Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/411-420

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Fascicules du tome 1
pages 401 à 410

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 411 à 420

pages 421 à 430



Varus, Préteur de Rome, eut ordre de proposer au peuple une loi qui en fixât le jour. La loi fut portée, & le jour marqué au 4e de devant les Nones de Juillet, c’est-à-dire, au 4e de ce mois : ce qui fut observé depuis. Voyez Tite-Live, Liv. XXV, & Seb. Corradus, dans ses notes sur le Brutus de Cicéron, n. 78.

Apollinaire. s. m. Nom propre d’homme. Apollinarius.

APOLLINARISTES. Apollinaristæ. Nom d’anciens Sectaires, dont S. Epiphane a parlé fort au long dans l’hérésie des Dimœtites ; ils ne croyoient point que Jésus-Christ eût pris de la Sainte Vierge une véritable chair. Apollinaris de Laodicée, qui étoit leur chef, avoit feint je ne sais quelle chair, qu’il prétendoit être de toute éternité, comme le remarque Saint Grégoire de Nazianze, Orat. 46. Il distinguoit l’ame de Jésus-Christ, de ce qu’on appelle en grec νοῦς, entendement, & par cette distinction, il établissoit que Jésus-Christ avoit pris une ame sans son entendement, & que le Verbe suppléoit à ce défaut ; quelques-uns même d’entre eux nioient que Jésus-Christ eût eu une ame. Ils croyoient que les ames des hommes étoient formées par d’autres ames, aussi-bien que les corps. Théodoret remarque qu’Apollinaire confondoit les personnes de la Sainte Trinité, & qu’il donnoit dans les erreurs de Sabellius. S. Balise lui reproche aussi d’avoir abandonné le sens littéral en expliquant la Sainte Ecriture, pour ne s’attacher qu’au sens allégorique. L’hérésie des Apollinaristes, qui étoit pleine de subtilité fut condamnée dans un synode d’Aléxandrie, sous Saint Athanase, l’an de Jesus-Christ 362, & ensuite à Rome par le Pape Damase, dans un concile, l’an 373. Les sectateurs d’Apollinaire ne s’accordoient pas tous entre eux, & ne soutenoient pas les mêmes erreurs ; ce qui donna lieu à différentes hérésies, toutes tirées des écrits & des erreurs d’Appollinaire : les plus considérables sont l’hérésie des Polémiens, sectateurs de Polémius, & celle des Antidicomarianites.

APOLLINE, s. f. Apollonia. Nom d’une Sainte Vierge, qui souffrit le martyre sous Philippe. Quelques Dictionnaires disent Apolline, ou Apollonie, comme si l’un & l’autre étoit également bon. Ils se servent même du dernier plutôt que du premier dans leurs discours. Cela est contre l’usage. On dit toujours Sainte Apolline, & jamais Sainte Apollonie, si ce n’est en Auvergne ; car M. l’Abbé Chastelain, dans son Martyrologe au 9 février, remarque que dans cette province on prononce Sainte Apollonie, & non pas Sainte Apolline, comme on dit ailleurs. Le Martyrologe romain dit qu’elle souffrit sous Dèce, mais ces mots, sous Dèce, ajoutés dans le nouveau Martyrologe romain, à l’éloge qu’Usuard, après Addon, fait de cette Sainte, sont contraires à ce qu’en dit S. Denys d’Aléxandrie, dans sa lettre à Fabius d’Antioche rapportée par Eusèbe, Liv. 6, ch. 34, où on lit, qu’un an entier avant que Dèce commençât à persécuter l’Eglise, cette Sainte fut martyrisée à Al'xandrie dans une émeute populaire, Philippe étant pour lors Empereur, & non pas Dèce. Dans les bas siècles on a inventé des actes de Sainte Apolline, qui n’ont aucun rapport à ce que S. Denys d’Al'xandrie dit d’elle, excepté l’arrachement des dents. Le Jésuite Bollandus, qui les a donnés sur un manuscrit d’Utrecht, les qualifie d’apocryphes. Comme l’Auteur de ces actes fait tuer Sainte Apolline d’un coup d’épée à Rome, sous Julien l’Apostat, ils ont trompé Gréven, Canisius, & Ferrarius, en leur faisant distinguer mal-à-propos deux Saintes Apollines.

APOLLON. s. m. Apollo. Nom d’un Dieu, fils de Jupiter & de Latone. Son nom est grec, & vient, selon Platon, ἀπὸ τοῦ πάλλειν τὰς ἀϰτίνας, de ce qu’il darde ses rayons. D’autres prétendent qu’il vient d’ἀπολλύσθαι, perdre, détruire. Ainsi Apollon signifie un destructeur, un exterminateur ; parce qu’avec ses dards il avoit la réputation de tout perdre. Apollon avoit bien des fonctions dans le Paganisme. 1°. Il étoit le soleil. C’est pour cela qu’au rapport de Cicéron, de nat. deor. libr. 2. Chrysippe dérivoit son nom de l’α privatif, & πολλοὶ plusieurs, parce qu’il n’y a qu’un soleil. Hésychius donne cette étymologie, & les Syriens l’appellent, dit-on, חדד, hhadad, qui signifie un, c’est Macrobe qui le dit, Saturn, Liv. 1, ch. 21 & 23. Il dit encore au même endroit, qu’il est appelé par les Egyptiens Horus, qu’on peut tirer de l’hébreu אור, or, qui signifie lumière. Il étoit aussi le Dieu & l’inventeur de la Médecine, & de l’art de la divination ; aussi presque tous les oracles lui étoient attribués. On lui attribue aussi l’invention de l’arc. Peut-être n’est-ce qu’une allusion aux rayons du soleil. Il étoit encore le Dieu de la Musique, de la Poësie, & de la Rhétorique, présidoit aux beaux Arts, & étoit le chef des Muses. On peignoit toujours Apollon jeune & sans barbe, & avec de grands cheveux. Le colosse de Rhodes étoit une figure d’Apollon. La tête est représentée couronnée de rayons sur les médailles de Rhodes, avec une rose au revers, & le mot ΡΟΔΙΩΝ. On dit qu’il prit le luth à Mercure ; car Apollon n’en est point l’inventeur ; Homère en fait l’honneur à Mercure, dans l’hymne qu’il a composée à sa louange. Cependant Polydore Virgile fait Apollon inventeur de la lyre & de la flute, Liv. 1. ch. 5. La cigale, le coq, l’épervier, l’olive, & le laurier, lui étoient consacrés.

Cicéron, de nat. deor. lib. 2, c. 57, distingue quatre Apollons. Le premier & le plus ancien, fut le gardien d’Athènes ; le second fut fils d’une Corybante, & naquit en Crète ; le troisième de Jupiter & de Latone. Eusèbe prétend que celui-ci est le plus ancien. Le quatrième né en Arcadie, donna des loix aux Arcadiens, & ils l’appellerent à cause de cela Nomius, ou législateur.

Apollon a eu bien des surnoms & des épithètes. Apollon Acésien, Acesius, parce qu’il étoit Dieu de la Médecine, d’ἀϰέομαι, medeor ; il eut aussi à Rome le surnom de Médecin, Medicus ; Actiaque, Actiacus, parce qu’il étoit honoré à Actium ; Alexicaque, qui chasse le mal ; à cause qu’il présidoit à la Médecine ; Cœlispex, qui regarde du haut du ciel, parce qu’il étoit le soleil ; Capitolin, Capitolinus ; Chochéen, Chocæus ; Clarien ou de Claros, Clarius ; Délien, ou de Délos, Delius, Deliacus ; Delphique, Delphicus ; de Didyme, Didymæus ; Hebdomagète, Hebdomagetes, parce qu’il étoit venu au monde le septième jour du mois, d’où vient que ce jour lui étoit consacré ; ou parce qu’il étoit venu au monde le septième mois, comme prétend le Scoliaste de Callimaque ; Héliopolitain, Heliopolitanus ; Hyperboréen, Hyperboreus ; Milésien ; Milesius ; Palatin, ou du mont Palatin à Rome, Palatinus ; Parœtonien, Parætonius, Ptous, Sarpedonius, Sofianus, Thustanicus ; ces noms lui furent donnés des lieux où il étoit honoré ; Daphnæus de Daphné, à cause d’une fontaine de ce nom qui rendit des oracles, ou du laurier, en grec δάφνη, qui lui étoit consacré ; Ἐξοϰεστήριος, qui remédie ; Ἀποστρόπαιος, qui tourne mal, parce qu’on lui racontoit les mauvais songes qu’on avoit eus, afin qu’il les détournât ; Προστάτηριος, à cause des statues qu’il avoit ordinairement dans les portiques ; Ἰήιος, Ἰομένος & λεχύνοριος, par rapport à ceux qui commençoient à s’adonner aux sciences, & à se trouver dans les assemblées des Philosophes qu’on appelloit λέχαι, λοίμιος ; pestilentiel, qui donne la peste ; Myricinus, parce qu’à Lesbos il avoit de la fougère en main, & qu’en quelques endroits cette herbe servoit aux divinations ; Navalis, à cause de la victoire d’Actium, dont Auguste lui crut être redevable. Les Scythes le surnommerent Acthosirus. Icadius son fils le surnomma Patrius. Il fut appelle Phaneus, de φαίνω, parce qu’il découvroit, faisoit connoître la vérité ; Pythien, Pythius, parce qu’il tua le serpent Python ; Sandalier, Sandalarius, d’une statue qu’Auguste lui dédia dans Rome, & qui avoit des sandales ; Syntodus, dans une inscription rapportée par Gyraldus, Syntag. 7 p. 217. Θυραῖος, comme qui diroit Portier, parce qu’il présidoit aux portes ; il eut même le surnom de Bourreau dans Rome, Tortor, parce qu’il avoit une statue dans la rue où se vendoient les fouets pour tourmenter les esclaves. Il y a encore dans l’Anthologie, Liv. 1 ch. 38, une épigramme de 25 vers, dont 24. ne sont composés que d’épithétes d’Apollon, rangés selon l’ordre alphabétique des 24 lettres grecques, Voyez aussi les listes des noms d’Apollon, qu’a faites M. Béger.

Apollon étoit un des Dieux de la fable les plus connus, par le soin qu’ont pris les Poëtes de lui attribuer l’enthousiasme ou l’espèce de fureur Poëtique, & de supposer en même-temps qu’il est le Dieu de la Médecine & de la lumière. Comme les payens par ce nom entendoient le soleil, qui fait naître les plantes, & leur donne les propriétés qu’elles ont de guérir plusieurs maladies, ils avoient aussi multiplié ses attributs, dont on trouve le detail & les explications chez les mythologues. Un assez grand nombre de lieux portoient son nom, parce qu’il y avoit un temple, une chapelle, ou quelque culte publiquement établi. Ces lieux se nommoient Apollonia, Apollinis fons, fanum, &c.

Apollon étoit aussi chez les Anciens le nom d’une danse, dans laquelle on représentoit ce Dieu.

Apollon. s. m. Terme de Fleuriste. C’est le nom d’une des espèces des œillets piquetés. C’est un piqueté de brun sur un fin blanc. L’œillet est petit, & sa plante fort sujette au blanc & à la pourriture. Il est à Lille. Cult. de Fl.

Apollon. s. m. Espèce de petite robe de chambre qui ne vient qu’à la moitié des cuisses. On couche avec l’apollon en hiver, & pour lors il est d’étoffe, & même quelquefois fourré. Et en été on le fait de taffetas, de toile des Indes, ou de quelque autre étoffe de soie légère. On en fait même de toile blanche, & les Dames s’en servent pour se peigner & se coëffer, comme elles faisoient autrefois de peignoirs. Ceux qu’elles portent pendant le jour s’appellent encore casaquins, ou pot-en-lair. Les hommes portent aussi des apollons, au lieu de robes de chambre, parce que leur petitesse les rend plus commodes.

APOLLONIA. Cap d’Afrique. Apollonia. Il est sur la côte de la Guinée, près l’embouchure de la rivière de Mancu.

APOLLONIE. Apollonia. Nom de plusieurs villes en différentes contrées. Ces villes furent ainsi nommées d’Apollon à qui elles étoient particulièrement consacrées. Voyez aussi Apolline.

APOLLONIES. s. m. pl. Nom des fêtes & sacrifices d’Apollon.

☞ APOLLYON, en grec ἀπολλύων, c’est-à-dire, qui fait périr, est le même qu’Abaddon, ou l’Ange de l’abyme, dont il est parlé dans l’Apocalypse. Voyez Abaddon.

☞ APOLOGÉTIQUE. adj. de t. g. Qui contient une apologie. Apologeticus. Lettres apologétiques. Discours, livres, manifestes apologétiques. Il est aussi sub. & signifie discours par écrit ou de vive voix pour la justification, pour la défense de quelqu’un, de quelque action, de quelque ouvrage. Dans ce sens on le dit particulièrement en parlant de l’apologie de Tertullien pour les Chrétiens. L’apologétique de Tertullien est un ouvrage plein de force, & tel qu’il pouvoit sortir des mains de Tertullien. Il y justifie les Chrétiens des choses dont on les accusoit, & principalement des crimes abominables qu’on disoit qu’ils commettoient dans leurs assemblées, & de leur peu d’amour pour la patrie. On leur reprochoit ce dernier crime, parce qu’ils ne vouloient pas faire les sermens accoutumés, & jurer au nom des Dieux tutélaires de l’empire. Tertullien adressa son Apologétique aux Magistrats de Rome, parce que l’Empereur Sévère étoit absent.

APOLOGIE. s. m. Apologia, defensio, purgatio. ☞ Discours par écrit ou de vive voix, pour la défense ou la justification de quelque action ou de quelque ouvrage ; & par extension, tout ce qui tend à la justification de quelqu’un. L’apologie de Balzac est une pièce éloquente. On disoit bien du mal de vous ; mais j’ai bien fait votre apologie. Naudé a fait une apologie pour tous les grands hommes accusés de magie. Cette démarche fait votre apologie.

Ce mot vient du grec ἀπολογέομαι, qui signifie, je repousse par la parole, je réfute.

APOLOGISTE, s. m. Celui qui écrit une apologie, qui fait l’apologie de quelqu’un. Defensor. François Ogier a été l’Apologiste de Balzac. J’ai eu les mêmes vûes qu’ont les anciens peres & apologistes de notre religion. Faidit.

APOLOGUE. s. m. Apologus, fabula. Fable morale & instructive : fiction dont le but est de corriger les mœurs des hommes. C’est un exemple fabuleux, qui s’insinue avec d’autant plus de facilité & d’effet, qu’il est plus commun, & plus familier. La Font. Jésus-Christ lui-même en a sanctifié & autorisé l’usage ; & l’on en peut remarquer un effet naturel dans celui que le Prophète Nathan proposa à David. S. Evr. Tel qui n’est point accessible à des remontrances positives ne sera peut-être point choqué de la censure secrette & indirecte d’un apologue. Id.

Ce mot vient du grec ἀπολογέιν, qui signifie, raconter, rapporter.

APOLTRONNIR. v. a. Terme de Fauconnerie, qui se dit lorsqu’on coupe à un oiseau les oncles des pouces, qui sont les doigts de derrière, & les clefs de la main ; car en lui ôtant les armes, on lui abat le courage, de sorte qu’il n’est plus propre pour le gros gibier. Accipitrem ignavum, inernem efficere.

Ce mot vient de poltron, & veut dire rendre poltron, c’est-à-dire, timide & lâche.

APOLYSE. s. f. C’est un terme de l’Histoire Ecclésiastique des Grecs, & de leur Liturgie. L’Apolyse répond à notre Ite, Missa est. Les Grecs disent : in pace procedamus ; & c’est ce qu’ils appellent apolyse, comme on le voit dans la Liturgie du Cardinal Bona, & autres Auteurs Liturgiques.

APOLYTIQUE. s. m. Terme de Liturgie. L’apolytique dans l’Eglise grecque est ce qui termine l’Office divin, ou les parties considérables de l’office divin. L’apolytique consiste en certains versets qui changent selon les temps, apolyticum, & en grec ἀπολυτέϰιον.

Ce mot vient d’ἀπὸ, & de λύω, solvo. Voyez le P. Goar dans ses Notes sur l’Eucologe, l’ordre de l’Office divin chez les Grecs, au commencement du second Tome des Actes des Saints du mois de Juin, le Typique de S. Sabas.

APOMÉCOMÉTRIE. subs. m. Apemecometria. C’est l’art qui enseigne à mesurer la distance des objets éloignés.

APOMÉLI. Boisson douce, faite avec des rayons de miel délayés & bouillis dans de l’eau. Ἀπομελι. Voyez la manière de la préparer dans le Dictionnaire de James.

APON. Fontaine près de Padoue, laquelle, si on en veut croire Claudien, rendoit la parole aux muets & guérissoit toutes les maladies : près de-là étoit un oracle de Géryon.

☞ APONEVROGRAPHIE & APONEVROLOGIE. Terme d’Anatomie. Partie de l’Anatomie, dans laquelle on donne la description des aponévroses. Aponevrographia, aponevrologia.

APONEVROSE. s. f. Terme d’Anatomie. C’est un nom qu’on donne aux extrémités nerveuses des muscles, & qui en font partie. Aponeurosis, ἀπονευρωσις, Tendones. ☞ C’est proprement l’expansion membraneuse d’un tendon ; un tissu de filets tendineux qui environne les muscles dans différentes parties du corps. La substance de l’aponévrose, ou du tendon, est moyenne entre la substance de la chair, ou du muscle, & celle du nerf, L’aponévrose commence à un muscle & finit à un nerf, il y en a dont la substance est plus molle, & approche plus de celle de la chair, & d’autres dont la substance est plus ferme, plus dure, & plus semblable à celle d’un nerf.

Ce mot vient d’ἀπὸ, & νεῦρον, qui signifie en grec un nerf.

APONEVROTIQUE. adj. m. & f. Qui appartient à une aponevrose. Aponevroticus, a, um. Membrane aponevrotique. En termes d’Anatomie il se dit substantivement du muscle du fascia lata. L’aponevrotique est un petit muscle longuet, placé sur le devant de la hanche, un peu obliquement de haut en bas. Il est attaché en haut au côté externe de l’épine intérieure de l’os des iles, entre les attaches du moyen fessier & du couturier. De-là il descend un peu obliquement en arrière par ses fibres charnues, qui forment un corps long d’environ cinq travers de doigt, large de deux, & fort aplati. Ce corps de muscles est placé entre deux lames de l’aponevrose, ou bandage large, qu’on nomme fascia lata, & s’y attache par des fibres tendineuses très-courtes, qui se perdent dans l’aponevrose, vers l’endroit où elle est adhérente au grand trochanter & au tendon du grand fessier. Ainsi il ne faut pas regarder le fascia lata, ou bande large comme une expension tendineuse du muscle. Winslow.

APOPHASE. s. f. Apophasis. Figure de Rhétorique, lorsqu’on se fait à soi-même une interrogation & qu’on y répond.

APOPHLEGMATISME, ou APOFLEGMATISME. s. m. Apophlegmatismus. Terme de Médecine. Ce sont des médicamens qu’on mâche pour attirer quantité de flegmes du cerveau. Le peuple les appelle masticatoires, ou machicatoires. Le tabac est un excellent apoflegmatisme, mais il gâte les dents, & les rend jaunes & noires : la sauge a presque autant de vertu pour faire sortir les humeurs superflues, & elle ne gâte pas tant les dents.

Ce mot est grec, & vient d’ἀπὸ, & φλέγμα.

APOPHORÈTE. s. m. Apophoreta. C’est un mot dont on est obligé de se servir en traduisant Martial, qui a intitulé de ce nom quelques livres de ses Epigrammes : il signifie des dons & présens qui se faisoient pendant les Saturnales, ou en certaines solennités, ou pour quelques brigues. Selon les Jésuites d’Anvers, Act. SS. April. T. II, 772. A, ce sont proprement de petits présens, que l’on envoyoit de table à ses amis. Cela paroît par Suétone dans Caligula, ch. 55, & par S. Ambroise, dans son Exhortation à la virginité. C’étoit aux Saturnales ; & ce n’étoit qu’aux hommes qu’on les envoyoit. Dans ce sens c’étoit à-peu-près ce que nous appelons étrennes. Suétone, dans Vespasien, chap. 19, n. 4, remarque comme une chose extraordinaire, que ce Prince en envoyoit aussi aux femmes aux Calendes de Mars. Symmache, Ep. 11, 80, appelle encore apophorète les présens que ceux qui avoient donné des jeux envoyoient ensuite à leurs amis. On l’a dit aussi du vaisseau plat, ou des corbeilles où l’on portoit ces présens. M. Béger, Tom. III, pag. 424, a donné la figure d’un instrument rond, qui a une queue, & qui est plat & sans profondeur, qu’il prétend être un apophorète, ou, comme il écrit, apopherète. Dans des siècles postérieurs on trouve ce mot pour signifier les chasses, ou vases dans lesquelles on portoit les reliques des Saints. Il y en a plusieurs exemples dans les anciennes vies des Saints.

Ce mot est dérivé par Isidore à ferendo, mais il vient plutôt du grec ἀπὸ, & φερω, je porte. Le XXIVe Livre de Martial est intitulé, apophorète, & chaque épigramme désigne un apophorète. On voit par-là ce que c’etoit, & qu’on envoyoit autre chose que des mets. Les Modernes qui traitent des apophorètes sont Turnebe, Advers. IX, 23 ; Ciaconius, de Triclinio, pag. 91 ; Struckius Antiq. Conv. VIII, 24 ; Lipenius, de Strenis, I, 15 ; Baccius, De Conviviis Antiq. IV, 5.

☞ APOPHTHEGME. s. m. Dit notable de quelque personne illustre : sentence courte & instructive prononcée par quelque homme de poids, ou faite à son imitation. Apophthegma, Dictum acutum & breve illustris viri. L’apophthegme est un sentiment exprimé d’une manière vive, & en peu de paroles, sur quelque sujet ou une répartie prompte & spirituelle, qui cause du plaisir & de l’admiration. Comme il y en a de plaisans & d’agréables, & qu’ils ne sont pas tous graves & serieux, on pourroit dire que l’apophthegme est ce qu’on appelle un bon mot en françois ; mais ce terme a plus d’étendue dans la langue grecque. Abl. Il y a des apophthegmes muets, & où l’action tient lieu de la parole. Id. C’est un homme profond, & d’un grand sens ; il ne parle que par apophthegmes. Lycosthène a fait un gros recueil des apophthegmes des Anciens, & les a rédigés par des chapitres. Erasme a aussi rassemblé les apophthegmes des Anciens, rapportés par Plutarque, & par Diogène Laërce. M. d’Ablancourt a dirigé les apophthegmes des Anciens dans un meilleur ordre ; & comme la vérité y est moins nécessaire que la beauté, il a été souvent obligé d’y donner un autre tour que les Auteurs dont il les a tirés. L’apophthegme, selon l’Auteur du Traité des bons mots, est différent de ce qu’on appelle bon mot, parce que l’apophthegme doit toujours être grave & instructif, & que le bon mot peut-être purement divertissant. Ce mot vient du grec ἀποφθέγμαγω qui signifie, je parle par sentences.

APOPHYGE. s. f. Apophygis. Terme d’Architecture. C’est l’endroit où la colonne sort de sa base, & commence à monter, & à échapper en haut. C’est pourquoi les ouvriers l’appellent escape, ou congé.

Ce mot en grec signifie fuite.

APOPHYSE. s. f. Apophysis. Terme d’Anatomie. C’est une éminence qui s’élève sur la superficie de l’os ; avec lequel elle est continue. Telles sont les éminences des vertèbres, de l’omoplate, des os du bras, de la cuisse, &c.

Ce mot est grec, & signifie production au-dehors.

Apophyse mamillaire, ou mastoïde. C’est une des éminences externes de l’os pétreux.

On appelle aussi apophyses mamillaires, les nerfs olfactoires, qui sont le principal organe de l’odorat. Ils vont jusqu’aux os cribleux, où ils se divisent en de petites fibres, qui passent par les trous de ces os, & qui vont se répandre dans la partie supérieure du nez.

APOPLECTIQUE. adj. m. & f. Qui tient de l’apoplexie, relatif à l’apoplexie. Accident apoplectique. On appelle aussi un remède apoplectique, celui qui préserve ou qui guérit de l’apoplexie. C’est la même chose qu’antiapoplectique. Sanandæ aut avertendæ apoplexiæ idoneum pharmacum.

Préviens un sort pareil, & par d’heureux efforts,
Dissipe cette humeur pésante & létargique,
Dont le regorgement fatal, apoplectique,
Que sais-je ? engloutiroit & l’esprit & le corps. R.

☞ Il s’emploie aussi substantivement. C’est un apoplectique.

APOPLEXIE. s. f. Stupor, Stupefactio nervorum omnium corporis, apoplexia. Terme de Médecine. ☞ Maladie aiguë qui attaque le cerveau, & qui ôte tout-à-coup le mouvement & le sentiment. C’est une soudaine privation du sentiment & du mouvement de tout le corps, avec lésion des principales facultés de l’ame, accompagnée d’un ronflement & de difficulté de respirer. Elle diffère du care, de la léthargie, & du coma, parce qu’en ces trois autres maladies l’assoupissement n’est pas si profond, ni le sentiment tout-à-fait perdu. Elle diffère de la syncope, parce qu’en celle-ci il n’y a point de pouls apparent ; ou du moins qu’il est fort foible ; au lieu que dans l’apoplexie il se soutient jusqu’à ce que la mort soit proche. Elle diffère de l’épilepsie en ce qu’en celle-ci le mouvement de la faculté animale n’est point aboli, mais seulement dépravé. Et elle diffère de la paralysie, en ce qu’en celle-ci il n’y a ni assoupissement, ni privation de connoissance. L’apoplexie est causée par l’interruption du mouvement du sang vers le cerveau, & par tout ce qui peut empêcher l’influence des esprits animaux dans les organes des sens, & dans les parties qui se meuvent volontairement. Tantôt elle vient d’un phlegmon dans le cerveau, tantôt d’une pituite visqueuse, dont le cerveau est rempli, comme il arrive dans les apoplexies d’hiver, & dans celles des vieillards ; tantôt elle vient d’une lymphe trop grossière, qui bouche les nerfs, ou du sang répandu dans le cerveau. Hippocrate distingue deux sortes d’apoplexies, l’une forte, & l’autre foible ; elles diffèrent par le plus ou moins de difficulté à respirer ; il faut avouer qu’elles sont toutes deux très-fortes, puisqu’elles sont accompagnées de symptômes très-dangéreux, & qu’elles causent souvent la mort. On appelle dans l’usage commun & dans la conversation, une apoplexie brutale, celle qui ôte tout d’un coup tout sentiment, & qui tue sur le champ, ou ne laisse jusqu’à la mort aucun sentiment. Pour prévenir l’apoplexie, il faut éviter l’excès de vin, & de travail, ne point manger avec excès, ne point dormir après le dîner, faire beaucoup d’exercice de corps, ne se point laisser accabler de chagrin. Pour guérir de l’apoplexie, il faut employer des remèdes qui causent de grandes évacuations, & n’en donner aucun où il entre de l’opium, ou des remèdes astringens, qui augmentent la force du mal.

Ce mot d’apoplexie vient du grec ἀποπλήϰτειν, qui signifie abattre, étonner, rendre stupide & sans sentiment, parce que cette maladie fait tomber en un instant, comme si on étoit abattu d’un coup de foudre. C’est pourquoi quelques-uns l’ont appelé sidération, comme qui diroit foudroyement.

☞ APOPOMPÉE. s. f. Nom que l’on donnoit à la victime que les Juifs chargeoient de malédiction, & qu’ils chassoient dans le désert à la fête de l’expiation..

☞ Ce mot vient du grec ἀποπεμπεῖν, renvoyer. Mor.

APORE. s. m. Problême très-difficile à résoudre, & qui n’a pas été résolu. Aporum. La quadrature du cercle est un apore.

C’est un mot grec, ἀπορὸν, qui n’est point établi dans notre langue ; il signifie en grec, ce qui est douteux, difficile, embarrassant, où on ne trouve point de passages. Il vient de l’α privatif, & de πόρος, passage, d’où est venu en notre langue le mot de pore, qui ne se dit que des passages imperceptibles qui sont dans les corps, & qui facilitent la transpiration des humeurs. Lorsqu’on proposoit un problême à quelque Philosophe grec, & sur-tout à un Académicien, s’il n’en pouvoit donner la solution, il répondoit ἀπορέω, c’est-à dire, je ne sais point cela, j’en doute, je ne puis vous éclaircir là-dessus. Au reste, si apore est un mot françois, il est de toutes les sciences. Chacune a ses difficultés, & ses embarras, &, si l’on peut se servir de ce terme, chacune a ses apores.

APOS. Jonston. Hirondelle de mer, très-garnie de plumes : sa tête est fort large, son bec est petit. Cet oiseau avale des mouches : son cou est court, ses ailes sont longues, sa queue est fourchue. L’apos vole sur la mer & sur la terre, & se nomme apos, de ἀποῦς, sans pieds, parce qu’elle les a très-petits.

APOSCEMME. s. m. ou APOSCEPSIE. s. f. D’ἀποσϰήπτω, qui signifie entre autres choses, transporter rapidement, & fixer d’un lieu dans un autre : influx, ou transmigration rapide des humeurs d’une partie du corps dans une autre. Cette transmigration est quelquefois une crise, & doit être attribuée à la force de la nature, comme l’observe Galien. Cet Auteur désigne encore par le terme aposcemmata, ces parties excrémentielles qui sont précipitées dans les intestins, & dont le mouvement en en-bas décharge les autres parties du poids dont elles étoient surchargées.

☞ APOSCEPARNISMOS. Voyez Apokeparnisme.

APOSÈME, ou APOZÈME, avec l’Acad. Fr. s. m. Terme de Médecine. Espèce de médicament liquide, composé de diverses décoctions de plusieurs plantes, racines, fleurs, feuilles, fruits & semences, dulcifiées avec du miel & du sucre, clarifiées & aromatisées. Decoctum. L’aposème ne diffère d’avec le sirop magistral que par la consistance & la cuitte ; ce sirop étant plus épais & visqueux. On y mêle quelquefois des remèdes purgatifs & les sirops. L’aposème diffère du julep, en ce que les aposèmes sont plus épais & visqueux, & qu’ils ne se font jamais avec des eaux distillées comme les juleps, mais seulement avec une décoction. Les aposèmes diffèrent des sirops en ce qu’ils sont plus clairs que les sirops. Les anciens Médecins donnoient le nom d’aposème à l’hydromel dans lequel ils avoient fait bouillir les feuilles de certaines plantes. Il y a deux sortes d’aposèmes, les altératifs & les purgatifs : on les distingue encore selon les parties pour la guérison desquelles on les donne ; ainsi il y a des aposèmes céphaliques, des aposèmes hépatiques, des aposèmes spléniques, &c. Chomel.

Ce mot vient du grec ἀποζέω, qui signifie defervesco. Ce qui montre qu’il faudroit l’écrire par un z ; mais comme nous donnons le son du z à le s qui est entre deux voyelles, l’usage est de mettre un s à ce mot, comme à beaucoup d’autres, qui devroient avoir un z.

APOSIOPÈSE. s. f. Terme de Rhétorique, qu’on appelle autrement Réticence. Aposiopesis, reticentia. Figure par laquelle on ne laisse pas de parler d’une chose, en faisant semblant de n’en vouloir rien dire, ou par laquelle on commence à parler d’une chose sans continuer. ☞ Nous avons un exemple de cette figure dans le discours de Neptune, indigné contre les vents qui venoient troubler son empire. Quos ego..... Sed motos præstat componere fluctus. Si je vous.....

Ce mot vient d’ἀποσιωπαω, taceo, reticeo, d’où se fait ἀποσιωπησις, aposiopèse.

APOSKEPARNISME. Voyez Apoképarnisme.

APOSPASME. s. m. Galien, Lib. de Conflit. Art. donne ce nom aux solutions de continuité qui surviennent dans les parties organiques. Apospasma, d’ἀποσπαω, déchirer, ou séparer.

☞ APOSTASIE. s. f. Dans un sens général, signifie l’abandon d’un parti qu’on suivoit, pour en prendre un autre. Apostasie se dit plus particulièrement de l’abandon qu’une personne fait de la vraie religion, pour en embrasser une fausse, ou de la désertion d’un ordre religieux dans lequel on avoit fait profession, & qu’on quitte sans une dispense légitime. Catholicæ religionis vel instituti religiosi desertio. Les Anciens ont distingué trois sortes d’apostasie. La première, à supererogatione, se commet par le clerc ou le religieux, qui abandonne sa profession pour retourner à l’état laïc. La seconde, à mandatis Dei, par celui, de quelque état qu’il soit, qui abandonne généralement les commandemens de Dieu, quoiqu’il conserve encore la foi. La troisième, à fide, par celui qui abandonne non-seulement les bonnes œuvres, mais encore totalement la foi. De la Mar. Cette division n’est pas exacte. Dans la première espèce il n’est pas nécessaire qu’un religieux se réduise à l’état laïc pour commettre une apostasie ; il suffit qu’il renonce à son Ordre & à sa religion, demeurât-il dans l’état ecclésiastique, ou passât-il dans un autre Ordre, s’il n’en a la dispense. La seconde espèce ne porte point aujourd’hui le nom d’apostasie, on l’appelleroit libertinage, débauche, impiété. Pour la troisième, il n’est pas nécessaire de renoncer totalement à la foi ; c’est-à-dire, à tous les articles de la foi ; il suffit d’être hérétique sur un seul pour être apostat. Voici comment il faut diviser l’apostasie, ou quelles sont les espèces différentes d’apostasie. Il y en a quatre : l’apostasie de l’ordre, l’apostasie de la profession religieuse, l’apostasie de la foi, & l’apostasie d’obéissance.

L’Apostasie de l’ordre, est lorsqu’un homme engagé dans les Ordres sacrés quitte de son autorité particulière l’habit & l’état ecclésiastique à dessein de ne le plus reprendre, & de vivre en laïc, comme feroit un prêtre, ou diacre, &c. qui se marieroit ou se feroit soldat.

L’Apostasie de la profession religieuse, est l’abandon criminel qu’un religieux fait de son état dans le dessein de n’y plus retourner ; mais de vivre hors de son monastère en laïc ou même en clerc, soit qu’il quitte l’habit de son Ordre, soit qu’il le conserve. Les Canonistes conviennent qu’un religieux qui sort de son monastère pour quelque temps, & à dessein d’y revenir, n’est pas apostat, mais fugitif ; qu’encore qu’il quitte l’habit de son Ordre, au for de sa conscience, il ne tombe point dans l’apostasie ; mais au for extérieur il seroit réputé apostat. Si un religieux, sans permission de son supérieur, passe dans un autre Ordre, même plus relâché, quoiqu’il encoure l’excommunication, & qu’il soit obligé de retourner à son Ordre, il n’est point apostat. Voyez sur cela Layman, Liv. II. Traité I, c. 16, n. 1, & les Auteurs qu’il cite.

L’apostasie de la foi, qui est la plus griève, généralement parlant est le renoncement à la foi : ce qui se peut faire en deux manières : 1o En renonçant entièrement à la religion & abandonnant le christianisme, pour passer à l’athéisme, ou à une religion qui ne reconnoisse point Jésus-Christ ; & alors c’est infidélité : ou en abandonnant seulement la religion catholique, & renonçant à quelques-uns de ses dogmes, quoiqu’on reconnoisse Jésus-Christ & le christianisme pour la vraie religion, & alors c’est hérésie. L’une & l’autre espèce s’appelle apostasie, & ceux qui y tombent, Apostats. Mais il faut, comme je l’ai dit, que l’on ait été d’abord dans le christianisme, & dans la religion catholique, & qu’on l’ait ensuite abandonnée ; car être né dans l’infidélité ou dans l’hérésie & y persister, ce n’est point apostasie, ni dans le droit, ni dans l’usage de notre langue. Luther soutint publiquement son apostasie dans la Diète de Vormes. Bouhours.

L’Apostasie de l’obéissance, en la prenant dans toute son étendue, se trouve dans tout péché mortel, selon Saint Thomas. Dans un sens plus étroit, c’est lorsqu’un sujet ou subalterne s’oppose aux commandemens justes de ses supérieurs. En ce sens le mot d’apostasie n’est point en usage dans notre langue, nous disons révolte, rebellion. L’espèce la plus griève de cette apostasie est le schisme, Voyez Apostat.

APOSTASIER. v. n. Tomber dans l’apostasie, devenir apostat. Catholicam religionem, vel institutum religiosum deferere. Les esclaves chrétiens sont dans un danger perpétuel d’apostasier.

APOSTAT, ATE. adj. Transfuge, déserteur qui quitte la vraie religion, ou qui renonce à ses vœux. Catholicæ religionis, vel instituti religiosi desertor. L’Empereur Julien a été surnommé l’Apostat. Moine apostat. Femme apostate.

☞ On le dit aussi substantivement, en parlant d’un homme qui a renoncé à la foi, ou d’un religieux qui a renoncé à ses vœux. C’est un apostat.

Il y a cette différence entre l’hérétique & l’apostat, que l’hérétique n’abandonne qu’une partie de la foi, & que l’apostat n’en conserve plus rien. De la Mar. Cette différence n’est pas vraie. Le catholique qui se fait hérétique, quoique l’on professe encore dans le parti hérétique qu’il embrasse plusieurs points de foi comme les catholiques, est cependant apostat ; & il est hérétique & apostat tout à la fois ; mais celui qui est né dans l’hérésie est simplement hérétique, & n’est point apostat.

Apostat. s. m. & f. Se dit aussi, mais par une espèce de métaphore, des vices contraires à d’autres vertus qu’à la religion, & alors il faut y ajouter le nom de la vertu, que blesse celui qu’on nomme apostat. Proditor virtutis alicujus, illius contemptor, hostis ab illa alienus. Si je n’ai pas pour mon prochain la charité que Jésus-Christ me commande….. quand je livrerois mon corps au fer & au feu… tout ce que je pourrois endurer de supplices & de tourmens seroit perdu pour moi….. je serois comme martyr, confesseur de la foi, mais indigne confesseur, parce que je serois en même temps apostat de la charité. Bourdal. Exhort. II. p. 361. Je ne veux plus entendre parler de cet homme, c’est un apostat de l’amitié. Il s’est rengagé dans le monde & dans les compagnies : c’est un apostat de la dévotion & de la retraite.

Apostat, se disoit autrefois proprement de celui qui avoit faussé la foi promise à son capitaine. Transfuga, desertor. On le dit encore de ceux qui changent de parti, & se rangent dans le parti opposé. Vous nous avez abandonné, vous êtes un apostat. Les Turcs traitent les Persans d’apostats, comme ayant altéré & corrompu la religion de Mahomet. Smith.

Ce mot vient du latin apostare, qui signifie, mépriser, violer. Dans son origine le mot d’apostat ne signifioit autre chose que prévaricateur ; & on disoit apostare leges ; pour dire, pécher contre la loi. Du Cange. Le mot d’apostare vient d’ἀπὸ & ἵστημι, sto, je me tiens à part.

☞ APOSTÈME. s. m. Terme de Chirurgie. Les Médecins le prononcent & l’écrivent ainsi. Dans le monde on dit apostume. C’est une tumeur contre nature qui vient à quelques parties du corps, causée par quelques humeurs corrompues qui aboutit souvent à une suppuration. Apostema, suppuratum. L’apostème procède d’une humeur fixée en quelques endroits du corps & hors de son lieu naturel. On l’appelle autrement Abscès, & ce mot est plus usité.

☞ Ce mot vient du grec ἀπόστημα, qui est dérivé du verbe ἀποστάσϑαι, qui signifie abscedere, c’est-à-dire, se départir d’un lieu pour se ranger & se cantonner en un autre.

☞ On dit figurément & proverbialement, il faut que l’apostème creve ; pour dire, qu’une colère ou quelqu’autre passion cachée, quelque conjuration ou affaire secrète, vienne enfin à éclater.

☞ APOSTER. v. a. Corrompre, gagner des gens pour les engager à faire une méchante affaire : engager quelqu’un à se trouver dans un lieu, soit pour observer, soit pour exécuter quelque chose. Il ne se prend guère qu’en mauvaise part. Adornare, subornare, apponere. Les calomniateurs ont des témoins apostés, pour déposer faussement contre leurs parties. Cet acte est signé par une personne apostée, qui a pris le nom ou l’habit d’un autre pour tromper le Notaire, ou les concractans. Les Grands ont des gens apostés pour semer de fausses nouvelles, selon que leurs intérêts les y obligent. Les filous ont toujours près d’eux des gens apostés, afin de ne se point trouver saisis des vols qu’ils font. Je vous demande une grâce, qui est, que vous ne vous imaginiez pas que j’aie aposté ce vieillard. Port-R.

APOSTÉ, ÉE. part. Subornatus, appositus.

Ce mot vient de positus, de pono.

APOSTHÈME. Voyez Apostème.

APOSTILLATEUR. s. m. Celui qui a fait des apostilles, des notes sur un ouvrage. Ce terme est employé par les Jurisconsultes.

APOSTILLE. s. f. Annotation ou renvoi qu’on fait à la marge d’un écrit pour y ajouter quelque chose qui manque dans le texte, ou pour l’éclaircir, & l’interpréter. Adscripta ad marginem annotatio. Plusieurs Auteurs ont commenté le Droit par de simples notes & apostilles. Un Notaire est obligé de parapher avec les parties toutes les apostilles d’un contrat. ☞ On met des apostilles au bas d’une lettre. On mande par apostille ce qu’on a oublié d’insérer dans le corps de la lettre.

Apostille. Contentio. Se dit au Palais en parlant des débats & contestations qui se font lors de l’examen des comptes, ou des jugemens qui sont rendus sur chaque article. Les apostilles se mettent sur le compte de la Chambre de la main de l’Auditeur qui les rapporte. On disoit anciennement postil, postilla, & ce mot venoit de positus. Voyez Postille.

APOSTILLER. v. a. Adscribere. Mettre des apostilles, qui se dit tant des notes & remarques qu’on fait sur les livres, que des additions qui se font sur les minutes des contrats, & de ce qu’on met dans les marges des comptes, & de ce qu’on ajoute au bas d’une lettre.

APOSTILLÉ, ÉE. part.

APOSTIS. s. f. Terme de Marine. Deux longues pièces de bois de 8 pouces en carré, tant soit peu abaissées : l’une est le long de la bande droite, & l’autre le long de la bande gauche d’une galère, depuis l’espale, (les Vocabulistes disent depuis l’épaule) jusqu’à la conille, chacune portant toutes les rames de la chiourme par le moyen d’une grosse corde.

Apostis. s. m. C’est, des rameurs qui sont sur une même rame, celui qui touche le vogue-avant, c’est-à-dire, le second en comptant du côté du courcie. Secundus remex. L’Apostis est un peu moins élevé que le vogue-avant, parce que la couverte d’une galère est en dos d’âne.

APOSTOILE. s. m. C’est ainsi qu’on appeloit anciennement le Pape. On trouve ce mot dans Pasquier, Hugues de Bercy, la Bible de Guyot, Villehardouin, &c.

De notre pere l’Apostoile
Voulsisse qu’il semblast l’étoile.

APOSTOLAT. s. m. Dignité ou ministère d’Apôtre. Apostoli munus, Apostolica dignitas, Apostolatus. S. Matthias vint par la voie du sort à l’Apostolat. Nous avons reçu par notre Seigneur Jésus-Christ la grâce de l’Apostolat que nous exerçons en son nom. Port-R. Anciennement l’épiscopat en général étoit appelé Apostolat ; c’étoit le titre honoraire. On le trouve encore attribué aux Evêques dans le sixième & le septième siècles. Depuis plusieurs siècles on ne le donne plus qu’au souverain Pontife.

Autrefois on disait Apostolité pour Apostolat. Philippe Mouskes, dans son Histoire manuscrite de France, dit :

Por çou que Grigore cil Pape
De son avoir ait acaté
Le don de l’apostolité.

Voyez Du Cange.

On appelle Apostolat, la charge ou commission des Apôtres de la Synagogue, dont nous allons parler tout à l’heure. Julien, dans sa lettre 25, au peuple Juif, & S. Epiphane, dans l’hérésie 30, qui est celle des Ebionites, la nomment ainsi. Cet apostolat (car on l’appeloit ainsi) & cette commission d’aller lever l’argent dans une province, s’accordoit comme une récompense & une grâce par le Patriarche. Elle donnoit le pouvoir de régler tout ce qui regardoit la discipline, & de déposer les ministres inférieurs, c’est-à-dire, selon S. Epiphane, les Chefs de la Synagogue, il falloit dire, des Synagogues, les Prêtres, les Anciens, & les Azanites. Tillem.

APOSTOLE. s. f. Levée que les Patriarches Juifs faisoient dans les provinces par le ministère de ceux qu’ils nommoient Apôtres, & dont nous parlerons tout à l’heure. Apostole. Julien l’Apostat, dans son Ep. aux Juifs, leur remet l’apostole ; c’est-à-dire, comme il l’explique lui même, l’Envoi du tribut qu’ils lui payoient. Missio tributi, quæ dicitur Apostole.

Ce mot est grec, ἀποστολὴ, Missio, envoi.

APOSTOLE. s. m. Est aussi un vieux mot, qu’on a dit autrefois pour Apôtre. Apostolus. Voyez Apôtre.

☞ APOSTOLICITÉ. s. f. Qui se prend en différens sens. Il signifie conformité de doctrine avec l’Eglise catholique ; ou la conformité des mœurs avec celles des Apôtres, ou l’autorité d’un caractère accordé par le S. Siége. Apostolicité d’un sentiment, de la vie, d’une mission.

☞ L’apostolicité est un des caractères distinctifs de l’Eglise de Jésus-Christ nommée Apostolique, parce qu’elle est fondée par les Apôtres.

APOSTOLIN. s. m. Apostolinus. Nom de Religieux. L’Ordre des Apostolins commença au XIVe siècle à Milan en Italie. Ils prirent ce nom, parce qu’ils faisoient profession d’imiter la vie des Apôtres, ou la vie apostolique des premiers fidèles. Papebrock, Act. Sanct. Jun. T. I. p. 556. On les appelle aussi Apôtres, Apostoli, là-même, T. II. p.1051. Les Apostolins prétendoient avoir été institués par S. Barnabé.

On ne sait point l’origine des Apostolins. Car c’est une fable de dire qu’ils ont été institués par S. Barnabé. Ce qu’il y a de plus vraisemblable, c’est que dans le XIVe siècle il y eut plusieurs Ermites qui s’unirent ensemble dans l’état de Gènes, & qu’à cause de la vie apostolique qu’ils menoient, ils furent appelés Apostolins, & Barnabites, ou les Freres de S. Barnabé, parce qu’ils prirent ce saint Abbé pour leur patron. Alexandre VI, par une bulle du 13 Janvier 1496, leur ordonna de faire des vœux solennels, & les soumit à la règle de S. Augustin, pour les retenir dans la Congrégation, dont auparavant ils sortoient comme ils vouloient. Sixte V les unit aux Ambrosiens, dont ils prirent le nom, ne faisant plus qu’un même Ordre. Cette union fut confirmée en 1606 par Paul V. Voyez le P. Hélyot, T. IV. c. 8. Le P. Bonnani, Morigio, Maurolycus, Hermand Schoonebeck.

APOSTOLIQUE. adj. m. & f. Qui vient des Apôtres. Apostolicus. L’Eglise catholique, apostolique & romaine. La doctrine, la foi apostolique. Les missions apostoliques. ☞ Le titre d’apostolique est un des caractères distinctifs de la véritable Eglise, qu’on donne aujourd’hui par excellence à l’Eglise romaine. On le dit particulièrement de ce qui concerne le S. Siége, de ce qui en émane. Bref apostolique. Bénédiction apostolique. Nonce apostolique.

On le dit aussi de tout ce qui se fait ou se dit à la manière des Apôtres. Une vie apostolique conforme à celle des Apôtres. Zèle apostolique, digne du temps des Apôtres.

Dans la primitive Eglise on nomma Apostoliques, & les Eglises qui avoient été fondées par les Apôtres, & les Evêques de ces Eglises, parce qu’ils étoient successeurs des Apôtres. Cela se bornoit à quatre, qui sont Rome, Alexandrie, Antioche, & Jérusalem ; parce qu’il n’y avoit que ces quatre Eglises qui eussent eu des Apôtres pour Evêques. Dans la suite les autres Eglises prirent aussi le titre d’Apostoliques, mais seulement à cause de la conformité de leur doctrine avec celle des Eglises qui étoient apostoliques par leur fondation, & parce que tous les Evêques se disoient successeurs des Apôtres. La première fois qu’on trouve ce titre donné à tous les Evêques, c’est dans la lettre de Clovis au concile d’Orléans tenu en 511, selon le P. Sirmond. Le Roi donne aux Evêques, non pas le titre d’Apostoliques, mais de très-dignes du Siége apostolique, Apostolicâ Sede dignissimi. Le Roi Gontran appelle aussi en 581 les Evêques du concile de Mâcon, Pontifes Apostoliques, Apostolici Pontifices. Les formules de Marculphe, écrites l’an 660, comme l’a montré le savant M. Bignon dans la première de ses notes sur ces formules ; ces formules, dis-je, sont pleines de ce titre. On le trouve encore dans Grégoire de Tours, Liv. IX. ch. 41 & 49, dans Sidonius Apollinaris, Liv. VI. Ep. 1. Après tout, ces exemples ne regardent que les Gaules ; & souvent ce terme, dans les formules de Marculphe, & dans Grégoire de Tours, ne se dit pas seul & absolument, quand il se dit des Evêques ; souvent il est joint à d’autres termes, & semble tomber sur la personne plutôt que sur la dignité. Viris Apostolicis, Ille Rex viro apostolico illi Episcopo, Apostolicâ Sede dignissimis, Sanctis & Apostolicâ Sede dignissimis, Sanclus & Apostolicus Remedius Pontifex ejusdem urbis. Dans Grégoire de Tours, Epitom. c. 16. Aussi le P. Ruinart, Bénédictin, dans sa note sur cet Auteur, Liv. IV. p. 166, not. 1, remarque, que quoique les Siéges épiscopaux s’appellaient Apostoliques, & qu’on donnât en ce temps-là le titre d’Apostolique à tous les Evêques ; cependant lorsqu’on donnoit ce titre absolument, & sans ajouter le nom de l’Evêque, ou de son Siége, il s’entendoit principalement du Siége de l’Evêque de Rome. En effet, c’est ainsi qu’en use Grégoire de Tours, Liv. II. ch. 1. Hist. Franc. & Liv. I. ch. 39. De glor. Mart. Et M. Bignon dit, qu’après tout, les Conciles & les Peres crient par-tout d’un consentement unanique que le Siége de Rome est appelé Apostolique d’une manière particulière. Voyez les notes sur les Form. de Marculphe, p. 251 de l’édit, in-4o. à Paris 1666, & Savaro sur l’épit. I du sixième Liv. de Sidon, Apol. p. 363. Balsamon en convient dans sa préface sur le concile de Carthage. Au reste, l’usage de donner ce titre aux Evêques, ne passa pas le septième siècle. Dans les siècles suivans, cette qualité fut restreinte au Pape seul ; & les trois Patriarchats d’Alexandrie, d’Antioche & de Jérusalem, étant tombés sous la puissance des Infidèles, ce titre demeura seul au Siége de Rome. C’est pourquoi on ne le donne aujourd’hui qu’à l’Evêque de Rome, suivant la décision du concile de Reims en l’an 1049. S. Grégoire le Grand avoit prétendu de son temps, que ce titre, qui étoit commun à tous les Evêques, appartenoit spécialement au successeur de Saint Pierre. C’est pourquoi, dans le même concile de Reims, un Evêque d’Espagne qui l’avoit pris, fut excommunié pour s’être arrogé cette prérogative réservée au Pape.

Le Royaume Apostolique, c’est le royaume de Hongrie. Il prend ce titre, comme il donne celui d’Angélique à la couronne de Hongrie.

Le Palais Apostolique, c’est le Palais du Pape. Ils n’eurent plus d’accès au Palais Apostolique.

Clercs Apostoliques. C’est un nom que l’on donne aux Religieux, appelés plus communément Jésuates.

On appelle aussi, Notaires Apostoliques, les Notaires qui font les expéditions pour la Cour de Rome. Acad. Fr.

☞ Chambre Apostolique. Tribunal où sont traitées les affaires qui concernent le trésor ou le domaine du S. Siége.

Apostolique. s. m. & f. Apostolicus. Nom de secte d’hérétiques. Il y a eu deux sortes d’hérétiques qui ont eu ce nom. Les premiers Apostoliques, nommés autrement Apotactiques, sortirent de la secte des Encratites & des Cathares. Ils faisoient profession de ne se point marier, de s’abstenir de vin, de viande, de renoncer aux richesses, & d’imiter en cela les Apôtres. C’est pourquoi ils s’appellerent Apostoliques, par un esprit d’orgueil, dit S. Augustin, her. 40. Ils parurent vers l’an 260, d’autres disent en 145 ; mais ils entendent apparemment parler de leurs peres, les Encratistes ; car les Apostoliques ne firent bande à part que vers le milieu du troisième siècle. Voyez Saint Epiphane, her. 61. Aug. her. 40. & Baron. à l’an 260. Ils s’appellerent aussi Cathares & Apotactiques. Voyez ces mots.

Les autres hérétiques nommés Apostoliques, parce qu’ils s’imaginoient vivre apostoliquement, sont du douzième siècle. Ils condamnoient le mariage, & menoient avec eux des femmes de mauvaise vie : ils rejetoient le baptême des enfans, la prière pour les morts, & l’invocation des Saints, n’admettoient point de purgatoire, & suivoient en bien des choses les extravagances des Manichéens. Saint Bernard écrivit contre eux.

APOSTOLIQUEMENT. adv. A la manière des Apôtres, saintement, avec simplicité. Apostolorum in morem. Ce Prélat vit sans faste, & apostoliquement.

APOSTOLORUM. s. m. Unguentum Apostolorum. Terme de Pharmacie. Sorte d’onguent mondicatif, qui est composé de douze drogues, en pareil nombre que celui des Apôtres : ce qui lui a donné ce nom. Il a été inventé par Avicenne. On l’appelle aussi, Onguent de Vénus, à cause qu’il est de couleur verte.

APOSTRE. Voyez Apôtre.

APOSTROPHE. s. f. Figure de Rhétorique, par laquelle l’Orateur interrompt le discours qu’il tenoit à l’Auditoire, pour s’adresser nommément à quelque personne, soit aux Dieux, soit aux hommes, aux vivans, aux morts, même à des choses inanimées, comme à des tombeaux & autres monumens. Apostropha, conversio. Le Prédicateur a fait une apostrophe fort belle & fort touchante. L’apostrophe que Cicéron adressa à Tubéron dans l’oraison qu’il a faite pour Ligarius, est un des plus beaux endroits de ce discours.

☞ Cette figure par laquelle l’Orateur détourne son discours, & perd de vue ses Auditeurs, fait quelquefois un bel effet ; mais elle doit être employée sobrement.

☞ Ce mot vient du grec ἀποστροφὴ, aversio, formé de ἀπο, ab, & στρέφω, verto.

Apostrophe en Grammaire. C’est une petite note, un petit trait courbe dont on se sert pour marquer l’élision ou le retranchement d’une voyelle. Apostrophus, elisæ vocalis nota. Ainsi dans ces mots l’homme, l’ame, l’église, l’état, &c. La petite note, le signe ainsi figuré ’qu’on met en haut entre la consonne & la voyelle pour marquer la suppression de la voyelle finale, s’appelle apostrophe.

☞ Ce mot pris pour le signe de la suppression d’une voyelle finale, devroit être du genre humain.

☞ APOSTROPHER. v. a. Détourner son discours pour adresser la parole à quelque personne, ou à quelque chose que l’on personnifie. Compellare, alloqui aliquem. L’endroit où Démosthène apostrophe les morts à la journée de Marathon lui a fait autant d’honneur que s’il avoit ressuscité les morts qu’il avoit apostrophés. Perr.

 J’aimerois mieux encor ces Prêcheurs furieux,
Qui portant vers le ciel leurs regards effroyables,

Apostrophent les Saints comme on chasse les Diables.
Sanlecq.

Apostropher se prend aussi pour appeler, qualifier, adresser la parole à quelqu’un, pour lui dire quelque chose de désagréable. Cet homme apostrophe tout le monde. Pourquoi m’apostrophez vous ainsi ?

Un pédant qu’à tous coups votre femme apostrophe
Du nom de bel esprit, & de grand Philosophe.

Mol.

Apostropher se dit aussi en plaisantant, lorsqu’on veut parler des coups que l’on donne ou que l’on reçoit. Apostropher quelqu’un d’un souflet, c’est-à-dire, lui donner un souflet.

Un Magister s’empressant d’étouffer
Quelque rumeur parmi la populace,
D’un coup dans l’œil se fit apostropher.
Dont il tomba faisant laide grimace.

Rousseau.

☞ APOSTROPHIE. Terme de Mythologie. Nom donné par Cadmus à Venus Uranie ou Céleste, que les Grecs révéroient, afin d’être détournés de toute impureté. Les Romains lui dédierent un temple du temps de Marcellus, suivant un avis qu’ils trouverent dans le livre des Sibylles, sous le nom de Verticorda, c’est-à-dire, qui tourne, ou change les cœurs. Les femmes débauchées y alloient offrir leurs présens, pour se convertir, & les jeunes filles pour conserver leur chasseté. Pausanias, l. I. & 9, cité par Mor.

APOSTUME. Voyez Apostème.

APOSTUMER. v. n. Se former en apostème, en pus. Suppurare. Cette veine n’a pas été bien dégorgée, il faut craindre qu’elle n’apostume. Cette contusion commence à apostumer.

☞ Puisqu’on veut que nous disions apostème au lieu d’apostume, ne devroit-on pas dire apostèmer au lieu d’apostumer.

APOTACTITE. s. m. Apotactica. Nom de secte, qui signifie, renonçant, du grec, ἀποτάσσω, ou ἀποτάττω, je renonce. Les Apotactites étoient des gens qui pour suivre le conseil évangélique de la pauvreté, & l’exemple des Apôtres & des premiers fidèles, renonçoient à leurs biens, & ne possédoient rien. Il ne paroît pas qu’ils errassent dans les commencemens. Nile même, dans la passion de Saint Théodore Martyr, ch. 2, avoue qu’ils ont eu de saintes vierges martyres dans la persécution de Dioclétien au commencement du IV siècle ; mais ensuite ils tomberent dans l’erreur comme les Encratites, ou Abstinens, & enseignèrent que ce renoncement aux richestes étoit non-seulement un conseil, mais encore un précepte, &c. Ainsi la loi 6 du Code Théodosien de hæret. les joint aux Eunomiens & aux Ariens, & leur défend toute sorte d’assemblées.

APOTEVITZ. Petite ville de l’Esclavonie, en Hongrie. Apetevitzza. Elle est dans le comté de Creits ou Creiss, au nord de la ville de ce nom, & près de celle de Dopranitz.

☞ APOTHEME. s. m. En Géométrie. Perpendiculaire menée du centre d’un polygone régulier sur un de ses côtés. Encyc.

APOTHÉOSE. s. f. Consécration, déification. Ce mot se dit principalement de la cérémonie par laquelle les anciens Romains mettoient leurs Empereurs au rang des Dieux ; après quoi ils leur élevoient des temples & des autels. Apotheosis, Consecratio, Relatio in Deos. C’étoit un dogme que Pythagore avoit puisé chez les Chaldéens, que les personnes vertueuses étoient mises après leur mort au rang des Dieux. Les Païens déifioient les inventeurs des choses utiles au genre humain, & ceux qui avoient rendu quelque service important à la République. Juvénal, en se moquant des fréquentes apothéoses, plaignoit le pauvre Atlas, qui alloit succomber sous le fardeau de tant de Dieux qu’on plaçoit tous les jours dans le Ciel. Bayl. Sénèque se moque agréablement de l’apothéose de Claudius. Tibère proposa au Sénat l’apothéose de Jésus-Christ, comme le rapportent Eusèbe, Tertullien, & S. Chrysostôme.

Ce mot vient de la préposition, ἀπὸ, & de θεός, Deus.

Hérodien, au commencement du livre 4 de son histoire, parlant de l’apothéose de Sévère, a fait une description exacte & fort curieuse des cérémonies qui s’observoient dans les apothéoses des Empereurs. Après que le corps du défunt a été brûlé avec les solemnités ordinaires, on met dans le vestibule du palais, sur un grand lit d’ivoire couvert de drap d’or, une image de cire qui le représente parfaitement, ayant néanmoins un visage de malade. Pendant presque tout le jour le Sénat se tient rangé & assis au côté gauche du lit avec des robes de deuil. Les Dames de la première qualité sont au côté droit, ayant des robes blanches toutes simples & sans ornemens. Cela dure sept jours de suite, pendant lesquels les Médecins s’approchant de temps en temps du lit pour considérer ce malade, trouvent toujours qu’il baisse jusqu’à ce qu’enfin ils publient qu’il est mort. Alors de jeunes Chevaliers Romains & de jeunes Seigneurs du premier rang chargent sur leurs épaules ce lit de parade, & passant par la rue sacrée, ils le portent au vieux marché, où les Magistrats ont coutume de se démettre de leurs charges, & là il est placé entre deux espèces d’amphitéâtres, dans l’un desquels sont de jeunes Gentils’hommes, & dans l’autre de jeunes Dames des meilleures maisons de Rome, chantant des hymnes en l’honneur du mort, composées sur des airs lugubres. Ces hymnes étant achevées, on porte le lit hors de la ville au champ de Mars. Au milieu de cette place est dressée une forme de pavillon carré qui est tout de bois : le dedans est rempli de matières combustibles, & au dehors il est revêtu de drap d’or, & orné de figures d’ivoire & de diverses peintures. Au-dessus de cet édifice il y en a plusieurs autres élevés, qui sont semblables au premier, tant pour la forme que pour la décoration, si ce n’est qu’ils sont plus petits & qu’ils vont toujours en diminuant. On place le lit de parade dans le second de ces édifices, qui a les portes ouvertes, & on jette tout à l’entour une grande quantité d’aromates, de parfums, de fruits & d’herbes odoriférantes. Après quoi les Chevaliers font autour du catafalque une certaine cavalcade à pas mesurés. Plusieurs chariots tournent aussi à l’entour. Ceux qui les conduisent sont aussi revêtus de robes de pourpre, & portent des représentations ou images des plus grands Capitaines Romains, & des plus illustres Empereurs. Cette cérémonie étant achevée, le nouvel Empereur s’approche du catafalque avec une torche à la main, & en même temps on y met le feu de tous côtés, en sorte que les aromates & les autres matières combustibles prennent feu tout d’un coup ; on lâche aussi-tôt du faîte de cet édifice un aigle, qui s’en volant dans l’air avec la flamme, va porter au ciel l’ame de l’Empereur, comme les Romains le croient. Et dès-lors il est mis au nombre des Dieux. C’est de-là que les médailles qui représentent des apothéoses ont le plus souvent un autel, sur lequel il y a du feu, ou bien un aigle qui prend son essor pour s’élever en l’air ; quelquefois il y a deux aigles. Le mot est toujours Consecratio. Quelquefois l’Empereur est assis sur l’aigle, qui l’enleve dans le ciel. Donat, De urbe Roma, III, 4, décrit une pierre antique qui représente l’apothéose de Tite. Il y a dans le trésor de la Sainte Chapelle de Paris une très-belle agathe orientale d’une grandeur extraordinaire, qui représente l’apothéose d’Auguste, selon quelques-uns, & selon d’autres, de Commode, Voyez Consécration.

Apothéose, se dit aussi de la réception fabuleuse des anciens héros parmi les Dieux. L’apothéose d’Hercule, d’Enée, &c.

☞ Faire l’apothéose de quelqu’un, signifie figurément lui donner les plus grands éloges. Bougainville.

APOTHÉOSER. v. a. Déifier, mettre au nombre des Dieux, déclarer Dieu. In Divos referre, Deum declarare. Quintillus se fit ouvrir les veines, & fut apothéosé par Aurélien, qui aima mieux lui accorder le nom de Dieu, que celui d’Empereur. Fleury, Hist. Eccl. Liv. IV. Toutes les parties de notre terre, de même que ses diverses productions, ont été apothéosées, chacune en leur particulier. M. Beneton de Perrin, p. 464 du Merc. de Mars 1735. Ce mot est en italique.

APOTHÈSE. s. f. C’est dans Hippocrate l’action de placer convenablement un membre rompu, & auquel les bandages sont appliqués ; c’est l’action de lui donner la situation dans laquelle il faut qu’il demeure.

D’ἀποτίθημι, placer.

APOTHICAIRE. Quelques-uns écrivent, Apothiquaire : souvent on ôte le h, & l’on écrit Apoticaire, ou Apotiquaire. Apothicaire est le mieux. s. m. Qui exerce cette partie de la Médecine qui consiste en la préparation des remédes. Qui fait & qui vend les remédes ordonnés par les Médecins. Medicamentarius ; Pharmacopola, Apothecarius. Voyez au mot Pharmacopole les différentes significations du mot latin Pharmacopola. De Rochefort définit les Apothicaires, les Cuisiniers des Médecins. Nicolas Langius a fait un grand volume contre les Apothicaires, sur le peu de connoissance qu’ils ont des simples, sur la facilité qu’ils ont à se laisser tromper par les marchands étrangers, qui leur fournissent des drogues sophistiquées ; sur ce qu’ils donnent une drogue pour une autre, une vieille qui a perdu ses forces, pour une nouvellement venue du Levant. Deroch. A Paris le corps des Maîtres Apothicaires est joint à celui des Epiciers & Droguistes, & on recevoit autrefois parmi les Apothicaires des Epiciers qui faisoient l’une & l’autre profession.

☞ Encore aujourd’hui les marchands Epiciers de Paris composent avec les Apothicaires le second des six corps des Marchands : mais les Epiciers n’ont droit de débiter que les drogues simples, & les quatre grandes compositions galéniques qui sont réputées marchandises foraines.

Apothicaire charitable. C’est celui qui donne ses remédes par charité. C’est aussi un livre qui traite des remèdes, & qui a été fait particulièrement en vue des pauvres.

Au reste il ne faut se servir de ces sortes de livres qu’avec précaution : comme le commun du peuple n’est pas en état de connoître les maladies auxquelles ces remèdes conviennent, il pourroit n’en pas faire une juste application.

Aspirant Apothicaire. C’est celui qui veut être Apothicaire, & se fait apprenti. Avant que les Aspirans Apothicaires puissent être obligés chez aucun maître de cet art, pour apprentis, ils doivent être, selon les statuts, amenés & présentés au bureau par-devant les Gardes, pour connoître s’ils ont étudiés en Grammaire, & s’ils sont capables d’apprendre la Pharmacie. Après que l’aspirant aura achevé ses quatre ans d’apprentissage, & servi les maîtres pendant six ans, il doit en rapporter le brevet & les certificats. Il sera présenté au bureau par un conducteur, & subira un examen pendant trois heures, par les Gardes, & neuf autres maîtres que les Gardes auront choisis & nommés. Il subit encore un second examen, appelé l’Acte des herbes, & ensuite les Gardes lui donnent à faire un chef-d’œuvre de cinq compositions. Voyez dans le Traité de la Police de M. de la Mare, Liv. IV, tit. 10 les réglemens pour les Apothicaires, & l’apothicairerie.

Ce mot vient du grec ἀποθήϰη, qui signifie, Boutique. On trouve Boticario dans les Loix Palatines de Jacques II, Roi de Majorque, publiées en 1344. Bartolin se plaint qu’il y a trop d’Apothicaires en Dannemarck ; quoiqu’il n’y en ait que trois à Copenhague, & quatre seulement en tout le reste du royaume, encore faut-il qu’ils fassent quelque autre trafic pour vivre : ce qui montre qu’on se pourroit bien passer d’Apothicaires. On en a compté 1300 dans Londres. Il y a dans des états de la maison du Roi un Apothicaire distillateur distingué des Apothicaires.

Apothicaire, se dit proverbialement en ces phrases : des parties d’Apothicaire, sont des mémoires de frais, ou de fournitures, sur lesquels il y a beaucoup à rabattre. On appelle aussi un Apothicaire sans sucre, un pauvre Apothicaire dont la boutique est mal fournie ; & figurément tout autre homme ou marchand qui n’a pas les choses nécessaires pour exercer sa profession, ou pour garnir sa boutique. Apothicaire sans sucre se dit peut-être à cause que les Apothicaires emploient du sucre dans plusieurs de leurs compositions, & que s’ils manquent de sucre, ils n’auront pas les autres ingrediens qui sont nécessaires dans ces compositions. On dit aussi d’un homme qui prend trop de remèdes, qu’il fait de son corps une boutique d’Apothicaire.

APOTHICAIRERIE. s. f. C’est la boutique où se préparent, se gardent, & se vendent les remèdes. Pharmacopolium. C’est aussi l’art de les bien préparer. Ars pharmacopæa, pharmaceutice. Cet homme entend bien l’apothicairerie. Les Gardes de l’apothicairerie & épicerie ; les Maîtres Gardes & Jurés en métier d’apothicairerie : le fait & état d’apothicairerie est de plus grande conséquence que tous les autres états quels qu’ils soient ; l’art d’apothicairerie, les marchandises d’apothicairerie & épicerie : toutes ces phrases sont tirées des réglemens faits pour les Apothicaires & l’apothicairerie. Ces réglemens au reste écrivent toujours Apothiquaire & Apothiquairerie, au moins dans le Traité de la Police de M. de la Mare. Il y a dans les Communautés des lieux destinés pour l’apothicairerie. L’apothicairerie de Dresde est fameuse. On dit qu’il y a 14000 boëtes d’argent toutes pleines de drogues & de remèdes fort renommés.

APOTHICAIRESSE. s. f. Religieuse qui a soin de l’apothicairerie de son Couvent, qui prépare les remèdes pour les malades, & qui consulte les Médecins en leur faveur. Medicamentaria. C’est la Mere une telle qui est Apothicairesse de son Couvent.

☞ On donne aussi ce nom à la femme d’un Apothicaire, au moins parmi le peuple ; qui dit quelquefois Apothicaresse.

APOTHRAUSE. s. f. Perfractio. Terme de Chirurgie. Espèce de fracture avec séparation & détachement de quelque esquille ou pièce de l’os. Ce mot est grec, ἀποθραυσις, Perfractio, fracture entière : on appelle aussi cette fracture, Apocope.

☞ APOTOME. s. m. Terme d’Algèbre. C’est la différence des quantités incommensurables ; l’excès d’une ligne donnée sur une autre ligne qui lui est incommensurable, de la diagonale, par exemple, sur le côté du carré. Apotome. Voyez les Élém. d’Euc. L. X.

Apotome, en termes de Musique, est la partie qui reste d’un ton entier, quand on en ôte le demi-ton majeur. Apotomia, discissio. La proportion en nombre de l’apotome est de 2048, à 2187. Les Grecs ont cru que le ton majeur ne pouvoit être divisé en deux parties égales, & ils ont appelé la première partie ἀποτομὴ, & l’autre λέμμα, suivant Pythagore & Platon. Les Anciens ont appelé Apotome le demi-ton imparfait. Quelques uns divisent encore l’apotome en majeur & en mineur.

Ce mot vient du grec ἀποτέμεο, abscindo.

APÔTRE. s. m. Envoyé, disciple de Jésus-Christ, qui a eu mission pour prêcher son Évangile par tout le monde, & pour le porter à toutes les nations de la terre. Apostolus. Le symbole des Apôtres. S. Pierre est le premier des douze Apôtres. S. Paul est appelé par excellence l’Apôtre des Gentils, parce que c’est celui qui a fait le plus de conversions parmi eux, son ministère leur ayant été particulièrement destiné, comme celui de l’Apôtre Saint Pierre aux Juifs. On donne quelque marque distinctive à tous les Apôtres. A S. Pierre des clefs ; à S. Paul une épée ; à S. André une croix en sautoir ; à S. Jacques le Mineur un bâton de foulon ; à S. Jean un calice, d’où s’envole un serpent ailé ; à S. Barthélemi un couteau ; à S. Philippe un long bâton, dont le bout d’en haut a la forme de croix ; à S. Thomas une lance ; à S. Matthieu une hache ; à S. Matthias une coignée ; à S. Jacques le Majeur un bourdon & une calebace ; à S. Simon une scie ; à S. Thadée une massue.

Le mot d’Apôtre, dans son origine, ne signifie autre chose que délégué, ou envoyé ; on le trouve dans Hérodote en ce sens, qui est le sens naturel de ce mot. Il est appliqué dans le Nouveau Testament à diverses sortes d’envoyés, premièrement aux douze disciples de Jésus-Christ, qui sont appelés Apôtres par excellence. C’est en ce sens-là que quelques faux prédicateurs de l’Évangile contesterent à S. Paul sa qualité d’Apôtre, parce qu’il n’y avoit que ceux qui avoient été témoins des actions de Jésus-Christ, qui pussent prendre cette qualité. Pour répondre à ces faux docteurs, qui avoient séduit les Églises de Galatie, il commença par ces mots la lettre qu’il leur écrivit, Paul Apôtre, non de la part des hommes, ni par aucun homme ; mais par Jésus-Christ & Dieu son pere. Il voulut leur faire connoître que sa mission venoit immédiatement de Dieu, & qu’il étoit par conséquent véritablement Apôtre.

En second lieu, le nom d’Apôtre se prend pour de simples envoyés des Églises ; comme quand S. Paul dit au ch. 16, de son Épitre aux Rom. v. 7 Saluez Andronicus & Junia mes parens, & qui ont été avec moi, lesquels ont un grand nom parmi les Apôtres.

En troisième lieu, on donnoit le nom d’Apôtres à ceux que les Eglises envoyoient porter des aumônes aux fidèles des autres Églises : ce qui avoit été pris des usages des Synagogues, qui appeloient Apôtres ces envoyés. C’est en ce sens-là que Saint Paul, écrivant aux Philippiens, dit au chapitre second de sa lettre, qu’Epaphrodite leur a servi d’Apôtre & de Ministre pour l’assister dans les besoins.

Apôtre est aussi celui qui a le premier planté la foi en quelque endroit. S. Denis de Corinthe est l’Apôtre de la France. S. François Xavier est l’Apôtre des Indes.

On donna encore au commencement de l’Église le nom d’Apôtres à d’autres que les douze que Jésus-Christ choisit. Ainsi S. Paul, Rom. XVI, ch. 7, dit qu’Andronicus & Junia sont considérables entre les Apôtres. Quelques-uns croient qu’on appeloit ainsi ceux qui avoient annoncé l’évangile les premiers en quelque lieu.

☞ Les Évêques ont été appelés autrefois Apôtres & Apostoles. Depuis ce nom a été donné au Pape seul, en sorte que nos écrivains françois l’appeloient Apostole, comme l’a remarqué M. Bignon dans ses notes sur les formules de Marculphe, pag, 251, édit. de Paris in-4o. 1666.

S. Paul est aussi appelé simplement & absolument l’Apôtre. Les Prédicateurs sur-tout en usent souvent ainsi. Je sais que l’Apôtre & les Saints ont gémi devant Dieu, de trouver dans eux l’ennemi le plus dangereux de leur salut. Chemin. Voilà un excellent moyen de se conserver en grâce, &, si j’ose le dire, de s’y confirmer ; aspirer toujours à un nouveau degré de charité, selon le conseil de l’Apôtre. Id. Loin de cette chaire cet art, qui loue vainement les hommes par les actions de leurs ancêtres, & qui s’arrête à des généalogies sans fin, comme parle l’Apôtre, plus propres à satisfaire une vaine curiosité, qu’à édifier une foi solide. Flech. Avoir déjà la mort à ses côtés, mourir, comme dit l’Apôtre, à chaque moment, & ne s’empresser pas d’arriver à la sainteté par la voie courte & abrégée d’une vie fervente, il n’y a, ou qu’une stupidité grossière, ou qu’une infidélité au moins commencée, qui puisse aller jusques-là. Bourdal. Quelquefois on dit, le grand Apôtre. Cette réponse, pour appliquer ici la parole du grand Apôtre, c’est la réponse de la mort. Bourdal. Cette expression au reste est très-ancienne, & ne nous est pas particulière. Nous l’avons prise des Peres Grecs & Latins, qui en usent très-souvent. C’est aussi en ce sens qu’on appeloit à Constantinople le Docteur de l’Apôtre une des dignités de l’Église de cette ville, dont la charge, ou la fonction, étoit d’expliquer au peuple les Épitres de S. Paul.

On appelle aussi en termes de Liturgie, & même dans l’usage ordinaire, les Épitres de S. Paul du nom d’Apôtre. S. Grégoire, dans son commentaire, dit, Deinde sequitur Apostolus, puis suit l’Apôtre, c’est-à-dire, l’Epître qui est tirée des Épitres de S. Paul. Lire l’Apôtre, c’est lire les Épitres de S. Paul. Ce nom, chez les Grecs, signifie aussi dans le même sens, & en termes de Liturgie, un livre d’Église qui contient les Epîtres de l’Apôtre, c’est-à-dire de S. Paul, selon l’ordre qu’ils les lisent dans leurs Eglises pendant le cours de l’année. Ils en ont un qui contient les Evangiles ; qu’ils appellent Εὐαγγέλιον, Evangile. Celui dont nous parlons apparamment ne contenoit d’abord que les Epîtres de S. Paul, & pour cela fut nommé l’Apôtre. Depuis long-temps il renferme aussi les actes des Apôtres, les Epîtres canoniques, & l’Apocalypse. Il est aussi nommé actes des Apôtres, Πραξαπόστολος, parce que c’est le premier livre qui s’y trouve.

Le nom d’Apôtre a été aussi en usage dans l’Eglise latine au même sens, & il se trouve dans S. Grégoire, comme on l’a dit, dans Hincmar, & dans Isidore. S. Augustin, Sermon 176, al 10, de verb. Apostol. Le concile de Tolède, can. 4 ; le concile de Carthage, & les anciens Sacramentaires donnent le nom d’Apôtre aux Epîtres de S. Paul. L’on avoit aussi des livres anciens qui contenoient les Evangiles, ou les Epîtres, selon l’ordre qu’on les lisoit à la messe pendant l’année. Il y en a un fort beau & fort ancien à l’abbaye de Chelles, qui contient tous les Evangiles de l’année selon la Vulgate.

Apôtres, chez les Juifs, étoient anciennement certains Officiers qu’ils envoyoient dans les provinces ; pour veiller à l’observation de la loi, pour lever l’argent qu’on donnoit, soit pour les réparations du temple, soit pour payer le tribut aux Empereurs, comme il paroît par la lettre de l’Empereur Julien aux Juifs, citée au mot Apostole. Le Code Théodosien, Liv. XIV. De Judæis, les appelle Apostoli, qui ad exigendum aurum atque argentum à Patriarcha certo tempore diriguntur. Voyez aussi la loi 18. Ibid. Les Juifs les nommoient שליחין Schelihhin, c’est-à-dire, envoyés. Ils étoient inférieurs aux Officiers de la Synagogue nommés Patriarches, qui les envoyoient comme des Commissaires dans toute l’étendue de leur district, & ils avoient juridiction de Légats ou d’Envoyés. Quelques Auteurs ont remarqué que S. Paul l’avoit été, & que c’est à cela qu’il fait allusion au commencement de son Epître aux Galates, comme s’il eût dit : Paul, non plus Apôtre de la Synagogue, & envoyé par elle, pour maintenir & avancer la loi mosaïque ; mais maintenant Apôtre & Envoyé de Jésus-Christ, &c. S. Jérôme, sans dire que S. Paul l’ait été, croit au moins qu’il fait allusion à ces Apôtres de la Synagogue. S. Epiphane, Hér. 30, parle de ces Apôtres des Juifs, & dit qu’ils étoient en grande vénération. Voyez aussi Baronius à l’an 32 de Jésus-Christ. Honorius défendit aux Juifs ces sortes de levées, & ces Apôtres, par la loi que j’ai citée. Voyez Godefroy sur la même loi. Cet Auteur croit que les noms d’Apôtres & de Patriarches n’ont commencé à être en usage parmi les Juifs, qu’après la destruction de Jérusalem. Voyez encore M. de Tillem. Hist. des Empereurs Tom. I. pag. 673.

Papias appela Apôtres, les Hérétiques nommés communément Apostoliques, dont nous avons parlé. S. Augustin leur donne le même nom, & dit qu’ils faisoient profession de ne rien posséder en ce monde. S. Bernard crie aussi avec force contre les Hérétiques de son temps, qui se nommoient Apôtres. Voy. Apostolique.

Le peuple appelle aussi Apôtres, des Confreres ou Pénitens qui vont les pieds nus aux processions du S. Sacrement, & en d’autres solemnités. En Portugal, & aux Indes, à Goa, on appelle les Jésuites, Apôtres. Des fruits si visibles & si merveilleux firent regarder les deux Missionnaires (Xavier & Rodriguez) comme des hommes envoyés du Ciel, & remplis de l’esprit de Dieu. Aussi tout le monde leur donna-t-il le surnom d’Apôtres, & ce titre glorieux est demeuré à leurs successeurs dans le Portugal. Bouh. Vie de Saint Franc. Xav. Liv. I. Dans l’arsenal de Brême, il y a 12 pièces de canon qu’on appelle les douze Apôtres ; supposant que tout le monde doit acquiescer à la prédication de pareils Apôtres.

Apôtres, chez les Protestans, sont de jeunes ministres, qui ont été reçus par provision, en attendant qu’ils soient appelés au service de quelque Eglise, afin qu’il y en ait toujours de prêts à remplir les places vacantes, & qu’ainsi les Eglises ne demeurent pas sans Pasteurs. Cela se pratique ordinairement à Genève, & en plusieurs endroits de la Suisse.

On dit proverbialement & ironiquement, de quelqu’un qui se lache sous un extérieur réservé. C’est un bon Apôtre.

On appeloit autrefois Apôtres, les Lettres dimissoires données à un Appelant par le Juge, à quo, adressées au Juge d’appel, par lesquelles il le certifioit de l’appel interjetté, & lui en renvoyoit la connoissance, sans quoi il n’étoit pas permis de le poursuivre par l’ancienne rigueur du droit ; ce que l’article 117 de l’Ordonnance de 1539 a aboli. Provocationis indices, & dimissionis testes Litteræ. Le temps limité pour obtenir ces Lettres étoit de trente jours ; au lieu de quoi on a introduit les désertions. Cette formule de Lettres dimissoires appelées Apôtres, a été plus long-temps en usage dans la Juridiction ecclésiastique. Il y en avoit de cinq sortes. On appelle Apôtres les Dimissoires, lorsqu’ils ont été expédiés par le Juge dont est appel, & qu’il renvoie l’appelant au Juge supérieur : Reverentiaux, lorsqu’ils ont été donnés seulement par révérence pour le supérieur : Refutatoires, lorsque le Juge à quo ne veut point déférer à l’appel, qui lui paroît frivole, & illusoire : Testimoniaux, lorsqu’en l’absence du Juge l’appel est interjetté devant un Notaire : Conventionnaux, lorsque, par le consentement des parties, l’appel est dévolu au Juge supérieur. Ce style a été aussi supprimé dans les Cours ecclésiastiques après l’Ordonnance de 1539. On appeloit encore autrefois Apôtres, les Lettres dimissoires que l’Evêque donnoit à un Laïc, ou à un Clerc qui se transportoit dans un autre diocèse pour y être ordonné. Voyez Cujas, Souchet, le commentaire de, M. Bourdin sur l’art. 117, de l’Ordonnance de 1539, &c.

Ce mot vient du grec ἀπόστολος, qui signifie un homme envoyé, du verbe ἀποστέλλειν, envoyer ; d’Apostolus, on a dit d’abord Apostole. Le Duc de Bretagne Jean II, dans son Testament, dit, « Et requier & pri mon cher Pere espituel l’Apostiole de Rome. » Geoffroy de Villehardouin a dit l’Apostoile de Romme. Ensuite on a dit Apostole. Henri III, Roi d’Angleterre, dans un acte de l’an 1266 rapporté par D. Lobineau, Hist. de Bret. T. II, p. 409, dit : « Le Jur de Jouedy prochein devaunt la feste S. Barnabé l’Apostle. » Puis enfin Apôtre, changeant la lettre l, en r, comme en beaucoup d’autres mots.

☞ APÔTRES. (Onguent des) Voyez Apostolorum.

APOTROPÉEN, ENNE. adj. Averruncus, malorum depulsor. Celui qui détourne quelque chose de mauvais. Ce nom est grec Ἀποτροπαιος, & vient d’ἀποτρέπω, je détourne, composé d’ἀπὸ, & de τρέπω, je tourne. C’est une épithète que les anciens Païens donnoient aux Dieux, qui, selon leur idée, détournoient d’eux les maux qui les menaçoient : on les appeloit aussi Ἀλεξίϰαϰοι. Les Latins les appeloient Averrunci, du mot averruncare, détourner. Voyez le P. Kirker, Tom. III, p. 487, sur les Dieux Apotropéens des Egyptiens.

APOUILLE. s. f. Apulia. On trouve Apolia dans la vie de S. Potit, le 13 Janv. Bolland. Tom. I, p. 757, mais d’autres exemplaires lisent Apulia. Voy. Pouille.

APOYOMATLI. s. m. Herbe de la Floride. Ses feuilles ressemblent à celles des porreaux, un peu plus longues, & plus déliées. Son tuyau est comme celui du jonc. Cette racine a une saveur aromatique. Les Espagnols en font une poudre qu’ils prennent avec du vin pour la gravelle. Elle excite l’urine ; elle appaise les douleurs de la poitrine, & guérit les affections de la matrice.

APOZÈME. Voyez Aposème.

APP.

APPAISEMENT. Voyez Apaisement.

APPAISER. Voyez Apaiser.

☞ APPANAGE & APPANAGER. Voyez Apanage & Apanager.

APPARAT. s. m. Eclat ou pompe qui accompagne