pour son plaisir. Je baisse les oreilles, j’écris, et puis je suis tout honteux, et je voudrais m’aller cacher.

J’ai l’honneur d’être, avec un profond respect, et en rougissant de mes hardiesses, madame, votre très-humble, très-obéissant, et très-obligé serviteur.

  1. Ce n’est pas dans une lettre à Mme de Choiseul (à moins qu’elle ne soit perdue), mais dans celle à Mme du Deffant, nº 7875.