L’Encyclopédie/1re édition/MUET

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MUET, s. m. (Gram.) qui n’a point eu l’usage de la parole, ou qui l’a perdu. Les sourds de naissance sont muets.

Ce n’est point d’aujourd’hui qu’on voit confirmer par expérience la possibilité de l’art si curieux d’apprendre à parler aux muets. Wallis en Angleterre, Amman en Hollande, l’ont pratiqué avec un succès admirable dans le siecle dernier. Les ouvrages de ces deux savans sont connus de tout le monde. Il paroît par leur témoignage qu’un certain religieux s’y étoit exercé bien avant eux. Emmanuel Ramirez de Cortone, & Pierre de Castro espagnol, avoient aussi traité cette matiere long-tems auparavant, & nous ne doutons point que d’autres auteurs n’aient encore écrit & publié des méthodes sur cet article. Il est cependant vraissemblable que c’est le P. Ponce espagnol, mort en 1584, qui a inventé le premier l’art de donner la parole aux muets ; mais il n’a pas enseigné sa méthode, comme ont fait Amman & Wallis. M. Perreire, né en Espagne, doit aussi la sienne à son génie : on peut voir ses succès dans l’histoire de l’académie des sciences. (D. J.)

Muet, adj. (Gram.) cette qualification a été donnée aux lettres par les Grammairiens, en deux sens différens ; dans le premier sens, elle n’est attribuée qu’à certaines consonnes, dont on a prétendu caractériser la nature ; dans le second sens, elle désigne toute lettre, voyelle ou consonne, qui est employée dans l’orthographe, sans être rendue en aucune maniere dans la prononciation.

I. Des consonnes appellées muettes. « Les Grammairiens ont accoutumé dans toutes les langues de faire plusieurs divisions & subdivisions des consonnes ; & la division la plus commune à l’égard des langues modernes, est qu’ils en distinguent les consonnes en muettes & en demi-voyelles, appellant muettes toutes celles dont le nom commence par une consonne, comme b, c, d, g, k, p, q, t, z, & demi-voyelles toutes les autres, comme f, h, l, m, n, r, s, x ». Regnier, gramm. fr. in-12. pag. 9.

Cet academicien abandonne cette division, parce qu’elle n’est établie, dit-il, sur aucune différence fondée dans la nature des consonnes.

En effet, s’il ne s’agit que de commencer le nom d’une consonne par cette consonne même pour la rendre muette, il n’y en a pas une qui ne le soit dans le système de Port-Royal, que j’adopte dans cet ouvrage : & d’ailleurs il est démontré qu’aucune consonne n’a de valeur qu’avec la voyelle, ou si l’on veut, que toute articulation doit précéder un son ; (voyez H.) ainsi toutes les consonnes sont muettes par leur nature, puisqu’elles ne rendent aucun son, mais qu’elles modifient seulement les sons. Platon (in Cratylo.) les appelle toutes ἀφωναι ; c’est le même sens que si on les nommoit muettes, & il y a plus de vérité que dans le nom de consonnes. Au reste, telle consonne dont l’appellation commence chez nous par une voyelle, commençoit chez les Grecs par la consonne même nous disons ele, emme, enne, erre, & ils disoient lambda, mu, nu, ro ; les mêmes lettres qui étoient muettes en Grece sont donc demi-voyelles en France, quoiqu’elles soient les signes des mêmes moyens d’explosion, ce qui est absurde. Les véritables distinctions des consonnes sont détaillées au mot Lettre ; M. l’abbé de Dangeau n’en avoit pas encore donné l’idée, lorsque la grammaire de M. l’abbé Regnier fut publiée.

II. Des lettres muettes dans l’orthographe. Je ne crois pas qu’on puisse remarquer rien de plus précis, de plus vrai, ni de plus essentiel sur cet article, que ce qu’en a écrit M. Harduin, secrétaire perpétuel de l’académie d’Arras, dans ses Rem. div. sur la prononciation & sur l’orthographe, pag. 77. Je vais simplement le transcrire ici, en y insérant quelques observations entre deux crochets.

« Qu’on ait autrefois prononcé des lettres qui ne se prononcent plus aujourd’hui, cela semble prouvé par les usages qui se sont perpétués dans plus d’une province, & par la comparaison de quelques mots analogues entre eux, dans l’un desquels on fait sonner une lettre qui demeure oiseuse dans l’autre. C’est ainsi que s & p ont gardé leur prononciation dans veste, espion, bastonnade, hospitalier, baptismal, septembre, septuagenaire, quoiqu’ils l’aient perdue dans vestir, espier, baston, hospital, baptesme, sept, septïer ». [On supprime même ces lettres dans l’orthographe moderne de plusieurs de ces mots, & l’on écrit vêtir, épier, bâton, hopital.]

« Mon intention n’est cependant pas de soutenir que toutes les consonnes muettes qu’on emploie, ou qu’on employoit il n’y a pas long-tems au milieu de nos mots, se prononçassent originairement. Il est au contraire fort vraissemblable que les savans se sont plû à introduire des lettres muettes dans un grand nombre de mots, afin qu’on sentît mieux la relation de ces mots avec la langue latine » ; [ou même par un motif moins louable, mais plus naturel ; parce que comme le remarque l’abbé Girard, on mettoit sa gloire à montrer dans l’écriture françoise, qu’on savoit le latin.] « Du moins est-il constant que les manuscrits antérieurs à l’Imprimerie, offrent beaucoup de mots écrits avec une simplicité qui montre qu’on les prononçoit alors comme à présent, quoiqu’ils se trouvent écrits moins simplement dans des livres bien plus modernes. J’ai eu la curiosité de parcourir quelques ouvrages du quatorzieme siecle, où j’ai vu les mots su vans avec l’orthographe que je leur donne ici : droit, saint, traité, dette, devoir, doute, avenir, autre, mout, recevoir, votre ; ce qui n’a. pas empêché d’écrire long-tems après, droict, sainct, traicté, debte, debvoir, doubte, advenir, aultre, moult, recepvoir, vostre, pour marquer le rapport de ces mots avec les noms latins directus, sanctus, tractatus, debitum, debere, dubitatio, advenire, alter, multum, recipere, vester. On remarque même, en plusieurs endroits des manuscrits dont je parle, une orthographe encore plus simple, & plus conforme à la prononciation actuelle, que l’orthographe dont nous nous servons aujourd’hui. Au lieu d’écrire science, sçavoir, corps, temps, compte, mœurs, on écrivoit dans ce siecle éloigné, sience, savoir, cors, tans, conte, meurs. » [Je crois qu’on a bien fait de ramener science, à cause de l’étymologie ; corps & temps, tant à cause de l’étymologie, qu’à cause de l’analogie qu’il est utile de conserver sensiblement entre ces mots & leurs dérivés, corporel, corporifier, corpulence, temporel, temporalité, temporiser, temporisation, que pour les distinguer par l’orthographe des mots homogenes cors de cerf ou cors des piés, tant adverbe, tan pour les Tanneurs, tend verbe : pareillement compte, en conservant les traces de son origine, computum, se trouve différencié par-là de comte, seigneur d’une comté, mot derivé de comitis, & de conte, narration fabuleuse, mot tiré du grec barbare ϰοντὸν, qui parmi les derniers Grecs signifie abrégé.]

« Outre la raison des étymologies latines ou grecques, nos ayeux insérerent & conserverent des lettres muettes, pour rendre plus sensible l’analogie de certains mots avec d’autres mots françois. Ainsi, comme tournoyement, maniement, éternuement, dévouement, je lierai, j’employerai, je tuerai, j’avouerai, sont formés de tournoyer, manier, éternuer, dévouer, lier, employer, tuer, avouer, on crut devoir mettre ou laisser à la pénultieme syllabe de ces premiers mots un e qu’on n’y prononçoit pas. On en usa de même dans beau, nouveau, oiseau, damoiseau, chasteau & autres mots semblables, parce que la terminaison eau y a succédé à el : nous disons encore un bel homme, un nouvel ouvrage ; & l’on disoit jadis, oisel, damoisel, chastel.

Les écrivains modernes, plus entreprenans que leurs devanciers,» [nous avons eu pourtant des devanciers assez entreprenans ; Sylvius ou Jacques Dubois dès 1531 ; Louis Meigret & Jacques Pelletier quelques vingt ans après ; Ramus ou Pierre de la Ramée vers le même tems ; Rambaud en 1578 ; Louis de Lesclache en 1668, & l’Artigaut très-peu de tems après, ont été les précurseurs des réformateurs les plus hardis de nos jours ; & je ne sais si l’abbé de S. Pierre, le plus entreprenant des modernes, a mis autant de liberté dans son système, que ceux que je viens de nommer : quoi qu’il en soit, je reprens le discours de M. Harduin.] « Les écrivains modernes plus entreprenans, dit-il, que leurs devanciers, rapprochent de jour en jour l’orthographe de la prononciation. On n’a guere réussi, à la vérité, dans les tentatives qu’on a faites jusqu’ici pour rendre les lettres qui se prononcent plus conformes aux sons & aux articulations qu’elles représentent ; & ceux qui ont voulu faire écrire ampereur, acsion, au lieu d’empereur, action, n’ont point trouvé d’imitateurs. Mais on a été plus heureux dans la suppression d’une quantité de lettres muettes, que l’on a entierement proscrites, sans considérer si nos ayeux les prononçoient ou non, & sans même avoir trop d’egards pour celles que des raisons d’étymologie ou d’analogie avoient maintenues si long-tems. On est donc parvenu à écrire doute, parfaite, honnête, arrêt, ajoûter, omettre, au lieu de doubte, parfaicte, honneste, arrest, adjouter, obmettre ; & la consonne oiseuse a été remplacée dans plusieurs mots par un accent circonflexe marqué sur la voyelle précédente, lequel a souvent la double propriété d’indiquer le retranchement d’une lettre & la longueur de la syllabe. On commence aussi à ôter l’e muet de gaiement, remerciement, éternuement, dévouement, &c.

Mais malgré les changemens considérables que notre orthographe a reçus depuis un siecle, il s’en faut encore de beaucoup qu’on ait abandonné tous les caracteres muets. Il semble qu’en se déterminant à écrire sûr, mûr, au lieu de seur, meur, on auroit dû prendre le parti d’écrire aussi bau, chapau, au-lieu de beau, chapeau, & euf, beuf, au-lieu d’œuf, bœuf, quoique ces derniers mots viennent d’ovum, bovis : mais l’innovation ne s’est pas étendue jusques-là ; & comme les hommes sont rarement uniformes dans leur conduite, on a même épargné dans certains mots, telle lettre qui n’avoit pas plus de droit de s’y maintenir, qu’en plusieurs autres de la même classe d’où elle a été retranchée. Le g, par exemple, est resté dans poing, après avoir été banni de soing, loing, témoing. Que dirai-je des consonnes redoublées qui sont demeurées dans une foule de mots où nous ne prononçons qu’une consonne simple ?

Quelques progrès que fasse à l’avenir la nouvelle orthographe, nous avons des lettres muettes qu’elle pourroit supprimer sans défigurer la langue, & sans en détruire l’économie. Telles sont celles qui servent à désigner la nature & le sens des mots, comme n dans ils aiment, ils aimerent, ils aimassent, & en dans les tems où les troisiemes personnes plurielles se terminent en oient, ils aimoient, ils aimeroient, ils soient ; car à l’égard du t de ces mots, & de beaucoup d’autres consonnes finales qui sont ordinairement muettes, personne n’ignore qu’il faut les prononcer quelquefois en conversation, & plus souvent encore dans la lecture ou dans le discours soutenu, sur-tout lorsque le mot suivant commence par une voyelle.

Il y a des lettres muettes d’une autre espece, qui probablement ne disparoîtront jamais de l’écriture. De ce nombre est l’u servile qu’on met toûjours après la consonne q, à moins qu’elle ne soit finale ; pratique singuliere qui avoit lieu dans la langue latine aussi constamment que dans la françoise. Il est vrai que cet u se prononce en quelques mots, quadrature, équestre, quinquagésime ; mais il est muet dans la plûpart, quarante, querelle, quotidien, quinze.

J’ai peine à croire aussi qu’on bannisse jamais l’u & l’e qui sont presque toujours muets entre un g & une voyelle. Cette consonne g répond, comme on l’a vu (article G.) à deux sortes d’articulations bien differentes. Devant a, o, u, elle doit se prononcer durement, mais quand elle précéde un e ou un i, la prononciation en est plus douce, & ressemble entierement à celle de l’i consonne [à celle du j.] Or pour apporter des exceptions à ces deux regles, & pour donner au g en certains cas une valeur contraire à sa position actuelle, il falloit des signes qui fissent connoître les cas exceptés. On aura donc pu imaginer l’expédient de mettre un u après le g, pour en rendre l’articulation dure devant un e ou un i, comme dans guérir, collégue, orgueil, guittare, guimpe ; & d’ajouter un e à cette consonne, pour la faire prononcer mollement devant a, o, u, comme dans geai, George, gageure. L’u muet semble pareillement n’avoir été inséré dans cercueil, accueil, écueil, que pour y affermir le c qu’on prononceroit comme s, s’il étoit immédiatement suivi de l’e.

Il n’est pas démontré néanmoins que ces voyelles muettes l’aient toujours été ; il est possible absolument parlant, qu’on ait autrefois prononcé l’u & l’e dans écueil, guider, George, comme on les prononce dans écuelle, Guise ville, & géometre : mais une remarque tirée de la conjugaison des verbes, jointe à l’usage où l’on est depuis long-tems de rendre ces lettres muettes, donne lieu de conjecturer en effet qu’elles ont été placées après le g & le c, non pour y être prononcées, mais seulement pour prêter, comme je l’ai déja dit, à ces consonnes une valeur contraire à celle que devroit leur donner leur situation devant telle ou telle voyelle.

Il est de principe dans les verbes de la premiere conjugaison, comme flatter, je flatte, blâmer, je blâme, que la premiere personne plurielle du présent [indéfini] de l’indicatif, se forme en changeant l’e final de la premiere personne du singulier en ons ; que l’imparfait [c’est dans mon système, le présent antérieur simple] de l’indicatif se forme par le changement de cet e final en ois ; & l’aoriste [c’est dans mon système, le présent antérieur périodique] par le changement du même e en ai : je flatte, nous flattons, je flattois, je flattai ; je blâme, nous blâmons, je blâmois, je blâmai. Suivant ces exemples, on devroit écrire je mange, nous mangons, je mangois, je mangai ; mais comme le g doux de mange, seroit devenu un g dur dans les autres mots, par la rencontre de l’o & de l’a, il est presque évident que ce fut tout exprès pour conserver ce g doux dans nous mangeons, je mangeois, je mang ai, que l’on y introduisit un e sans vouloir qu’il fût prononcé. Par-là on crut trouver le moyen de marquer tout à la fois dans la prononciation & dans l’orthographe, l’analogie de ces trois mots avec je mange dont ils dérivent. La même chose peut se dire de nous commenceons, je commenceois, je commencèai, qu’on n’écrivoit sans doute ainsi avant l’invention de la cédille, que pour laisser au e la prononciation douce qu’il a dans je commence.

Cette cédille inventée si à propos, auroit dû faire imaginer d’autres marques pour distinguer les cas où le c doit se prononcer comme un k devant la voyelle e, & pour faire connoître ceux où le g doit être articulé d’une façon opposée aux regles ordinaires. Ces signes particuliers vaudroient beaucoup mieux que l’interposition d’un e ou d’un u, qui est d’autant moins satisfaisante qu’elle induit à prononcer écuelle comme écueil, aiguille comme anguille, & même géographe & ciguë, comme George & figue, quand l’écrivain n’a pas soin, ce qui arrive assez fréquemment ; d’accentuer le premier e de géographe, & de mettre deux points sur le second i d’aiguille & sur l’e final de cigue ». [Le moyen le plus sur & le plus court, s’il n’y avoit eu qu’à imaginer des moyens, auroit été de n’attacher à chaque consonne qu’une articulation, & de donner à chaque articulation sa consonne propre.]

« Quoi qu’il en soit de mon idée de réforme, dont il n’y a point d’apparence qu’on voye jamais l’exécution, on doit envisager la voyelle e dans beau tout autrement que dans il mangea. Elle ne fournit par elle-même aucun son dans le premier de ces mots ; mais elle est censée tenir aux deux autres voyelles, & on la regarde en quelque sorte comme faisant partie des caracteres employés à représenter le son o ; au-lieu que dans il mangea, l’e ne concourt en rien à la représentation du son : il n’a nulle espece de liaison avec l’a suivant, c’est à la seule consonne g qu’il est uni, pour en changer l’articulation, eu égard à la place qu’elle occupe. Ce que je dis ici de l’e, par rapport au mot mangea, doit s’entendre également de l’u tel qu’il est dans guerre, recueil, quotité ; & ce que j’observe sur l’e, par rapport au mot beau, doit s’entendre aussi de l’a & de l’o dans Saone & bœuf ». Voyez Lettre, Voyelle, Consonne, Diphtongue, Orthographe, & differens articles de lettres particulieres. (B. E. R. M.)

Muet, en Droit, & singulierement en matiere criminelle, s’entend également de celui qui ne peut pas parler & de celui qui ne le veut pas ; mais on procede différemment contre le muet volontaire ou le muet par nature.

Quand l’accusé est muet ou tellement sourd qu’il ne puisse aucunement entendre, le juge lui nomme d’office un curateur sachant lire & écrire, lequel prête serment de bien & fidellement défendre l’accusé, & répondra en sa présence aux interrogatoires, fournira de reproches contre les témoins, & sera reçu à faire audit nom tous actes que l’accusé pourroit faire pour se défendre. Il lui sera même permis de s’instruire secrétement avec l’accusé, par signes ou autrement ; si le muet ou sourd sait & veut écrire, il pourra le faire & signer toutes ses réponses, dires & reproches, qui seront néanmoins signés aussi par le curateur, & tous les actes de la procédure feront mention de l’assistance du curateur.

Mais si l’accusé est un muet volontaire qui ne veuille pas répondre le pouvant faire, le juge lui fera sur-le-champ trois interpellations de répondre, à chacune desquelles il lui déclarera qu’à faute de répondre son procès va lui être fait, comme à un muet volontaire, & qu’après il ne sera plus venu à répondre sur ce qui aura été fait en sa présence pendant son silence volontaire. Le juge peut néanmoins, s’il le juge à propos, lui donner un délai pour répondre de vingt-quatre heures au plus, après quoi, s’il persiste en son refus, le juge doit en effet procéder à l’instruction du procès, & faire mention à chaque article d’interrogatoire que l’accusé n’a voulu répondre ; & si dans la suite l’accusé veut répondre, ce qui aura été fait jusqu’à ses réponses subsistera, même la confrontation des témoins contre lesquels il aura fourni de reproches ; & il ne sera plus reçu à en fournir, s’ils ne sont justifiés par pieces.

Muets, (Hist. mod. turque.) Les sultans ont dans leurs palais deux sortes de gens qui servent à les divertir, savoir les muets & les nains ; c’est, dit M. de Tournefort, une espece singuliere d’animaux raisonnables que les muets du serrail. Pour ne pas troubler le repos du prince, ils ont inventé entr’eux une langue dont les caracteres ne s’expriment que par des signes ; & ces figures sont aussi intelligibles la nuit que le jour, par l’attouchement de certaines parties de leur corps. Cette langue est si bien reçue dans le serrail, que ceux qui veulent faire leur cour & qui sont auprès du prince, l’apprennent avec grand soin : car ce seroit manquer au respect qui lui est dû que de se parler à l’oreille en sa présence. (D. J.)