Le Koran (Traduction de Kazimirski)/43

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Traduction par Traduction d’Albin de Kazimirski Biberstein.
Librairie Charpentier (p. 399-405).

CHAPITRE XLIII.

ORNEMENT D’OR[1].


Donné à la Mecque. — 89 versets.


Au nom du Dieu clément et miséricordieux


  1. Ha. Mim. Par le Livre évident,
  2. Nous l’avons envoyé en langue arabe, afin que vous le compreniez.
  3. li est renfermé dans la mère du Livre qui est chez nous ; il est élevé, rempli de sagesse[2].
  4. Éloignerons-nous de vous l’admonition, parce que vous êtes un peuple transgresseur ?
  5. Que de prophètes avons-nous envoyés vers les peuples d’autrefois !
  6. Aucun prophète n’a paru au milieu d’eux qu’ils ne l’aient pris pour l’objet de leurs railleries ;
  7. Nous anéantîmes, des peuples plus forts que ceux-ci (les Mecquois) ; l’exemple des hommes d’autrefois est là.
  8. Si tu leur demandes qui est le créateur du ciel et de la terre, ils répondront : C’est le Puissant, le Sage, qui les a créés.
  9. Qui a fait de la terre un lit pour vous, et y a tracé des routes afin de vous guider.
  10. Qui fait descendre du ciel de l’eau dans une certaine mesure. Par cette eau, nous ressuscitons la terre morte. C’est ainsi que vous aussi vous serez ressuscites.
  11. Qui a créé pour vous des couples dans toutes les espèces ; pour vous porter il a créé des bestiaux et établi des vaisseaux ;
  12. Afin que vous y soyez commodément, le corps en équilibre, et afin que vous vous souveniez de ce bienfait de votre Seigneur, lorsque vous y êtes commodément et le corps en équilibre ; afin que vous disiez : Gloire à celui qui nous a soumis ces choses (ces animaux et ces vaisseaux) ! nous n’en serions jamais venus à bout.
  13. Nous retournerons à notre Seigneur.
  14. Cependant ils lui ont attribué des enfants parmi ses serviteurs[3]. L’homme est vraiment ingrat !
  15. Dieu aurait-il pris des filles parmi ses créatures, et vous aurait-il choisis pour ses fils ?
  16. Et cependant, quand on annonce à l’un d’entre eux la naissance d’un être qu’il attribue à Dieu, son visage s’assombrit, et il.est comme suffoqué.
  17. Attribueront-ils à Dieu comme enfant un être qui grandît dans les ornements et les parures, et qui est toujours à disputer sans raison[4] ?
  18. Ils regardent les anges, qui sont serviteurs de Dieu, comme des femmes. Ont-ils été témoins de leur création ? Leur témoignage sera consigné, et on les interrogera un jour là-dessus.
  19. Si Dieu avait voulu, disent-ils, nous ne les aurions jamais adorés. Ils n’en savent rien, et ils mentent impudemment.
  20. Leur avons-nous jamais donné à l’appui de cela quelque document qu’ils gardent par devers eux ?
  21. Point du tout. — Mais ils disent : Nous avons trouvé nos pères pratiquant ce culte, et nous nous guidons sur leurs pas.
  22. Il en a été ainsi avant toi, toutes les fois que nous avons envoyé quelque avertisseur vers une cité » ses plus riches habitants leur disaient : Nous avons trouvé nos pères suivant ce culte, et nous marchons sur leurs pas.
  23. Dis-leur : Avions-nous dit à un tel apôtre : Et si je vous apporte un culte plus droit que celui de vos pères ? Ils répondaient : Non, nous ne croyons pas à ta mission.
  24. Nous avons tiré vengeance de ces peuples. Vois quelle a été la fin de ceux qui ont traité nos envoyés d’imposteurs.
  25. Souviens-toi de ce que dit Abraham à son père et à son peuple : Je suis innocent de votre culte.
  26. Je n’adore que celui qui m’a créé ; il me dirigera sur le chemin droit.
  27. Il (Abraham) a établi cette parole comme une parole qui devait rester éternellement après lui parmi ses enfants, afin qu’ils revinssent sans cesse à Dieu.
  28. J’ai permis à ceux-ci (aux Arabes idolâtres) et à leurs pères de jouir des biens terrestres jusqu’à ce que la vérité et l’apôtre véritable viennent au milieu d’eux.
  29. Mais, lorsque la vérité leur apparut, ils s’écrièrent : Ce n’est que de la sorcellerie, nous n’y croyons pas.
  30. Ils disent : Si au moins le Koran avait été révélé à quelque homme considérable des deux villes (la Mecque et Médine), nous aurions pu y croire.
  31. Sont-ils donc distributeurs des faveurs divines ? C’est nous qui leur distribuons leur subsistance dans ce monde ; nous les élevons les uns au-dessus des autres, en sorte que les uns prennent les autres pour serviteurs. Mais la miséricorde de Dieu vaut mieux que les biens qu’ils ramassent.
  32. Sans la crainte que tous les hommes ne devinssent un seul peuple d’infidèles, nous aurions donné à ceux qui ne croient point en Dieu des toits d’argent à leurs maisons, et des escaliers pour y monter ;
  33. Et des portes d’argent et des sièges pour qu’ils s’y reposent à leur aise ;
  34. Et des ORNEMENTS D’OR. Tout ceci n’est qu’une jouissance passagère de cette vie, car la vie future, ton Seigneur la réserve aux pieux.
  35. Celui qui cherchera à se soustraire aux exhortations du Très-Haut, nous lui attacherons Satan avec une chaîne ; il sera son compagnon inséparable.
  36. Les démons détourneront les hommes du sentier de Dieu, et ils croiront cependant suivre le droit chemin,
  37. Jusqu’au moment où, arrivé devant nous, l’homme s’écriera : Plût à Dieu qu’il y eût entre moi et Satan la distance des deux levers du soleil[5] ! Quel détestable compagnon que Satan !
  38. Mais ces regret ne vous serviront de rien dans ce jour ; si vous avec été injustes, vous serez encore compagnons dans le supplice.
  39. Saurais-tu, ô Mohammed ! faire entendre le sourd, et diriger l’aveugle et l’homme engagé évidement dans une fausse route ?
  40. Soit que nous t’éloignons du milieu d’eux, nous en tirerons vengeance.
  41. Soit que nous te rendions témoin de l’accomplissement de nos menaces, nous les tenons en notre pouvoir.
  42. Attache-toi fermement à ce qui t’a été révélé, car tu es sur le sentier droit.
  43. Le Koran est une admonestation pour toi et pour ton peuple. Un jour on vous en demandera compte.
  44. Interroge les apôtres que nous avons envoyés devant toi, si nous leur avons choisi d’autres dieux que Dieu pour les adorer.
  45. Nous envoyâmes Moïse, accompagné de nos signes, vers Pharaon et les grands de son royaume. Je suis, leur dit-il ; l’envoyé du maître de l’univers.
  46. Lorsqu’il se présenta devant eux avec nos signes, ils s’en moquèrent.
  47. (Tous ces miracles étaient plus surprenants les uns que les autres.) Nous leur infligeâmes des châtiments, afin qu’ils se convertissent.
  48. Ils dirent une fois à Moïse : O magicien ! prie ton Seigneur de faire ce qu’il a promis, car nous voilà sur la droite voie.
  49. Et à peine les avons-nous délivrés du malheur, qu’ils ont violé leurs engagements.
  50. Pharaon fit proclamer à son peuple ces paroles : O mon peuple ! le royaume d’Égypte et ces fleuves qui coulent à mes pieds ne sont-ils pas à moi, ne le voyez-vous pas ?
  51. Ne suis-je pas plus fort que cet homme méprisable,
  52. Et qui à peine peut s’exprimer[6] ?
  53. Si au moins on lui voyait des bracelets d’or, s’il venait en compagnie des anges ?
  54. Pharaon inspira de la légèreté à ses peuplés[7], et ils lui obéirent, car ils étaient pervers.
  55. Mais quand ils provoquèrent notre colère, nous tirâmes vengeance d’eux, et nous les submergeâmes tous.
  56. Nous en avons fait un exemple et la fable clé leurs successeurs
  57. Si l’on propose à ton peuple le fils de Marie pour exemple, ils ne veulent pas en entendre parler.
  58. Ils disent : Nos dieux valent-ils mieux que le fils de Marie[8], ou le fils de Marie que nos dieux ? Ils ne proposent cette question que par esprit de dispute. Oui, certes ils sont chicaniers.
  59. Jésus n’est qu’un serviteur (homme ) que nous avons comblé de nos faveurs, et que nous proposâmes comme exemple aux enfants d’Israël.
  60. (Si nous avions voulu, nous aurions produit de vous-mêmes[9] des anges pour vous succéder sur la terre.)
  61. Il sera l’indice de l’approche de l’heure. N’en doutez donc pas ; suives moi, car c’est le chemin droit.
  62. Que Satan ne vous en détourne pas, car il est votre ennemi déclaré.
  63. Quand Jésus vint au milieu des hommes accompagné de signes, il dit : Je vous, apporte la sagesse, et je viens vous expliquer ce qui est l’objet de vos disputes. Craignez donc Dieu, et obéissez-moi.
  64. Dieu est mon Seigneur et le vôtre, adorez-le, c’est le chemin droit.
  65. Les différents partis[10] se mirent à députer entre eux. Malheur au méchant le jour du châtiment douloureux !
  66. Qu’attendent-ils donc ? Est-ce l’heure qui les surprendra à l’improviste, quand ils ne s’y attendront pas ?
  67. Les amis les plus intimes deviendront ennemis dans ce jour ; il en sera autrement avec ceux qui craignent.
  68. O mes serviteurs ! vous n’aurez rien à redouter en ce jour, vous ne serez point affligés.
  69. A vous qui croyez à nos signes, à vous qui vous étiez résignés à ma volonté (qui avez été musulmans), on vous dira :
  70. Entrez dans le paradis, vous et vos compagnes ; réjouissez-vous.
  71. On leur présentera à la ronde des écuelles d’or et des gobelets remplis de choses que les sens désirent tant, et qui font les délices des yeux. Vous y demeurerez éternellement.
  72. Voici le jardin que vous recevrez en héritage pour prix de vos œuvres.
  73. Vous y avez des fruits en abondance : nourrissez-vous-en.
  74. Les méchants éprouveront éternellement le supplice de la géhenne.
  75. On ne le leur adoucira pas, ils seront hors de tout espoir du salut.
  76. Ce n’est pas nous qui les avons traités injustement, ils ont été iniques envers eux-mêmes.
  77. Ils crieront : O Malek[11] ! que ton Seigneur mette un terme à nos supplices ! — Non, répondra-t-il, vous y resterez.
  78. Nous vous apportâmes la vérité ; mais la plupart d’entre vous conçurent de la répugnance pour la vérité.
  79. Si les infidèles tendent des pièges, nous leur en tendrons aussi.
  80. S’imaginent-ils que nous ne connaissons pas leurs secrets, les paroles qu’ils se disent à l’oreille ? Oui, nos envoyés qui sont au milieu d’eux couchent tout par écrit
  81. Dis : Si Dieu avait un fils, je serais le premier à l’adorer.
  82. Gloire au souverain des cieux et de la terre, au souverain du trône ! loin de lui ce qu’ils lui attribuent !
  83. Laissez-les tenir des discours frivoles, et se divertir jusqu’à ce qu’ils se trouvent face à face avec leur journée, cette journée qui leur est promise[12].
  84. Il est celui qui est Dieu dans le ciel, Dieu sur la terre. Il est le Savant, le Sage.
  85. Béni soit celui à qui appartient tout ce qui est dans les cieux, sur la terre, et dans l’intervalle qui les sépare ! lui seul a la connaissance de l’heure ; c’est à lui que vous retournerez.
  86. Ceux que vous invoquer à côté de Dieu ne pourront intercéder en faveur de personne[13] ; celui-là seul le pourra, qui a témoigné de la vérité. Les infidèles l’apprendront.
  87. Si tu les interrogés en leur disant : Qui vous a créés ? ils répondront : C’est Dieu. Pourquoi donc mentent-ils ?
  88. Dieu a entendu ces paroles de Mohammed : Seigneur, le peuple ne croit pas, et il a répondu :
  89. Eh bien ! laisse-les faire[14], et dis-leur : Salut ! — Et ils apprendront ce qui en est.

  1. Voy. le verset 34
  2. La mère du Livre est le prototype, l’original du Koran, ainsi que lié tous les livres révélés. Ce prototype est immuable ; ses développements cependant peuvent varier selon les siècles et les hommes auxquels s’adresse un livre sacré ; c’est dans ce sens probablement qu’il faut entendre lit distinction dès versets du Koran, donnée chapitre III, 3.
  3. Les mots du texte emportent une expression de mépris ; littéralement on devrait les traduire ainsi : « Cependant ils lui donnent des petits bouts, des parcelles en fait de serviteurs. » C’est-à-dire ils croient que ces êtres créés sont des parcelles de lui-même, ses enfants.
  4. La femme, à cause de sa raison défectueuse, est toujours disposée à chercher querelle sans motif.
  5. On veut entendre par cette expression la distancé du lever du soleil en été à celui d’hiver ; mais il est plus exact d’entendre par ce mot la distance entre le lever et le coucher du soleil, l’usage autorise l’emploi d’un duel dans un nom qui ne doit pas en avoir par lui-même, mais qui fait deux avec un autre mot même d’un sens opposé ou tout à fait différent. C’est ainsi qu’en parlant de deux fils d’Ali, Hassan et Housseïn, on dit en arabe Hassaneïn, les deux Hassan.
  6. Car Moïse avait l’élocution difficile.
  7. Il fit perdre à son peuple le jugement sain et rassis.
  8. Ceci a trait à l’objection artificieuse que faisaient les idolâtres à Mahomet, quand il leur disait que leurs idoles seraient précipitées dans le feu. Ils lui demandèrent si Jésus, regardé par les chrétiens comme Dieu, aurait le même sort.
  9. Comme nous avons fait naître Jésus sans père.
  10. Par ces mots, Mahomet entend ici les différentes sectes, soit juives, soit chrétiennes.
  11. Malek est l’ange qui préside aux tourments des réprouvés. Au lieu de ïa Malekou (ô Malek !), quelques-uns lisent : ïa Mali, comme pour peindre les souffrances des réprouvés qui ne seront pas en état d’achever le mot.
  12. C’est la terrible journée du jugement dernier.
  13. Selon les commentateurs, Jésus et Esdras, quoiqu’ils eussent été admis comme dieux, l’un par les chrétiens, l’autre par les juifs (selon Mahomet), pourront cependant intercéder auprès de Dieu.
  14. Détourne-toi d’eux en désespoir de les voir croyants.