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Le Dialogue (Hurtaud)/70

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Traduction par Hurtaud.
Lethielleux (p. 239-240).


CHAPITRE XL

(70)

De l’erreur de ceux qui ont mis toute leur affection dans les consolations et visions spirituelles.

Cet amour-propre spirituel cause parfois à l’âme un plus grand dommage, lorsqu’elle s’attache uniquement aux consolations intérieures et à ces visions sont souvent je favorise mes serviteurs. Dès qu’elle s’en voit privée, elle tombe dans la tristesse et l’ennui. Il lui semble qu’elle a perdu la grâce, quand je me retire ainsi de son esprit. Comme je te l’ai dit, je m’en vais et je reviens dans l’âme, non que je lui retire la grâce, quand je me retire ainsi de son esprit. Comme je te l’ai dit, je m’en vais et je reviens dans l’âme, non que je lui retire la grâce, mais seulement le sentiment qu’elle en a, pour la conduire à la perfection. C’est alors qu’elle se désole ; elle croit être descendue en enfer, en se sentant sevrée de la joie qu’elle éprouvait, et exposée aux attaques de nombreuses tentations.

Quelle ignorance en ce jugement, et comme elle se laisse abuser par son amour-propre spirituel ! Comme elle connaît peu la vérité ! Elle ne doit pas ignorer cependant, que je suis en elle, que Moi seul suis le souverain Bien, que c’est Moi qui garde sa volonté dans le bien au temps de la lutte, et l’empêche de courir en arrière à la recherche de son plaisir.

Bien plutôt doit-elle s’abaisser, s’estimer indigne de la paix et du repos de l’esprit. C’est à cette fin que je me retire d’elle. Je désire l’amener à s’humilier et à reconnaître ma charité envers elle, dans cette bonne volonté que je lui conserve au milieu des tentations. Je ne veux pas qu’elle se contente du lait de la douceur dont j’asperge son visage : il faut qu’elle s’attache au sein de ma Vérité, et qu’elle en tire la chair en même temps que le lait. Elle y trouvera le lait de ma charité, mais par la chair du Christ crucifié, par sa doctrine dont je vous ai fait un pont par lequel l’on peut arriver jusqu’à moi.

Voilà donc pourquoi je me retire de mes serviteurs. S’ils se gouvernent d’après les règles de la prudence, s’ils ne sont pas assez ignorants pour ne désirer que le lait, je reviens à eux avec plus de douceur, avec plus de lumière, avec une charité plus ardente. Mais, s’ils n’éprouvent qu’ennuis, tristesse et trouble d’esprit, de ne plus sentir en eux cette douceur spirituelle, ils retirent peu de profit de mon absence et restent dans la tiédeur.