L’Encyclopédie/1re édition/PERDRIX

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PERDRIX, Perdrix grise, Perdris, Perdris gringette, Perdrix goache, ou gouache, Perdrix grieche, perdrix cinerea, Aldrovandi, Will. oiseau qui a environ un pié & un demi-pouce de longueur, depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue, & plus d’un pié six pouces d’envergure : le front, les côtés de la tête, & la gorge, sont d’un roux clair ; le dessus de la tête est d’un brun roussâtre mêlé de petites lignes longitudinales jaunâtres. Il y a au-dessous des yeux de petites excroissances de chair rouge ; la face supérieure du cou a des bandes transversales de cendré, de noir, & d’un peu de roux ; les plumes du dos, du croupion, & celles du dessus de la queue, ont les mêmes couleurs, & il y a au bout de chaque plume une bande étroite & transversale de couleur rousse ; la partie inférieure du cou & la poitrine, sont d’un cendré bleuâtre mêlé de petites taches rousses & de bandes noires transversales ; il y a au bas de la poitrine une large bande en forme de fer à cheval de couleur de marron ; les plumes des côtés du corps sont de même couleur que celles de la poitrine ; elles ont chacune près de l’extrémité une large bande transversale rousse ; le bas-ventre est d’un blanc sale & jaunâtre ; les plumes des jambes, & celles des dessous de la queue, sont roussâtres & traversées de taches noirâtres : le milieu de chaque plume a une tache blanche longitudinale, en suivant la direction du tuyau : les petites plumes des aîles & les grandes des épaules, ont les mêmes couleurs que celles du dos, & de plus de grandes taches rousses ; chaque plume a aussi une ligne d’un blanc roussâtre, qui s’étend selon la longueur des tuyaux ; les grandes plumes des aîles sont brunes & rayées transversalement de blanc roussâtre ; la queue est composée de vingt plumes ; les six du milieu ont les mêmes couleurs que le dos ; les sept autres de chaque côté sont rousses, à l’exception de la pointe qui est cendrée ; le bec, les piés, & les ongles, ont une couleur cendrée bleuâtre ; le mâle a un ergot obtus à la partie postérieure du pié.

Les couleurs des perdrix grises varient ; on en trouve qui sont presqu’entierement blanches, & qui ont de petites lignes brunes transversales en forme de zig-zag. Cet oiseau multiplie beaucoup ; la femelle pond seize ou dix-huit œufs ; les petits qui en sortent vivent tous en société avec le pere & la mere pendant tout l’hiver, jusqu’à ce que chaque mâle cherche à s’appareiller avec une femelle. Ornith. de M. Brisson, tome I. Voyez Oiseau.

Perdrix de la nouvelle Angleterre, perdix novæ Angliæ, Klein. avi. Elle est plus petite que la perdrix grise ; elle a la tête, le cou, le dos, le croupion, les petites plumes des aîles, & celles des dessus de la queue d’un brun tirant sur le roux mêlé de noir ; il y a quelques petites taches blanches sur la partie supérieure du cou ; la gorge est blanche ; la poitrine, le ventre, & les côtés du corps, sont jaunâtres & traversés par des bandes noires ; il y a de chaque côté de la tête une bande longitudinale, qui commence à l’origine du bec, qui passe sur les yeux, & qui s’étend jusque derriere la tête ; les jambes & les plumes du dessous de la queue ont une couleur jaunâtre, marquée de taches de couleur de maron ; les grandes plumes des aîles & celles de la queue, sont brunes : on trouve cet oiseau à la nouvelle Angleterre & à la Jamaïque. Ornith. de M. Brisson, tome I. Voyez Oiseau.

Perdrix blanche, Arbenne, lagopus avis, Aldrovandi, Will. oiseau que M. Brisson a mis dans le genre des gélinotes, & qu’il a décrit sous le nom de gélinote blanche. Il est un peu plus gros que la perdrix rouge ; il a environ un pié deux pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue ; il change de couleur au printems, comme la plûpart des autres animaux blancs ; & il est presqu’entierement blanc pendant l’hiver ; il y a sur les côtés de la tête une petite tache noire entre les yeux & le bec ; le tuyau de la seconde des grandes plumes de l’aîle & des quatre qui suivent, est noirâtre ; les quatre plumes du milieu de la queue sont blanches ; toutes les autres ont une couleur noirâtre, à l’exception de la pointe qui est blanche ; les piés, & même les doigts, sont couverts jusqu’à l’origine des ongles, de plumes blanches ; il y a au-dessus des yeux une petite bande de mamelons charnus, d’un très-beau rouge ; le bec est noir, & les ongles sont bruns. Pendant l’été cet oiseau est en partie brun, & en partie blanc ; il a aussi quelquefois un peu de couleur de maron rayée transversalement de noir. On le trouve dans le pays du Nord, & même en France & en Italie sur les hautes montagnes. Ornith. de M. Brisson, tome I. Voyez Oiseau.

Perdrix du Brésil, perdix brasiliana jambu dicta Pisoni, Will. Cette perdrix a la grosseur de nos perdrix ; elle est en entier d’une couleur jaunâtre obscure, mêlée de brun ; elle se perche sur les arbres ; ses œufs sont d’un très-beau bleu : c’est un oiseau du Brésil. Ornith. de M. Brisson, tome I. Voyez Oiseau.

Perdrix de la Chine, perdix sinensis ; cette espece de perdrix est un peu plus grosse que notre perdrix rouge ; elle a environ un pié six lignes de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue, & un pié quatre pouces jusqu’au bout des ongles. Il y a de chaque côté de la tête quatre bandes longitudinales, qui commencent toutes à l’origine du bec, & qui s’étendent jusqu’au derriere de la tête ; la premiere, c’est-à-dire, celle qui se trouve au-dessus des autres, passe sur les yeux ; elle est la plus large & noirâtre. La seconde est blanche ; la troisieme noirâtre, & la derniere a une couleur roussâtre. Le sommet de la tête est d’un brun mêlé de petites taches blanchâtres, & la gorge a une couleur blanche ; les plumes du dos, du croupion, & celles du dessus de la queue, sont rayées transversalement de brun & de roussâtre ; les plumes des aîles sont brunes, & ont aussi des bandes transversales blanchâtres, qui forment sur chaque côté de la plume un petit arc de cercle ; la queue est roussâtre & a des bandes transversales noires ; le bec est noirâtre ; les piés sont roux ; le mâle a un ergot long de deux lignes & demie à chaque pié : on trouve cet oiseau à la Chine. Ornith. de M. Brisson. Voyez Oiseau.

Perdrix de Damas, Perdrix de Syrie, perdix damascena Bellonii, Will. On a mis cet oiseau dans le genre des gelinotes, & M. Brisson l’a décrit sous le nom de gelinote des Pyrenées : il est à-peu-près de la grosseur de la perdrix grise ; il a dix pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu’au bout des ongles ; le dessus de la tête, la face supérieure du cou & le dos, ont différentes couleurs mêlées ensemble, telles que le noir, le roux, le jaunâtre, & le verdâtre ; le croupion est rayé transversalement de noir & de roux ; les petites plumes des aîles sont d’un brun tirant sur le marron ; les grandes ont une couleur verdâtre, mêlée de jaunâtre, à l’exception de la pointe qui est noire ; les joues sont fauves ; il y a derriere les yeux une petite ligne noire ; le tour des yeux & la gorge ont cette même couleur ; le dessus de la face inférieure du cou est olivâtre ; le dessous est roux, terminé par une bande noire, & séparé de la couleur olivâtre par une seconde bande de la même couleur ; ces bandes entourent le cou comme un double collier ; les plumes de la poitrine, du ventre, des côtés du corps, & celles de la face inférieure des aîles, sont blanches ; la couleur des grandes plumes des aîles est cendrée ; elles ont l’extrémité brune & le tuyau noir ; il y a seize plumes dans la queue ; les deux du milieu ont presque le double de la longueur des autres ; toutes ces plumes sont de couleur cendrée, mêlée confusément d’olivâtre : on trouve cet oiseau en Syrie & sur les Pyrénées.

On a donné le nom de perdrix de Damas, à une variété de la perdrix grise, comme dans différentes provinces de France, sous le nom de perdrix grise de la petite espece. Elle ne differe de la vraie perdrix grise, qu’en ce qu’elle est plus petite, & qu’elle a le bec plus alongé. Ornith. de M. Brisson. Voyez Oiseau.

Perdrix franche, voyez Perdrix rouge.

Perdrix de Grece, voyez Bartavelle.

Perdrix de la Guiane, grosse Perdrix du Brésil, gallina silvestris macucagna Brasiliensibus dicta Marg. Wil. Cette espece de perdrix est plus grosse qu’une poule ; elle a le bec noir, & long de plus d’un pouce & demi ; la tête & le cou sont variés de petits points noirs & d’un jaune obscur ; la gorge est blanche ; le dos, la poitrine, le ventre & les jambes ont une couleur cendrée obscure ; les petites plumes des aîles sont brunes, & ont des lignes noires en zig-zag ; les grandes plumes sont entierement noires : cet oiseau n’a point de queue. Ses œufs sont un peu plus gros que ceux des poules, & d’un bleu verdâtre. On le trouve dans la Guiane & au Brésil. Ornith. de M. Brisson, tom. I. Voyez Oiseau.

Perdrix de montagne, voyez Ococolin.

Perdrix de montagne du Mexique, voyez Ococolin du Mexique.

Perdrix rouge, Perdrix aux piés rouges, Perdrix franche, Perdrix gaille, gaye ou gaule, Pernisse, perdrix rufa, Wil. La perdrix rouge est un peu plus grosse que la perdrix grise. Elle a près d’un pié un pouce de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue, & un pié six pouces d’envergure. Le devant de la tête est d’un gris-brun, & le derriere d’un gris tirant sur le roux ; la gorge a une couleur blanche qui est entourée d’une bande noire : cette bande commence aux narines, passe sous les yeux, & va se terminer sous la gorge, où elle forme une sorte de collier ; il y a aussi de chaque côté de la tête une bande longitudinale blanche. Les plumes de la face intérieure & des côtés du cou sont cendrées, & ont chacune deux taches noires à leur extrémité une de chaque côté du tuyau ; la face supérieure est d’un brun roux ; les plumes qui sont près du derriere de la tête ont chacune à leur extrémité deux taches noires & oblongues ; les plumes du dos, du croupion, des dessus de la queue, & celles des aîles sont d’un gris-brun ; la poitrine est cendrée ; les plumes du ventre, des jambes & celles du dessous de la queue ont une couleur rousse ; celles des côtés du corps sont cendrées à leur origine, elles ont ensuite une raie transversale blanche, suivie d’une autre raie noire ; enfin leur extrémité est rousse. Il y seize plumes dans la queue : les quatre du milieu sont d’un gris brun ; celle qui les suit de chaque côté a les barbes extérieures rousses, & les intérieures d’un gris-brun ; toutes les autres sont entierement rousses. L’iris des yeux, le bec & les piés ont une belle couleur rouge.

Les couleurs de la perdrix rouge varient. On trouve de ces oiseaux presqu’entierement blancs ou blanchâtres, à l’exception de la tête qui est d’un brun-roux. Le bec & les piés restent toujours rouges. ornit. de M. Brisson, tome I. Voyez Oiseau.

Perdrix rouge de Barbarie, perdix Barbara Klein, cet oiseau est un peu plus petit que la perdrix grise. Il a environ un pié de longueur depuis la pointe du bec jusqu’au bout des ongles, & un pié sept pouces d’envergure. Le dessus de la tête est couleur de marron ; cette couleur devient plus obscure derriere la tête, & elle forme sur le cou une sorte de collier parsemé de taches blanches & rondes ; les côtés de la tête & la gorge sont d’un cendré clair & bleuâtre, & il y a près de l’endroit des oreilles une tache qui tire sur le brun. La partie supérieure du cou & le dos ont une couleur brune obscure tirant sur le cendré ; le croupion est cendré. Les grandes plumes des épaules & celles du dessus des aîles sont d’un beau bleu, à l’exception des bords qui ont une couleur de marron. La partie inférieure du cou, au-dessous du collier, est d’un cendré clair ; le ventre, les plumes du dessous de la queue & celles de la face inférieure des aîles sont d’un brun clair ; la poitrine est de couleur de rose pâle ; les plumes des côtés du corps sont cendrées près de la racine ; elles ont ensuite une bande blanche transversale dans leur milieu, & leur extrémité est de couleur orangée. Les grandes plumes des aîles sont d’un brun obscur tirant sur le cendré ; les moyennes ont la même couleur, mais plus claire. Le bec, le tour des yeux & les piés sont d’un très-beau rouge. Le mâle a sur la patte postérieure du pié un petit ergot obtus. On trouve cet oiseau en Barbarie. Ornith. de M. Brisson, tome I. Voyez Oiseau.

Perdrix rousse des Antilles, voyez Pigeon violet de la Martinique.

Perdrix du Sénégal, perdix Senegalensis, oiseau du genre des perdrix, il est un peu plus grand que notre perdrix rouge. Il a environ un pié deux pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue ; tout le corps est varié de roux, de brun & de blanc sale ; le dessus de la tête est roux & n’a point de taches ; les côtés sont d’un blanc sale, & ont de petites taches longues & brunes ; la gorge est aussi d’un blanc sale, mais elle n’a point de taches. Il y a sur les côtés de la tête trois petites bandes qui prennent leur origine à la racine du bec ; la bande du milieu est blanche, & les deux autres sont noires ; la supérieure s’étend jusques sur le derriere de la tête, & les deux autres seulement derriere les yeux ; le cou est roux & marqué de taches brunes & de blanc sale. Il y a à chaque pié deux ergots. On trouve cet oiseau au Sénégal. Ornith. de M. Brisson. Voyez Oiseau.

Perdrix, (Chasse.) on donne, comme on voit, le nom perdrix à plusieurs oiseaux de différens pays, tels que la perdrix de Grece, celle de Damas, celle de la Guadeloupe, &c. mais ce nom est particulierement attribué aux especes que nous appellons en Europe perdrix grise, perdrix rouge, & perdrix blanche : cette derniere espece ne se trouve communément qu’en Savoie & dans les Alpes. Voyez Arbenne.

La perdrix grise & la rouge qui sont communes en France, ont dans les mœurs aussi-bien que dans la forme & le plumage, des différences qui en font des especes très-séparées : aussi ne se mêlent-elles point ensemble, même dans les lieux où l’abondance des unes & des autres les met souvent en présence dans le tems de l’effervescence commune. Cependant lorsque le nombre des mâles perdrix rouges excede celui des femelles, on voit quelques-uns de ces mâles s’attacher à une paire de perdrix grises, la suivre constamment, & donner des marques d’empressement & d’amour. Mais on n’a jamais vu aucune perdrix rouge en venir avec une grise jusqu’à l’accouplement. Cet amour étranger n’a d’effets que la jalousie. Il trouble seulement le ménage ; & ces soins assidus ne produisent qu’une importunité sans fruit. La maniere dont les deux especes se nourrissent est à-peu-près la même. Elles vivent de grain, de semences, d’œufs de fourmis, de petites araignées & d’autres insectes qui se trouvent dans les campagnes & dans les bois.

Les perdrix grises s’apparient dès la fin de Février, ou au commencement de Mars, lorsque les grandes gelées sont passées. Il y a pendant les premiers jours beaucoup de combats entre les mâles, & même entre les femelles, jusqu’à ce que le choix mutuel soit fait d’une maniere fixe, & que la pariade soit décidée. Le tems doux avance ce moment ; & à mesure que la chaleur augmente, la fermentation de l’amour devient plus forte dans ces oiseaux. Les mâles sont plus empressés, & les femelles plus dociles. Ils s’accouplent vers le commencement d’Avril, & les femelles pondent à la fin de ce mois, ou au commencement de Mai. Le nombre des œufs varie ordinairement selon l’âge de la perdrix. A deux & trois ans la ponte est souvent de dix-huit œufs. Elle diminue ensuite, & cesse presqu’entierement à six ans. Alors la perdrix est déja vieille, & il ne lui reste plus guere qu’une année à vivre. Elle dépose ses œufs dans un nid fait presque sans apprêt. Ce n’est qu’une fente au fond de laquelle sont arrangées quelques brins de paille ou d’herbe seche, & quelques feuilles. Les jeunes perdrix ne choisissent pas même avec beaucoup de soin le lieu où elles placent ce nid. Mais celles que l’âge & l’expérience ont instruites y apportent beaucoup d’attention. Elles choisissent un endroit élevé, à l’abri de l’inondation, & environné de brossailles qui le dérobent à la vue & en défendent l’entrée. De plus lorsqu’elles quittent leurs œufs, pour aller manger, elles ont soin de les couvrir avec des feuilles. Voyez Instinct.

Le tems de l’incubation est de vingt-deux jours. Pendant ce tems le mâle reste aux environs du nid, & accompagne sa femelle lorsqu’elle releve pour chercher à vivre. Les petits étant éclos, le pere & la mere prennent soin en commun de les conduire. Ils les promenent dans les prés, aux bords des bois, découvrent pour eux les fourmilieres, les appellent presque continuellement, & leur indiquent les insectes & les graines qui sont propres à leur nourriture. La perdrix grise donne à ses petits des soins plus empressés & plus actifs qu’aucune autre espece. Leur tendresse va jusqu’à une jalousie cruelle à l’égard des perdreaux qui ne sont pas de leur compagnie. Dans les pays fort peuplés de gibier, on voit communément les vieilles perdrix poursuivre avec fureur les petits les unes des autres, & les assommer à coups de bec. Lorsque quelque péril vient à menacer la famille, le pere & la mere, pour l’en détourner, s’y présentent eux-mêmes avec un courage qui étonne dans des animaux aussi foibles. Si c’est un chasseur, ou un chien qui les menace, ils se montrent d’abord, fuient ensuite en traînant l’aîle, laissent aux poursuivans l’espérance de les joindre ; & quand ils les ont suffisamment éloignés, ils revolent à leurs petits.

Les perdrix grises vivent réunies en familles, qu’on nomme compagnies, jusqu’au tems où l’amour les sépare & les apparie. Celles même qui n’ont point pondu, ou dont les œufs ont été détruits par quelque accident, se remettent en compagnies dans le mois de Juillet, & y restent jusqu’au tems de la pariade.

Les perdrix rouges différent en cela des grises, quant aux mœurs. Elles ne sont pas, à beaucoup près aussi étroitement liées par compagnies. Les petits même qui ont été élevés ensemble, & qui sont de la même famille, se tiennent toujours à quelque distance l’un de l’autre ; ils ne partent pas ensemble, & ne vont pas tous du même côté. Les perdrix grises, lorsqu’elles ont été forcées de se séparer, se rappellent aussi-tôt avec beaucoup de vivacité & d’inquiétude. Cela n’arrive guere parmi les perdrix rouges qu’entre le mâle & la femelle dans le tems de l’amour. Les perdrix rouges s’apparient ainsi que les grises ; mais aussi-tôt que la femelle couve, le mâle la quitte, & la laisse seule chargée du soin de ses petits. La perdrix grise s’apprivoise aisément ; elle se familiarise avec les passans le long des chemins ; & en lui donnant à manger pendant l’hiver, on l’engage aisément à pénétrer jusque dans les maisons. La perdrix rouge conserve toujours un caractere plus farouche, & l’éducation domestique en est plus difficile. Voyez Faisanderie.

Les perdrix grises habitent volontiers les plaines fertiles ; elles se plaisent sur-tout dans celles qui sont fécondées par des engrais chauds, tels que la marne, &c. Elles ne sont tranquilles, qu’autant qu’elles ont des remises à portée d’elles ; mais en général elles ne se jettent dans le bois que pour éviter la poursuite des oiseaux ou des chasseurs, & elles en sortent dès que le péril est passé. Les perdrix rouges cherchent naturellement les montagnes fourrées de bruyeres & de jeunes bois. Si elles relevent dans les plaines, c’est pour aller vivre, & les bois sont leur habitation propre. Voyez Gibier.

Tout le monde sait quelle ressource on tire des perdrix, soit pour l’agrément de la table, soit pour le plaisir de la chasse. C’est pour réunir ces deux objets qu’on prend tant de soins pour la conservation de ces oiseaux. La maniere de les chasser la plus ordinaire, est avec des chiens couchans qui les arrêtent, & indiquent au chasseur le lieu où elles sont. Le chasseur doit alors les tourner, chercher à les appercevoir, & les tuer devant son chien, soit à terre si elles tiennent, soit au vol si elles viennent à partir. Les heures les plus convenables pour cette chasse sont dans l’automne, depuis dix heures jusqu’à midi, & depuis deux heures jusqu’à quatre. Le matin, à midi & le soir, les perdrix relevent pour manger, & alors elles sont presque toujours en mouvement. On prend les perdrix pendant la nuit avec des filets, appellés les uns traineaux, les autres pentieres. Mais ces sortes de chasses qui n’appartiennent qu’aux braconniers, ne méritent pas qu’on en donne des leçons. Il est une autre maniere de les prendre pendant le jour, qui peut être utile, & qui tend à la conservation sans rien prendre sur l’usage. On a un filet rond monté sur des cerceaux qui lui donnent la figure d’un cône fort alongé ; on l’appelle tonnelle. On tend ce filet dans un chaume, & on l’assujettit de maniere que les mailles d’en-bas touchent exactement la terre, & que les piés des perdrix ne puissent pas s’y embarrasser. On place ensuite en-avant de la tonnelle deux filets conducteurs, qu’on nomme aillers, qui partent de l’embouchure de la tonnelle, & dont l’intervalle va en s’élargissant. Lorsque cet attiral est préparé, le chasseur porte devant lui une toile jaune tendue sur un chassis, & qu’on appelle vache, parce qu’elle en a la couleur. Cette vache a un trou placé à la hauteur de l’œil, au moyen duquel le chasseur voit ce qui se passe devant lui. Toujours caché derriere cette toile, il va chercher une compagnie de perdrix qui marchant devant cet objet sans en être assez effrayée pour prendre son vol, est conduite pas-à-pas, d’abord entre les aillers, & de-là dans la tonnelle même. Alors le chasseur jette sa vache, court à son filet, & saisit les perdrix dont il laisse aller les femelles, & tue les coqs. Par ce moyen il ôte la surabondance des mâles, sans courre le risque, comme avec le fusil, d’en blesser inutilement, ou de se méprendre. Il naît ordinairement dans l’espece des perdrix un tiers de coqs plus que de femelles. Il est important pour la reproduction d’ôter cet excédent afin que les paires ne soient point troublées au tems de la ponte. On garde aussi pour cela dans des cages quelques poules privées. On les porte le soir dans les endroits où on a remarqué trop de coqs. Elles appellent, & leur chant attire les mâles qu’on tue alors à coups de fusil. On nomme chanterelles, les perdrix destinées à cet usage.

Perdrix, (Diete.) cet oiseau est dès-long-tems fameux parmi les alimens les plus exquis & les plus salutaires ; supériorité réelle qu’a la chair de la perdrix, à ces deux titres, sur les autres chairs que mangent les hommes, c’est d’être véritablement succulente sans être grasse. Elle peut convenir par cette qualité singuliere à tous les sujets, soit vigoureux, soit délicats, tant à ceux qui sont en pleine santé, qu’à ceux qui sont en convalescence.

Je ne sais ce qu’il faut croire d’une opinion qui est répandue parmi le peuple, savoir que le glouton le plus décidé ne sauroit manger une perdrix tous les jours pendant un mois entier.